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03/10/2019 | FRANCE | N°19BX00744

France | France, Cour administrative d'appel de Bordeaux, 4ème chambre, 03 octobre 2019, 19BX00744


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A... C... a demandé au tribunal administratif de Toulouse d'annuler l'arrêté du 27 juillet 2018 par lequel le préfet de la Haute-Garonne a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligée à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de renvoi.

Par un jugement n° 1803756 du 24 janvier 2019, le tribunal administratif de Toulouse a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée 22 février 2019, M. C..., repr

ésentée par Me F..., demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de T...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A... C... a demandé au tribunal administratif de Toulouse d'annuler l'arrêté du 27 juillet 2018 par lequel le préfet de la Haute-Garonne a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligée à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de renvoi.

Par un jugement n° 1803756 du 24 janvier 2019, le tribunal administratif de Toulouse a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée 22 février 2019, M. C..., représentée par Me F..., demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Toulouse du 24 janvier 2019 ;

2°) d'annuler l'arrêté contesté ;

3°) d'enjoindre au préfet de la Haute-Garonne de lui délivrer un titre de séjour, sous astreinte de 100 euros par jour de retard ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 2 000 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- la motivation est stéréotypée et insuffisante ; la motivation en fait est insuffisante dès lors que le préfet n'a pas précisé les circonstances de fait particulières servant de justification à l'examen de sa situation personnelle et familiale ; la motivation en droit est insuffisante dès lors qu'on ignore sur quels fondements juridiques il a été regardé comme s'étant maintenu irrégulièrement sur le territoire ;

- l'arrêté méconnaît le Titre III du protocole annexe de l'accord franco-algérien en date du 27 décembre 1968 ; la décision est entachée d'erreur manifeste d'appréciation ; il satisfait à la condition de préinscription au sein d'un établissement d'enseignement supérieur et à celle de disposer de moyens d'existence suffisants ; il résidait en France depuis plus de deux ans lorsqu'il a atteint l'âge de 18 ans et justifie d'un parcours scolaire assidu et sérieux ;

- même s'il ne justifie pas d'un visa de long séjour, la circulaire du 26 mars 2002 prévoit que sa demande devait faire l'objet d'un examen circonstancié nonobstant ses conditions d'entrée en France ; la carte de séjour temporaire " étudiant " peut être délivrée même en l'absence de visa de long séjour en cas de nécessité liée au déroulement des études et sous réserve de la régularité de l'entrée sur le territoire français ; si la convention franco-algérienne ne prévoit pas de cas de dispense de visa long séjour dans le cadre d'une demande de carte de résident algérien en qualité d'étudiant, il est entré en France de manière régulière et a suivi une scolarité régulière et sérieuse ; il ne se prévaut pas des hypothèses prévues par les articles L. 313-7 et R. 313-10 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile car elles ne sont pas applicables aux ressortissants Algériens ; le préfet n'a pas étudié sa situation très particulière en l'obligeant à interrompre son cursus scolaire pour solliciter un visa de long séjour ; il est dans l'impossibilité de mettre en place la procédure légale applicable pour poursuivre ses études en France ;

- en refusant de l'exempter de la présentation d'un visa de long séjour, le préfet a injustement apprécié sa situation ; il aurait dû prendre en compte les circonstances particulières puisque le refus de séjour a pour effet d'obliger l'étudiant à interrompre ses études en cours d'année et de lui faire perdre la chance d'obtenir son diplôme ;

- le préfet a commis une erreur de droit en refusant d'examiner s'il pouvait bénéficier d'une dispense de visa ;

- la décision méconnaît l'article 6 5° de l'accord franco-algérien en date du 27 décembre 1968 et l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales dès lors que le refus d'autoriser son séjour porte incontestablement à son droit au respect de sa vie familiale une atteinte disproportionnée au regard du motif du refus ; il est arrivé encore jeune en France et y est totalement intégré ;

- le préfet a commis une erreur de fait en estimant qu'aucun élément n'est apparu de nature à justifier la régularisation de son séjour à titre exceptionnel et dérogatoire en qualité d''étudiant ;

- la décision a porté une atteinte disproportionnée à son droit au respect de la vie privée tel que protégé par les dispositions de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales dès lors que l'ensemble de ses attaches scolaires et universitaires sont en France ;

- la décision est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation eu égard aux conséquences que ce refus de séjour a sur sa situation personnelle et sur la poursuite de ses études ;

- la décision méconnaît la circulaire dite VALLS du 28 novembre 2012 laquelle prévoit qu'il convient de procéder à un examen particulièrement attentif de la situation des étrangers entrés en France mineurs qui devenus majeurs sont exclus du droit au séjour ; le public visé est celui justifiant d'au moins deux années de résidence en France à leur majorité et d'un parcours scolaire assidu et sérieux ; il est possible, dans une appréciation au cas par cas, de délivrer à un ressortissant étranger en situation irrégulière qui poursuit des études supérieures une carte de séjour temporaire portant la mention " étudiant " en application de l'article L. 313-7 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, dispositions également applicables aux étrangers algériens dans le cadre de ladite circulaire ; il demande l'application souple de cette circulaire en vertu du principe de sécurité juridique.

Par un mémoire en défense, enregistré le 14 juin 2019, le préfet de la Haute-Garonne conclut au rejet de la requête. Il réitère les observations présentées en première instance.

Vu :

- les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968, entre le gouvernement de la République française et le gouvernement de la République algérienne démocratique et populaire, relatif à la circulation, à l'emploi et au séjour en France des ressortissants algériens et de leurs familles, modifié par un premier avenant signé à Alger le 22 décembre 1985 ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979, modifiée ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991, modifiée ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. E... D...,

- et les observations de Me B..., substituant Me F... représentant M. C....

Considérant ce qui suit :

1. M. C..., ressortissant algérien, est entré en France le 7 octobre 2015, à l'âge de 16 ans, sous couvert d'un visa touristique de 90 jours, puis s'est maintenu sur le territoire national. Il a sollicité le 8 septembre 2017 la délivrance d'un titre de séjour, sur le fondement de l'article 6 5°de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1868 et du Titre III du protocole annexe à ce même accord. Par arrêté du 27 juillet 2018, le préfet de la Haute-Garonne a refusé de lui délivrer le titre demandé, l'a obligé à quitter le territoire dans le délai trente jours et a fixé le pays de destination. Il relève appel du jugement en date du 24 janvier 2019 par lequel le tribunal administratif de Toulouse a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté.

2. Il ressort des termes même de l'arrêté que le préfet de Haute-Garonne a procédé à un examen sérieux de la situation personnelle du requérant. L'arrêté contesté comporte les éléments de fait et de droit lui servant de fondement. La circonstance que n'y figure pas la mention exacte des dispositions au titre desquelles M. C... est en situation irrégulière depuis l'expiration de son visa de 90 jours délivré en 2015 n'est pas de nature à entacher cette décision d'un défaut de motivation.

3. Aux termes du Titre III de l'annexe à l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 tel qu'issu du troisième avenant signé le 11 juillet 2001 : " Les ressortissants algériens qui suivent un enseignement, un stage ou font des études en France et justifient de moyens d'existence suffisants (bourses ou autres ressources) reçoivent, sur présentation, soit d'une attestation de pré-inscription ou d'inscription dans un établissement d'enseignement français, soit d'une attestation de stage, un certificat de résidence valable un an, renouvelable et portant la mention " étudiant " ou " stagiaire ". Aux termes de l'article 9 du même : " Pour être admis à entrer et séjourner plus de trois mois sur le territoire français au titre des articles 4, 5, 7, 7 bis al. 4 (lettre c et d) (a à d) et du titre III du protocole, les ressortissants algériens doivent présenter un passeport en cours de validité muni d'un visa de long séjour délivré par les autorités françaises. ". Enfin, aux termes de l'article R. 313-10 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Peut être exempté, sur décision du préfet, de l'obligation de présentation du visa de long séjour prescrite au 2° de l'article R. 313-1 : (...) 2° L'étranger qui a suivi une scolarité en France depuis au moins l'âge de seize ans et qui y poursuit des études supérieures. A l'appui de sa demande, l'étranger doit justifier du caractère réel et sérieux des études poursuivies. ".

4. M. C... a suivi une scolarité depuis son arrivée en France, a obtenu son baccalauréat scientifique lors de la session de juin 2018 et justifie d'une pré-inscription auprès d'un établissement d'enseignement supérieur. L'Etat ne conteste pas que le requérant justifie désormais de moyens d'existence suffisants. Toutefois, et ainsi que l'ont jugé les premiers juges, la condition liée à la présentation d'un passeport en cours de validité muni d'un visa de long séjour n'est pas satisfaite.

5. Si le requérant déclare ne pas se réclamer des dispositions de l'article R. 313-10 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, il soutient que le préfet de Haute-Garonne a commis une erreur de droit en refusant d'examiner s'il pouvait bénéficier d'une dispense de l'obligation de justifier de l'obtention d'un visa de long séjour et une erreur de fait et une erreur manifeste d'appréciation quant aux conséquences de la décision sur sa situation personnelle et sur la poursuite de ses études dès lors que la décision en litige l'oblige à interrompre son cursus scolaire pour solliciter un visa de long séjour.

6. Il ressort pourtant de l'arrêté contesté que si le préfet de Haute-Garonne a examiné la possibilité de délivrer le titre de séjour sollicité malgré l'absence de visa sur le fondement des dispositions, certes inapplicables, de l'article R. 313-10 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, il a fait de même dans le cadre de l'exercice de son pouvoir discrétionnaire. Le moyen tiré de l'erreur de droit doit donc être écarté.

7. De plus le préfet de Haute-Garonne n'a pas commis d'erreur de fait ni d'erreur manifeste d'appréciation quant aux conséquences de la décision sur la situation personnelle du requérant et sur la poursuite de ses études en estimant que M. C..., qui avait obtenu le baccalauréat, pouvait désormais poursuivre des études supérieures selon un cursus similaire dans son pays d'origine.

8. M. C... est arrivé en France à l'âge de 16 ans et y résidait depuis 2 ans et 10 mois à la date de la décision contestée. Si sa soeur ainée réside également en France, le requérant, célibataire et sans charge de famille, n'établit pas avoir tissé des liens d'une particulière intensité sur le territoire national et n'est pas dépourvu de liens dans son pays d'origine où résident ses parents. Dans ces conditions, le préfet de la Haute-Garonne n'a pas porté à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des buts en vue desquels il a pris la décision attaquée et n'a, dès lors, méconnu ni l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, ni l'article 6 5° de l'accord franco-algérien susvisé ni celles du Titre III du même accord. Il n'a de même commis aucune erreur manifeste d'appréciation sur les conséquences de cette décision sur la situation personnelle du requérant.

9. Enfin, M. C... ne peut pas se prévaloir de la circulaire du 28 novembre 2012 du ministre de l'intérieur relative aux conditions d'examen des demandes d'admission au séjour déposées par des ressortissants étrangers en situation irrégulière dans le cadre des dispositions du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, qui est dépourvue de caractère réglementaire.

10. Il résulte de ce qui précède que M. C... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Toulouse a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 27 juillet 2018 du préfet de la Haute-Garonne. Par voie de conséquence, les conclusions de l'intéressé aux fins d'injonction ne peuvent être accueillies et sa demande tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative doit être rejetée.

DECIDE :

Article 1er : La requête de M. C... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... C... et au ministre de l'intérieur.

Copie en sera adressée au préfet de la Haute-Garonne.

Délibéré après l'audience du 5 septembre 2019 à laquelle siégeaient :

M. Philippe Pouzoulet, président,

M. Dominique Ferrari, président-assesseur,

M. E... D..., premier conseiller,

Lu en audience publique, le 3 octobre 2019.

Le rapporteur,

Stéphane D... Le président,

Philippe PouzouletLe greffier,

Sylvie Hayet

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur, en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.

N° 19BX007445


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Bordeaux
Formation : 4ème chambre
Numéro d'arrêt : 19BX00744
Date de la décision : 03/10/2019
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-01-03 Étrangers. Séjour des étrangers. Refus de séjour.


Composition du Tribunal
Président : M. POUZOULET
Rapporteur ?: M. Stéphane GUEGUEIN
Rapporteur public ?: Mme LADOIRE
Avocat(s) : NAKACHE-HAARFI

Origine de la décision
Date de l'import : 08/10/2019
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.bordeaux;arret;2019-10-03;19bx00744 ?
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