La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

03/07/2017 | FRANCE | N°17BX01336

France | France, Cour administrative d'appel de Bordeaux, 6ème chambre - formation à 3, 03 juillet 2017, 17BX01336


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Le préfet de la Vienne a demandé au juge des référés du tribunal administratif de Poitiers d'ordonner la suspension de l'exécution de l'arrêté du 17 mars 2017 par lequel le maire de Saint-Léger-de-Montbrillais a réglementé la circulation des véhicules sur les voies communales n° 206 et 207.

Par une ordonnance n° 1700863 du 14 avril 2017, le juge des référés du tribunal administratif de Poitiers a suspendu l'exécution de cet arrêté.

Procédure devant la cour :

Par une requêt

e enregistrée le 28 avril 2017 et un mémoire complémentaire enregistré le 1er juin 2017, la commune de...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Le préfet de la Vienne a demandé au juge des référés du tribunal administratif de Poitiers d'ordonner la suspension de l'exécution de l'arrêté du 17 mars 2017 par lequel le maire de Saint-Léger-de-Montbrillais a réglementé la circulation des véhicules sur les voies communales n° 206 et 207.

Par une ordonnance n° 1700863 du 14 avril 2017, le juge des référés du tribunal administratif de Poitiers a suspendu l'exécution de cet arrêté.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 28 avril 2017 et un mémoire complémentaire enregistré le 1er juin 2017, la commune de Saint-Léger-de-Montbrillais, représentée par Me B..., demande à la cour :

1°) d'annuler cette ordonnance du 14 avril 2017 ;

2°) de rejeter le déféré préfectoral à fin de suspension ;

3°) d'enjoindre au préfet de la Vienne de rembourser la somme de 1 200 euros versée par la commune de Saint-Léger-de-Montbrillais en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 2 000 euros sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- l'ordonnance attaquée est entachée d'une contradiction de motifs, dans un premier temps le juge retient le caractère disproportionné de la mesure de police, en écartant le rapport d'essai et la note technique comme non probante pour justifier la mesure visant à restreindre le tonnage autorisé sur les voies concernées, puis, dans un second temps, elle relève que l'étude technique du même laboratoire révèle finalement que les engins de plus de 3,5 tonnes ne peuvent circuler sur les voies n° 206 et 207 ;

- le maire peut, dans le cadre des pouvoirs de police qu'il tient des dispositions des articles L. 141-8 et R. 141-3 du code de la voirie routière et de l'article L. 2213 du code général des collectivités territoriales, limiter de façon temporaire ou permanente le tonnage des véhicules ;

- les voies n° 206 et 207 relèvent de la catégorie T5 correspondant à un trafic rural de moins de 750 véhicules par jour, tous véhicules confondus, ou à un trafic recevant moins de 25 poids lourds par jour et par sens, par ailleurs, les voies n° 206 et 207 sont des anciens chemins ruraux empierrés, qui ont été recouverts d'une voie de bitume servant de voie de roulement, par conséquent, elles ne sont pas aménagées pour recevoir des véhicules dont le tonnage est supérieur à 3,5 tonnes ;

- l'arrêté litigieux est motivé par l'intérêt général à travers la protection des voies communales n° 206 et 207, afin de limiter les dépenses d'entretien de ces voies et non par la volonté d'empêcher le fonctionnement de l'exploitation de MmeC... ; le maire de la commune de Saint-Léger-de-Montbrillais avait proposé à Mme C...d'autres emplacements pour l'installation de son exploitation, qui contrairement à ce que soutenait le préfet devant le juge des référés, n'étaient pas situés en zone Natura 2000 ;

- Mme C...n'a pas contesté son permis de construire délivré par le préfet de la Vienne en tant qu'il mentionne également la limitation du tonnage des véhicules sur les voies n° 206 et 207 ; la limitation à 12 tonnes par l'arrêté en litige est motivée par la prise en compte de la nécessité de desservir les exploitations et propriétés environnantes ; la présence de réseaux d'eau est établie par les pièces du dossier ; la commune a déjà limité le tonnage autorisé sur les voies dans le passé ;

- c'est à tort que le juge des référés a mis à la charge de la commune de Saint-Léger-de-Montbrillais la somme de 1 200 euros à verser sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative dès lors que le préfet de la Vienne n'a pas fait appel à un avocat, qu'il n'ait pas démontré qu'il est exposé des frais particuliers.

Par un mémoire en défense enregistré le 17 mai 2017, le préfet de la Vienne, représenté par MeA..., conclut au rejet de la requête et à ce qu'une somme de 5 000 euros soit mise à la charge de la commune de Saint-Léger-de-Montbrillais au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il fait valoir que :

- la commune ne démontre pas l'existence d'un trafic T5 sur els voies communales n° 206 et 2017 et ne conseille pas l'interdiction de circulation des véhicules dont le poids total roulant autorisé est supérieur à 12 tonnes sur lesdites voies pour assurer leur pérennité ; la commune n'affirme nullement que les canalisations et les réseaux électriques sous la chaussée seraient fragilisés par la circulation d'un véhicule dont le poids total roulant autorisé est supérieur à 12 tonnes ;

- l'arrêté contesté porte une atteinte disproportionnée à la liberté du commerce et de l'industrie ainsi qu'a la liberté de circulation, justifié par la commune par la nécessité d'assurer la pérennité des voies communales et la protection des canalisations d'eau et des réseaux électriques sous la chaussées, corroborée par aucun élément probatoire ;

- aucun itinéraire de contournement n'est prévu ;

- la commune n'a pas adopté d'arrêtés restreignant la circulation sur des voies communales analogues ;

- le détournement est établit en l'espèce.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code général des collectivités territoriales ;

- le code de la voirie routière ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Pierre Larroumec, président ;

- les conclusions de Mme Béatrice Molina-Andréo, rapporteur public ;

- les observations de MeB..., représentant la commune de Saint-Léger-de-Montbrillais et de MeA..., représentant la préfecture de la Vienne.

Considérant ce qui suit :

1. Aux termes des dispositions de l'alinéa trois de l'article L. 2131-6 du code général des collectivités territoriales, auxquelles renvoie l'article L. 554-1 du code de justice administrative : " (...) Le représentant de l'Etat peut assortir son recours d'une demande de suspension. Il est fait droit à cette demande si l'un des moyens invoqués, parait, en l'état de l'instruction, propre à créer un doute sérieux quant à la légalité de l'acte attaqué. (...) ".

2. Sur le fondement de ces dispositions, le préfet de la Vienne a demandé au juge des référés du tribunal administratif de Poitiers de suspendre l'exécution de l'arrêté du 17 mars 2017 par lequel le maire de Saint-Léger-de-Montbrillais a réglementé la circulation des véhicules sur les voies communales n° 206 et 207. La commune de Saint-Léger-de-Montbrillais fait appel de l'ordonnance du 14 avril 2017 par laquelle le juge des référés du tribunal administratif de Poitiers a suspendu l'exécution de cet arrêté.

Sur la régularité de l'ordonnance attaquée :

3. Si la commune de Saint-Léger-de-Montbrillais soutient que l'ordonnance attaquée est entachée de contradiction de motifs, un tel moyen, qui se rattache au bien-fondé du raisonnement suivi par le juge des référés du tribunal administratif, est sans incidence sur la régularité de l'ordonnance attaquée.

Sur le bien-fondé de l'ordonnance :

En ce qui concerne les conclusions aux fins de suspension :

4. Aux termes de l'article R. 141-3 du code de la voirie routière : " Le maire peut interdire d'une manière temporaire ou permanente l'usage de tout ou partie du réseau des voies communales aux catégories de véhicules dont les caractéristiques sont incompatibles avec la constitution de ces voies, et notamment avec la résistance et la largeur de la chaussée ou des ouvrages d'art. ".

5. L'arrêté contesté du 17 mars 2017 édicté par le maire de la commune de Saint-Léger-de-Montbrillais sur le fondement des dispositions précitées, et pris aux motifs qu'il est nécessaire d'assurer la pérennité des voies communales et la protection des réseaux sous la chaussée, interdit la circulation des véhicules dont le poids total est supérieur à 12 tonnes sur les voies n° 206 et 207 à l'exception des véhicules nécessaires pour assurer les missions de service public et de ceux nécessaires à l'entretien et au gros-oeuvre du château d'eau, mais également, des véhicules des exploitants riverains en production végétale n'excédant pas 20 tonnes entre le 1er juillet et le 15 octobre.

6. Toutefois, la commune n'établit pas par les pièces qu'elle produit, notamment une note technique du 17 mars 2017 du laboratoire LRM, visée par l'arrêté contesté, dont les conclusions sont basées sur un trafic théorique de 25 poids lourds, dont le tonnage n'est pas précisé, par jours et par an, sans démontrer que cette hypothèse de calcul correspondrait au trafic qui serait réellement supporté par les voies litigieuse, et une lettre du 2 février 2017 du président Eaux de Viennes dont le contenu incertain mentionne " il est relativement difficile d'apprécier précisément les incidences sur les réseaux d'eau potable présents sur les VC 206 et 207, de l'augmentation des charges et de la fréquence du trafic routier (...) l'application de charges lourdes, plus importantes et plus nombreuses, pourrait entrainer une accentuation des casses des réseaux ", l'existence d'un risque pour la pérennité des voies n° 206 et 207 et pour les réseaux qu'elles présentent. Dans ces conditions, le moyen tiré du caractère disproportionné de la mesure de police prévue par l'arrêté contesté, qui a pour effet de restreindre la libre circulation sur les voies n° 206 et 207 et de faire obstacle au fonctionnement de l'exploitation de MmeC..., apparaît, en l'état du dossier, de nature à créer un doute sérieux sur sa légalité.

7. Par ailleurs, il ressort des pièces du dossier que l'arrêté contesté interdit seulement la circulation aux véhicules dont le poids total est supérieur à 12 tonnes sur les voies n° 206 et 207 à l'exception notamment des véhicules des exploitants riverains en production végétale n'excédant pas 20 tonnes entre le 1er juillet et le 15 octobre, alors que la commune de Saint-Léger-de-Montbrillais affirme, sans toutefois l'établir de manière certaine, que ces voies ne sont pas conçues pour recevoir des poids lourds de plus de 3,5 tonnes, Dès lors, cet arrêté apparaît comme n'étant pas motivé par la protection des voies et de leur réseaux, mais par l'unique but de faire obstacle au bon fonctionnement de l'exploitation de MmeC..., seule exploitante riveraine des voies n° 206 et 207 en production animale. Dans ces conditions, en l'état de l'instruction, le moyen tiré du détournement de pouvoir paraît lui aussi de nature à créer un doute sérieux quant à la légalité de l'arrêté contesté.

8. Il résulte de ce qui précède que la commune de Saint-Léger-de-Montbrillais n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par l'ordonnance attaquée, le juge des référés du tribunal administratif de Poitiers a suspendu l'exécution de l'arrêté du 17 mars 2017.

En ce qui concerne l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative par le juge des référés :

9. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ne font pas obstacle à ce que soit mise à la charge de la partie perdante une somme demandée par une personne morale, notamment par l'Etat, au titre des frais exposés dans l'instance et non compris dans les dépens, alors même que cette personne morale n'a pas été représentée par un avocat. Dans les circonstances de l'espèce, c'est à bon droit que le juge des référés du tribunal administratif de Poitiers a fait droit aux conclusions présentées par le préfet de la Vienne tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Sur les conclusions aux fins d'injonction :

10. La présente ordonnance n'implique aucune mesure d'exécution. Par suite, les conclusions de la commune de Saint-Léger-de-Montbrillais tendant à ce qu'il soit enjoint au préfet de la Vienne de lui rembourser la somme de 1 200 euros doivent être rejetées.

Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

11. Ces dispositions font obstacle à ce que soit mise à la charge du préfet de la Vienne le versement de quelque somme que ce soit à la commune de Saint-Léger-de-Montbrillais au titre des dispositions de l'article L.761-1 du code de justice administrative. En revanche, il y a lieu dans les circonstances de l'espèce de mettre à la charge de la commune, à verser au préfet de la Vienne, une somme de 1 200 euros sur le même fondement.

DECIDE

Article 1er : La requête de la commune de Saint-Léger-de-Montbrillais est rejetée.

Article 2 : La commune de Saint-Léger-de-Monbrillais versera au préfet de la Vienne la somme de 1 200 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : La présente ordonnance sera notifiée à commune de Saint-Léger-de-Montbrillais et au préfet de la Vienne.

Délibéré après l'audience du 6 juin 2017 à laquelle siégeaient :

M. Pierre Larroumec, président,

M. Pierre Bentolila, premier conseiller,

Mme Rey-Gabriac, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 3 juillet 2017.

L'assesseur le plus ancien dans l'ordre du tableau,

Pierre Bentolila

Le président,

Pierre Larroumec

Le greffier,

Cindy Virin

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.

Pour expédition certifiée conforme.

Le greffier,

Cindy Virin

2

No 17BX01336


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Bordeaux
Formation : 6ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 17BX01336
Date de la décision : 03/07/2017
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

135-01-015-02 Collectivités territoriales. Dispositions générales. Contrôle de la légalité des actes des autorités locales. Déféré préfectoral.


Composition du Tribunal
Président : M. LARROUMEC
Rapporteur ?: M. Pierre LARROUMEC
Rapporteur public ?: Mme MOLINA-ANDREO
Avocat(s) : SCP D'AVOCATS GAND PASCOT PENOT

Origine de la décision
Date de l'import : 18/07/2017
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.bordeaux;arret;2017-07-03;17bx01336 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award