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08/02/2019 | FRANCE | N°16BX01883

France | France, Cour administrative d'appel de Bordeaux, 4ème chambre - formation à 3, 08 février 2019, 16BX01883


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La commune de Régina a demandé au tribunal administratif de la Guyane de condamner solidairement M. B...et la SARL Sigma ingénierie à lui payer la somme de 232 452,68 euros en réparation du préjudice qu'elle estime avoir subi. M. B...et la SARL Sigma ingénierie ont demandé la condamnation de la commune à leur payer à chacun la somme de 20 000 euros en réparation du préjudice qu'ils estiment avoir subis.

Par un jugement n° 1401182 du 7 avril 2016, le tribunal administratif de la Guyane a rejeté

l'ensemble de ces demandes.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregist...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La commune de Régina a demandé au tribunal administratif de la Guyane de condamner solidairement M. B...et la SARL Sigma ingénierie à lui payer la somme de 232 452,68 euros en réparation du préjudice qu'elle estime avoir subi. M. B...et la SARL Sigma ingénierie ont demandé la condamnation de la commune à leur payer à chacun la somme de 20 000 euros en réparation du préjudice qu'ils estiment avoir subis.

Par un jugement n° 1401182 du 7 avril 2016, le tribunal administratif de la Guyane a rejeté l'ensemble de ces demandes.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 8 juin 2016, des mémoires complémentaires, enregistrés respectivement le 22 mai 2017 et le 19 juillet 2017, et des pièces complémentaires, enregistrées le 30 novembre 2018, la commune de Régina, représentée par MeC..., demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de la Guyane du 7 avril 2016 ;

2°) de condamner M. B...et la SARL Sigma ingénierie à lui payer la somme de

232 452, 68 euros, assortie des intérêts au taux légal ;

3°) de mettre à la charge de M. B...et de la SARL Sigma ingénierie une somme de

5 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

4°) de rejeter la demande indemnitaire de La mutuelle des architectes français.

Elle soutient que :

- le dommage étant survenu avant la réception des travaux, les maîtres d'oeuvre engagent leur responsabilité contractuelle ;

- les maîtres d'oeuvre ont commis une faute dans la direction et la surveillance des travaux ;

- les maîtres d'oeuvre ont manqué à leur obligation de conseil ;

- son choix d'une charpente en bois ne saurait exonérer les maîtres d'oeuvre de leur responsabilité ;

- les maîtres d'oeuvre ont manqué à leur devoir de conseil envers l'entreprise en charge des travaux ;

- l'architecte a manqué à ses obligations déontologiques ;

- les maîtres d'oeuvre doivent être condamnés à réparer l'intégralité des dommages subis par la commune ;

- la cause unique du dommage réside dans l'absence d'ancrage de la structure qui s'est effondrée ;

- la commune a payé l'intégralité du marché et a été exposée à des surcoûts ;

- elle n'a formulé aucune demande ni aucun grief à l'encontre de La mutuelle des architectes français ;

- le mémoire en défense de la SARL Sigma ingénierie est irrecevable ;

- la maîtrise d'oeuvre n'a pas respecté les articles 9, 10, 11, 15 du décret n° 93-1268.

Par un mémoire, enregistré le 24 mars 2017, La mutuelle des architectes français, représentée par MeD..., conclut, à titre principal, à l'incompétence de la juridiction administrative pour toute demande formulée à son encontre, à titre subsidiaire, au rejet de toute demande tendant à ce qu'elle garantisse M.B..., à la condamnation de la commune de Régina à lui payer la somme de 5 000 euros à titre de dommages et intérêts et à ce que soit mise à la charge de la commune de Régina une somme de 4 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle fait valoir que :

- la juridiction administrative est incompétente pour statuer sur toute demande à son encontre ;

- elle n'est pas l'assureur de la SARL Sigma ingénierie ;

- si M. B...a souscrit une police d'assurance auprès d'elle, il n'a pas déclaré le chantier en litige et ne peut donc être garanti par elle ;

- l'entreprise responsable des travaux a reconnu son entière responsabilité ;

- la commune n'articule aucune demande à son encontre.

Par des mémoires, enregistrés respectivement le 8 juin 2017 et le 12 août 2017, la SARL Sigma ingénierie, représentée par MeE..., conclut au rejet de la requête et à ce que soit mise à la charge de la commune de Régina une somme de 3 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle fait valoir que :

- chargée d'une mission de base, elle a parfaitement rempli son obligation contractuelle de direction et de surveillance des travaux ;

- la cause du sinistre est un défaut de mise en oeuvre de la charpente par un sous-traitant et non l'existence de défaillance des points d'ancrage de la structure qui s'est effondrée ;

- le dommage est entièrement imputable à l'entreprise ;

- elle s'est acquittée de son obligation d'information du maître d'ouvrage ;

- la commune ne saurait se prévaloir d'une prétendue obligation de conseil du maître d'oeuvre vis-à-vis de l'entrepreneur ; en tout état de cause, elle a identifié les manquements, les a signalés et a émis des prescriptions ;

- les dispositions du code de déontologie des architectes constituent seulement le versant déontologique des obligations contractuelles s'imposant aux maîtres d'oeuvre chargés d'une mission de base.

Par des mémoires, enregistrés le 8 juin 2017 et les 12 et 24 août 2017, et des pièces complémentaires, enregistrées le 28 novembre 2018, M. A...B..., représenté par MeE..., conclut au rejet de la requête et à ce que soit mise à la charge de la commune de Régina une somme de 3 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il fait valoir que :

- chargé d'une mission de base, il a parfaitement rempli son obligation contractuelle de direction et de surveillance des travaux ;

- la cause du sinistre est un défaut de mise en oeuvre de la charpente par un sous-traitant et non l'existence de défaillance des points d'ancrage de la structure qui s'est effondrée ;

- le dommage est entièrement imputable à l'entreprise ;

- il s'est acquitté de son obligation d'information du maître d'ouvrage ;

- la commune ne saurait se prévaloir d'une prétendue obligation de conseil du maître d'oeuvre vis-à-vis de l'entrepreneur ; en tout état de cause, il a identifié les manquements, les a signalés et a émis des prescriptions ;

- les dispositions du code de déontologie des architectes constituent seulement le versant déontologique des obligations contractuelles s'imposant aux maîtres d'oeuvre chargés d'une mission de base.

Par ordonnance du 20 juin 2017, la clôture de l'instruction a été fixée en dernier lieu au 25 juillet 2017 à 12h00.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la loi n° 85-704 du 12 juillet 1985 relative à la maîtrise d'ouvrage publique et à ses rapports avec la maîtrise d'oeuvre privée ;

- le décret n° 93-1268 du 29 novembre 1993 relatif aux missions de maîtrise d'oeuvre confiées par des maîtres d'ouvrage publics à des prestataires de droit privé ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Romain Roussel, premier conseiller,

- et les conclusions de Mme Sabrina Ladoire, rapporteur public.

Considérant ce qui suit :

1. En vue de la réalisation de la couverture de son plateau sportif, la commune de Régina a confié la maîtrise d'oeuvre à M.B..., architecte, et à la SARL Sigma ingénierie. Le 4 octobre 2009, avant réception des travaux, la construction s'est effondrée. La commune de Régina relève appel du jugement du 7 avril 2016 par lequel le tribunal administratif de la Guyane a rejeté sa demande tendant à la condamnation de M. B...et de la SARL Sigma ingénierie à lui payer la somme de 232 452, 68 euros. La mutuelle des architectes français demande que la commune de Régina soit condamnée à lui payer la somme de 5 000 euros à titre de dommages et intérêts.

Sur la recevabilité des écritures produites pour la SARL Sigma ingénierie :

2. La seule circonstance que le mémoire présenté pour la SARL Sigma ingénierie contient une erreur de plume dans ses conclusions n'est pas de nature à le rendre irrecevable.

Sur les conclusions indemnitaires présentées par la commune de Régina :

3. Il résulte de l'instruction, en particulier du compte rendu de contrôle technique effectué par le bureau Veritas le 4 octobre 2010, que l'effondrement, le 4 octobre 2009, de la structure en cours de réalisation est dû à l'absence de scellement des tiges d'ancrage et que les massifs de fondation ne présentaient aucun désordre visible.

4. Par courrier du 7 octobre 2009, la SARL BSM a reconnu être entièrement responsable de l'effondrement de la construction en cours de réalisation. Il ne résulte pas de l'instruction que cette société n'aurait pas supporté l'indemnisation de l'ensemble des préjudices subis par la commune. Dans ces conditions, la commune ne justifie pas de la réalité d'un préjudice restant à indemniser et dont la charge devrait être supportée par les maîtres d'oeuvre.

5. Il résulte également de l'instruction que préalablement à la survenance du désordre, les maîtres d'oeuvre avaient demandé à la SARL BSM, en charge du gros-oeuvre, de " prendre des dispositions urgentes pour sceller les portiques et les maintenir en toute sécurité ", de " bloquer en pied " la jambe de force de maintien et de faire preuve d'une " plus grande mobilisation sur le chantier ".

6. Il ne résulte donc pas de l'instruction que M. B...et la SARL Sigma ingénierie auraient manqué à l'une de leurs obligations de maître d'oeuvre.

7. Dans ces conditions, les conclusions indemnitaires de la commune de Régina doivent être rejetées.

Sur les conclusions incidentes de La mutuelle des architectes français :

8. La mutuelle des architectes français ne justifie pas du préjudice qu'elle allègue avoir subi. Par suite, et en tout état de cause, ses conclusions à fin d'indemnisation ne peuvent qu'être rejetées.

Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

9. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de M. B...et de la SARL Sigma ingénierie, qui ne sont pas les parties perdantes dans la présente instance, la somme que demande la commune de Régina au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens. En revanche, il y a lieu de mettre à la charge de la commune de Régina, en application de ces mêmes dispositions, une somme de 800 euros à verser respectivement à M. B...et à la SARL Sigma ingénierie. Enfin, il n'y a pas lieu de mettre à la charge de la commune de Régina la somme que demande La mutuelle des architectes français en application de ces mêmes dispositions.

DECIDE

Article 1er : La requête de la commune de Régina est rejetée.

Article 2 : Les conclusions incidentes de La mutuelle des architectes français sont rejetées.

Article 3 : La commune de Régina versera une somme de 800 euros respectivement à M. B...et à la SARL Sigma ingénierie en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : Les conclusions de La mutuelle des architectes français tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à la commune de Régina, à M. A...B..., à la SARL Sigma ingénierie, à La mutuelle des architectes français.

Copie sera transmise au ministre des outre-mer.

Délibéré après l'audience du 11 janvier 2019 à laquelle siégeaient :

M. Philippe Pouzoulet, président,

Mme Sylvande Perdu, premier conseiller,

M. Romain Roussel, premier conseiller,

Lu en audience publique, le 8 février 2019.

Le rapporteur,

Romain Roussel

Le président,

Philippe Pouzoulet

La greffière,

Catherine Jussy

La République mande et ordonne au préfet de la Guyane en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.

6

N° 16BX01883


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Bordeaux
Formation : 4ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 16BX01883
Date de la décision : 08/02/2019
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Composition du Tribunal
Président : M. POUZOULET
Rapporteur ?: M. Romain ROUSSEL
Rapporteur public ?: Mme LADOIRE
Avocat(s) : NOSSIN

Origine de la décision
Date de l'import : 19/02/2019
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.bordeaux;arret;2019-02-08;16bx01883 ?
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