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31/12/2018 | FRANCE | N°16BX03850

France | France, Cour administrative d'appel de Bordeaux, 3ème chambre - formation à 3, 31 décembre 2018, 16BX03850


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société Papeteries du Poitou a demandé au tribunal administratif de Poitiers de lui accorder la décharge des suppléments de cotisation foncière des entreprises auxquels elle a été assujettie au titre des années 2010 à 2012.

Par un jugement n° 1402050 du 22 novembre 2016, le tribunal administratif de Poitiers a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 7 décembre 2016 et des mémoires enregistrés le 19 juillet 2017 et le 16 mars 2018, la soc

iété Papeteries du Poitou, représentée par Me A..., demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société Papeteries du Poitou a demandé au tribunal administratif de Poitiers de lui accorder la décharge des suppléments de cotisation foncière des entreprises auxquels elle a été assujettie au titre des années 2010 à 2012.

Par un jugement n° 1402050 du 22 novembre 2016, le tribunal administratif de Poitiers a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 7 décembre 2016 et des mémoires enregistrés le 19 juillet 2017 et le 16 mars 2018, la société Papeteries du Poitou, représentée par Me A..., demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Poitiers du 22 novembre 2016 ;

2°) de lui accorder la décharge des impositions et pénalités contestées ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 4 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- l'article 1469 3° quater du code général des impôts ayant été abrogé à compter du 1er janvier 2010, date à partir de laquelle la cotisation foncière des entreprises s'est substituée à la taxe professionnelle, l'administration n'a pu légalement lui opposer, pour déterminer la valeur locative des locaux professionnels servant de base aux impositions litigieuses, la règle dite du maintien du prix de revient initial résultant dudit article ;

- contrairement à ce qu'a estimé le tribunal administratif, le point 6.1.33 de l'article 2 de la loi n° 2009-1673 du 30 décembre 2009 n'a eu ni pour objet ni pour effet de faire subsister la règle du maintien du prix de revient initial en dépit de son abrogation.

Par des mémoires enregistrés le 1er juin 2016 et le 21 février 2018, le ministre de l'action et des comptes publics (direction de contrôle fiscal Sud-ouest) conclut au rejet de la requête. Il soutient que les moyens invoqués par la société Papeteries du Poitou ne sont pas fondés.

Par une ordonnance du 16 mars 2018, la clôture d'instruction a été fixée en dernier lieu au 4 avril 2018 à 12h00.

Vu :

- les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Aymard de Malafosse,

- et les conclusions de Mme Déborah de Paz, rapporteur public.

Considérant ce qui suit :

1. La société Papeteries du Poitou, qui a pour activité la fabrication de papiers et cartons, a cédé le 10 décembre 2003 ses locaux industriels à la société Slibail Immobilier et a souscrit avec cette société, le même jour, un contrat de crédit-bail immobilier portant sur ces mêmes locaux. La société Slibail a été absorbée, par un acte du 14 décembre 2006 complété par un acte du 18 janvier 2008, par la société Finamur, filiale comme elle à 99,99 % de la société Crédit Agricole Leasing et Factoring. A l'issue d'une vérification de comptabilité, le service des impôts, constatant que les deux sociétés qui avaient fusionné étaient liées et que le transfert de propriété était resté sans incidence quant aux locaux qui continuaient à être exploités par la société Papeteries du Poitou, a estimé que le prix de revient des biens cédés devait, en vertu des dispositions du 3° quater de l'article 1469 du code général des impôts, être maintenu à sa valeur antérieure à la cession. Il en est résulté des rehaussements des valeurs locatives de ces biens et, partant, l'établissement d'impositions supplémentaires de cotisation foncière des entreprises au titre des années 2010, 2011 et 2012. La société Papeteries du Poitou fait appel du jugement du tribunal administratif de Poitiers du 22 novembre 2016 rejetant sa demande en décharge de ces impositions.

2. Aux termes de l'article 1467 du code général des impôts, dans sa rédaction applicable à compter du 1er janvier 2010 : " La cotisation foncière des entreprises a pour base : 1° la valeur locative des biens passibles d'une taxe foncière situés en France (...) dont le redevable a disposé pour les besoins de son activité professionnelle pendant la période de référence définie aux articles 1467 A et 1478, à l'exception de ceux qui ont été détruits ou cédés au cours de la même période (...) La valeur locative des biens passibles d'une taxe foncière est calculée suivant les règles fixées pour l'établissement de cette taxe. Pour le calcul de l'impôt, la valeur locative des immobilisations industrielles définie à l'article 1499 est diminuée de 30 % (...) ". Aux termes de l'article 1499 du même code : " La valeur locative des immobilisations industrielles passibles de la taxe foncière sur les propriétés bâties est déterminée en appliquant au prix de revient de leurs différents éléments, revalorisé à l'aide des coefficients qui avaient été prévus pour la révision des bilans, des taux d'intérêt fixés par décret en Conseil d'Etat (...) ".

3. Aux termes de l'article 1469 du code général des impôts, dans sa version issue de la loi du 30 décembre 2004 de finances rectificative pour 2004 : " La valeur locative est déterminée comme suit : / (...) 3° quater. Le prix de revient d'un bien cédé n'est pas modifié lorsque ce bien est rattaché au même établissement avant et après la cession et lorsque, directement ou indirectement : / a. l'entreprise cessionnaire contrôle l'entreprise cédante ou est contrôlée par elle ;/ b. ou ces deux entreprises sont contrôlées par la même entreprise (...) ". Aux termes de l'article 1518 B du même code : " A compter du 1er janvier 1980, la valeur locative des immobilisations corporelles acquises à la suite d'apports, de scissions, de fusions de sociétés ou de cessions d'établissements réalisés à partir du 1er janvier 1976 ne peut être inférieure aux deux tiers de la valeur locative retenue l'année précédant l'apport, la scission, la fusion ou la cession (...)Pour les opérations (...) réalisées à compter du 1er janvier 1992, la valeur locative des immobilisations corporelles ne peut être inférieure aux quatre cinquièmes de son montant avant l'opération (...) ".

4. Les dispositions du 3° quater de l'article 1469 du code général des impôts ont été abrogées à compter du 1er janvier 2010 par l'article 2 de la loi du 30 décembre 2009 de finances pour 2010, qui a supprimé la taxe professionnelle et instauré la contribution économique territoriale. Cet article précise, au point 6.1.33, que : " Pour l'application de l'article 1518 B du code général des impôts en 2010, la valeur locative des immobilisations corporelles retenue l'année précédant l'une des opérations mentionnées à cet article s'entend de la valeur locative retenue pour le calcul de la taxe professionnelle des seuls biens passibles de taxe foncière, à l'exclusion des biens exonérés de taxe foncière sur les propriétés bâties en application des 11° et 12° de l'article 1382 du même code ". Elles ont toutefois été reprises à l'article 1518 B du code général des impôts, en application du O du I de l'article 108 de la loi du 29 décembre 2010 de finances pour 2011, qui dispose au 1, que " Par exception aux cinquième et sixième alinéas, pour les opérations réalisées à compter du 1er janvier 2011 et mentionnées au premier alinéa ou au sixième alinéa, la valeur locative des immobilisations corporelles ne peut être inférieure à : / 1° 100 % de son montant avant l'opération lorsque, directement ou indirectement, l'entreprise cessionnaire ou bénéficiaire de l'apport contrôle l'entreprise cédante, apportée ou scindée ou est contrôlée par elle, ou ces deux entreprises sont contrôlées par la même entreprise (...) " et, au 2, que : " Pour la détermination de la valeur locative servant de base à la cotisation foncière des entreprises, les dispositions de l'article 1518 B du code général des impôts telles qu'elles résultent du 1 s'appliquent à compter du 1er janvier 2010 et les dispositions de l'avant-dernier alinéa de cet article résultant du 1 s'appliquent aux immobilisations cédées à compter du 1er janvier 2010 ".

5. D'une part, les dispositions du 3° quater de l'article 1469 du code général des impôts, qui posaient la règle du maintien du prix de revient d'un bien cédé, pour les opérations de fusion d'entreprises liées, ont été abrogées à compter du 1er janvier 2010. Si l'avant-dernier alinéa de l'article 1518 B du code général des impôts, dans sa rédaction issue de la loi de finances pour 2011, reprend ces dispositions, il n'est pas applicable aux immobilisations cédées, comme en l'espèce, avant le 1er janvier 2010. D'autre part, si le point 6.1.33 de l'article 2 de la loi de finances pour 2010 prévoit que, pour l'application, en 2010, de l'article 1518 B du code général des impôts, la valeur locative des immobilisations corporelles retenue l'année précédant l'une des opérations mentionnées à cet article s'entend de la valeur locative retenue pour le calcul de la taxe professionnelle des seuls biens passibles de la taxe foncière, à l'exclusion des biens exonérés de taxe foncière sur les propriétés bâties en application des 11° et 12° de l'article 1382 du même code, ces dispositions n'ont ni pour objet ni pour effet de permettre le maintien de l'application à des immobilisations cédées avant le 1er janvier 2010 des dispositions du 3° quater de l'article 1469 du même code, abrogées au point 6.1.34 du même article 2.

6. Il résulte de tout ce qui précède que les rehaussements litigieux sont dépourvus de base légale. Il s'ensuit que la société Papeteries du Poitou est fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Poitiers a rejeté sa demande en décharge.

7. Il y a lieu de mettre à la charge de l'Etat, partie perdante dans la présente instance, le versement à la société Papeteries du Poitou de la somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

DECIDE :

Article 1er : Le jugement n° 1402050 du 22 novembre 2016 du tribunal administratif de Poitiers est annulé.

Article 2 : Il est accordé décharge à la société Papeteries du Poitou des suppléments de cotisation foncière des entreprises auxquels elle a été assujettie au titre des années 2010, 2011 et 2012, soit un montant total, en droits et pénalités, de 37 639 euros.

Article 3 : L'Etat versera à la société Papeteries du Poitou la somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à la société Papeteries du Poitou et au ministre de l'action et des comptes publics.

Délibéré après l'audience du 13 décembre 2018 à laquelle siégeaient :

M. Aymard de Malafosse, président,

M. Laurent Pouget, président-assesseur,

M. David Katz, premier conseiller,

Lu en audience publique, le 31 décembre 2018.

Le président-assesseur,

Laurent POUGETLe président-rapporteur,

Aymard de MALAFOSSE Le greffier,

Christophe PELLETIER

La République mande et ordonne au ministre de l'action et des comptes publics en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.

5

N° 16BX03850


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Bordeaux
Formation : 3ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 16BX03850
Date de la décision : 31/12/2018
Type d'affaire : Administrative

Analyses

19-03-045-03-01 Contributions et taxes. Impositions locales ainsi que taxes assimilées et redevances.


Composition du Tribunal
Président : M. DE MALAFOSSE
Rapporteur ?: M. Aymard DE MALAFOSSE
Rapporteur public ?: Mme DE PAZ
Avocat(s) : CABINET D'AVOCAT RGM (ROUME-GUTTON-MOAYED)

Origine de la décision
Date de l'import : 04/01/2019
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.bordeaux;arret;2018-12-31;16bx03850 ?
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