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19/12/2017 | FRANCE | N°15BX01587

France | France, Cour administrative d'appel de Bordeaux, 5ème chambre (formation à 3), 19 décembre 2017, 15BX01587


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B... A...et M. C...A...ont demandé au tribunal administratif de Pau d'annuler les courriers, en date du 23 août 2011, par lesquels le directeur départemental des territoires et de la mer des Pyrénées-Atlantiques leur a demandé, pour le moulin de la Ville et le moulin Foulon (de Comet), d'une part, de lui transmettre une copie de l'acte d'autorisation de mise en service de ces ouvrages, d'autre part, de lui adresser un programme de travaux de mise aux normes desdits ouvrages ainsi qu'un calendrier de ces tr

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Par un jugement n° 1301949 du 3 mars 2015, le tribunal admin...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B... A...et M. C...A...ont demandé au tribunal administratif de Pau d'annuler les courriers, en date du 23 août 2011, par lesquels le directeur départemental des territoires et de la mer des Pyrénées-Atlantiques leur a demandé, pour le moulin de la Ville et le moulin Foulon (de Comet), d'une part, de lui transmettre une copie de l'acte d'autorisation de mise en service de ces ouvrages, d'autre part, de lui adresser un programme de travaux de mise aux normes desdits ouvrages ainsi qu'un calendrier de ces travaux.

Par un jugement n° 1301949 du 3 mars 2015, le tribunal administratif de Pau a fait droit à leurs demandes.

Procédure devant la cour :

Par un recours et un mémoire, enregistrés le 11 mai 2015 et le 8 septembre 2017, le ministre de la transition écologique et solidaire demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du 3 mars 2015 du tribunal administratif de Pau ;

2°) de rejeter les demandes présentées par Messieurs A...devant le tribunal administratif.

Il soutient que :

- le jugement est irrégulier en ce qu'il a jugé recevable la requête de Messieurs A...; les courriers du 23 août 2011 ne peuvent être regardés comme valant mise en demeure d'accomplir des travaux de mise en conformité des ouvrages ;

- à supposer que la cour estime la requête recevable comme dirigée contre des actes susceptibles de faire grief, compte tenu de la teneur de ces courriers, ceux-ci n'entrent pas dans le champ des mesures de police qui imposent des " sujétions à leur destinataire ", mesures visées par la loi du 11 juillet 1979 à laquelle se réfère la loi du 12 avril 2000 relative aux droits des citoyens dans leurs relations avec les administrations ;

- le second motif d'annulation retenu par le tribunal est entaché d'une erreur de droit ; l'article L. 432-6 du code de l'environnement impose que les ouvrages situés sur les cours d'eau classés comportent des dispositifs assurant la circulation des poissons migrateurs ; or même franchissable en l'absence de dispositif particulier, l'ouvrage peut constituer une entrave à la libre circulation des poissons ; la nécessité d'un aménagement ne peut s'apprécier au regard du fait qu'en l'absence de dispositif les poissons parviennent ou non à franchir l'obstacle ; une autre approche méconnaît l'objectif du législateur ;

- les premiers juges ont également commis une erreur d'appréciation ; une franchissabilité partielle ne suffit pas à établir que la libre circulation des poissons est assurée ; la présence d'anguilles en aval de l'ouvrage ne suffit pas à établir que la libre circulation des poissons telle qu'exigée par l'article L. 432-6 reprises au Ill de l'actuel article L. 214-17 du code de l'environnement est suffisamment assurée ;

- la rivière de l'Aran est incluse dans la zone active du volet local de l'unité de gestion Adour du plan anguille ; les actions à mener visent à garantir une " perméabilité des obstacles à la montaison et dévalaison " et à " améliorer la montaison des anguilles en zone active " ; à supposer même qu'ils puissent à certaines périodes de l'année, notamment de hautes eaux, être franchis par certains individus des espèces migratrices, les seuils en cause perturbent de manière significative l'accès des anguilles notamment aux zones indispensables à leur reproduction, leur croissance, leur alimentation ou leur abri ; les études menées par l'institution Adour démontrent que ces ouvrages posent de graves problèmes de franchissabilité, notamment pour l'anguille et la lamproie qui supportent, pour la première, une chute de 20 cm et pour la seconde, une hauteur de 25 cm ; que ce soit le moulin d'A... ou le seuil de Comet la hauteur de chute observée ne permet pas son franchissement y compris en période de hautes eaux par les individus " moyens " des espèces anguilles et lamproie.

Par deux mémoires en défense, enregistrés le 26 août 2015 et le 29 septembre 2017, Messieurs B...et DominiqueA..., représentés par MeD..., concluent au rejet de la requête et à ce que la somme de 3 500 euros soit mise à la charge de l'Etat sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Ils soutiennent que :

- les décisions en litige font grief ;

- le caractère contradictoire de la procédure prévu par l'article 24 de la loi n° 2000-321 du 12 avril 2000 n'a pas été respecté ;

- les décisions prises par le préfet sont entachées d'une erreur de droit et d'une erreur d'appréciation dans la mesure où ces décisions ne justifient pas l'absence de franchissabilité ou l'entrave que pourraient constituer les ouvrages à la libre circulation des poissons et où ils justifient que depuis au moins 700 ans les seuils en question ne peuvent constituer des obstacles à cette circulation ;

- ils sont fondés à se prévaloir du nouvel article L. 214-18-1 de la loi n° 2017-227 du 24 février 2017 dès lors que les moulins sont installés en liste 2 prévue à l'article L. 214-17 du code de l'environnement et présentant un projet de relance hydroélectrique ; ils sont désormais exemptés des règles prévues au 2° de l'article L. 214-17 I du code de l'environnement.

Par ordonnance du 29 septembre 2017, la clôture d'instruction a été fixée au 13 octobre 2017 à 12 heures.

Un mémoire présenté par le ministre de la transition écologique et solidaire a été enregistré le 23 novembre 2017.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code de l'environnement ;

- la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979 relative à la motivation des actes administratifs et à l'amélioration des relations entre l'administration et le public ;

- la loi n° 2000-321 du 12 avril 2000 relative aux droits des citoyens dans leurs relations avec les administrations ;

- la loi n° 2017-227 du 24 février 2017 ;

- l'arrêté du 2 janvier 1986 fixant la liste des espèces migratrices présentes dans certains cours d'eau classés ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Florence Madelaigue ;

- les conclusions de Mme Déborah De Paz, rapporteur public,

- et les observations de MeD..., représentant MM.A....

Considérant ce qui suit :

1. Par courriers en date du 23 août 2011, le directeur départemental des territoires et de la mer des Pyrénées-Atlantiques a demandé à M. B...A...pour le moulin de la Ville et à M. C... A...pour le moulin Foulon (de Comet), d'une part, de lui transmettre une copie de l'acte d'autorisation de mise en service de ces ouvrages, d'autre part, de lui adresser un programme de travaux de mise aux normes desdits ouvrages ainsi qu'un calendrier de ces travaux. Le ministre de la transition écologique et solidaire relève appel du jugement du tribunal administratif de Pau qui a annulé, à la demande de Messieurs B...et DominiqueA..., lesdits courriers.

Sur la recevabilité de la demande de première instance de Messieurs B...et Dominique A...:

2. Par un courrier recommandé avec avis de réception en date du 23 août 2011, adressé à M. B...A...et à M. C...A..., propriétaires ou exploitants de moulins sur le cours d'eau l'Aran sur le territoire de la commune de Labastide Clairence, le directeur départemental des territoires et de la mer des Pyrénées-Atlantiques, après avoir indiqué les objectifs de reconquête du bon état des eaux et des milieux aquatiques à l'horizon 2015 fixés par l'Union européenne et la France et cité les dispositions de l'article L. 432-6 du code de l'environnement, leur a indiqué qu'il résultait d'une expertise menée sur la situation des ouvrages situés sur ce cours d'eau que leur ouvrage a une situation " non conforme " et leur a demandé en conséquence de [lui] transmettre " dès que possible " un programme de travaux de mise aux normes envisagés au titre de la police de l'eau et un calendrier prévisionnel de ces travaux. Par ces courriers, le directeur départemental des territoires et de la mer les a également informés de la possibilité de solliciter l'aide d'un bureau d'étude spécialisé, pour élaborer le projet de mise aux normes " le plus pertinent et le mieux adapté ", en grande partie financé pour ses études, par des fonds publics. Eu égard aux termes dans lesquels ils sont rédigés, ces courriers, qui ne produisent par eux-mêmes aucun effet qui leur soit propre et qui se bornent à demander aux propriétaires des moulins de prévoir les dispositions nécessaires dans la perspective d'une mise en conformité avec les dispositions du code de l'environnement exigeant la mise en place de dispositifs assurant la circulation des poissons migrateurs, sans fixer de délai pour cette mise en conformité et sans être assortis de la menace d'une sanction, ne peuvent être regardés comme des décisions faisant grief susceptibles de faire l'objet d'un recours en excès de pouvoir. Par suite, le ministre de la transition écologique et solidaire est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué en date du 3 mars 2015, le tribunal administratif de Pau, après avoir écarté la fin de non-recevoir opposée par le ministre, a statué sur la demande d'annulation desdites lettres présentées devant lui par Messieurs B...et DominiqueA.... Ce jugement doit donc être annulé et la demande rejetée.

3. Il résulte de ce qui précède que le ministre de la transition écologique et solidaire est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué le tribunal administratif de Pau a annulé les courriers attaqués en date du 23 août 2011 du directeur départemental des territoires et de la mer des Pyrénées-Atlantiques.

Sur l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

4. En vertu des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, la cour ne peut pas faire bénéficier la partie tenue aux dépens ou la partie perdante du paiement par l'autre partie des frais qu'elle a exposés à l'occasion du litige soumis au juge. Les conclusions présentées à ce titre par Messieurs B...et Dominique A...doivent dès lors être rejetées.

DECIDE :

Article 1er : Le jugement n° 1301949 du 3 mars 2015 du tribunal administratif de Pau est annulé.

Article 2 : La demande présentée par MM. B...et C...A...devant le tribunal administratif de Pau et leurs conclusions présentées en appel sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié au ministre d'Etat, ministre de la transition écologique et solidaire et à MM. B...et C...A....

Délibéré après l'audience du 28 novembre 2017 à laquelle siégeaient :

Mme Elisabeth Jayat, président,

Mme Christine Mège, président-assesseur,

Mme Florence Madelaigue, rapporteur,

Lu en audience publique, le 19 décembre 2017.

Le rapporteur,

Florence Madelaigue

Le président,

Elisabeth JayatLe greffier,

Evelyne Gay-Boissières

La République mande et ordonne au ministre d'Etat, ministre de la transition écologique et solidaire en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.

2

N° 15BX01587


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Bordeaux
Formation : 5ème chambre (formation à 3)
Numéro d'arrêt : 15BX01587
Date de la décision : 19/12/2017
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

Nature et environnement - Installations classées pour la protection de l'environnement - Régime juridique - Pouvoirs du préfet - Contrôle du fonctionnement de l'installation.

Nature et environnement - Divers régimes protecteurs de l`environnement.


Composition du Tribunal
Président : Mme JAYAT
Rapporteur ?: Mme Florence MADELAIGUE
Rapporteur public ?: Mme DE PAZ
Avocat(s) : CABINET D'AVOCATS LARROUY-CASTERA

Origine de la décision
Date de l'import : 26/12/2017
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.bordeaux;arret;2017-12-19;15bx01587 ?
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