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01/10/2019 | FRANCE | N°19BX00231

France | France, Cour administrative d'appel de Bordeaux, 5ème chambre, 01 octobre 2019, 19BX00231


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. E... A... a demandé au tribunal administratif de Poitiers d'annuler l'arrêté du 2 mars 2018 par lequel la préfète de la Vienne a refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans le délai de trente jours et a fixé le pays de renvoi.

Par un jugement n° 1801386 du 25 septembre 2018, le tribunal administratif de Poitiers a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 18 janvier 2019, M. A...

, représenté par Me F..., demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administrat...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. E... A... a demandé au tribunal administratif de Poitiers d'annuler l'arrêté du 2 mars 2018 par lequel la préfète de la Vienne a refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans le délai de trente jours et a fixé le pays de renvoi.

Par un jugement n° 1801386 du 25 septembre 2018, le tribunal administratif de Poitiers a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 18 janvier 2019, M. A..., représenté par Me F..., demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Poitiers du 25 septembre 2018 ;

2) d'annuler l'arrêté de la préfète de la Vienne du 2 mars 2018 ;

3°) d'enjoindre à la préfète de la Vienne de lui délivrer un titre de séjour dans le délai de quinze jours à compter de la notification de l'arrêt à intervenir sous astreinte de 150 euros par jour de retard ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros en application des dispositions combinées des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 alinéa 2 de la loi du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique.

Il soutient, en ce qui concerne l'arrêté pris dans son ensemble, que :

- cet arrêté a été signé par le secrétaire général de la préfecture sans qu'il soit justifié que ce dernier ait bénéficié d'une délégation de signature à cet effet.

Il soutient, en ce qui concerne la décision de refus de titre de séjour, que :

- elle porte une atteinte manifestement excessive à son droit au respect de sa vie privée et familiale en méconnaissance des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et des dispositions de l'article L. 313-11-7° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; qu'il vit en effet en France depuis plus de huit années à la date de l'arrêté litigieux et a tissé des liens personnels d'une intensité et d'une ancienneté suffisantes ; qu'il ne peut lui être reproché de ne pas avoir respecté la précédente décision d'obligation de quitter le territoire français dès lors qu'il a engagé de nombreuses démarches pour solliciter la régularisation de sa situation ; qu'il a un niveau d'étude " Master " et est hébergé chez un ami de longue date dont il a fait la connaissance dans le cadre universitaire et avec lequel il partage des activités sociales et sportives ; que s'il n'a pu trouver de travail c'est en raison de l'absence de titre de séjour mais il est présent dans la vie associative en tant que bénévole ; qu'il n'a plus d'attaches en Guinée, que ses parents sont décédés et son frère qui assurait les ressources financières nécessaires à la poursuite de ses études en France est également décédé en 2012, et qu'il ne sera pas en mesure de reprendre une vie privée et personnelle en Guinée du fait de son appartenance à la minorité peule et des risques de discrimination et d'exaction encourus.

Il soutient, en ce qui concerne les décisions d'obligation de quitter le territoire français et fixant le pays de renvoi, que :

- elles portent une atteinte manifestement excessive à son droit au respect de sa vie personnelle pour les mêmes raisons que celles évoquées précédemment.

Par un mémoire en défense, enregistré le 8 avril 2019, la préfète de la Vienne conclut au rejet de la requête.

Elle fait valoir que les moyens soulevés par M. A... ne sont pas fondés.

M. A... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision n° 2018/20803 du 20 décembre 2018.

Par ordonnance du 11 février 2019, la clôture de l'instruction a été fixée au 8 avril 2019 à 12 heures.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 modifiée ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le rapport de M. C... a été entendu au cours de l'audience publique.

Considérant ce qui suit :

1. M. A..., né le 1er décembre 1982, de nationalité guinéenne, est entré en France le 2 août 2009 muni d'un visa de long séjour portant la mention " étudiant " valable jusqu'au 20 juillet 2010. Un titre de séjour portant la mention "étudiant" lui a été délivré pour la période du 22 octobre 2010 au 21 octobre 2011. Saisi d'une demande de renouvellement de ce titre de séjour, la préfète de la Vienne l'a rejetée par un arrêté du 14 janvier 2013 assorti d'une obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et sur la légalité duquel le tribunal administratif de Poitiers s'est prononcé par jugement du 3 juillet 2013 portant rejet de la demande de l'intéressé. Le 6 novembre 2017, M. A... a présenté une nouvelle demande de titre de séjour au titre de la vie privée et familiale sur le fondement du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Il relève appel du jugement du 25 septembre 2018 par lequel le tribunal administratif de Poitiers a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 2 mars 2018 de la préfète de la Vienne qui, en réponse à sa demande du 6 novembre 2017, a refusé de lui accorder un titre de séjour et lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours en fixant le pays de retour.

Sur les moyens communs aux conclusions dirigées contre les différentes décisions contestées :

2. Il ressort des dispositions de l'article 3 de l'arrêté n° 2017-SG-DCPPAT-01 du 2 novembre 2017, régulièrement publié au recueil des actes administratifs spécial du même jour, que M. B... D..., sous-préfet hors classe, secrétaire général de la préfecture de la Vienne, s'est vu délivrer, par la préfète de ce département, une délégation de signature à l'effet de signer notamment l'ensemble des décisions et actes relevant des dispositions du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, et par conséquent, les décisions portant refus de séjour et obligation de quitter le territoire français. Par suite, le moyen tiré de l'incompétence du signataire de l'acte doit être écarté.

Sur la décision de refus de titre de séjour :

3. Aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. / 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui. ". Par ailleurs, aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " est délivrée de plein droit : (...) 7° A l'étranger ne vivant pas en état de polygamie, qui n'entre pas dans les catégories précédentes ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, dont les liens personnels et familiaux en France, appréciés notamment au regard de leur intensité, de leur ancienneté et de leur stabilité, des conditions d'existence de l'intéressé, de son insertion dans la société française ainsi que de la nature de ses liens avec la famille restée dans le pays d'origine, sont tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus, sans que la condition prévue à l'article L. 311-7 soit exigée. L'insertion de l'étranger dans la société française est évaluée en tenant compte notamment de sa connaissance des valeurs de la République (...) ". Pour l'application de ces dispositions et stipulations, l'étranger qui invoque la protection due à son droit au respect de sa vie privée et familiale en France doit apporter toute justification permettant d'apprécier la réalité et la stabilité de ses liens personnels et familiaux effectifs en France au regard de ceux qu'il a conservés dans son pays d'origine.

4. Il ressort des pièces du dossier que M. A..., célibataire et sans charge de famille, est entré en France en août 2009, alors qu'il était âgé de 27 ans, pour y poursuivre ses études en " Master droit éco gestion " mention " entreprise et développement durable ". Il n'a toutefois obtenu aucun diplôme et s'est vu notifier, le 22 janvier 2013, un arrêté de refus de titre de séjour assorti d'une mesure d'éloignement à laquelle il s'est soustrait en se maintenant ainsi en situation irrégulière sur le territoire français depuis cinq années à la date de la décision attaquée. Il fait cependant valoir qu'il est hébergé chez un ami, se prévaut de sa qualité de bénévole auprès d'associations et du fait qu'il est dépourvu d'attaches familiales dans son pays d'origine depuis le décès de ses parents et de son frère en 2012 et 2013. Toutefois, ces considérations sont insuffisantes pour établir que M. A... a noué en France, où il est arrivé à l'âge de 27 ans, si bien qu'il a passé l'essentiel de son existence dans son pays d'origine, des liens d'une intensité telle que la décision en litige devrait être regardée comme ayant porté une atteinte disproportionnée à son droit à une vie privée et familiale normale. Si, par ailleurs, M. A... soutient qu'en raison de son appartenance à la minorité peule, il subirait des discriminations en cas de retour dans son pays d'origine, ce qui ferait obstacle à ce qu'il reprenne dans ce pays une vie privée et personnelle, il n'assortit ces allégations d'aucune précision ou d'éléments probants permettant à la cour d'en apprécier le bien-fondé. Compte tenu de l'ensemble de ces circonstances, la décision contestée prise à l'encontre du requérant n'a pas méconnu les stipulations et dispositions précitées des articles 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et L. 313-11 7° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.

Sur les décisions d'obligation de quitter le territoire français et fixant le pays de renvoi :

5. Dans les circonstances indiquées au point 4, le moyen tiré de l'atteinte manifestement excessive au droit du requérant au respect de sa vie personnelle ne peut qu'être écarté.

6. Il résulte de tout ce qui précède que M. A... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Poitiers a rejeté sa demande. Par voie de conséquence, ses conclusions aux fins d'injonction et d'astreinte ainsi que celles tendant à l'application des dispositions combinées des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 alinéa 2 de la loi du 10 juillet 1991 ne peuvent qu'être rejetées.

DECIDE :

Article 1er : La requête de M. A... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. E... A..., au ministre de l'intérieur et à Me F.... Copie en sera adressée à la préfète de la Vienne.

Délibéré après l'audience du 3 septembre 2019 à laquelle siégeaient :

Mme Elisabeth Jayat, président,

M. Frédéric C..., président-assesseur,

Mme Caroline Gaillard, premier conseiller,

Lu en audience publique, le 1er octobre 2019.

Le rapporteur,

Frédéric C...Le président,

Elisabeth JayatLe greffier,

Virginie Marty

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.

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N° 19BX00231


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Bordeaux
Formation : 5ème chambre
Numéro d'arrêt : 19BX00231
Date de la décision : 01/10/2019
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

Étrangers - Séjour des étrangers.

Étrangers - Obligation de quitter le territoire français (OQTF) et reconduite à la frontière.


Composition du Tribunal
Président : Mme JAYAT
Rapporteur ?: M. Frédéric FAÏCK
Rapporteur public ?: Mme PERDU
Avocat(s) : MARQUES - MELCHY

Origine de la décision
Date de l'import : 15/10/2019
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.bordeaux;arret;2019-10-01;19bx00231 ?
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