La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

16/06/2016 | FRANCE | N°14BX02750

France | France, Cour administrative d'appel de Bordeaux, 4ème chambre (formation à 3), 16 juin 2016, 14BX02750


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La SARL Huilerie Gid a demandé au tribunal administratif de Bordeaux de prononcer la décharge des rappels de taxe sur les huiles destinées à l'alimentation humaine auxquels elle a été assujettie au titre des années 2010, 2011 et 2012 et, à titre subsidiaire, de saisir la Cour de Justice de l'Union Européenne d'une question préjudicielle.

Par un jugement n° 1301569 du 28 août 2014, le tribunal administratif de Bordeaux a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requê

te enregistrée le 17 septembre 2014, la SARL Huilerie Gid, représentée par MeA..., demande à la...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La SARL Huilerie Gid a demandé au tribunal administratif de Bordeaux de prononcer la décharge des rappels de taxe sur les huiles destinées à l'alimentation humaine auxquels elle a été assujettie au titre des années 2010, 2011 et 2012 et, à titre subsidiaire, de saisir la Cour de Justice de l'Union Européenne d'une question préjudicielle.

Par un jugement n° 1301569 du 28 août 2014, le tribunal administratif de Bordeaux a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 17 septembre 2014, la SARL Huilerie Gid, représentée par MeA..., demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Bordeaux du 28 août 2014 ;

2°) de faire droit à sa demande de remboursement de la taxe au titre des années 2010 et 2012 pour un montant total de 1 258 839 euros ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du Code de justice administrative.

---------------------------------------------------------------------------------------------------------------------

Vu :

- les autres pièces du dossier.

Vu :

- le traité sur le fonctionnement de l'Union européenne ;

- le code général des impôts et le livre de procédure fiscale ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Olivier Mauny,

- et les conclusions de Mme Frédérique Munoz-Pauziès, rapporteur public.

Considérant ce qui suit :

1. La SARL Huilerie Gid a demandé au tribunal administratif de Bordeaux la restitution partielle des droits de taxe sur les huiles destinées à l'alimentation humaine qu'elle a acquittés au titre des périodes du 1er janvier au 31 décembre 2010, 2011 et 2012, en tant que les droits ont été acquittés au titre des acquisitions intracommunautaires d'huile d'olive auxquelles a été appliqué un taux de taxe excédant celui appliqué aux autres huiles végétales. Par un jugement du 28 août 2014, dont elle fait appel, le tribunal administratif a rejeté sa demande.

Sur la régularité du jugement :

2. Il résulte de l'instruction que, pour contester le différentiel de taux sur les huiles destinées à l'alimentation humaine et démontrer qu'il s'agissait de produits similaires, la SARL Huilerie Gid a soutenu, en première instance, que les huiles d'olive, de colza et de tournesol présentaient des caractéristiques comparables et des propriétés analogues, qu'elles répondaient aux mêmes besoins des consommateurs, et que leur différence de fabrication, tenant à l'origine de l'huile, ne pouvait pas justifier l'application d'un taux différent. Il est vrai que le jugement du tribunal administratif, qui relève que les huiles susmentionnées ne constituent pas des produits similaires au sens de l'article 110 du Traité sur le fonctionnement de l'Union européenne dès lors que, " compte tenu de leurs différences en termes de qualité, d'usage et de prix, elles ne peuvent être considérées comme substituables pour les consommateurs (...) ", n'a pas précisé les caractéristiques objectives permettant de distinguer ces produits selon les besoins des consommateurs. Toutefois, la société n'a pas développé en première instance d'argumentation détaillée sur les caractéristiques de ces différentes huiles pour les consommateurs, et le tribunal administratif a suffisamment répondu au moyen tel qui avait été soulevé devant lui sans qu'il puisse lui être fait grief de n'avoir pas écarté d'autres arguments à l'appui du moyen. Le moyen tiré de l'insuffisante motivation du jugement ne peut donc qu'être écarté.

Sur le bien fondé du jugement :

3. En premier lieu, l'article 1609 vicies du code général des impôts a créé une taxe spéciale sur les huiles végétales, fluides ou concrètes, effectivement destinées, en l'état ou après incorporation dans tous produits alimentaires, à l'alimentation humaine. Cette taxe est due par les producteurs sur toutes les ventes ou livraisons à soi-même de ces huiles pour les huiles fabriquées en France continentale et en Corse, lors de l'importation pour les huiles importées en France continentale et en Corse et lors de l'acquisition pour les huiles qui font l'objet d'une acquisition intracommunautaire. Etablie et recouvrée selon les mêmes modalités ainsi que les mêmes sûretés, garanties et sanctions que les taxes sur le chiffre d'affaires, elle a été instituée depuis le 1er janvier 2009 au profit de la Mutualité sociale agricole chargée de ces prestations. En vertu de l'article 159 ter A de l'annexe IV au code général des impôts, cette taxe est perçue en fonction du poids net des huiles. Il résulte des tarifs fixés en euro par kilogramme et en vigueur pour les périodes en litige que, pour les huiles végétales, le tarif le plus élevé de la taxe n'est applicable qu'à l'huile d'olive tandis que les huiles de colza et de tournesol bénéficient de tarifs plus faibles.

4. Il résulte de l'instruction que l'huile d'olive, en ce qu'elle provient d'un fruit et non d'une graine, est produite par un procédé mécanique et non par raffinage, a un goût et des propriétés culinaires spécifiques, présente des caractéristiques objectives qui, au regard des consommateurs, la distinguent des huiles de colza et de tournesol. L'huile d'olive constitue donc un produit différent des deux dernières huiles. Il suit de là que l'application à l'huile d'olive d'un taux de taxe spéciale sur les huiles destinées à la consommation humaine différent de celui appliqué aux autres huiles n'est pas contraire audit article 1609 vicies du code général des impôts, quand bien même cet article n'opère pas de distinction entre les huiles végétales.

5. En second lieu, aux termes de l'article 110 du Traité sur le fonctionnement de l'Union européenne, d'autre part : " Aucun État membre ne frappe directement ou indirectement les produits des autres États membres d'impositions intérieures, de quelque nature qu'elles soient, supérieures à celles qui frappent directement ou indirectement les produits nationaux similaires. / En outre, aucun État membre ne frappe les produits des autres États membres d'impositions intérieures de nature à protéger indirectement d'autres productions. ". Des produits sont similaires au sens de ces stipulations lorsqu'ils présentent, au regard des consommateurs, des propriétés analogues ou répondent aux mêmes besoins. Pour l'appréciation du caractère de similitude de deux catégories de produits, il y a lieu de prendre en considération, d'une part, un ensemble de caractéristiques objectives, telles que leur origine, leurs procédés de fabrication, leurs qualités organoleptiques, notamment leur goût et leur texture, et, d'autre part, le fait que ces catégories de produits sont susceptibles ou non de répondre à des besoins identiques des consommateurs, cette identité s'appréciant non pas en fonction des habitudes de consommation existantes, mais au vu des possibilités d'évolution de ces habitudes et, essentiellement, sur la base des caractéristiques objectives qui font qu'un produit est susceptible de répondre, au regard de certaines catégories de consommateurs, aux mêmes besoins qu'un autre.

6. D'une part, il résulte de ce qui précède que l'huile d'olive n'est pas un produit similaire aux huiles de colza et de tournesol. Par suite, le moyen tiré de ce que la taxe spéciale sur les huiles destinées à la consommation humaine, en frappant plus lourdement l'huile d'olive, quasi-exclusivement importée, et les huiles de colza et de tournesol consommées en France, majoritairement de fabrication nationale, méconnaîtrait les stipulations de l'alinéa premier de l'article 110 du Traité sur le fonctionnement de l'Union européenne doit être écarté, en l'absence de toute discrimination directe ou indirecte au détriment de l'huile d'olive.

7. D'autre part, il résulte de l'instruction qu'en dépit de différences dans leurs caractéristiques objectives, les huiles d'olive, de colza et de tournesol présentent des propriétés communes suffisantes, notamment en ce qui concerne l'assaisonnement des aliments, pour que les consommateurs, en fonction de leurs goûts ou de leurs revenus, optent pour l'une ou l'autre de ces huiles. Pour l'application de ces stipulations, elles se trouvent donc dans un rapport de concurrence au moins partielle. Toutefois, la différence de taxation résultant de l'application d'un tarif de taxe spéciale sur les huiles plus élevé pour l'huile d'olive que pour les autres huiles n'est pas de nature à influer sur le comportement du consommateur dans le secteur considéré, dès lors que la taxe représente un montant très faible du prix de vente de ces produits et que les prix de vente des différentes huiles diffèrent significativement, l'huile d'olive étant nettement plus chère que les autres huiles. Il ne résulte donc pas de l'instruction que la taxe spéciale sur les huiles aurait un effet protecteur des huiles de fabrication nationale, en décourageant la vente de l'huile d'olive, essentiellement importée, au profit de la vente des produits nationaux alternatifs que constituent l'huile de tournesol et l'huile de colza. Par suite, le moyen tiré de la méconnaissance des stipulations du second alinéa de l'article 110 du Traité sur le fonctionnement de l'Union européenne ne peut qu'être écarté, en l'absence de tout effet de protection résultant du régime fiscal en litige au détriment de l'huile d'olive.

8. Il résulte de tout ce qui précède que la SARL Huilerie Gid n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que le tribunal administratif de Bordeaux a rejeté sa demande. Il y a lieu de rejeter, par voie de conséquence, ses conclusions présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

DECIDE

Article 1er : La requête de la SARL Huilerie Gid est rejetée.

''

''

''

''

4

N° 14BX02750


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Bordeaux
Formation : 4ème chambre (formation à 3)
Numéro d'arrêt : 14BX02750
Date de la décision : 16/06/2016
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Contentieux fiscal

Analyses

19-08-015 Contributions et taxes. Parafiscalité, redevances et taxes diverses.


Composition du Tribunal
Président : M. POUZOULET
Rapporteur ?: M. Olivier MAUNY
Rapporteur public ?: Mme MUNOZ-PAUZIES
Avocat(s) : SOCIETE D'AVOCATS TAX TEAM et CONSEILS

Origine de la décision
Date de l'import : 28/06/2016
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.bordeaux;arret;2016-06-16;14bx02750 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award