La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

28/06/2018 | FRANCE | N°16BX01066

France | France, Cour administrative d'appel de Bordeaux, 3ème chambre - formation à 3, 28 juin 2018, 16BX01066


Vu la procédure suivante :

Procédure antérieure :

Le syndicat des copropriétaires de la Villa Mai Tikia a demandé au tribunal administratif de Pau de condamner la commune de Pau à lui verser une indemnité de 26 071,07 euros en réparation des préjudices qu'il a subis du fait de la chute de la branche d'un arbre sur la toiture de l'immeuble situé 4 rue Edmond Rostand à Pau.

Par un jugement n° 1401228 du 27 octobre 2015, le tribunal administratif de Pau a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 29 mars 2016,

et un mémoire présenté le 12 décembre 2016, le syndicat des copropriétaires de la Villa Mai T...

Vu la procédure suivante :

Procédure antérieure :

Le syndicat des copropriétaires de la Villa Mai Tikia a demandé au tribunal administratif de Pau de condamner la commune de Pau à lui verser une indemnité de 26 071,07 euros en réparation des préjudices qu'il a subis du fait de la chute de la branche d'un arbre sur la toiture de l'immeuble situé 4 rue Edmond Rostand à Pau.

Par un jugement n° 1401228 du 27 octobre 2015, le tribunal administratif de Pau a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 29 mars 2016, et un mémoire présenté le 12 décembre 2016, le syndicat des copropriétaires de la Villa Mai Tikia, représenté par la SCP J. Bernadet, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Pau du 27 octobre 2015 ;

2°) de condamner la commune de Pau à lui verser une indemnité de 11 496,21 euros TTC en réparation des préjudices subis du fait de la chute de la branche d'un arbre sur la toiture de l'immeuble ;

3°) de mettre à la charge de la commune de Pau la somme de 2 500 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- le courrier de notification du 2 novembre 2015 a été retourné avec la mention " n'habite pas à l'adresse indiquée " ; or, le syndicat des copropriétaires ne peut avoir de domicile que dans l'immeuble qui porte le même nom ; les services postaux ont été défaillants en s'abstenant d'interroger les habitants de l'immeuble ; ainsi, les voies et délais de recours ne leur sont pas opposables ;

- la réalité de son préjudice est établie ;

- le rapport d'expertise amiable démontre que c'est la chute de l'arbre qui a endommagé la toiture de l'immeuble ; il en est de même du rapport interne établi le 25 juillet 2011 par le chef de service des espaces verts ; la commune ne produit aucun arrêté de catastrophe naturelle tendant à démontrer qu'il y aurait eu une tempête à cette date ; d'ailleurs, après le sinistre, le double alignement des tilleuls plantés sur cette voie a fait l'objet d'une taille de mise en sécurité ;

- les devis ont été établis dans le cadre d'expertises amiables et justifient le quantum du préjudice subi par le syndicat ; ce dernier n'était pas tenu de faire l'avance de l'intégralité des travaux ; il a toutefois mis en place des mesures conservatoires pour ne pas aggraver son préjudice ; la SARL CGCC est intervenue en urgence pour le bâchage de la toiture ; un devis actualisé devait être établi concernant les réparations nécessaires et directement imputables à la chute de l'arbre ; le devis qui chiffre les travaux à hauteur de 10 451,10 euros HT, soit 11 496,21 euros TTC, est conforme à l'estimation de l'expert amiable et correspond uniquement aux travaux rendus nécessaires par la chute de la branche sur une surface de 50 m² ;

- Mme C...agissant en qualité de représentante du syndic bénévole, les devis devaient lui être adressés ;

- n'a pas seulement été chiffré le coût de la location de la bâche mais également celui de sa pose et dépose.

Par des mémoires, enregistrés les 2 décembre 2016 et 15 février 2017, la commune de Pau, représentée par MeB..., demande à la cour : 1) de rejeter la requête du syndicat des copropriétaires de la Villa Mai Tikia ; 2) à titre subsidiaire, de retenir l'absence de qualité et d'intérêt du syndicat pour demander paiement des devis et factures communiqués et à titre infiniment subsidiaire, de constater le caractère excessif de l'indemnité réclamée ; 3) de mettre à la charge de ce syndicat de copropriétaires une somme de 3 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- la requête est tardive ; il n'est pas apporté la preuve que le courrier aurait été retourné au tribunal administratif ; la date à laquelle le jugement a été notifié n'est pas indiquée ;

- les désordres invoqués n'ont donné lieu à aucun constat amiable ; ainsi, il n'est pas établi que les désordres allégués soient imputables à la chute de la branche et qu'ils ne seraient pas imputables à la tempête qui a soufflé ce jour là ; aucune expertise n'a été diligentée par le syndicat des copropriétaires ;

- immédiatement après le sinistre, le syndicat sollicitait une somme de 1 253,61 euros en réparation des conséquences de celui-ci alors qu'il a, après 2014, demandé une indemnité de 26 071,07 euros ;

- le devis de réfection de la toiture daté du 15 novembre 2013 est postérieur de plus de deux ans et demi au sinistre ; ce devis porte sur la réfection de l'intégralité de la toiture, y compris de la charpente et la zinguerie, alors qu'il n'est pas établi que la chute de l'arbre aurait nécessité la reprise de l'intégralité de cette toiture ; le cabinet Saretec a d'ailleurs souligné que la copropriété lui avait demandé de chiffrer des prestations complémentaires en vue des travaux de ravalement envisagés ; or, ce devis constitue l'essentiel des sommes réclamées et le devis actualisé qui ne réduit pas les prestations de la requérante ne peut non plus être pris en compte ; lors de l'expertise amiable, à défaut de débachage de la toiture et de moyens d'accès sécurisé, le montant du préjudice matériel n'a pu être établi ; ainsi, il n'est pas établi que les travaux de charpente étaient nécessaires ni ceux sur la zinguerie, à défaut pour la surface de zinc d'avoir pu être vérifiée ; la requérante a en outre chiffré le coût de location de la bâche à 1 458,68 euros alors que celui-ci serait de 253,75 euros HT ;

- de même, les travaux de réfection de la peinture et du papier peint de l'appartement de Mme A...pour lesquels il est produit trois devis datés du 14 mai 2012 ne peuvent être reliés au sinistre du 21 février 2011 ;

- les devis produits et factures ne sont pas libellés au nom du syndicat des copropriétaires ; ceux relatifs à la réfection de la toiture sont au nom de MmeC..., ce qui ne permet donc pas d'établir qu'ils concernent effectivement la réfection de la toiture commune de l'immeuble ; Mme C...ne justifie d'ailleurs pas de sa qualité à agir pour le compte de ce syndicat ; il est en de même du devis actualisé.

Par une ordonnance du 17 février 2017, la clôture d'instruction a été fixée en dernier lieu au 2 mars 2017 à 12h00.

Vu les autres pièces des dossiers.

Vu :

- le code général de la propriété des personnes publiques ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Sabrina Ladoire,

- et les conclusions de M. Guillaume de La Taille Lolainville, rapporteur public.

Considérant ce qui suit :

1. A la suite d'une tempête survenue le 21 février 2011, la branche d'un tilleul est tombée sur la toiture d'un immeuble situé 4 avenue Edmond Rostand à Pau, et géré par le syndicat des copropriétaires de la Villa Mai Tikia. Ce syndicat relève appel du jugement n° 1401228 du 27 octobre 2015 par lequel le tribunal administratif de Pau a rejeté sa demande tendant à la condamnation de la commune de Pau à l'indemniser de son préjudice et sollicite à ce titre le versement d'une indemnité de 11 496,21 euros.

Sur la recevabilité de la requête :

2. Aux termes de l'article R. 811-1 du code de justice administrative : " Toute partie présente dans une instance devant le tribunal administratif ou qui y a été régulièrement appelée, alors même qu'elle n'aurait produit aucune défense, peut interjeter appel contre toute décision juridictionnelle rendue dans cette instance. (...) ". Selon l'article R. 811-2 du même code : " Sauf disposition contraire, le délai d'appel est de deux mois. Il court contre toute partie à l'instance à compter du jour où la notification a été faite à cette partie dans les conditions prévues aux articles R. 751-3 à R. 751-4-1. / Si le jugement a été signifié par huissier de justice, le délai court à dater de cette signification à la fois contre la partie qui l'a faite et contre celle qui l'a reçue. ". Enfin, aux termes de l'article R. 751-3 de ce code : " Sauf disposition contraire, les décisions sont notifiées le même jour à toutes les parties en cause et adressées à leur domicile réel, par lettre recommandée avec demande d'avis de réception, sans préjudice du droit des parties de faire signifier ces décisions par acte d'huissier de justice (...). ".

3. Il résulte de l'instruction, et notamment des accusés de réception produits au dossier, que le jugement attaqué du tribunal administratif de Pau du 27 octobre 2015 a été notifié, par lettre du greffe de ce tribunal datée du 2 novembre 2015, au syndicat des copropriétaires de la villa Mai Tikia, à l'adresse que celui-ci avait indiquée et qui correspondait à celle de l'immeuble endommagé. Toutefois, ce pli contenant le jugement a été retourné au greffe du tribunal le 6 novembre 2015 au motif que le destinataire était inconnu à l'adressée indiquée. Or, dès lors qu'il n'est pas allégué que le syndicat requérant aurait changé d'adresse, ni même que sa boîte aux lettres n'aurait pas été identifiable, ce dernier n'ayant pas été avisé du passage du préposé de la poste, la notification de ce jugement n'a pas été régulière. Il s'ensuit que la requête d'appel du syndicat des copropriétaires, enregistrée le 29 mars 2016, ne saurait être regardée comme tardive. Dès lors, la fin de non-recevoir ainsi invoquée ne peut qu'être rejetée.

Sur les demandes indemnitaires :

4. Le maître de l'ouvrage est responsable même en l'absence de faute, des dommages que les ouvrages publics, dont il a la garde, peuvent causer aux tiers, tant en raison de leur existence que de leur fonctionnement. Il ne peut s'exonérer de sa responsabilité que s'il établit que ces dommages résultent de la faute de la victime ou d'un cas de force majeure.

5. Il résulte de l'instruction, et en particulier du rapport établi par le chef du service technique de la commune de Pau le 25 juillet 2011, que l'arbre dont l'une des branches s'est abattue sur la toiture de l'immeuble situé au 4 rue Edmond Rostand à Pau le 21 février 2011, par vent fort, était implanté le long de cette voie publique, propriété de la commune de Pau. Ainsi, le syndicat des copropriétaires de l'immeuble avait la qualité de tiers à l'égard de cet ouvrage public que constitue l'arbre, accessoire de la voie publique. La commune de Pau peut ainsi voir sa responsabilité sans faute engagée à raison des préjudices en lien direct avec la chute de cette branche, à moins d'établir l'existence d'une faute de la victime ou un cas de force majeure. En l'espèce, si la commune soutient que la chute de cette branche serait consécutive à une tempête, il résulte du rapport d'expertise contradictoire établi le 10 juin 2015 que les conditions météorologiques du 21 février 2011 ne revêtaient pas un caractère exceptionnel, la vitesse maximale du vent s'étant élevée à 75,6 km/h. En outre, la commune n'invoque aucune faute qui serait imputable au syndicat des copropriétaires, victime de ce sinistre. Par suite, ce dernier est fondé à demander l'indemnisation de ses préjudices certains en lien direct avec la chute de la branche.

6. En appel, le syndicat requérant sollicite la condamnation de la commune de Pau à lui verser, non plus la somme de 23 535,83 euros qui correspondait au devis du 15 novembre 2013 concernant la réfection intégrale de la toiture, mais la somme de 11 496,21 euros TTC indiquée sur le dernier devis qui a été établi le 2 avril 2015. Si le rapport d'expertise amiable rédigé le 10 juin 2015 souligne qu'il n'a pu être procédé au chiffrage des travaux de nature à remédier aux désordres affectant la toiture, il relève que les différents participants à cette réunion expertale ont reconnu que la couverture en zinc du terrasson de la lucarne en versant Sud-Est avait été endommagée par la chute de la branche. Le syndicat des copropriétaires produit d'ailleurs, pour la première fois en appel, un devis établi le 2 avril 2015, qui porte précisément sur la " remise en état de la couverture en zinc " de l'immeuble en cause, qui chiffre le montant des travaux de réfection du " terrasson " à la somme de 11 496,21 euros TTC. En effet, selon ce même devis, la détérioration de la couverture en zinc au niveau de la lucarne implique une réfection totale du terrasson. Ainsi, les travaux énoncés dans ledit devis doivent être regardés comme correspondant effectivement à ceux nécessaires en vue de remédier aux dommages occasionnés par la chute de la branche en cause. En outre, la commune de Pau ne saurait se prévaloir utilement du fait que cette demande d'indemnisation se fonde sur un devis et non une facture et qu'il a au surplus été libellé au nom de MmeC..., syndic bénévole, et non de la copropriété, dès lors que les dépenses susévoquées présentent un caractère certain et devront nécessairement être supportées par le syndicat des copropriétaires. Dans ces conditions, le syndicat requérant, qui établit l'existence d'un préjudice futur et certain en lien direct avec la chute de la branche en cause, est fondé à demander la condamnation de la commune de Pau à lui verser une indemnité de 11 496,21 euros TTC en réparation de son préjudice matériel.

7. Il résulte de ce qui précède que le syndicat des copropriétaires de la villa Mai Tikia est fondé à soutenir que c'est à tort que par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Pau a rejeté sa demande.

Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

8. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge du syndicat des copropriétaires de la Villa Mai Tikia, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, quelque somme que ce soit au titre des frais exposés par la commune de Pau et non compris dans les dépens.

9. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de la commune de Pau une somme de 1 500 euros à verser au syndicat des copropriétaires de la Villa Mai Tikia en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

DECIDE :

Article 1er : Le jugement n° 1401228 du 27 octobre 2015 du tribunal administratif de Pau est annulé.

Article 2 : La commune de Pau versera au syndicat des copropriétaires de la Villa Mai Tikia une indemnité de 11 496,21 euros TTC.

Article 3 : La commune de Pau versera une somme de 1 500 euros au syndicat des copropriétaires de la Villa Mai Tikia en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : Le surplus des conclusions des parties est rejeté.

Article 5 : Le présent arrêt sera notifié au syndicat des copropriétaires de la Villa Mai Tikia et à la commune de Pau.

Délibéré après l'audience du 7 juin 2018, à laquelle siégeaient :

M. Aymard de Malafosse, président,

M. Laurent Pouget, président-assesseur,

Mme Sabrina Ladoire, premier conseiller,

Lu en audience publique, le 28 juin 2018.

Le rapporteur,

Sabrina LADOIRELe président,

Aymard de MALAFOSSELe greffier,

Christophe PELLETIER

La République mande et ordonne au ministre d'Etat, ministre de l'intérieur en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.

2

N° 16BX01066


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Bordeaux
Formation : 3ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 16BX01066
Date de la décision : 28/06/2018
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

67-02 Travaux publics. Règles communes à l'ensemble des dommages de travaux publics.


Composition du Tribunal
Président : M. DE MALAFOSSE
Rapporteur ?: Mme Sabrina LADOIRE
Rapporteur public ?: M. de la TAILLE LOLAINVILLE
Avocat(s) : SCP BERNADET

Origine de la décision
Date de l'import : 03/07/2018
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.bordeaux;arret;2018-06-28;16bx01066 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award