La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

24/01/2017 | FRANCE | N°16BX03328,16BX03383,16BX03508

France | France, Cour administrative d'appel de Bordeaux, 2ème chambre - formation à 3, 24 janvier 2017, 16BX03328,16BX03383,16BX03508


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme A...E...a demandé au tribunal administratif de Toulouse d'annuler la décision du 8 avril 2016 par laquelle le préfet de la Haute-Garonne lui a refusé le bénéfice du regroupement familial en faveur de son fils.

Par une ordonnance n° 1602758 du 22 juillet 2016, le président de la 2ème chambre du tribunal administratif de Toulouse a rejeté sa demande comme manifestement irrecevable.

Procédure devant la cour :

I°) Par une requête n° 16BX03328 et un mémoire enregistrés les 10 oct

obre et 15 novembre 2016, MmeE..., représentée par Me Laspalles, demande à la cour :

1°) d'annu...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme A...E...a demandé au tribunal administratif de Toulouse d'annuler la décision du 8 avril 2016 par laquelle le préfet de la Haute-Garonne lui a refusé le bénéfice du regroupement familial en faveur de son fils.

Par une ordonnance n° 1602758 du 22 juillet 2016, le président de la 2ème chambre du tribunal administratif de Toulouse a rejeté sa demande comme manifestement irrecevable.

Procédure devant la cour :

I°) Par une requête n° 16BX03328 et un mémoire enregistrés les 10 octobre et 15 novembre 2016, MmeE..., représentée par Me Laspalles, demande à la cour :

1°) d'annuler cette ordonnance du 22 juillet 2016 ;

2°) d'annuler la décision administrative contestée ;

3°) d'enjoindre au préfet de la Haute-Garonne de délivrer à son fils le visa d'entrée au titre du regroupement familial, sous astreinte de 100 euros par jour de retard à compter du huitième jour suivant la notification de l'arrêt à intervenir ;

4°) de condamner l'Etat à verser à son conseil la somme de 1 500 euros en application des dispositions combinées de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 alinéa 2 de la loi du 10 juillet 1991, outre les entiers dépens.

II°) Par une requête et un mémoire enregistrés sous le n° 16BX03383 les 18 octobre 2016 et 15 novembre 2016, Mme E..., représentée par Me Laspalles, demande à la cour :

1°) de prononcer le sursis à exécution de l'ordonnance n° 1602758 du 22 juillet 2016 par laquelle la présidente de la 2ème chambre du tribunal administratif de Toulouse a rejeté, comme manifestement irrecevable, sa demande tendant à l'annulation de la décision du 8 avril 2016 du préfet de la Haute-Garonne lui refusant le bénéfice du regroupement familial en faveur de son fils Tony Atikpahoun ;

2°) de condamner l'Etat à verser à son conseil la somme de 1 500 euros en application des dispositions combinées de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 alinéa 2 de la loi du 10 juillet 1991, outre les entiers dépens.

III°) Par une requête enregistrée sous le n° 16BX03508 le 2 novembre 2016, Mme E...A..., représentée par Me Laspalles, demande à la cour :

1°) de suspendre, sur le fondement de l'article L. 521-1 du code de justice administrative, l'exécution de la décision du 8 avril 2016 par lequel le préfet de la Haute-Garonne lui a refusé le bénéfice du regroupement familial en faveur de son fils jusqu'à ce qu'il soit statué au fond sur sa requête formée contre l'ordonnance n° 1602758 du 22 juillet 2016 par laquelle la présidente de la 2ème chambre du tribunal administratif de Toulouse a rejeté, comme manifestement irrecevable, la demande d'annulation de cette décision ;

2°) d'enjoindre au préfet de la Haute-Garonne de délivrer à son fils le visa d'entrée au titre du regroupement familial et ce sous astreinte de 100 euros par jour de retard à compter du huitième jour suivant la notification de l'arrêt à intervenir ;

3°) de condamner l'Etat à verser à son conseil la somme de 1 500 euros en application des dispositions combinées de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 alinéa 2 de la loi du 10 juillet 1991, outre les entiers dépens.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- l'arrêté du 19 décembre 2003 pris en application de l'annexe III au code général des impôts et relatif au classement des communes par zones ;

- le code de justice administrative.

La requête n° 16BX03508 a été dispensée d'instruction en application de l'article R. 611-8 du code de justice administrative.

Par décision du 7 novembre 2016, le président de la cour a désigné M. C...B...pour exercer temporairement les fonctions de rapporteur public à l'audience.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le rapport de M. D...a été entendu au cours de l'audience publique.

Considérant ce qui suit :

1. MmeE..., de nationalité béninoise, est entrée en France régulièrement en 2007. Elle est titulaire d'une carte de résident valable jusqu'en 2024. Elle a sollicité le 24 décembre 2015 le bénéfice du regroupement familial en faveur de son fils né le 28 octobre 2000 résidant au Bénin. Par une décision du 8 avril 2016, le préfet de la Haute-Garonne a rejeté sa demande. Par une première requête n°16BX03328, elle relève appel de l'ordonnance du 22 juillet 2016 par laquelle le président de la 2ème chambre du tribunal administratif de Toulouse a rejeté sa demande. Elle demande qu'il soit sursis à l'exécution de cette ordonnance par une requête enregistrée sous le n° 16BX03383. Enfin, par une requête n° 16BX03508, elle demande la suspension de la décision du 8 avril 2016.

2. Les requêtes 16BX03328, 16BX03508 et 16BX03508 présentées par Mme E... sont dirigées contre la même ordonnance et la même décision administrative. Il y a lieu de les joindre pour statuer par un seul arrêt.

Sur les conclusions en annulation de la requête n° 16BX03328 :

3. Il ressort des pièces du dossier et il n'est d'ailleurs pas contesté que la décision du 8 avril 2016 a été notifiée à Mme E...le 10 avril suivant. Celle-ci a présenté une demande d'aide juridictionnelle le 2 mai 2016, soit avant l'expiration du délai de recours contentieux de deux mois dont elle disposait pour contester une décision de refus de regroupement familial. Dès lors, la demande d'aide juridictionnelle a eu pour effet d'interrompre le délai de recours contentieux qui n'était pas expiré lorsque la demande d'annulation a été enregistrée au greffe du tribunal administratif le 17 juin 2015. Par suite, Mme E...est fondée à soutenir que c'est à tort que le président de la 2ème chambre du tribunal administratif de Toulouse, sur le fondement de l'article R. 222-1 du code de justice administrative, a rejeté sa demande comme étant manifestement irrecevable en raison de sa tardiveté. Il y a lieu, dès lors, d'évoquer et de statuer immédiatement sur la demande présentée par Mme E...devant le tribunal administratif.

Sans qu'il soit besoin de statuer sur les autres moyens :

4. Aux termes de l'article L. 411-5 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, dans sa version en vigueur à la date de la décision contestée : " Le regroupement familial ne peut être refusé que pour l'un des motifs suivants : 1° Le demandeur ne justifie pas de ressources stables et suffisantes pour subvenir aux besoins de sa famille. Sont prises en compte toutes les ressources du demandeur et de son conjoint indépendamment des prestations familiales et des allocations prévues à l'article L. 262-1 du code de l'action sociale et des familles, à l'article L. 815-1 du code de la sécurité sociale et aux articles L. 351-9, L. 351-10 et L. 351-10-1 du code du travail. Les ressources doivent atteindre un montant au moins égal au salaire minimum de croissance mensuel ; 2° Le demandeur ne dispose pas ou ne disposera pas à la date d'arrivée de sa famille en France d'un logement considéré comme normal pour une famille comparable vivant dans la même région géographique ; (...) ". Aux termes de l'article R. 411-5 de ce même code : " Pour l'application du 2° de l'article L. 411-5, est considéré comme normal un logement qui : 1° Présente une superficie habitable totale au moins égale à : - en zone B : 24 m2 pour un ménage sans enfant ou deux personnes, augmentée de 10 m2 par personne jusqu'à huit personnes et de 5 m2 par personne supplémentaire au-delà de huit personnes ;(...) Les zones A, B et C ci-dessus sont celles définies pour l'application du 1er alinéa du j du 1° du I de l'article 31 du code général des impôts ". Il ressort de l'annexe à l'arrêté du 19 décembre 2003 susvisé que, pour l'application des dispositions précitées, la commune de Toulouse est classée en zone B.

5. Pour rejeter la demande de regroupement familial présentée par MmeE..., le préfet de la Haute-Garonne a estimé, d'une part, que bien qu'il soit d'une superficie suffisante, le logement de l'intéressée n'était pas conforme car comportant deux chambres alors que la famille se compose d'un adulte et de deux enfants d'âges et de sexes différents, et, d'autre part, que les ressources de celle-ci, provenant de contrats à durée déterminée, n'étaient pas stables.

6. D'une part, il est constant que Mme E...dispose d'un logement d'une superficie habitable de près de 70 m², supérieure à la surface minimale requise par les dispositions précitées pour accueillir 3 personnes en zone B, zone dans laquelle se situe ce logement. Ledit logement comporte tous les équipements d'hygiène et de confort correspondant aux normes actuelles. La requérante a déposé une demande de logement locatif social de type T4 mais dans l'attente, la circonstance que le logement T3 de type duplex ne comporterait que deux chambres pour des enfants d'âges et de sexes différents et ne permettraient pas de respecter la destination première des pièces, Mme E...ayant prévu de dormir dans le salon pour laisser les chambres aux enfants, n'est pas de nature à faire regarder ce logement comme ne répondant pas à la condition de normalité fixée par le deuxième alinéa de l'article L. 411-5 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.

7. D'autre part, le seul fait de travailler dans le cadre de contrats à durée déterminée ne suffit pas pour permettre d'estimer que l'intéressée ne disposerait pas de ressources stables. Mme E... justifie, en particulier par les bulletins de salaire qu'elle produit au titre de la période de douze mois précédant le dépôt de sa demande, de la régularité de son activité d'auxiliaire de vie et de ses revenus. Il ressort également des pièces du dossier que les ressources de Mme E... au titre de la période de référence exigée atteignaient un montant au moins égal au salaire minimum de croissance mensuel. L'intéressée disposait donc de ressources stables et suffisantes au sens des dispositions précitées de l'article L. 411-5 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.

8. Il résulte de tout ce qui précède que Mme E...est fondée à soutenir que c'est à tort que le préfet de la Haute-Garonne a rejeté sa demande tendant au bénéfice du regroupement familial.

Sur les conclusions en sursis à exécution de la requête n°16BX03383 :

9. Le présent arrêt rend sans objet les conclusions de la requête n° 16BX03383 tendant à ce qu'il soit sursis à l'exécution de l'ordonnance attaquée. Par suite, il n'y a pas lieu d'y statuer.

Sur les conclusions en suspension d'exécution de la requête n° 16BX03508 :

10. La cour statue par le présent arrêt sur les conclusions de la requête formée par Mme E...contre l'ordonnance du 22 juillet 2016 rejetant sa demande tendant à l'annulation de la décision du préfet de la Haute-Garonne du 8 avril 2016. Par suite, les conclusions tendant à ce que la cour ordonne la suspension de l'exécution de cette décision sont devenues sans objet.

Sur les conclusions en injonction :

11. L'exécution de cet arrêt implique nécessairement que le préfet autorise le regroupement familial sollicité par MmeE.... Par suite, il y a lieu d'ordonner au préfet de la Haute-Garonne d'autoriser le regroupement familial sollicité par Mme E...au profit de son fils Tony, dans un délai d'un mois à compter de la notification du présent arrêt, sans qu'il soit besoin d'assortir cette injonction d'une astreinte.

Sur l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 alinéa 2 de la loi du 10 juillet 1991 :

12. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre une somme de 1 200 euros à la charge de l'Etat à verser à Me Laspalles, avocat de MmeE..., au titre des articles 37 de la loi du 10 juillet 1991 et L. 761-1 du code de justice administrative, ce versement valant renonciation à la part contributive de l'Etat versée au titre de l'aide juridictionnelle.

DECIDE :

Article 1er : Il n'y a plus lieu de statuer sur les requêtes n° 16BX03383 et n° 16BX03508 de MmeE....

Article 2 : L'ordonnance n° 1602758 du 22 juillet 2016 du président de la 2ème chambre du tribunal administratif de Toulouse et la décision du 8 avril 2016 du préfet de la Haute-Garonne sont annulées.

Article 3 : Il est enjoint au préfet de la Haute-Garonne d'autoriser le regroupement familial demandé par Mme E...au profit de son fils Tony dans un délai d'un mois à compter de la notification du présent arrêt.

Article 4 : L'Etat versera à Me Laspalles la somme de 1 200 euros en application de l'article

L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.

Article 5 : Le surplus des conclusions de la requête et de la demande est rejeté.

2

N° 16BX03328-16BX03383-16BX03508


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Bordeaux
Formation : 2ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 16BX03328,16BX03383,16BX03508
Date de la décision : 24/01/2017
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-01-03 Étrangers. Séjour des étrangers. Refus de séjour.


Composition du Tribunal
Président : Mme JAYAT
Rapporteur ?: M. Gil CORNEVAUX
Rapporteur public ?: M. DELVOLVÉ
Avocat(s) : SELARL SYLVAIN LASPALLES

Origine de la décision
Date de l'import : 14/02/2017
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.bordeaux;arret;2017-01-24;16bx03328.16bx03383.16bx03508 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award