La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

26/10/2017 | FRANCE | N°16BX00658

France | France, Cour administrative d'appel de Bordeaux, 2ème chambre - formation à 3, 26 octobre 2017, 16BX00658


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme A...B...a demandé au tribunal administratif de Toulouse de condamner l'Office national d'indemnisation des accidents médicaux des affections iatrogènes et des infections nosocomiales (ONIAM) à lui verser une indemnité de 467 354 euros en réparation des préjudices qu'elle a subis du fait des manoeuvres obstétricales réalisées lors de son accouchement survenu le 4 août 2003.

Par un jugement n° 1300917 du 17 décembre 2015, le tribunal administratif de Toulouse a rejeté sa demande.

Pro

cédure devant la cour :

Par une requête et un mémoire, enregistrés le 16 février 2016 e...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme A...B...a demandé au tribunal administratif de Toulouse de condamner l'Office national d'indemnisation des accidents médicaux des affections iatrogènes et des infections nosocomiales (ONIAM) à lui verser une indemnité de 467 354 euros en réparation des préjudices qu'elle a subis du fait des manoeuvres obstétricales réalisées lors de son accouchement survenu le 4 août 2003.

Par un jugement n° 1300917 du 17 décembre 2015, le tribunal administratif de Toulouse a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête et un mémoire, enregistrés le 16 février 2016 et le 29 juillet 2016,

MmeB..., représentée par MeG..., demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du 17 décembre 2015 du tribunal administratif de Toulouse ;

2°) de faire droit à sa demande indemnitaire ;

3°) de mettre à la charge de l'ONIAM la somme de 5 000 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que l'accident médical dont elle a été victime le 4 août 2003 remplit les conditions prévues au II de l'article L. 1142-1 du code de la santé publique et pouvait donc être pris en charge au titre de la solidarité nationale par l'ONIAM. Elle sollicite la condamnation de l'ONIAM à lui verser :

- une somme de 36 414 euros pour les dépenses de santé correspondant à l'achat de protections hygiéniques;

- l'allocation d'une indemnité au titre de l'assistance en tierce personne

de 8 070 euros ;

- une indemnité de 57 884,29 euros pour la perte de ses gains professionnels actuels ;

- une indemnité de 204 486,27 pour les pertes professionnelles futures ;

- la somme de 50 000 euros au titre de l'incidence professionnelle ;

- l'allocation de la somme de 3 000 euros à titre d'indemnités kilométriques ;

- l'allocation de la somme de 10 000 euros pour les douleurs permanentes qu'elle endure depuis la consolidation ;

- l'indemnisation de son déficit fonctionnel permanent à hauteur de 42 500 euros pour les atteintes aux fonctions physiologiques et de 10 000 euros pour la perte de la qualité de vie et les troubles dans ses conditions d'existence ;

- une somme de 30 000 euros pour son préjudice sexuel et de 50 000 euros pour son préjudice d'agrément.

Par un mémoire du 8 avril 2016, la caisse primaire d'assurance maladie de Bayonne déclare n'avoir aucune observation à formuler.

Par un mémoire en défense, enregistré le 13 juillet 2016, l'ONIAM conclut à titre principal à sa mise hors de cause et au rejet de la requête, à titre subsidiaire au rejet de la demande d'indemnisation de Mme B...au titre des indemnités kilométriques, de la perte de gains professionnels actuels, de la perte de gains professionnels futurs et des dépenses de santé futures et à la réduction à de plus justes proportions de l'indemnisation sollicitée par

Mme B...s'agissant des autres postes de préjudices.

L'ONIAM soutient que :

- le dommage subi par Mme B...n'est pas anormal au regard de son état de santé comme de l'évolution prévisible de celui-ci de sorte que les conditions requises par l'article L. 1142-1 du code de la santé publique pour une indemnisation au titre de la solidarité nationale ne sont pas réunies ;

- à titre subsidiaire, que la demande d'indemnisation des frais de déplacements que

Mme B...a dû engager pour se rendre aux opérations d'expertise doit être rejetée dès lors que l'article L. 761-1 du code de justice administrative est destiné à prendre en compte les frais engagés par les parties, et en particulier les frais de déplacements pour se rendre aux opérations d'expertise ;

- l'indemnisation des frais d'assistance par tierce personne de Mme B...ne saurait excéder, compte tenu du taux horaire fixé par son référentiel pour une aide non spécialisée, la somme de 9 068,51 euros ;

- aucune perte de gains professionnels ne peut être évaluée pour les années 2003, 2004, 2005, 2006, 2007, et les neuf autres mois de l'année 2009 pour lesquelles la requérante ne verse aucun document sur sa situation et ses revenus, de sorte que sa demande devra être rejetée ;

- il en sera de même de sa demande tendant à la réparation de dépenses de santé futures dès lors qu'elle ne produit aucune facture concernant les serviettes hygiéniques qu'elle serait contrainte d'acheter ;

- la perte de gains professionnels futurs n'est pas établie ;

- l'indemnisation de l'incidence professionnelle de Mme B...qui, avant les faits, était professeur de natation et de ski, et n'a pas pu reprendre cette activité, ne saurait excéder la somme de 15 000 euros dès lors que les séquelles qu'elle présente n'entraînent pas une inaptitude à l'exercice de toute activité professionnelle ;

- la demande au titre du déficit fonctionnel permanent, évalué par l'expert à 25 %, qui comprend les douleurs permanentes, la perte de la qualité de vie et les troubles dans les conditions d'existence de MmeB..., sera ramenée à de plus justes proportions à la somme de 40 832 euros, le préjudice d'agrément à la somme de 6 900 euros et le préjudice sexuel à la somme de 7 000 euros.

Les parties ont été informées par courrier du 4 septembre 2017, en application des dispositions de l'article R. 611-7 du code de justice administrative, de ce que l'arrêt était susceptible d'être fondé sur un moyen relevé d'office, tiré de l'incompétence de la juridiction administrative et d'annuler comme étant entaché d'irrégularité le jugement du tribunal administratif de Toulouse qui a admis à tort sa compétence, alors que le fait générateur du dommage dont Mme B...demandait l'indemnisation s'est produit à la clinique Lafargue de Bayonne, soit dans un établissement de soins privé (cf. article L. 1142-20 du code de la santé publique).

Par un courrier enregistré le 7 septembre 2017, Mme B...a répondu au moyen d'ordre public.

Par un courrier enregistré le 11 septembre 2017, l'ONIAM a répondu au moyen d'ordre public.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code de la santé publique ;

- le code de la sécurité sociale ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de MmeE...,

- les conclusions de M. Katz, rapporteur public,

- et les observations de MeF..., représentant l'ONIAM.

Considérant ce qui suit :

1. Mme A...B...a accouché à la clinique Lafargue de Bayonne, le 4 août 2003, de son premier enfant, par forceps et sous anesthésie générale, après l'échec d'une extraction par ventouse. Les suites immédiates de cette intervention ont été marquées par d'importants troubles conduisant à une intervention chirurgicale pour promonto-fixation pratiquée le 30 mars 2006 au centre hospitalier universitaire de Toulouse, laquelle a été compliquée d'une éventration et a nécessité une nouvelle intervention le lendemain. Ayant conservé, malgré une troisième intervention le 17 janvier 2007, une cystocèle, une hysterocèle et une rectocèle, Mme B...a saisi la commission régionale de conciliation et d'indemnisation (CRCI) d'Aquitaine, laquelle a diligenté une expertise médicale confiée à M. H...-I...C..., médecin légiste et

à M. H...-A...D..., chirurgien viscéral. Sur la base du rapport déposé par ces

experts, le 5 mars 2010, qui concluait que les conséquences résultant des manoeuvres instrumentales nécessitées par les conditions de l'accouchement constituaient un accident médical, par une décision du 16 juin 2010, la CRCI a émis un avis favorable à la réparation des préjudices au titre de la solidarité nationale par l'Office national d'indemnisation des accidents médicaux, des affections iatrogènes et des infections nosocomiales (ONIAM). Estimant que l'offre d'indemnisation proposée par ce dernier était insuffisante, Madame B...a saisi le tribunal administratif de Toulouse d'une demande tendant à la condamnation de l'ONIAM à lui verser une indemnité de 467 354 euros en réparation des préjudices subis du fait des manoeuvres obstétricales réalisées lors de son accouchement le 4 août 2003 et interjette appel du jugement du 17 décembre 2015, rejetant sa requête.

2. Aux termes de l'article L. 1142-20 du code de la santé publique : " La victime, ou ses ayants droit, dispose du droit d'action en justice contre l'office si aucune offre ne lui a été présentée ou si elle n'a pas accepté l'offre qui lui a été faite. / L'action en indemnisation est intentée devant la juridiction compétente selon la nature du fait générateur du dommage. ".

3. La demande présentée par Mme B...devant le tribunal administratif de Toulouse tendait à l'indemnisation au titre de la solidarité nationale des préjudices résultant de l'accident médical constitué par les conséquences des manoeuvres instrumentales nécessitées lors de son accouchement le 4 août 2003 à la clinique Lafargue de Bayonne. Il n'est pas contesté que le fait générateur à l'origine du dommage pour lequel l'appelante demande la condamnation de l'ONIAM s'est produit dans un établissement de soins privé. Conformément à

l'article L. 1142-20 du code de la santé publique précité, il n'appartient qu'aux juridictions judiciaires de connaître du litige ainsi soulevé. Dès lors, il y a lieu d'annuler le jugement en date du 17 décembre 2015 par lequel le tribunal administratif de Toulouse s'est reconnu compétent pour connaître de l'action engagée par Mme B...et, statuant par voie d'évocation, de rejeter cette demande comme portée devant une juridiction incompétente pour en connaître.

4. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'ONIAM qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, la somme que Mme B...demande au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens.

DÉCIDE :

Article 1er : Le jugement du tribunal administratif de Toulouse en date du 17 décembre 2015 est annulé.

Article 2 : La demande présentée par Mme B...devant le tribunal administratif de Toulouse est rejetée comme portée devant un ordre de juridiction incompétent pour en connaitre.

Article 3 : Les conclusions de Mme B...présentées sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à Mme A...B..., à l'Office national d'indemnisation des accidents médicaux des affections iatrogènes et des infections nosocomiales et à la caisse primaire d'assurance maladie de Bayonne.

Délibéré après l'audience du 3 octobre 2017 à laquelle siégeaient :

M. Éric Rey-Bèthbéder, président,

M. Didier Salvi, président-assesseur,

Mme Aurélie Chauvin, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 26 octobre 2017

Le rapporteur,

Aurélie E...Le président,

Éric Rey-BèthbéderLe greffier,

Cindy Virin

La République mande et ordonne au ministre des solidarités et de la santé en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.

2

N° 16BX00658


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Bordeaux
Formation : 2ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 16BX00658
Date de la décision : 26/10/2017
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

17-03 Compétence. Répartition des compétences entre les deux ordres de juridiction.


Composition du Tribunal
Président : M. REY-BETHBEDER
Rapporteur ?: Mme Aurélie CHAUVIN
Rapporteur public ?: M. KATZ
Avocat(s) : CABINET D'AVOCATS CHAMBOLLE

Origine de la décision
Date de l'import : 14/11/2017
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.bordeaux;arret;2017-10-26;16bx00658 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award