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29/10/2019 | FRANCE | N°18BX02915

France | France, Cour administrative d'appel de Bordeaux, 5ème chambre, 29 octobre 2019, 18BX02915


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. H... B... a demandé au tribunal administratif de Bordeaux d'annuler la délibération du 11 mai 2017 par laquelle le conseil municipal de la commune de Lacanau a approuvé son plan local d'urbanisme.

Par un jugement n° 1702888 du 24 mai 2018, le tribunal administratif de Bordeaux a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête et un mémoire, présentés le 24 juillet 2018 et le 7 décembre 2018, M. H... B..., représenté par Me F..., demande à la cour :

1°) d'

annuler ce jugement n° 1702888 du tribunal administratif de Bordeaux en tant qu'il rejette la demande ...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. H... B... a demandé au tribunal administratif de Bordeaux d'annuler la délibération du 11 mai 2017 par laquelle le conseil municipal de la commune de Lacanau a approuvé son plan local d'urbanisme.

Par un jugement n° 1702888 du 24 mai 2018, le tribunal administratif de Bordeaux a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête et un mémoire, présentés le 24 juillet 2018 et le 7 décembre 2018, M. H... B..., représenté par Me F..., demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement n° 1702888 du tribunal administratif de Bordeaux en tant qu'il rejette la demande d'annulation de la délibération du 11 mai 2017 en tant qu'elle classe en zone naturelle et espace boisé classé la partie basse de la parcelle cadastrée section BV n° 124 ; subsidiairement, d'annuler cette délibération en tant qu'elle classe en espace boisé classé la partie basse de la parcelle en cause ;

2°) d'annuler la délibération du 11 mai 2017 en tant qu'elle classe ainsi la parcelle en cause ;

3°) de mettre à la charge de la commune de Lacanau la somme de 3 500 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que ;

- le classement en zone naturelle et en espace boisé classé de la parcelle cadastrée section BV n° 124 est entaché d'erreur manifeste d'appréciation ; ce classement est ainsi contraire aux orientations du schéma de cohérence territoriale visant à définir un espace de renouvellement urbain dans le secteur Lacanau Océan ;

- ce classement est aussi contraire au contenu du rapport de présentation du plan local d'urbanisme qui identifie le secteur concerné comme ayant vocation à accueillir de l'habitat ;

- ce classement est contraire au projet d'aménagement et de développement durables du plan local d'urbanisme ; il n'est pas cohérent de créer un espace boisé classé sur un terrain destiné à l'urbanisation ;

- il aurait été cohérent de classer la parcelle litigieuse en zone AU car les documents du plan local d'urbanisme indiquent qu'elle se situe dans une zone dédiée à l'urbanisation ; de plus, la parcelle se situe au coeur d'un espace urbanisé et elle est desservie par les réseaux d'équipements publics.

Par des mémoires en défense, enregistrés le 29 octobre 2018 et 18 juillet 2019, la commune de Lacanau, représentée par Me G..., conclut :

1°) au rejet de la requête ;

2°) à ce qu'il soit mis à la charge de la requérante le paiement de la somme de 5 000 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

3°) subsidiairement, à ce que la cour prononce un sursis à statuer afin de permettre la régularisation des éventuelles irrégularités du plan local d'urbanisme en application de l'article L. 600-9 du code de l'urbanisme.

Elle soutient que les moyens soulevés ne sont pas fondés.

Par ordonnance du 27 novembre 2018, la date au-delà de laquelle aucun moyen nouveau ne peut être invoqué en application de l'article R. 611-7-1 du code de justice administrative a été fixée au 28 janvier 2019 à 12h00.

Par ordonnance du 24 juin 2019, la clôture d'instruction a été fixée au 26 juillet 2019 à 12h00.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code de l'urbanisme ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. E... A...,

- les conclusions de Mme Sylvande Perdu, rapporteur public,

- et les observations de Me D..., représentant M. B..., et de Me C..., représentant la commune de Lacanau.

Considérant ce qui suit :

1. Par une délibération du 10 octobre 2003, le conseil municipal de Lacanau a prescrit la révision de son plan d'occupation des sols, sa transformation en plan local d'urbanisme et a défini les modalités de la concertation associée à cette procédure. Après l'enquête publique, qui s'est déroulée du 16 janvier au 1er mars 2017, le conseil municipal de Lacanau a approuvé le plan local d'urbanisme par une délibération du 11 mai 2017. M. H... B..., propriétaire à Lacanau des parcelles cadastrées section BX n° 6 et 9 et BV n° 124, a demandé au tribunal administratif de Bordeaux d'annuler la délibération du 11 mai 2017. M. B... relève appel du jugement rendu le 24 mai 2018 par lequel le tribunal a rejeté sa demande. Il demande à la cour d'annuler ce jugement en tant qu'il a rejeté sa demande d'annulation de la délibération du 11 mai 2017 dans la mesure où elle classe sa parcelle n°124 en espace boisé classé et en zone naturelle et d'annuler, dans cette limite, ladite délibération.

Sur la légalité de la délibération du 11 mai 2017 :

2. En premier lieu, aux termes de l'article L. 131-4 du code de l'urbanisme : " Les plans locaux d'urbanisme et les documents en tenant lieu ainsi que les cartes communales sont compatibles avec : 1° Les schémas de cohérence territoriale (...) ".

3. A l'exception des cas limitativement prévus par la loi dans lesquels les schémas de cohérence territoriale peuvent contenir des normes prescriptives, ceux-ci doivent se borner à fixer des orientations et des objectifs. Il résulte des dispositions précitées de l'article L. 131-4 du code de l'urbanisme que les plans locaux d'urbanisme sont soumis à une simple obligation de comptabilité avec ces orientations et objectifs. Si ces derniers peuvent être en partie exprimés sous forme quantitative, il appartient aux auteurs des plans locaux d'urbanisme, qui déterminent les partis d'aménagement à retenir en prenant en compte la situation existante et les perspectives d'avenir, d'assurer, ainsi qu'il a été dit, non leur conformité aux énonciations des schémas de cohérence territoriale mais leur compatibilité avec les orientations générales et les objectifs qu'ils définissent. Pour apprécier la compatibilité d'un plan local d'urbanisme avec un schéma de cohérence territoriale, il appartient au juge administratif de rechercher, dans le cadre d'une analyse globale le conduisant à se placer à l'échelle de l'ensemble du territoire couvert en prenant en compte l'ensemble des prescriptions du document supérieur, si le plan ne contrarie pas les objectifs qu'impose le schéma, compte tenu des orientations adoptées et de leur degré de précision, sans rechercher l'adéquation du plan à chaque disposition ou objectif particulier.

4. Le schéma de cohérence territoriale (SCOT) des Lacs Médocains énonce des objectifs à atteindre en termes de développement démographique, de maîtrise de l'étalement urbain, de protection de l'environnement, notamment des sites présentant un intérêt environnemental. Ce document qualifie le secteur Lacanau-Océan, dont la parcelle n° 124 appartenant à M. B... se situe à l'extrémité sud, d'" espace de renouvellement urbain " en application de l'objectif visant à privilégier le développement d'un pôle économique et touristique sur Lacanau pour renforcer l'attractivité de la commune et notamment son agglomération littorale. Toutefois, le SCOT des Lacs Médocains, qui précise que l'extension de l'urbanisation sur Lacanau-Océan doit être calibrée dans la perspective ainsi poursuivie tout en tenant compte de l'inscription du site en espaces proches du rivage, n'implique pas nécessairement le classement en zone constructible de la parcelle n°124, en particulier sa partie basse qui est à l'état de dune. Cette dernière parcelle a fait l'objet d'un classement en zone naturelle et en espaces boisés classés et il ne ressort pas des pièces du dossier qu'à lui seul un tel classement contrarierait l'objectif poursuivi par le SCOT s'agissant du secteur Lacanau-Océan. Par suite, le moyen tiré de la contrariété de la délibération en litige avec ce document d'orientations et d'objectifs doit être écarté.

5. En deuxième lieu, aux termes de l'article L. 151-4 du code de l'urbanisme : " Le rapport de présentation explique les choix retenus pour établir le projet d'aménagement et de développement durables (...) Il s'appuie sur un diagnostic établi au regard des prévisions économiques et démographiques et des besoins répertoriés en matière de développement économique, de surfaces et de développement agricoles, de développement forestier, d'aménagement de l'espace, d'environnement, notamment en matière de biodiversité, d'équilibre social de l'habitat, de transports, de commerce, d'équipements et de services. (...) Il justifie les objectifs chiffrés de modération de la consommation de l'espace et de lutte contre l'étalement urbain compris dans le projet d'aménagement et de développement durables au regard des objectifs de consommation de l'espace fixés, le cas échéant, par le schéma de cohérence territoriale et au regard des dynamiques économiques et démographiques. (...) ". Aux termes de l'article L. 151-5 du même code : " Le projet d'aménagement et de développement durables définit : 1° Les orientations générales des politiques d'aménagement, d'équipement, d'urbanisme, de paysage, de protection des espaces naturels, agricoles et forestiers, et de préservation ou de remise en bon état des continuités écologiques ; 2° Les orientations générales concernant l'habitat, les transports et les déplacements, les réseaux d'énergie, le développement des communications numériques, l'équipement commercial, le développement économique et les loisirs, retenues pour l'ensemble de l'établissement public de coopération intercommunale ou de la commune. Il fixe des objectifs chiffrés de modération de la consommation de l'espace et de lutte contre l'étalement urbain. Il peut prendre en compte les spécificités des anciennes communes, notamment paysagères, architecturales, patrimoniales et environnementales, lorsqu'il existe une ou plusieurs communes nouvelles. ". Aux termes de l'article L.151-8 dudit code : " Le règlement fixe, en cohérence avec le projet d'aménagement et de développement durables, les règles générales et les servitudes d'utilisation des sols permettant d'atteindre les objectifs mentionnés aux articles L. 101-1 à L. 101-3. ".

6. Pour apprécier la cohérence exigée au sein du plan local d'urbanisme entre le règlement et le projet d'aménagement et de développement durables, il appartient au juge administratif de rechercher, dans le cadre d'une analyse globale le conduisant à se placer à l'échelle du territoire couvert par le document d'urbanisme, si le règlement ne contrarie pas les orientations générales et objectifs que les auteurs du document ont définis dans le projet d'aménagement et de développement durables, compte tenu de leur degré de précision. Par suite, l'inadéquation d'une disposition du règlement du plan local d'urbanisme à une orientation ou un objectif du projet d'aménagement et de développement durables ne suffit pas nécessairement, compte tenu de l'existence d'autres orientations ou objectifs au sein de ce projet, à caractériser une incohérence entre ce règlement et ce projet.

7. Afin de préserver le patrimoine environnemental et paysager de la commune de Lacanau, caractérisé par la présence de l'océan, d'un lac et de forêts, les auteurs du plan local d'urbanisme ont entendu réduire de 50 % la superficie des zones à urbaniser, augmenter de 7 % celle des espaces boisés classés ainsi que les zones naturelles, ces dernières couvrant 12 946 hectares de la commune contre 2 103 hectares dans l'ancien plan d'occupation des sols. Quant aux espaces boisés classés, leur superficie est passée de 8 806 ha à 9 442 ha dans le nouveau plan local d'urbanisme. Dans ce cadre, le projet d'aménagement et de développement durables a défini des principes visant à préserver les coupures d'urbanisation et à maîtriser l'étalement urbain. L'annexe au rapport de présentation du plan local d'urbanisme justifie le classement de la dune de Narsot, où se trouve la parcelle du requérant, par le fait qu'elle se compose d'un boisement de pins maritimes relativement homogènes, typique du milieu environnant. La dune de Narsot est également identifiée comme appartenant au réservoir de biodiversité du massif landais. Le classement partiel de la parcelle n° 124 en zone naturelle et en espaces boisés classés, ces derniers concernant le versant le plus abrupt de la dune sur la parcelle n°124, vise ainsi à préserver le système dunaire et les paysages environnants. Un tel classement est ainsi cohérent avec les objectifs du projet d'aménagement et de développement durables au regard du diagnostic établi dans le rapport de présentation du plan local d'urbanisme.

8. Il ressort des pièces du dossier que la parcelle en litige, qui est vierge de constructions, présente une superficie importante et accueille des boisements. Elle s'ouvre au sud sur un très vaste espace naturel et forestier. Par suite, alors même que sa partie nord a été classée en zone AU et qu'elle serait desservie par les réseaux d'équipement, la partie considérée de la parcelle n° 124 pouvait, compte tenu de ses caractéristiques et de sa localisation, et cela sans erreur manifeste, être classée en zone N et en espaces boisés classés.

9. Il résulte de tout ce qui précède que M. B... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Bordeaux a rejeté sa demande. Par voie de conséquence, ses conclusions présentées au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative doivent être rejetées. En revanche, il y a lieu de faire application de ces dernières dispositions en mettant à la charge de M. B... la somme de 1 500 euros au titre des frais exposés par la commune de Lacanau et non compris dans les dépens.

DECIDE :

Article 1er : La requête n° 18BX02915 de M. H... B... est rejetée.

Article 2 : M. H... B... versera à la commune de Lacanau la somme de 1 500 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. H... B... et à la commune de Lacanau.

Délibéré après l'audience du 1er octobre 2019 à laquelle siégeaient :

Mme Elisabeth Jayat, président,

M. E... A..., président-assesseur,

Mme Caroline Gaillard, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 29 octobre 2019.

Le rapporteur,

Frédéric A...Le président,

Elisabeth JayatLe greffier,

Virginie Marty

La République mande et ordonne au préfet de la Gironde en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.

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N° 18BX02915


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