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04/12/2018 | FRANCE | N°16BX02897

France | France, Cour administrative d'appel de Bordeaux, 5ème chambre - formation à 3, 04 décembre 2018, 16BX02897


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

L'association " groupement citoyens alternative transport Réunion " (ATR-FNAUT) a demandé au tribunal administratif de La Réunion, d'une part, d'annuler l'arrêté du 19 décembre 2013 du ministre de l'écologie, du développement durable et de l'énergie et du ministre délégué en charge des transports, de la mer et de la pêche autorisant la région Réunion à déroger dans le cadre de la réalisation de la nouvelle route du littoral entre Saint-Denis et La Possession, aux interdictions de destruction, alt

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Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

L'association " groupement citoyens alternative transport Réunion " (ATR-FNAUT) a demandé au tribunal administratif de La Réunion, d'une part, d'annuler l'arrêté du 19 décembre 2013 du ministre de l'écologie, du développement durable et de l'énergie et du ministre délégué en charge des transports, de la mer et de la pêche autorisant la région Réunion à déroger dans le cadre de la réalisation de la nouvelle route du littoral entre Saint-Denis et La Possession, aux interdictions de destruction, altération ou dégradation de sites de reproduction ou d'aires de repos du grand dauphin commun (tursiops truncatus), ensemble la décision implicite de rejet du recours gracieux formé contre cet arrêté et, d'autre part, d'annuler la décision du 20 décembre 2013 du préfet de La Réunion autorisant la région Réunion à déroger, à une interdiction prévue à l'article L. 411-2 du code de l'environnement visant des espèces de mammifères marins et de tortues marines protégées, de reptiles terrestres protégés, de spécimens d'espèces d'insectes protégés, de spécimens d'espèces d'oiseaux protégés et d'annuler la décision implicite de rejet du recours gracieux formé contre cette décision.

Par un jugement n° 1400607, 1400608 du 26 mai 2016, le tribunal administratif de La Réunion a rejeté ses demandes.

Procédure devant la cour :

Par une requête et un mémoire, enregistrés le 24 août 2016 et le 22 mai 2017, l'association " groupement citoyens alternative transport Réunion " (ATR-FNAUT), représentée par MeA..., demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du 26 mai 2016 du tribunal administratif de La Réunion ;

2°) d'annuler l'arrêté du 19 décembre 2013 du ministre de l'écologie, du développement durable et de l'énergie et du ministre délégué en charge des transports, de la mer et de la pêche accordant à la région Réunion une dérogation au titre de la nouvelle liaison routière ;

3°) d'annuler la décision du 20 décembre 2013 du préfet de La Réunion portant dérogation en faveur de la Région Réunion à une interdiction prévue à l'article L. 411-2 du code de l'environnement concernant les espèces protégées ;

4°) de mettre à la charge de la région Réunion la somme de 8 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- en ce qui concerne la recevabilité de sa demande, au regard de son objet social défini à l'article 2 de ses statuts qui l'autorise à contester le nouveau mode de déplacement à La Réunion résultat du choix de la nouvelle route du littoral, elle a intérêt à contester les arrêtés attaqués ; elle est par ailleurs régulièrement représentée en justice par son président qui a reçu mandat à cette fin du conseil d'administration de l'association ;

- les décisions attaquées sont entachées, par la voie de l'exception, de l'illégalité de l'arrêté du 7 mars 2012 par lequel le préfet a déclaré d'utilité publique le projet de construction de la nouvelle route du littoral ; cet arrêté méconnaît en effet les dispositions de la loi littorale codifiée à l'article L. 146-7 du code de l'urbanisme et est entaché d'erreur manifeste d'appréciation dès lors qu'il existait d'autres tracés présentant un meilleur bilan coût/avantages ;

- la consultation du public qui s'est déroulée du 30 octobre au 30 novembre 2012 est irrégulière ;

- l'étude d'impact est insuffisante dès lors que le projet porte atteinte à l'environnement et que le maintien de l'état de conservation favorable des espèces n'est pas assuré ;

- les décisions attaquées sont entachées d'erreurs de motifs en droit et en fait ; le projet ne présente pas le caractère d'intérêt public majeur ; il existait d'autres solutions alternatives satisfaisantes.

Par deux mémoires en défense, enregistrés le 13 avril 2017 et le 26 mai 2017, la région Réunion conclut au rejet de la requête et à ce que la somme de 8 000 euros soit mise à la charge de l'association requérante sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- à titre principal, les conclusions de la requête tendant à l'annulation des décisions contestées sont irrecevables au motif que l'association " groupement citoyens alternative transport Réunion " (ATR-FNAUT) n'a pas d'intérêt lui donnant qualité pour agir ; en effet, au regard de son objet social tel que défini dans ses statuts, l'association requérante ne justifie pas d'un intérêt à agir suffisamment direct pour contester les décisions en litige ; l'association constitue une association de représentation et de défense des intérêts des usagers des transports réunionnais ; or, la Nouvelle Route du Littoral (NRL) ne constitue pas un nouveau mode de déplacement, pas plus qu'elle n'induit ou n'appelle un nouveau mode de déplacement à La Réunion ;

- à titre subsidiaire, les moyens soulevés ne sont pas fondés.

Par un mémoire, enregistré le 29 mai 2017, le ministre d'Etat, ministre de la transition écologique et solidaire, conclut au rejet de la requête.

Il soutient que les conclusions de la requête tendant à l'annulation des décisions contestées sont irrecevables au motif que l'association " groupement citoyens alternative transport Réunion " (ATR-FNAUT) n'a pas d'intérêt lui donnant qualité pour agir et que les moyens soulevés ne sont pas fondés.

Par ordonnance du 29 mai 2017, la clôture d'instruction a été fixée, en dernier lieu, au 3 juillet 2017 à 12h00.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code de l'environnement ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Florence Madelaigue,

- les conclusions de M. Guillaume de La Taille Lolainville, rapporteur public,

- et les observations de MeC..., représentant l'association " groupement citoyens alternative transport Réunion ", et de MeB..., représentant la Région Réunion.

Considérant ce qui suit :

1. Par un arrêté du 19 décembre 2013, le ministre de l'écologie, du développement durable et de l'énergie et le ministre délégué en charge des transports, de la mer et de la pêche, ont autorisé la région Réunion à déroger aux interdictions de destruction, altération ou dégradation de sites de reproduction ou d'aires de repos du grand dauphin commun (tursiops truncatus) dans le cadre de la réalisation d'une nouvelle liaison routière sécurisée entre Saint-Denis et La Possession. Par une décision du 20 décembre 2013, le préfet de La Réunion a autorisé la région Réunion à déroger à une interdiction prévue à l'article L. 411-2 du code de l'environnement concernant des espèces de mammifères marins, de tortues marines protégées, de reptiles terrestres protégés, de spécimens d'espèces d'insectes protégés, de spécimens d'espèces d'oiseaux protégés. L'association ATR-FNAUT relève appel du jugement n° 1400607, 1400608 du 26 mai 2016 du tribunal administratif de La Réunion en tant qu'il a rejeté ses demandes tendant à l'annulation de ces arrêtés.

2. L'arrêté interministériel et la décision du préfet de La Réunion en litige ont été pris sur le fondement des dispositions des articles L. 411-2 et R. 414-1 et suivants du code de l'environnement qui habilitent l'Etat à délivrer des dérogations aux interdictions de destruction ou d'enlèvement des oeufs ou des nids, de mutilation, de destruction, de perturbation intentionnelle, ainsi que de destruction, d'altération ou de dégradation des habitats d'espèces animales protégées, à condition que le projet réponde de par sa nature et compte tenu notamment du projet urbain dans lequel il s'inscrit, à une raison impérative d'intérêt public majeur, qu'il n'existe pas d'autre solution satisfaisante et que la dérogation ne nuise pas au maintien, dans un état de conservation favorable, des populations des espèces concernées dans leur aire de répartition naturelle. Ces décisions ont donc pour seul objet d'encadrer les dérogations au principe d'interdiction de la capture ou de la destruction des espèces protégées édicté par le législateur posé à l'article L. 411-1 du code de l'environnement.

3. Aux termes de l'article 2 de ses statuts, l'association ATR-FNAUT a pour objet " d'assurer la représentation et la défense des usagers des transports à La Réunion auprès des entreprises de transport public, des pouvoirs publics, des collectivités territoriales, des médias et de tous organismes publics ou privés. / de participer à l'amélioration de la qualité et de la sécurité des transports publics. / de promouvoir l'usage des transports publics pour assurer les déplacements à La Réunion par tous moyens. / de favoriser les déplacements des piétons et des cycles en coordination avec les transports collectifs. / de favoriser un aménagement équilibré du territoire et un développement durable, protéger l'environnement local et global, améliorer le cadre de vie et le paysage urbain, suburbain et naturel, réduire les gaspillages économiques liés aux déplacements à La Réunion. / d'assurer les relations avec la Fédération Nationale des Associations d'Usagers des Transports. / de prendre part au débat public sur la politique des transports de toutes natures. (...) ".

4. L'association requérante, membre de la Fédération Nationale des Associations d'Usagers des Transports, s'est donnée pour but, aux termes de ses statuts, de promouvoir l'usage des transports publics, de participer à l'amélioration de la qualité et de la sécurité de ces transports et de défendre le droit des usagers des transports à La Réunion, dans le respect notamment du développement durable, de l'environnement et du cadre de vie. L'objet que ses statuts assignent ainsi à l'association ne lui confèrent pas un intérêt suffisamment direct lui donnant qualité pour demander l'annulation de décisions dont l'objet est d'autoriser, pour la réalisation des travaux de la nouvelle route du littoral, des dérogations à l'interdiction de destruction d'espèces protégées et à l'interdiction de dégradation de leurs habitats, prises au titre de la police spéciale édictée par le code de l'environnement, lesquelles n'ont par elles-mêmes ni pour objet ni pour effet d'arrêter ou d'orienter des choix en matière de mobilités. Par suite, c'est à bon droit que le tribunal administratif de La Réunion a accueilli la fin de non-recevoir opposée par le préfet de La Réunion et tirée du défaut d'intérêt à agir de l'association ATR-FNAUT.

5. Il résulte de ce qui précède que l'association ATR-FNAUT n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de La Réunion a rejeté ses demandes.

Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

6. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mis à la charge de l'Etat, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, le versement d'une quelconque somme à l'association ATR-FNAUT au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens. Dans les circonstances de l'espèce, il n'y a pas lieu de faire droit aux conclusions du préfet de La Réunion présentées sur le fondement de ces mêmes dispositions.

DECIDE :

Article 1er : La requête de l'association " groupement citoyens alternative transport Réunion " (ATR-FNAUT) est rejetée.

Article 2 : Les conclusions du préfet de La Réunion tendant au bénéfice de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à l'association " groupement citoyens alternative transport Réunion " (ATR-FNAUT), à la région Réunion, au ministre d'Etat, ministre de la transition écologique et solidaire et au ministre des outre-mer. Une copie en sera adressée au préfet de La Réunion.

Délibéré après l'audience du 20 novembre 2018 à laquelle siégeaient :

Mme Elisabeth Jayat, président,

M. Frédéric Faïck, premier conseiller,

Mme Florence Madelaigue, premier conseiller,

Lu en audience publique, le 4 décembre 2018.

Le rapporteur,

Florence MadelaigueLe président,

Elisabeth JayatLe greffier,

Florence Deligey

La République mande et ordonne au ministre d'Etat, ministre de la transition écologique et solidaire en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.

2

N° 16BX02897


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Bordeaux
Formation : 5ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 16BX02897
Date de la décision : 04/12/2018
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

Associations et fondations - Questions communes - Contentieux - Intérêt pour agir.

Associations et fondations - Régime juridique des différentes associations - Associations reconnues d'utilité publique - Objet et buts.


Composition du Tribunal
Président : Mme JAYAT
Rapporteur ?: Mme Florence MADELAIGUE
Rapporteur public ?: M. de la TAILLE LOLAINVILLE
Avocat(s) : SCP HURMIC - KACI

Origine de la décision
Date de l'import : 11/12/2018
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.bordeaux;arret;2018-12-04;16bx02897 ?
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