La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

15/10/2019 | FRANCE | N°18BX00176

France | France, Cour administrative d'appel de Bordeaux, 5ème chambre, 15 octobre 2019, 18BX00176


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La SCI Delage a demandé au tribunal administratif de Pau d'annuler l'arrêté du 21 mars 2013 par lequel le maire de Saint-Pierre-du-Mont a délivré à la SCI 261 rue René Vielle le permis de construire qu'elle avait sollicité pour la construction d'un immeuble composé de bureaux et de commerces après division d'un terrain et démolition d'un entrepôt.

Par un jugement n° 1501737 du 21 novembre 2017, le tribunal administratif de Pau a annulé cet arrêté.

Procédure devant la cour :

I.

Par une requête, enregistrée le 16 janvier 2018 sous le n° 18BX00176, et des mémoires complément...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La SCI Delage a demandé au tribunal administratif de Pau d'annuler l'arrêté du 21 mars 2013 par lequel le maire de Saint-Pierre-du-Mont a délivré à la SCI 261 rue René Vielle le permis de construire qu'elle avait sollicité pour la construction d'un immeuble composé de bureaux et de commerces après division d'un terrain et démolition d'un entrepôt.

Par un jugement n° 1501737 du 21 novembre 2017, le tribunal administratif de Pau a annulé cet arrêté.

Procédure devant la cour :

I. Par une requête, enregistrée le 16 janvier 2018 sous le n° 18BX00176, et des mémoires complémentaires, enregistrés le 16 avril 2018 et le 11 juin 2019, la commune de Saint-Pierre-du-Mont, représentée par la SCP Bouyssou et associés, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Pau du 21 novembre 2017 ;

2°) de rejeter la demande présentée par la SCI Delage devant le tribunal administratif de Pau ;

3°) de mettre à la charge de la SCI Delage une somme de 4 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- la demande présentée devant le tribunal était tardive et les premiers juges n'ont pas suffisamment pris en compte les éléments produits sur ce point par la pétitionnaire ;

- invoquant un intérêt purement commercial et concurrentiel, la demanderesse ne justifiait pas d'un intérêt pour agir au sens de l'article L. 600-1-2 du code de l'urbanisme et le jugement attaqué est entaché de contradiction sur ce point ;

- le permis de construire en litige respecte les obligations fixées par l'article 13 du règlement de la zone UE du plan local d'urbanisme, lequel ne fixe pas de nombre minimal de plantations à réaliser ;

- en considérant que l'article L. 600-5-1 du code de l'urbanisme n'était pas applicable en l'espèce dès lors que la construction autorisée était achevée, les premiers juges ont commis une erreur de droit ; en outre, les vices invoqués étaient tous régularisables.

Par trois mémoires, enregistrés les 13 mars 2018, 11 juin 2018 et 9 juillet 2019, et des pièces complémentaires, enregistrées le 15 juillet 2019, la SCI Delage, représentée par la SCP de Brisis - Esposto, conclut au rejet de la requête et à ce que soit mise à la charge de la commune de Saint-Pierre-du-Mont une somme de 4 500 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle fait valoir que :

- contrairement à la pétitionnaire, elle a produit des éléments permettant de considérer que sa demande n'était pas tardive ;

- en sa qualité de propriétaire de la parcelle voisine du terrain d'assiette du projet en litige, et compte tenu de la perte de visibilité des établissements de ses preneurs à bail en raison de la construction litigieuse, elle justifie d'un intérêt à agir ;

- non seulement le permis en litige méconnaît l'article 13 du règlement de la zone UE, ainsi qu'en a jugé le tribunal, mais il méconnaît également les articles 11 et 12 du même règlement et le dossier de demande était incomplet ;

- il était loisible au tribunal de décider de ne pas faire application de l'article L. 600-5-1 du code de l'urbanisme.

Par un mémoire, enregistré le 15 juillet 2019, la SCI 261 rue René Vielle, représentée par la SELARL Etche avocats, conclut à l'annulation du jugement du tribunal administratif de Pau du 21 novembre 2017, au rejet de la demande présentée par la SCI Delage devant le tribunal administratif de Pau ou, à titre subsidiaire, à l'application de l'article L. 600-5-1 du code de l'urbanisme, et à ce que soit mise à la charge de la SCI Delage une somme de 2 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle fait valoir que :

- la demande présentée devant le tribunal était tardive dès lors qu'un affichage continu avait été réalisé dès 2013 ;

- la construction en litige est dépourvue d'impact négatif sur les locaux commerciaux appartenant à la demanderesse de première instance, laquelle ne justifie donc pas d'un intérêt à agir en l'espèce ;

- les moyens soulevés par la demanderesse n'étaient pas fondés et le tribunal a commis une erreur de droit dans l'interprétation de l'article 13 du règlement de la zone UE du plan local d'urbanisme ;

- le tribunal avait l'obligation de faire application de l'article L. 600-5-1 du code de l'urbanisme.

Par ordonnance du 15 juillet 2019, la clôture d'instruction a été fixée en dernier lieu au 16 août 2019 à 12 heures.

Les parties ont été informées, en application des dispositions de l'article R. 611-7 du code de justice administrative, de ce que l'arrêt était susceptible d'être fondé sur un moyen relevé d'office, tiré de la tardiveté des conclusions de la SCI 261 rue René Vielle.

II. Par une requête, enregistrée le 20 janvier 2018 sous le numéro 18BX00245, et des mémoires complémentaires, enregistrés les 17 juin et 15 juillet 2019, la SCI 261 rue René Vielle, représentée par la SELARL Etche avocats, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Pau du 21 novembre 2017 ;

2°) de rejeter la demande présentée par la SCI Delage devant le tribunal administratif de Pau ou, à titre subsidiaire, de faire application de l'article L. 600-5-1 du code de l'urbanisme ;

3°) de mettre à la charge de la SCI Delage une somme de 2 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- la demande présentée devant le tribunal était tardive dès lors qu'un affichage continu avait été réalisé dès 2013 ;

- la construction en litige est dépourvue d'impact négatif sur les locaux commerciaux appartenant à la demanderesse de première instance, laquelle ne justifie donc pas d'un intérêt à agir en l'espèce ;

- en refusant de tenir compte des plantations situées en bordure des aires de stationnement, le tribunal a commis une erreur de droit dans l'interprétation de l'article 13 du règlement de la zone UE du plan local d'urbanisme ;

- le tribunal avait l'obligation de faire application de l'article L. 600-5-1 du code de l'urbanisme ;

- les autres moyens soulevés par la demanderesse n'étaient pas fondés.

Par deux mémoires, enregistrés les 13 mars 2018 et 10 juillet 2019, et des pièces complémentaires, enregistrées le 15 juillet 2019, la SCI Delage, représentée par la SCP de Brisis - Esposto, conclut au rejet de la requête et à ce que soit mise à la charge de la commune de Saint-Pierre-du-Mont une somme de 4 500 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle fait valoir que :

- contrairement à la pétitionnaire, elle a produit des éléments permettant de considérer que sa demande n'était pas tardive ;

- en sa qualité de propriétaire de la parcelle voisine du terrain d'assiette du projet en litige, et compte tenu de la perte de visibilité des établissements de ses preneurs à bail en raison de la construction litigieuse, elle justifie d'un intérêt à agir ;

- non seulement le permis en litige méconnaît l'article 13 du règlement de la zone UE, ainsi qu'en a jugé le tribunal, mais il méconnaît également les articles 11 et 12 du même règlement et le dossier de demande était incomplet ;

- il était loisible au tribunal de décider de ne pas faire application de l'article L. 600-5-1 du code de l'urbanisme.

Par un mémoire, enregistré le 1er août 2019, la commune de Saint-Pierre-du-Mont, représentée par la SCP Bouyssou et associés, conclut à l'annulation du jugement du tribunal administratif de Pau du 21 novembre 2017, au rejet de la demande présentée par la SCI Delage devant le tribunal administratif de Pau et à ce que soit mise à la charge de la SCI Delage une somme de 4 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle fait valoir qu'elle renvoie à ses écritures dans l'instance 18BX00176.

Par ordonnance du 15 juillet 2019, la clôture d'instruction a été fixée en dernier lieu au 16 août 2019 à 12 heures.

Les parties ont été informées, en application des dispositions de l'article R. 611-7 du code de justice administrative, de ce que l'arrêt était susceptible d'être fondé sur un moyen relevé d'office, tiré de la tardiveté des conclusions de la commune de Saint-Pierre-du-Mont.

Par un mémoire, enregistré le 27 août 2019, la commune de Saint-Pierre-du-Mont a présenté des observations en réponse à cette information.

Par courrier du 23 août 2019, les parties ont été informées de ce que la cour était susceptible de mettre en oeuvre, dans les deux dossiers, la procédure prévue par l'article L. 600-5-1 du code de l'urbanisme et invitées à présenter leurs observations sur ce point.

Par deux mémoires, enregistrés le 27 août 2019, la commune de Saint-Pierre-du-Mont a présenté des observations en réponse à ce courrier.

Par deux mémoires, enregistrés le 5 septembre 2019, la SCI Delage a présenté des observations en réponse au moyen susceptible d'être relevé d'office et à l'information sur la possibilité de mise en oeuvre de la procédure prévue par l'article L. 600-5-1 du code de l'urbanisme.

Vu les autres pièces des dossiers.

Vu :

- le code de l'urbanisme ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Romain Roussel, premier conseiller,

- les conclusions de Mme Sylvande Perdu, rapporteur public,

- et les observations de Me A..., représentant la commune de Saint-Pierre-du-Mont, de Me B... pour la SCI 261 rue René Vielle, et de Me C..., représentant la SCI Delage.

Considérant ce qui suit :

1. La SCI 261 rue René Vielle a déposé, le 31 octobre 2012, une demande de permis de construire pour la réalisation d'un immeuble de bureaux et de commerces après division d'un terrain et démolition d'un entrepôt. Par arrêté du 21 mars 2013, le maire de Saint-Pierre-du-Mont (Landes) lui a accordé ce permis. La commune de Saint-Pierre-du-Mont et la SCI 261 rue René Vielle relèvent appel du jugement du 21 novembre 2017 par lequel le tribunal administratif de Pau a annulé cet arrêté à la demande de la SCI Delage.

2. Les requêtes n° 18BX00176 et 18BX00245 présentées pour la commune de Saint-Pierre-du-Mont et pour la SCI 261 rue René Vielle sont dirigées contre le même jugement. Il y a lieu de les joindre pour statuer par un seul arrêt.

Sur la recevabilité des conclusions de la SCI 261 rue René Vielle dans l'instance 18BX00176 et de celles de la commune de Saint-Pierre-du-Mont dans l'instance 18BX00245 :

3. Il ressort des pièces du dossier que le jugement attaqué a été notifié à la SCI 261 rue René Vielle le 24 novembre 2017. Par son mémoire, enregistré au greffe de la cour le 15 juillet 2019 dans l'instance 18BX00176, la SCI 261 rue René Vielle a conclu expressément à l'annulation du jugement du tribunal administratif et au rejet de la demande de première instance de la SCI Delage. Ces conclusions d'appel, présentées après expiration du délai d'appel, sont tardives et, par suite, irrecevables.

4. Il ressort des pièces du dossier que le jugement attaqué a également été notifié à la commune de Saint-Pierre-du-Mont le 21 novembre 2017. Par son mémoire, enregistré au greffe de la cour le 1er août 2019 dans l'instance 18BX00245, la commune de Saint-Pierre-du-Mont a conclu expressément à l'annulation du jugement du tribunal administratif et au rejet de la demande de première instance de la SCI Delage. Ces conclusions d'appel, présentées après expiration du délai d'appel, sont tardives et, par suite, irrecevables.

Sur la recevabilité de la demande de première instance de la SCI Delage :

5. En premier lieu, aux termes de l'article R. 600-2 du code de l'urbanisme : " Le délai de recours contentieux à l'encontre d'une décision de non-opposition à une déclaration préalable ou d'un permis de construire, d'aménager ou de démolir court à l'égard des tiers à compter du premier jour d'une période continue de deux mois d'affichage sur le terrain des pièces mentionnées à l'article R. 424-15 ". Aux termes de l'article R. 424-15 du même code : " Mention du permis explicite ou tacite ou de la déclaration préalable doit être affichée sur le terrain, de manière visible de l'extérieur, par les soins de son bénéficiaire, dès la notification de l'arrêté ou dès la date à laquelle le permis tacite ou la décision de non-opposition à la déclaration préalable est acquis et pendant toute la durée du chantier (...) / Un arrêté du ministre chargé de l'urbanisme règle le contenu et les formes de l'affichage ". Aux termes de l'article A. 424-17 du même code : " Le panneau d'affichage comprend la mention suivante : / " Droit de recours : / " Le délai de recours contentieux est de deux mois à compter du premier jour d'une période continue de deux mois d'affichage sur le terrain du présent panneau (art. R. 600-2 du code de l'urbanisme) (...) ". Enfin, aux termes de l'article R. 600-3, dans sa rédaction applicable au litige : " Aucune action en vue de l'annulation d'un permis de construire ou d'aménager ou d'une décision de non-opposition à une déclaration préalable n'est recevable à l'expiration d'un délai d'un an à compter de l'achèvement de la construction ou de l'aménagement. / Sauf preuve contraire, la date de cet achèvement est celle de la réception de la déclaration d'achèvement mentionnée à l'article R. 462-1 ".

6. Il ressort des pièces du dossier que, alors que la SCI Delage a produit en première instance un constat d'huissier établi le 5 août 2015 dont il ressort qu'à cette date, d'une part, le permis de construire en litige, daté du 21 mars 2013, faisait l'objet d'un affichage régulier et visible depuis l'extérieur et, d'autre part, que les travaux de construction n'avaient pas commencé, la SCI 261 rue René Vielle s'est bornée à produire un constat d'huissier daté du 23 avril 2013 relatif à l'affichage d'un autre permis de construire que celui en litige ainsi qu'une attestation, datée du 18 mars 2016, rédigée par le gérant d'une société voisine du projet en litige, n'apportant aucun élément concernant l'affichage complet et régulier du permis attaqué. La SCI 261 rue René Vielle ne produit en appel aucune pièce supplémentaire sur ce point. Dans ces conditions, la demande d'annulation enregistrée au greffe du tribunal administratif le 14 août 2015 ne saurait être regardée comme tardive.

7. En second lieu, aux termes de l'article L. 600-1-2 du code de l'urbanisme, dans sa rédaction applicable au litige : " Une personne autre que l'État, les collectivités territoriales ou leurs groupements ou une association n'est recevable à former un recours pour excès de pouvoir contre un permis de construire, de démolir ou d'aménager que si la construction, l'aménagement ou les travaux sont de nature à affecter directement les conditions d'occupation, d'utilisation ou de jouissance du bien qu'elle détient ou occupe régulièrement ou pour lequel elle bénéficie d'une promesse de vente, de bail, ou d'un contrat préliminaire mentionné à l'article L. 261-15 du code de la construction et de l'habitation ".

8. Il résulte de ces dispositions qu'il appartient, en particulier, à tout requérant qui saisit le juge administratif d'un recours pour excès de pouvoir tendant à l'annulation d'un permis de construire, de démolir ou d'aménager, de préciser l'atteinte qu'il invoque pour justifier d'un intérêt lui donnant qualité pour agir, en faisant état de tous éléments suffisamment précis et étayés de nature à établir que cette atteinte est susceptible d'affecter directement les conditions d'occupation, d'utilisation ou de jouissance de son bien. Il appartient au défendeur, s'il entend contester l'intérêt à agir du requérant, d'apporter tous éléments de nature à établir que les atteintes alléguées sont dépourvues de réalité. Le juge de l'excès de pouvoir apprécie la recevabilité de la requête au vu des éléments ainsi versés au dossier par les parties, en écartant le cas échéant les allégations qu'il jugerait insuffisamment étayées mais sans pour autant exiger de l'auteur du recours qu'il apporte la preuve du caractère certain des atteintes qu'il invoque au soutien de la recevabilité de celui-ci. Eu égard à sa situation particulière, le voisin immédiat justifie, en principe, d'un intérêt à agir lorsqu'il fait état devant le juge, qui statue au vu de l'ensemble des pièces du dossier, d'éléments relatifs à la nature, à l'importance ou à la localisation du projet de construction.

9. Il est constant que la SCI Delage est propriétaire de la parcelle contigüe au terrain d'assiette du projet en litige, sur laquelle est implanté un bâtiment hébergeant deux commerces. Le projet en litige consiste principalement en la construction d'un bâtiment rectangulaire sur la quasi-totalité de la limite séparative. Il ressort des pièces du dossier que, si l'arrière du bâtiment appartenant à la SCI Delage restera visible depuis la rocade dans le sens est-ouest, il sera en revanche entièrement occulté par le projet en litige dans le sens ouest-est. Dans ces conditions, en se prévalant de la perte de visibilité commerciale pour les locataires du bâtiment lui appartenant, la SCI Delage justifie en l'espèce d'un intérêt à agir au sens des dispositions, citées au point 7, de l'article L. 600-1-2 du code de l'urbanisme.

Au fond :

10. Le tribunal a annulé le permis de construire en litige au motif que le projet ainsi autorisé méconnaît les dispositions de l'article 13 du règlement de la zone UE du plan local d'urbanisme, aux termes desquelles : " Les espaces libres et les aires de stationnement pour véhicules légers doivent être aménagés et plantés (...) ".

11. Il ressort de la notice du dossier de demande que le projet en litige ne porte que sur la construction d'un bâtiment de bureaux et de commerces, devant lequel sont prévues des places de stationnement. Il ressort des plans du dossier de demande que le projet ne prévoit pas que cette aire de stationnement de 19 places soit plantée. À cet égard, la circonstance que le projet prévoit que les espaces libres de part et d'autre du bâtiment soient plantés est sans incidence. Il en va de même de la circonstance tirée de ce que l'aire de stationnement du restaurant préexistant sur le terrain initial qui fait l'objet d'une division, soit elle-même déjà plantée, quand bien même la notice précise que ces aires de stationnement seront " mutualisées ". Dans ces conditions, c'est à bon droit que les premiers juges ont regardé comme fondé le moyen tiré de la méconnaissance, par le permis en litige, des dispositions citées au point précédent de l'article 13 du règlement de la zone UE du plan local d'urbanisme.

Sur l'application de l'article L. 600-5-1 du code de l'urbanisme :

12. En vertu de l'article L. 600-5-1 du code de l'urbanisme, lorsque, saisi de conclusions dirigées contre un permis de construire, le juge administratif estime, après avoir constaté que les autres moyens ne sont pas fondés, qu'un vice entraînant l'illégalité de cet acte est susceptible d'être régularisé, il sursoit à statuer, après avoir invité les parties à présenter leurs observations, jusqu'à l'expiration du délai qu'il fixe pour cette régularisation. Si une mesure de régularisation est notifiée dans ce délai au juge, celui-ci statue après avoir invité les parties à présenter leurs observations. La faculté de régularisation ainsi ouverte n'est pas subordonnée à la condition que la construction faisant l'objet du permis attaqué, dès lors qu'elle est légalement possible, n'ait pas été achevée.

13. Dans ces conditions, c'est à tort que les premiers juges ont refusé de faire application de ces dispositions au motif que la construction du bâtiment autorisée par le permis en litige est achevée.

14. Le juge peut mettre en oeuvre les pouvoirs qu'il tient de l'article L. 600-5-1 du code de l'urbanisme pour la première fois en appel, alors même que l'autorisation d'urbanisme en cause a été annulée par les premiers juges.

15. Lorsque le juge d'appel estime qu'un moyen ayant fondé l'annulation du permis litigieux par le juge de première instance est tiré d'un vice susceptible d'être régularisé, et qu'il décide de faire usage de la faculté qui lui est ouverte par l'article L. 600-5-1, il lui appartient, avant de surseoir à statuer sur le fondement de ces dispositions, de constater préalablement qu'aucun des autres moyens ayant, le cas échéant, fondé le jugement d'annulation, ni aucun de ceux qui ont été écartés en première instance, ni aucun des moyens nouveaux et recevables présentés en appel, n'est fondé et n'est susceptible d'être régularisé et d'indiquer dans sa décision de sursis pour quels motifs ces moyens doivent être écartés.

16. En premier lieu, aux termes de l'article R. 431-8 du code de l'urbanisme : " Le projet architectural comprend une notice précisant : / 1° L'état initial du terrain et de ses abords indiquant, s'il y a lieu, les constructions, la végétation et les éléments paysagers existants ; / 2° Les partis retenus pour assurer l'insertion du projet dans son environnement et la prise en compte des paysages, faisant apparaître, en fonction des caractéristiques du projet : a) L'aménagement du terrain, en indiquant ce qui est modifié ou supprimé ; b) L'implantation, l'organisation, la composition et le volume des constructions nouvelles, notamment par rapport aux constructions ou paysages avoisinants ; c) Le traitement des constructions, clôtures, végétations ou aménagements situés en limite de terrain ; d) Les matériaux et les couleurs des constructions ; e) Le traitement des espaces libres, notamment les plantations à conserver ou à créer ; f) L'organisation et l'aménagement des accès au terrain, aux constructions et aux aires de stationnement ". Aux termes de l'article R. 431-9 du même code : " Le projet architectural comprend également un plan de masse des constructions à édifier ou à modifier coté dans les trois dimensions. Ce plan de masse fait apparaître les travaux extérieurs aux constructions, les plantations maintenues, supprimées ou créées et, le cas échéant, les constructions existantes dont le maintien est prévu (...) ".

17. D'une part, la notice du dossier de demande précise que le projet s'inscrit dans un lotissement artisanal. Les plans, photographies et documents graphiques qui y sont joints permettent d'apprécier l'environnement proche du projet et l'insertion de celui-ci par rapport aux constructions avoisinantes, y compris le bâtiment appartenant à la SCI Delage. Il en est de même concernant le traitement des accès et du terrain.

18. D'autre part, aucune disposition du code de l'urbanisme n'imposait à la pétitionnaire de mentionner dans le dossier de demande la présence à proximité du terrain d'assiette du projet d'une canalisation de gaz. En tout état de cause, le permis en litige a repris sous forme de prescriptions l'avis rendu par Transport et Infrastructures Gaz de France (TIGF) et un permis modificatif a été délivré à la pétitionnaire le 6 juillet 2016 autorisant notamment la modification de l'implantation du projet afin de tenir compte de cet avis.

19. Il résulte de ce qui précède que le moyen tiré du caractère incomplet du dossier de demande dont être écarté dans ses différentes branches.

20. En deuxième lieu, aux termes de l'article 11 du règlement de la zone UE du plan local d'urbanisme : " Les constructions ainsi que les espaces extérieurs devront être soignés. / Au niveau des murs, les couleurs vives sont proscrites (...) ".

21. En autorisant la construction d'un bâtiment dont la façade sera revêtue d'un enduit couleur ocre rouge, le permis en litige n'a pas méconnu les dispositions citées au point précédent de l'article 11 du règlement de la zone UE du plan local d'urbanisme.

22. En troisième lieu, aux termes de l'article 12 du règlement de la zone UE du plan local d'urbanisme : " Afin d'assurer le stationnement des véhicules en dehors des voies publiques les constructeurs doivent aménager un nombre de places de stationnement correspondant aux besoins des constructions et installations à savoir : / - pour les constructions à usage de bureaux et de commerces, une surface de stationnement au moins égale à 60 % de la surface de construction, / -pour les établissements hôteliers, une place de stationnement par chambre, / - pour les constructions à usage artisanal, industriel ou d'entrepôt, une surface de stationnement au moins égale à 20 % de la surface de construction. / Le nombre de places est arrondi au nombre entier immédiatement supérieur à celui résultant du calcul. La surface à prendre en compte pour une place de stationnement est d'environ 25 m² (surface correspondant à la place ainsi qu'aux nécessaires aires de manoeuvre) ".

23. Il ressort des pièces du dossier que le permis en litige, qui porte, ainsi que le précise explicitement le dossier de demande, sur la seule construction d'un bâtiment de bureaux et de commerces, autorise un projet de 568 m² de surface de plancher. En application des dispositions de l'article 12 du règlement de la zone UE, le projet doit donc prévoir une aire de stationnement d'une surface de 340,8 m², correspondant à 60 % de cette surface de plancher. Il ressort des pièces du dossier que le projet prévoit une aire de stationnement portant sur 19 places, de 5 mètres sur 49,69 mètres, soit 248,45 m², ainsi qu'une voie de desserte interne de 5,68 mètres de large sur la même longueur, soit 282,24 m², permettant les manoeuvres nécessaires au stationnement. Dès lors, le projet prévoit une surface de stationnement, au sens des dispositions de l'article 12 du règlement de la zone UE du plan local d'urbanisme, de 530,69 m², largement supérieure aux 60 % de la surface de construction du projet. Dans ces conditions, le moyen tiré de la méconnaissance de l'article 12 du règlement de la zone UE du plan local d'urbanisme doit être écarté.

24. L'illégalité relevée au point 11 du présent arrêt est éventuellement susceptible de régularisation. Par suite, il y a lieu de surseoir à statuer sur les conclusions des deux requêtes et d'impartir à la SCI 261 rue René Vielle un délai de quatre mois à compter de la notification du présent arrêt aux fins d'obtenir la régularisation de ce vice.

DECIDE :

Article 1er : Le jugement du tribunal administratif de Pau du 21 novembre 2017 est annulé en tant qu'il a rejeté les conclusions tendant à l'application de l'article L. 600-5-1 du code de l'urbanisme.

Article 2 : Il est sursis à statuer sur le surplus du litige jusqu'à l'expiration d'un délai de quatre mois à compter de la notification du présent arrêt pour permettre à la SCI 261 rue René Vielle de notifier le cas échéant à la cour une mesure de régularisation de l'illégalité mentionnée au point 11.

Article 3 : Tous droits et moyens des parties sur lesquels il n'est pas expressément statué par le présent arrêt sont réservés jusqu'en fin d'instance.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à la commune de Saint-Pierre-du-Mont, à la SCI 261 rue René Vielle et à la SCI Delage.

Délibéré après l'audience du 17 septembre 2019 à laquelle siégeaient :

Mme Elisabeth Jayat, président,

M. Frédéric Faïck, président assesseur,

M. Romain Roussel, premier conseiller,

Lu en audience publique, le 15 octobre 2019.

Le rapporteur,

Romain RousselLe président,

Elisabeth JayatLe greffier,

Virginie Marty

La République mande et ordonne au préfet des Landes en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.

3

N°s 18BX00176, 18BX00245


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Bordeaux
Formation : 5ème chambre
Numéro d'arrêt : 18BX00176
Date de la décision : 15/10/2019
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

Urbanisme et aménagement du territoire - Permis de construire - Nature de la décision - Sursis à statuer.

Urbanisme et aménagement du territoire - Autorisations d`utilisation des sols diverses - Régimes de déclaration préalable.


Composition du Tribunal
Président : Mme JAYAT
Rapporteur ?: M. Romain ROUSSEL
Rapporteur public ?: Mme PERDU
Avocat(s) : SCP DE BRISIS - ESPOSITO

Origine de la décision
Date de l'import : 19/10/2019
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.bordeaux;arret;2019-10-15;18bx00176 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award