La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

29/03/2018 | FRANCE | N°16BX03839,16BX03840,17BX03496

France | France, Cour administrative d'appel de Bordeaux, 3ème chambre - formation à 3, 29 mars 2018, 16BX03839,16BX03840,17BX03496


Vu la procédure suivante :

Procédure antérieure :

MeA..., mandataire liquidateur de M. D...C..., a demandé au tribunal administratif de Toulouse de prononcer la réduction des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu auxquelles ce dernier a été assujetti au titre des années 2006 et 2007, à concurrence des sommes de 1 121 euros pour 2006 et de 7 542 euros pour 2007, et la réduction, à hauteur de 5 577 euros, de la cotisation primitive d'impôt sur le revenu qui lui a été assignée au titre de l'année 2008. Le directeur régional des finances publiques de Mi

di-Pyrénées a par ailleurs soumis d'office au tribunal, en vertu de l'article ...

Vu la procédure suivante :

Procédure antérieure :

MeA..., mandataire liquidateur de M. D...C..., a demandé au tribunal administratif de Toulouse de prononcer la réduction des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu auxquelles ce dernier a été assujetti au titre des années 2006 et 2007, à concurrence des sommes de 1 121 euros pour 2006 et de 7 542 euros pour 2007, et la réduction, à hauteur de 5 577 euros, de la cotisation primitive d'impôt sur le revenu qui lui a été assignée au titre de l'année 2008. Le directeur régional des finances publiques de Midi-Pyrénées a par ailleurs soumis d'office au tribunal, en vertu de l'article R. 199-1 du livre des procédures fiscales, la réclamation de Me A...tendant à la décharge des rappels de taxe sur la valeur ajoutée et des pénalités y afférentes mis à la charge de M. C...au titre de la période du 1er janvier 2006 au 31 décembre 2007.

Par un jugement n°s 1202922, 1300378 du 4 octobre 2016, le tribunal administratif de Toulouse a rejeté ces demandes.

Procédure devant la cour :

I) Par deux requêtes, enregistrées le 2 décembre 2016 sous les n°s 16BX03839 et 16BX03840, et des mémoires complémentaires enregistrés les 31 mars 2017, 7 août 2017 et 19 février 2018, MeA..., représenté par MeF..., demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Toulouse ;

2°) de prononcer la réduction des impositions contestées, à concurrence, en dernier lieu, de 10 332 euros au titre de l'année 2007 et de 4 777 euros au titre de l'année 2008.

3°) de mettre à la charge de l'Etat les frais d'instance, dont les droits d'enregistrement de 35 euros.

Il soutient que :

- M. C...est de bonne foi ;

- la somme de 15 500 euros créditée sur le compte BFCC le 13 juillet 2007 correspond à la cession à titre personnel du véhicule Citroën Picasso ; M. C...a racheté le leasing auprès de la société Coopamat et l'a revendu à la société Carrière ; tous les justificatifs utiles sont produits ; il ne s'agit donc pas d'une recette professionnelle ;

- les sommes portées sur la déclaration de revenus de 2008 pour un montant total de 27 950,73 euros ont en réalité été encaissées en 2007 mais n'ont pas été portées sur la déclaration rectificative pour 2007 car elles ont été incluses dans le redressement fiscal de 2007 ; la déclaration rectificative pour 2008 était jointe à la déclaration préalable et tous les justificatifs nécessaires ont été produits ; la différence entre le montant des sommes encaissées et celle retranscrite par le cabinet comptable sur la déclaration rectificative 2035 s'explique par une erreur matérielle dont le comptable atteste ; il y a donc une double imposition de ces sommes ;

- M. C...a réglé pour le compte de M. B...un certain nombre de factures au titre des années 2006 et 2007 ; il a tenté sans succès de se faire rembourser ces sommes ; c'est donc à juste titre qu'il les a déduites comme " avances clients ".

Par un mémoire en défense enregistré le 8 juin 2017, le ministre des finances et des comptes publics (direction spécialisée de contrôle fiscal Sud-ouest) conclut au rejet de la requête.

Il soutient que :

- les dégrèvements correspondant à la décharge décidée par le tribunal ont été prononcés et il n'y a donc plus de litige en ce qui concerne la cession du véhicule ; la requête n'est recevable, au regard des moyens soulevés, qu'en ce qui concerne les rehaussements correspondant aux avances clients de l'année 2007 et à la somme encaissée de 27 600 euros ;

- l'extrait du grand livre produit fait apparaître un montant de 23 076 euros hors taxe le 31 décembre 2008 et ne permet pas d'établir la double imposition alléguée ; le requérant ne produit aucune facture, le montant détaillé des sommes encaissées ne correspond pas à ce qui est affirmé et les justificatifs produits démontrent la régularité de la comptabilisation en 2007, année de leur encaissement ;

- il n'a jamais été démontré que les charges supplémentaires à déduire n'auraient pas été déduites au titre d'exercices antérieurs ; le requérant ne prouve pas que les sommes considérées constituent effectivement des avances à des clients ou n'auraient pas été remboursées, ni même qu'elles auraient un lien réel avec l'activité ; ainsi pour le clientB..., les documents produits ne permettent pas de confirmer la date à laquelle la créance serait devenue irrécouvrable.

II) Par une requête, enregistrée le 9 novembre 2017 sous le n° 17BX03496, et un mémoire en réplique enregistré le 1er décembre 2017, MeA..., liquidateur mandataire de M. D... C..., représenté par MeF..., demande à la cour, en référé, la désignation d'un expert comptable.

Il soutient que les factures, les relevés de compte et la comptabilité des années 2007 et 2008 pourront être utilement examinés par un expert impartial et objectif, aux fins d'éclairer la juridiction.

Par des mémoires enregistrés le 24 novembre 2017 et le 21 février 2018, le ministre des finances et des comptes publics (direction spécialisée de contrôle fiscal Sud-ouest) conclut au rejet de la requête, estimant qu'une telle expertise serait frustratoire et que la condition d'urgence n'est pas remplie.

Vu les autres pièces des dossiers.

Vu :

- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Laurent Pouget,

- les conclusions de M. Guillaume de La Taille Lolainville, rapporteur public,

- et les observations de MeF..., représentant Me A...mandataire liquidateur de M.C....

Considérant ce qui suit :

1. M. C...exerçait à Lanta (Haute-Garonne) une activité d'études et de conseil en agencement de magasins de bijouterie, optique et luminaires. Il a fait l'objet d'une vérification de comptabilité qui a porté sur les exercices clos en 2006 et 2007 en matière de bénéfices non commerciaux, et sur la période du 1er janvier 2006 au 31 décembre 2007 en matière de taxe sur la valeur ajoutée. A l'issue de ce contrôle, sa comptabilité a été rejetée comme non probante et le vérificateur a procédé à la reconstitution du chiffre d'affaires des exercices concernés. Il en est résulté des rehaussements, notifiés selon la procédure contradictoire pour les bénéfices non commerciaux et selon la procédure de taxation d'office pour la taxe sur la valeur ajoutée. Me A..., mandataire liquidateur de M.C..., a présenté plusieurs réclamations contre les impositions issues de ces rehaussements. Ces réclamations ont donné lieu de la part de l'administration à des décisions de rejet partiel, et le tribunal administratif de Toulouse a été saisi de demandes de Me A...tendant à la réduction des impositions restant en litige. Me A...relève appel, sous les n°s 16BX03839 et 16BX03840, du jugement de ce tribunal en date du 4 octobre 2016 en tant qu'il a rejeté ses demandes, sollicitant désormais la réduction des impositions assignées à M. C...en ce que, d'une part, celles-ci procèdent du refus de l'administration d'admettre des charges supplémentaires en déduction, pour un montant total de 30 728 euros et, d'autre part, en ce qu'elles aboutiraient à une double imposition d'un montant de recettes de 27 600 euros. Me A...sollicite en outre, sous le n° 17BX03496, que soit ordonnée, en référé, une expertise comptable portant sur cette dernière somme.

2. Les requêtes n°s 16BX03839, 16BX03840 et 17BX03496 concernent la même procédure d'imposition et ont fait l'objet d'une instruction commune. Il y a lieu de les joindre pour statuer par un même arrêt.

Sur le bien-fondé des impositions :

3. D'une part, aux termes de l'article 92 du code général des impôts : " 1. Sont considérés comme provenant de l'exercice d'une profession non commerciale ou comme revenus assimilés aux bénéfices non commerciaux, les bénéfices des professions libérales, des charges et offices dont les titulaires n'ont pas la qualité de commerçants et de toutes occupations, exploitations lucratives et sources de profits ne se rattachant pas à une autre catégorie de bénéfices ou de revenus. ". Et selon l'article 93 du même code : "1. Le bénéfice à retenir dans les bases de l'impôt sur le revenu est constitué par l'excédent des recettes totales sur les dépenses nécessitées par l'exercice de la profession (...) ".

4. D'autre part, en vertu de l'article R. 194-1 du livre des procédures fiscales, lorsque l'imposition a été établie d'après les bases indiquées dans la déclaration souscrite par le contribuable, ce dernier ne peut obtenir la décharge ou la réduction de cette imposition qu'à la condition d'en démontrer son caractère exagéré. M.C..., par des déclarations rectificatives jointes à sa réclamation préalable du 23 décembre 2010, a fait état de charges qu'il considère comme déductibles, pour des montants de 3 740 euros au titre de 2006 et de 26 988 euros au titre de 2007, et qui n'avaient été mentionnées ni dans ses déclarations initiales ni au cours des opérations de contrôle. Il a également demandé que soit retranché des revenus déclarés au titre de l'exercice clos en 2008 un montant de recettes de 27 600 euros, qui aurait selon lui été déjà imposé au titre de 2007. Il lui appartient dès lors, et sans qu'il puisse utilement invoquer sa bonne foi, de démontrer le caractère exagéré des impositions établies d'après les bases initialement déclarées.

En ce qui concerne les charges supplémentaires à déduire :

5. Il résulte de l'instruction que M. C...a notamment produit, à l'appui des déclarations rectificatives qu'il a déposées au titre des exercices clos en 2006 et 2007, une facture " Delzongle " du 21 avril 2006, une facture d'honoraires du 19 avril 2007 et un relevé de compte " Le Cadre Miroiterie " du 9 décembre 2005, dont il soutient qu'elles correspondent à des dépenses professionnelles qu'il avait omis de déclarer. Cependant, le libellé de la facture " Delzongle " ne permet pas d'établir qu'elle correspondrait à une dépense nécessitée par l'activité professionnelle de M.C.... Il en va de même des sommes correspondant au relevé de compte " Le Cadre Miroiterie ", alors qu'aucune facture originale n'a été produite à l'appui de ce relevé et que rien n'établit, au demeurant, la corrélation entre les sommes y figurant et les talons de chèques et relevés bancaires communiqués à l'administration en tant que pièces justificatives. Quant à la facture d'honoraires, il n'a pas été justifié par le contribuable de ce qu'elle n'aurait pas été déjà prise en compte dans sa déclaration initiale pour 2007. Le contribuable a également produit, ou s'est prévalu sans les produire, de factures " JB Fabrication ", " Néon France ", " Cojer Encastrables ", " Sedem France ", " Bati-Renov " et " Ferrari ", dont Me A...fait valoir qu'elles ont été acquittées par M. C...auprès de fournisseurs en lieu et place de certains de ses clients défaillants, et en particulier de M.B..., placé en redressement judiciaire. De telles avances de trésorerie au profit de clients ne peuvent cependant, par nature et en tout état de cause, être regardées comme nécessitées par l'exercice de la profession du contribuable, au sens des dispositions précitées de l'article 93 du code général des impôts. Dans ces conditions, Me A...n'établit pas que les impositions établies d'après les déclarations initiales de M. C...devraient être minorées à concurrence de la prise en comptes des charges supplémentaires déclarées le 23 décembre 2010.

En ce qui concerne les encaissements indûment déclarés au titre de 2008 :

6. Me A...fait valoir qu'une somme de 27 600 euros a été portée par erreur en recettes dans la déclaration de revenus initialement déposée au titre de l'année 2008, alors qu'elle correspond en réalité à des paiements effectués par le client "E... - Martres Optique " durant l'exercice clos en 2007, pour un montant total de 27 950,73 euros, qui ont été pris en compte par le vérificateur dans sa reconstitution des résultats de cet exercice. Il résulte en effet des factures, copies de chèques et bordereaux de remises de chèques produits par le requérant que M. C...a facturé en 2007 un certain nombre de prestations à l'entreprise de M.E..., laquelle lui a versé au cours de cette même année un règlement d'un montant sensiblement équivalent à la somme portée en comptabilité en 2008. Me A...produit par ailleurs, à l'appui de ses dires, deux attestations des experts comptables de M.C..., qui confirment être à l'origine de l'erreur d'inscription comptable et de déclaration en 2008, et qui expliquent en outre par une erreur matérielle la légère divergence de montants constatée. Dans ces conditions, et en l'absence de contestation sérieuse de ces éléments par l'administration, le requérant doit être regardé comme apportant la preuve qui lui incombe de la double imposition alléguée. Il est par suite fondé à solliciter la réduction, à due concurrence, de la cotisation primitive d'impôt sur le revenu qui lui a été assignée au titre de l'année 2008.

7. Il résulte de ce qui précède que Me A...est seulement fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Toulouse a rejeté ses demandes en tant qu'elles portent sur la réduction de sa cotisation primitive d'impôt sur le revenu pour 2008, à concurrence d'une réduction du montant brut de ses bénéfices non commerciaux de 27 600 euros.

Sur les conclusions à fin d'expertise :

8. Au regard de ce qui précède, l'expertise comptable sollicitée par le requérant apparaît dépourvue d'utilité. Par suite, les conclusions tendant à ce que soit ordonnée une telle expertise doivent être rejetées.

9. Dès lors que le présent arrêt se prononce au fond sur la demande d'expertise comptable de MeA..., les conclusions de la requête n° 17BX03496 tendant à la désignation d'un expert, en référé, sur le fondement de l'article R. 532-1 du code de justice administrative sont dépourvues d'objet. Il n'y a, en conséquence, pas lieu d'y statuer.

Sur les conclusions présentées en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

10. Dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu de mettre à la charge de l'Etat le versement à Me A...de la somme de 1 500 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

DECIDE :

Article 1er : Il n'y a pas lieu de statuer sur la requête n° 17BX03496 de MeA....

Article 2 : Il est accordé la décharge, en droits et majorations, de la cotisation primitive d'impôt sur le revenu assignée à M. C...au titre de l'année 2008, à concurrence de la réduction de 27 600 euros du montant brut des bénéfices non commerciaux.

Article 3 : Le jugement n°s 1202922, 1300378 du 4 octobre 2016 du tribunal administratif de Toulouse est réformé en ce qu'il a de contraire à l'article 2 ci-dessus.

Article 4 : L'Etat versera la somme de 1 500 euros à Me A...au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 5 : Le surplus des conclusions des requêtes n°s 16BX03839 et 16BX03840 est rejeté.

Article 6 : Le présent arrêt sera notifié à MeA..., mandataire liquidateur de M. D...C...et au ministre de l'action et des comptes publics.

Copie en sera adressée à M. D...C....

Délibéré après l'audience publique du 1er mars 2018 à laquelle siégeaient :

M. Aymard de Malafosse, président,

M. Laurent Pouget, président-assesseur,

Mme Marie-Pierre Beuve Dupuy, premier conseiller,

Lu en audience publique, le 29 mars 2018.

Le rapporteur,

Laurent POUGETLe président,

Aymard de MALAFOSSE Le greffier,

Christophe PELLETIER

La République mande et ordonne au ministre de l'action et des comptes publics en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.

6

N°s 16BX03839, 16BX03840, 17BX03496


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Bordeaux
Formation : 3ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 16BX03839,16BX03840,17BX03496
Date de la décision : 29/03/2018
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

19-04-02-05-02 Contributions et taxes. Impôts sur les revenus et bénéfices. Revenus et bénéfices imposables - règles particulières. Bénéfices non commerciaux. Détermination du bénéfice imposable.


Composition du Tribunal
Président : M. DE MALAFOSSE
Rapporteur ?: M. Laurent POUGET L.
Rapporteur public ?: M. de la TAILLE LOLAINVILLE
Avocat(s) : CABINET ROUMAGNAC

Origine de la décision
Date de l'import : 10/04/2018
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.bordeaux;arret;2018-03-29;16bx03839.16bx03840.17bx03496 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award