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29/03/2018 | FRANCE | N°16BX00275

France | France, Cour administrative d'appel de Bordeaux, 3ème chambre - formation à 3, 29 mars 2018, 16BX00275


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B...C...a demandé au tribunal administratif de Poitiers, d'une part, d'annuler la décision du 9 avril 2013 par laquelle le maire de Nachamps l'a licencié en fin de stage, ensemble la décision du 22 mai 2013 portant rejet de son recours gracieux, d'autre part d'enjoindre à la commune de Nachamps de le titulariser, enfin, de condamner ladite commune à lui verser une somme totale de 25 000 euros en réparation des préjudices qu'il estime avoir subis.

Par un jugement n° 1302682 du 18 novembre 2015, l

e tribunal administratif de Poitiers a rejeté sa demande.

Procédure devant ...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B...C...a demandé au tribunal administratif de Poitiers, d'une part, d'annuler la décision du 9 avril 2013 par laquelle le maire de Nachamps l'a licencié en fin de stage, ensemble la décision du 22 mai 2013 portant rejet de son recours gracieux, d'autre part d'enjoindre à la commune de Nachamps de le titulariser, enfin, de condamner ladite commune à lui verser une somme totale de 25 000 euros en réparation des préjudices qu'il estime avoir subis.

Par un jugement n° 1302682 du 18 novembre 2015, le tribunal administratif de Poitiers a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 20 janvier 2016, M.C..., représenté par MeA..., demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du 18 novembre 2015 du tribunal administratif de Poitiers ;

2°) d'annuler la décision du 9 avril 2013 par laquelle le maire de Nachamps l'a licencié en fin de stage ;

3°) d'enjoindre à la commune de Nachamps de le réintégrer dans ses fonctions à compter de la date de son éviction illégale, de le titulariser à cette date en qualité d'adjoint technique de 2ème classe et de reconstituer sa carrière, dans le délai d'un mois à compter de la notification de l'arrêt, sous astreinte de 50 euros par jour de retard ;

4°) de condamner la commune de Nachamps à lui verser une somme totale de 25 000 euros en réparation de ses préjudices moral et financier ;

5°) de mettre à la charge de la commune de Nachamps une somme de 1 500 euros au titre des dispositions combinées des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique.

Il soutient que :

- la commission administrative paritaire n'a pas été consultée sur les faits ayant motivé son licenciement ; il ne résulte pas du procès-verbal de réunion du 19 mars 2013, lequel indique de manière erronée qu'il a été nommé à compter du 1er mai 2013, que la commission a effectivement été consultée sur les faits justifiant son licenciement pour insuffisance professionnelle ;

- la matérialité des faits justifiant son licenciement n'est pas établie ;

- les faits reprochés caractérisent des fautes disciplinaires, mais sont sans lien avec ses aptitudes professionnelles et ne permettent pas de remettre en cause sa manière de servir ;

- la commune aurait dû suivre une procédure disciplinaire, qui revêt un caractère contradictoire ;

- le licenciement repose sur une erreur manifeste d'appréciation ; il a occupé, sous couvert de contrats, le même emploi durant quatre années, sans que son aptitude professionnelle ne soit remise en cause ; la durée de son stage a en outre été amputée de plusieurs congés maladie, ce qui limite l'appréciation de son aptitude professionnelle ;

- en réalité, le maire était opposé à sa titularisation, et a exercé sur lui une pression constante constitutive d'un harcèlement ;

- il a droit à la réparation intégrale des préjudices résultant de son licenciement illégal.

Par un mémoire en défense enregistré le 30 mai 2016, la commune de Nachamps conclut au rejet de la requête et à la mise à la charge de M. C...d'une somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- l'erreur matérielle que comporte l'avis de la commission administrative paritaire n'affecte pas sa régularité ; il résulte du procès-verbal de réunion de cette commission que les faits reprochés sont constitutifs d'une insuffisance professionnelle et qu'elle a été destinataire du dossier d'évaluation du stagiaire ; la commission a d'ailleurs rendu un avis unanime favorable au licenciement ;

- les faits reprochés sont constitutifs d'une insuffisance professionnelle, ainsi que le révèlent les notes obtenues en cours de stage ;

- le licenciement ne procède pas d'une erreur manifeste d'appréciation ; la manière de servir de l'agent a pu se dégrader en cours de stage, quand bien même aucun reproche ne lui avait été adressé auparavant ; l'aptitude professionnelle du requérant a pu être appréciée malgré ses congés maladie, compte tenu de leur durée limitée ;

- il ne peut être fait injonction à la commune de titulariser M.C....

M. C...a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 10 mars 2016.

Par une ordonnance du 8 novembre 2017, la clôture de l'instruction a été fixée au 15 décembre 2017 à 12h00.

Vu :

- les autres pièces du dossier ;

- la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique territoriale ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 modifiée relative à l'aide juridique ;

- le décret n° 92-1194 du 4 novembre 1992 fixant les dispositions communes applicables aux fonctionnaires stagiaires de la fonction publique territoriale ;

- le décret n° 2006-1691 du 22 décembre 2006 portant statut particulier du cadre d'emplois des adjoints techniques territoriaux ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique

- le rapport de Mme Marie-Pierre Beuve Dupuy,

- les conclusions de M. D...de la Taille Lolainville, rapporteur public,

- et les observations de MeE..., représentant la commune de Nachamps.

Considérant ce qui suit :

1. M. C...a été recruté à partir du 1er août 2008 par la commune de Nachamps, sous couvert de contrats à durée déterminée renouvelés jusqu'au 30 avril 2012, en qualité d'agent d'entretien. Par un arrêté du maire de Nachamps du 25 avril 2012, il a été nommé dans le cadre d'emplois des adjoints techniques territoriaux en qualité d'adjoint technique de deuxième classe stagiaire à temps complet. Par arrêté du 9 avril 2013, le maire de Nachamps a prononcé son licenciement en fin de stage pour insuffisance professionnelle. M. C...relève appel du jugement du 18 novembre 2015 par lequel le tribunal administratif de Poitiers a rejeté ses conclusions tendant à l'annulation de cette décision de licenciement, à ce qu'il soit enjoint à la commune de Nachamps de le titulariser et à la condamnation de ladite commune à lui verser une somme totale de 25 000 euros en réparation des préjudices résultant de ce licenciement.

2. Aux termes de l'article 4 du décret du 4 novembre 1992 fixant les dispositions communes applicables aux fonctionnaires stagiaires : " La durée normale du stage et les conditions particulières dans lesquelles elle peut éventuellement être prorogée sont fixées par les statuts particuliers des cadres d'emplois (...) ". Aux termes de l'article 5 de ce décret : " Le fonctionnaire territorial stagiaire peut être licencié pour insuffisance professionnelle lorsqu'il est en stage depuis un temps au moins égal à la moitié de la durée normale du stage.

Le licenciement est prononcé après avis de la commission administrative paritaire compétente pour le cadre d'emplois dans lequel l'intéressé a vocation à être titularisé (...) " Aux termes de l'article 8 du décret du 22 décembre 2006 portant statut particulier du cadre d'emplois des adjoints techniques territoriaux, dans sa rédaction applicable au présent litige : " Les candidats recrutés en qualité d'adjoint technique territorial de 2e classe sur un emploi d'une collectivité territoriale (...) sont nommés stagiaires par l'autorité territoriale investie du pouvoir de nomination pour une durée d'un an.(...) ". L'article 10 de ce décret dispose : " A l'issue du stage, les stagiaires dont les services ont donné satisfaction sont titularisés par décision de l'autorité territoriale investie du pouvoir de nomination (...). Les autres stagiaires peuvent, sur décision de l'autorité territoriale, être autorisés à effectuer un stage complémentaire d'une durée maximale d'un an. Si le stage complémentaire a été jugé satisfaisant, les intéressés sont titularisés. / Les adjoints techniques territoriaux de 2e classe stagiaires (...) qui n'ont pas été autorisés à effectuer un stage complémentaire, ou dont le stage complémentaire n'a pas été jugé satisfaisant, sont soit licenciés s'ils n'avaient pas auparavant la qualité de fonctionnaire, soit réintégrés dans leur grade d'origine. ".

3. En premier lieu, il ressort de l'avis, favorable au licenciement de M.C..., émis par la commission administrative paritaire du 19 mars 2013, que ladite commission s'est prononcée après avoir pris connaissance du " dossier d'évaluation du stagiaire ", lequel comporte les évaluations de l'intéressé au terme, respectivement, de trois mois, six mois et neuf mois de stage. Ainsi, et contrairement à ce qui est soutenu en appel, les éléments justifiant le licenciement pour insuffisance professionnelle de M. C...ont été portés à la connaissance de ladite commission. Par ailleurs, l'erreur matérielle que comporte cet avis sur l'année de nomination de M. C...n'affecte pas sa régularité.

4. En deuxième lieu, les trois évaluations de stage réalisées trimestriellement au cours de l'année de stage de M. C...font état d'un manque de respect des consignes, d'une insuffisante rapidité d'exécution, d'une insuffisante attention portée au matériel, d'un " comportement changeant " qui a une incidence sur la qualité du travail fourni et d'un manque d'autonomie. Le requérant, qui ne discute nullement la pertinence des appréciations négatives portées de manière réitérée sur ses services par l'ensemble des évaluations faites au cours de sa période de stage, ne peut sérieusement soutenir que ces appréciations reposeraient sur des faits matériellement inexacts.

5. En troisième lieu, il ressort des pièces du dossier que les manquements ci-dessus relevés ont, pour certains, donné lieu à des sanctions, le maire de Nachamps ayant infligé à M. C... un avertissement le 28 août 2012 pour avoir endommagé du matériel, puis un blâme le 23 novembre 2012 pour une absence injustifiée, l'absence de respect des instructions et l'utilisation d'un véhicule communal à des fins personnelles. Toutefois, les carences ci-dessus relevées dans la manière de servir, prises dans leur ensemble, caractérisent un comportement général insuffisant et révèlent une incapacité de M. C...à assumer les fonctions qui lui étaient confiées, lesquelles requièrent notamment une autonomie dans le travail. Ainsi, et contrairement à ce que soutient le requérant, le motif d'insuffisance professionnelle retenu par le maire de Nachamps pour prendre la décision litigieuse n'est pas entaché d'erreur de droit.

6. En quatrième lieu, la mesure de licenciement litigieuse, motivée, ainsi qu'il vient d'être dit, par un ensemble de faits caractérisant l'insuffisance professionnelle de M.C..., ne revêt pas un caractère disciplinaire et pouvait donc être prise sans mise en oeuvre d'une procédure contradictoire.

7. En cinquième lieu, eu égard aux carences ci-dessus relevées dans la manière de servir de M. C...durant son stage, le maire de Nachamps, à même d'apprécier la manière de servir du requérant durant son année de stage bien qu'elle ait été amputée d'un total de 41 jours de congés maladie, n'a pas commis d'erreur manifeste d'appréciation en prononçant le licenciement de l'intéressé. Ainsi que l'ont estimé les premiers juges, la circonstance que le travail de M. C... n'aurait pas fait l'objet d'appréciation défavorable au cours de la période précédant sa nomination en qualité de stagiaire, durant laquelle il exerçait ses fonctions comme agent contractuel, est sans incidence sur l'appréciation portée par l'autorité administrative quant à son comportement durant le stage précédant son éventuelle titularisation.

8. Enfin, si M. C...fait valoir que la décision de licenciement querellée procède, en réalité, du refus personnel du maire de Nachamps de le titulariser, le détournement de pouvoir ainsi allégué n'est pas établi.

9. Il résulte de ce qui précède que M. C...n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Poitiers a rejeté sa demande.

Sur l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

10. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de la commune de Nachamps, qui n'a pas dans la présente instance la qualité de partie perdante, le versement de quelque somme que ce soit au titre des frais exposés par M. C...et non compris dans les dépens. Il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire droit aux conclusions présentées par la commune de Nachamps sur le fondement des mêmes dispositions.

DECIDE :

Article 1er : La requête de M. C...est rejetée.

Article 2 : Les conclusions présentées par la commune de Nachamps sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. B...C...et à la commune de Nachamps.

Délibéré après l'audience du 1er mars 2018 à laquelle siégeaient :

M. Aymard de Malafosse, président,

M. Laurent Pouget, président-assesseur,

Mme Marie-Pierre Beuve Dupuy, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 29 mars 2018.

Le rapporteur,

Marie-Pierre BEUVE DUPUYLe président,

Aymard de MALAFOSSE

Le greffier,

Christophe PELLETIER

La République mande et ordonne au ministre d'Etat, ministre de l'intérieur en ce qui le concerne et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun, contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.

2

N° 16BX00275


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Bordeaux
Formation : 3ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 16BX00275
Date de la décision : 29/03/2018
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

Actes législatifs et administratifs - Validité des actes administratifs - Forme et procédure - Procédure consultative - Consultation obligatoire.

Fonctionnaires et agents publics - Cessation de fonctions - Licenciement - Stagiaires.


Composition du Tribunal
Président : M. DE MALAFOSSE
Rapporteur ?: Mme Marie-Pierre BEUVE-DUPUY
Rapporteur public ?: M. de la TAILLE LOLAINVILLE
Avocat(s) : SELARL P. BENDJEBBAR - O. LOPES

Origine de la décision
Date de l'import : 10/04/2018
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.bordeaux;arret;2018-03-29;16bx00275 ?
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