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15/12/2016 | FRANCE | N°16BX02634

France | France, Cour administrative d'appel de Bordeaux, 4ème chambre - formation à 3, 15 décembre 2016, 16BX02634


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme B...C...a demandé au tribunal administratif de Toulouse d'annuler l'arrêté du préfet de Tarn-et-Garonne du 11 janvier 2016 portant refus de titre de séjour, obligation de quitter le territoire dans un délai de six mois et fixant le pays de renvoi.

Par un jugement n° 1600712 du 28 juin 2016, le tribunal administratif de Toulouse a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 29 juillet 2016, MmeC..., représentée par Me A..., demande à la cour :



1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Toulouse du 28 juin 2016 ;

2°) d'ann...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme B...C...a demandé au tribunal administratif de Toulouse d'annuler l'arrêté du préfet de Tarn-et-Garonne du 11 janvier 2016 portant refus de titre de séjour, obligation de quitter le territoire dans un délai de six mois et fixant le pays de renvoi.

Par un jugement n° 1600712 du 28 juin 2016, le tribunal administratif de Toulouse a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 29 juillet 2016, MmeC..., représentée par Me A..., demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Toulouse du 28 juin 2016 ;

2°) d'annuler l'arrêté en date du 11 janvier 2016 par lequel le préfet de Tarn-et-Garonne a refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de six mois et a fixé le pays de renvoi ;

3°) d'enjoindre au préfet de Tarn-et-Garonne de lui délivrer un titre de séjour à compter de la notification de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 100 euros par jour de retard ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 000 euros en application des dispositions combinées de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique.

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Vu :

- les autres pièces du dossier ;

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- la convention internationale relative aux droits de l'enfant ;

- le pacte international relatif aux droits civils et politiques du 19 décembre 1966 ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 modifiée relative à l'aide juridique ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Le rapport de M. Philippe Pouzoulet a été entendu au cours de l'audience publique

Considérant ce qui suit :

1. MmeC..., de nationalité géorgienne, est entrée en France le 28 juin 2010, sous couvert d'un visa délivré par les autorités néerlandaises. A la suite de l'introduction d'une requête en divorce introduite par son mari en septembre 2013, et du rejet consécutif de sa demande de renouvellement de titre de séjour en qualité d'épouseD..., elle n'a pas exécuté la mesure d'éloignement prise à son encontre. Elle a sollicité en janvier 2014 la délivrance d'un titre de séjour l'autorisant à travailler sur le fondement de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile le 26 août 2015. Elle relève appel du jugement du 28 juin 2016 par lequel le tribunal administratif de Toulouse a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 11 janvier 2016 du préfet de Tarn-et-Garonne portant refus de séjour, obligation de quitter le territoire dans un délai de six mois et fixant le pays de renvoi.

Sur la la décision portant refus de séjour :

2. En premier lieu, l'arrêté vise les articles 3 et 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ainsi que les dispositions du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, notamment l'article L. 313-14 et le 3° du I et le II de l'article L. 511-1. Par ailleurs, la décision portant refus de séjour relève les conditions d'entrée et de séjour de la requérante, elle mentionne également les éléments relatifs à sa situation familiale, en particulier l'engagement d'une procédure de divorce par le conjoint français de la requérante et le refus consécutif du renouvellement du titre de séjour en qualité de conjoint français, et elle précise que Mme C...ne produit pas les éléments permettant de considérer qu'elle serait titulaire d'un contrat de travail. Dans ces conditions, et alors même que ses motifs ne reprennent pas l'ensemble des éléments caractérisant la situation personnelle de l'intéressée, cette décision doit être regardée comme suffisamment motivée.

3. En deuxième lieu, la requérante fait valoir qu'elle vit en France depuis 2010 où elle travaille et que sa fille mineure et son fils majeur qui l'ont rejointe sont scolarisés et y suivent des études. Toutefois, il ressort des pièces du dossier que MmeC..., qui a été admise à séjourner en France en qualité de conjointe d'un ressortissant français, est désormais séparée de ce dernier. Elle a vécu en Géorgie jusqu'à l'âge de quarante ans où elle n'est pas dépourvue d'attaches familiales et où elle peut reconstituer la cellule familiale avec ses deux enfants issus d'une première union, dont son fils majeur à la date de l'arrêté attaqué, qui fait également l'objet d'une décision de refus de séjour assortie d'une obligation de quitter le territoire français dont la légalité a été confirmée par un arrêt de la Cour n° 16BX02633 de ce jour. En outre, il est constant que l'intéressée s'est soustraite à l'exécution de trois précédentes mesures d'éloignement, l'une prononcée en 2012 après qu'elle a été déboutée du droit d'asile, la deuxième prise en 2013 à la suite du refus de renouvellement du titre de séjour en qualité de conjoint de Français et la troisième prise en 2014 lui refusant une première admission exceptionnelle au séjour. La légalité des deux dernières séries de mesures la concernant a été confirmée par des arrêts de la Cour n° 14BX00976 du 4 décembre 2014 et n° 14BX03103 du 2 avril 2015. Dans ces conditions, eu égard notamment aux conditions de son séjour en France, la décision contestée ne porte pas à la vie privée et familiale de Mme C...une atteinte disproportionnée au regard des buts poursuivis et ne méconnaît ni l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, ni en tout état de cause l'article 17 du pacte international relatif aux droits civils et politiques et les dispositions du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Pour les mêmes motifs cette décision n'est pas entachée d'une erreur manifeste dans l'appréciation de ses conséquences sur sa situation personnelle.

4. En troisième lieu, MmeC..., qui ne conteste pas que la décision attaquée n'a pas pour conséquence de la séparer de sa fille, fait valoir que cette dernière est scolarisée en France, toutefois, il ne ressort pas des pièces du dossier que la fille de la requérante serait dans l'impossibilité de poursuivre sa scolarité en Géorgie. Par suite cette décision ne méconnaît pas les stipulations de l'article 3-1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant. Mme C...ne peut se prévaloir utilement des articles 28 et 29 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant, qui créent des obligations entre Etats sans ouvrir de droit aux intéressés, et par conséquent, ne peuvent être invoqués à l'appui d'un recours pour excès de pouvoir.

5. En quatrième lieu, lorsqu'il est saisi d'une demande de délivrance d'un titre de séjour sur le fondement de l'une des dispositions du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, le préfet n'est pas tenu, en l'absence de dispositions expresses en ce sens, d'examiner d'office si l'intéressé peut prétendre à une autorisation de séjour sur le fondement d'une autre disposition de ce code, même s'il lui est toujours loisible de le faire à titre gracieux, notamment en vue de régulariser la situation de l'intéressé. Il en résulte que la requérante ne peut utilement invoquer le moyen tiré de ce qu'elle réunissait les conditions pour se voir délivrer un titre de séjour sur le fondement de l'article L. 313-10 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, ce qui au demeurant n'est pas établi, alors qu'elle n'a pas présenté sa demande de titre de séjour sur un tel fondement et que le préfet n'a pas non plus examiné d'office son droit au séjour au regard de ces dispositions.

6. En cinquième lieu, aux termes de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " La carte de séjour temporaire mentionnée à l'article L. 313-11 ou la carte de séjour temporaire mentionnée au 1° de l'article L. 313-10 peut être délivrée, sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, à l'étranger ne vivant pas en état de polygamie dont l'admission au séjour répond à des considérations humanitaires ou se justifie au regard des motifs exceptionnels qu'il fait valoir, sans que soit opposable la condition prévue à l'article L. 311-7. / L'autorité administrative est tenue de soumettre pour avis à la commission mentionnée à l'article L. 312-1 la demande d'admission exceptionnelle au séjour formée par l'étranger qui justifie par tout moyen résider en France habituellement depuis plus de dix ans (...) ". En présence d'une demande de régularisation présentée, sur le fondement de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, par un étranger qui ne serait pas en situation de polygamie et dont la présence en France ne présenterait pas une menace pour l'ordre public, il appartient à l'autorité administrative de vérifier, dans un premier temps, si l'admission exceptionnelle au séjour par la délivrance d'une carte portant la mention " vie privée et familiale " répond à des considérations humanitaires ou se justifie au regard de motifs exceptionnels, et à défaut, dans un second temps, s'il est fait état de motifs exceptionnels de nature à permettre la délivrance, dans ce cadre, d'une carte de séjour temporaire portant la mention " salarié " ou " travailleur temporaire ". Dans cette dernière hypothèse, un demandeur qui justifierait d'une promesse d'embauche ou d'un contrat lui permettant d'exercer une activité, ne saurait être regardé, par principe, comme attestant, par là même, de motifs exceptionnels exigés par la loi.

7. Si Mme C...se prévaut de ce qu'elle résiderait en France depuis 2010, de ce qu'elle occupe un emploi en tant qu'aide ménagère et qu'elle présente une promesse d'embauche au sein de l'association " Faites de la musique à Moissac ", il ne ressort pas des pièces du dossier, eu égard notamment aux conditions de séjour de l'intéressée en France mais également à celles dans lesquelles elle a exercé son dernier emploi, que le préfet, en ayant estimé que ces circonstances ne pouvaient pas constituer un motif exceptionnel ou une circonstance humanitaire, aurait méconnu les dispositions précitées de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Par ailleurs, Mme C...ne peut utilement se prévaloir des orientations générales que, par sa circulaire du 28 novembre 2012, le ministre de l'intérieur a adressées aux préfets afin de les éclairer dans la mise en oeuvre de leur pouvoir de régularisation.

8. En dernier lieu, et même en considérant que Mme C...a entendu se prévaloir de la méconnaissance des dispositions du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile par la décision attaquée, elle n'apporte aucun élément permettant d'apprécier le bien-fondé d'un tel moyen.

Sur la décision portant obligation de quitter le territoire français :

9. En premier lieu, en vertu des dispositions du I de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, la décision énonçant l'obligation de quitter le territoire français n'a pas à faire l'objet d'une motivation distincte de celle de la décision relative au séjour lorsque, notamment, un refus de délivrance d'un titre de séjour a été opposé à l'étranger. La décision de refus de titre de séjour du 11 janvier 2016 comporte, ainsi qu'il a été dit au point 2, l'énoncé des considérations de droit et de fait sur lesquelles elle se fonde et l'arrêté en litige vise les dispositions du I de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile qui permettent d'assortir le refus de titre de séjour d'une obligation de quitter le territoire français. Dès lors, le moyen tiré de ce que la décision faisant obligation au requérant de quitter le territoire français est insuffisamment motivée doit être écarté.

10. En deuxième lieu, pour les mêmes motifs que ceux énoncés aux points 3 et 4 du présent arrêt, Mme C...n'est pas fondée à soutenir que la décision lui faisant obligation de quitter territoire français méconnaîtrait les stipulations des articles 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et 3-1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant.

11. En dernier lieu, et même en considérant que Mme C...a entendu se prévaloir de la méconnaissance des dispositions du 10° de l'article L. 511-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile par la décision attaquée, elle n'apporte aucun élément permettant d'apprécier le bien-fondé d'un tel moyen.

Sur la décision fixant le pays de renvoi :

12. En premier lieu, la décision fixant le pays de destination de la mesure d'éloignement de Mme C...vise les dispositions de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ainsi que l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales. En outre, elle relève que l'intéressée est une ressortissante de nationalité géorgienne faisant l'objet d'une obligation de quitter le territoire français et que Mme C...n'établit pas être exposée à des peines ou traitements contraires à la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales en cas de retour dans son pays d'origine. Par suite, le moyen tiré de l'insuffisante motivation de la décision contestée doit être écarté.

13. En second lieu, si MmeC..., dont la demande d'asile a été rejetée par l'Office français de protection des réfugiés et apatrides puis par la Cour nationale du droit d'asile, soutient qu'elle encourt des risques en cas de retour dans son pays d'origine en raison tant des dettes contractées par son défunt époux que de la situation politique en Géorgie, les éléments qu'elle produit à l'appui de ses allégations ne permettent d'en établir la réalité. Par suite la décision fixant la Géorgie comme pays de renvoi de Mme C...ne méconnaît ni les stipulations des articles 3 et 5 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ni celles des articles 7 et 9 du pacte international relatif aux droits civils et politiques, ni non plus les dispositions de l'article L. 513-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.

14. Il résulte de tout ce qui précède que Mme C...n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Toulouse a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 11 janvier 2016 par lequel le préfet de Tarn et Garonne a refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire et a fixé le pays de destination. Par voie de conséquence il y a lieu de rejeter ses conclusions à fin d'injonction, ainsi que celles présentées au titre des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991.

DECIDE

Article 1er : La requête de Mme C...est rejetée.

6

N° 16BX02634


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Bordeaux
Formation : 4ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 16BX02634
Date de la décision : 15/12/2016
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-01-03-04 Étrangers. Séjour des étrangers. Refus de séjour. Motifs.


Composition du Tribunal
Président : M. POUZOULET
Rapporteur ?: M. Philippe POUZOULET
Rapporteur public ?: Mme MUNOZ-PAUZIES
Avocat(s) : SCP LARROQUE - REY - ROSSI

Origine de la décision
Date de l'import : 27/12/2016
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.bordeaux;arret;2016-12-15;16bx02634 ?
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