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12/11/2019 | FRANCE | N°17BX03096

France | France, Cour administrative d'appel de Bordeaux, 3ème chambre, 12 novembre 2019, 17BX03096


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme G... F... a demandé au tribunal administratif de Toulouse d'annuler la décision du 6 novembre 2015 par laquelle La Poste a déclaré l'accident de service qu'elle a subi le 3 février 2015 consolidé sans incapacité permanente partielle.

Par un jugement n°1505679 du 6 juillet 2017, le tribunal administratif de Toulouse a annulé cette décision et enjoint à La Poste de réexaminer la situation administrative de Mme F... dans un délai de deux mois.

Procédure devant la cour :

Par une

requête et un mémoire, enregistrés les 13 septembre 2017 et 19 avril 2019, La Poste, représent...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme G... F... a demandé au tribunal administratif de Toulouse d'annuler la décision du 6 novembre 2015 par laquelle La Poste a déclaré l'accident de service qu'elle a subi le 3 février 2015 consolidé sans incapacité permanente partielle.

Par un jugement n°1505679 du 6 juillet 2017, le tribunal administratif de Toulouse a annulé cette décision et enjoint à La Poste de réexaminer la situation administrative de Mme F... dans un délai de deux mois.

Procédure devant la cour :

Par une requête et un mémoire, enregistrés les 13 septembre 2017 et 19 avril 2019, La Poste, représentée par Me D..., demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Toulouse du 6 juillet 2017 ;

2°) de mettre à la charge de Mme F... la somme de 1 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- le motif d'annulation retenu par le tribunal administratif de Toulouse n'est pas fondé car Mme F... a bien été destinataire le 28 octobre 2015 du courrier l'informant de la tenue de la commission de réforme et ce courrier contenait les droits et garanties attachés à cette procédure ;

- les autres moyens développés par Mme F... en première instance ne sont pas davantage fondés car la décision du 6 novembre 2015 contestée est motivée et contient l'indication d'un avis de la commission de réforme, elle comporte le nom et la qualité de l'auteur de cette décision, et cette décision est fondée puisque son état est estimé consolidé au 4 juin 2015 sans IPP selon le médecin expert.

Par des mémoires en défense, enregistrés les 11 octobre 2017 et 7 mai 2019, Mme F..., représentée par Me A..., conclut au rejet de la requête, à ce qu'il soit enjoint à La Poste de prendre une nouvelle décision dans un délai d'un mois et sous astreinte de 150 euros par jour de retard, à ce que le jugement soit annulé en tant qu'il a mis à sa charge les frais d'expertise, de rectifier l'erreur matérielle dans le dispositif du jugement en ce qui concerne les frais de procès et de mettre à la charge de La Poste la somme de 2 000 euros à lui verser au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- la décision litigieuse, qui est dépourvue du nom et du prénom de son auteur, est intervenue en méconnaissance des dispositions de l'article 4 de la loi du 12 avril 2000 ;

- elle n'a pas été informée de la totalité de ses droits devant la commission de réforme en ce qu'elle n'a pas été informée de son droit à consulter son dossier médical, n'a pas disposé d'un délai de 8 jours entre la convocation et la réunion de la commission, le courrier de convocation n'émane pas d'un médecin ou d'un personnel administratif disposant d'une délégation de signature, le médecin de prévention n'a pas été informé de la réunion ;

- sur le fond, les moyens ne sont pas fondés.

Vu :

- les autres pièces du dossier.

Vu :

- la loi n°84-16 du 11 janvier 1984 ;

- le décret n°86-442 du 14 mars 1986 ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme E... H...,

- et les conclusions de Mme Béatrice Molina-Andréo, rapporteur public.

Considérant ce qui suit :

1. Mme G... F..., agent professionnel qualifié de premier niveau (APN1) de La Poste affectée à Valence d'Agen (Tarn), a été victime le 3 février 2015, durant son service, d'une chute de vélo. Par une décision du 17 février 2015, La Poste a reconnu cet accident imputable au service, puis par une décision du 6 novembre 2015, a déclaré cet accident de service consolidé au 4 juin 2015 sans incapacité permanente partielle. Mme F... a demandé au tribunal administratif de Toulouse d'annuler la décision du 6 novembre 2015 et le tribunal a fait droit à sa demande par un jugement n°1505679 du 6 juillet 2017. La Poste relève appel de ce jugement.

Sur les conclusions à fin d'annulation :

2. Le tribunal administratif de Toulouse a annulé la décision du 6 novembre 2015 de La Poste au motif qu'il ne ressortait pas des pièces du dossier que Mme F... ait été, préalablement à la réunion de la commission de réforme du 5 novembre 2015, informée de la date à laquelle serait examiné son dossier et de ses droits concernant la communication de son dossier et de la possibilité de se faire entendre ou de faire entendre le médecin et la personne de son choix. Toutefois et pour la première fois en appel, La Poste produit le courrier du 27 octobre 2015 que Mme F... a reçu le 28 octobre 2015, informant l'intéressée de ladite réunion de la commission de réforme.

3. Il résulte de ce qui précède que c'est à tort que le tribunal administratif s'est fondé sur le motif ci-dessus examiné, pour annuler la décision du 6 novembre 2015.

4. Toutefois, il appartient à la cour administrative d'appel, saisie de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens soulevés par Mme F... devant le tribunal administratif de Toulouse.

En ce qui concerne la légalité externe de la décision du 6 novembre 2015 :

5. En premier lieu, Mme F... fait valoir que la décision litigieuse, qui est dépourvue du nom et du prénom de son auteur, est intervenue en méconnaissance des dispositions de l'article 4 de la loi du 12 avril 2000. Cependant la décision en cause comporte la signature du directeur du " service courrier colis " de Midi Pyrénées Nord, lequel est identifié dans les visas de cette décision comme étant M. C... B.... La circonstance que le nom de ce signataire ne soit pas accolé à sa signature mais mentionné dans les visas de la décision est sans incidence sur la légalité de la décision attaquée, dès lors que l'auteur peut être identifié sans ambiguïté.

6. En deuxième lieu, Mme F... soutient que la décision serait insuffisamment motivée en droit et en fait dès lors qu'elle n'indique ni le sens ni la motivation de l'avis de la commission de réforme. Cependant, la décision du 6 novembre 2015 contient les éléments de droit et de fait permettant d'en apprécier la portée, quand bien même le sens de l'avis de la commission de réforme n'était pas indiqué.

7. En troisième lieu, l'article 19 du décret n°86-442 du 14 mars 1986 dispose que : "(...) Le fonctionnaire est invité à prendre connaissance, personnellement ou par l'intermédiaire de son représentant, de la partie administrative de son dossier. Un délai minimum de huit jours doit séparer la date à laquelle cette consultation est possible de la date de la réunion de la commission de réforme ; il peut présenter des observations écrites et fournir des certificats médicaux. /La commission de réforme, si elle le juge utile, peut faire comparaître le fonctionnaire intéressé. Celui-ci peut se faire accompagner d'une personne de son choix ou demander qu'une personne de son choix soit entendue par la commission de réforme (...) ".

8. Il ressort de la lecture du courrier du 27 octobre 2015 adressé par La Poste à Mme F..., laquelle en a accusé réception le 28 octobre 2015, que les informations exigées par les dispositions précitées ont bien été portées à sa connaissance, notamment la date de la réunion, la possibilité d'accéder à son dossier médical et de se faire entendre par la commission. Il ressort également des pièces du dossier qu'un délai de 8 jours a séparé la réception du courrier du 27 octobre 2015 et la date de la réunion de la commission le 5 novembre 2015.

9. En quatrième lieu, l'article 18 du décret n°86-442 du 14 mars 1986 dispose que : " Le médecin chargé de la prévention attaché au service auquel appartient le fonctionnaire dont le cas est soumis au comité médical ou à la commission de réforme est informé de la réunion et de son objet. Il peut obtenir, s'il le demande, communication du dossier de l'intéressé. Il peut présenter des observations écrites ou assister à titre consultatif à la réunion ; il remet obligatoirement un rapport écrit dans les cas prévus aux articles 26, 32, 34 et 43 ci-dessous (...) ".

10. Il ressort de ces dispositions que le médecin de prévention devait être informé de la tenue de la réunion de la commission de réforme ayant à examiner la situation de Mme F.... Toutefois, s'agissant de l'examen de la date de consolidation d'un accident de service et de la fixation d'un taux d'IPP, et alors qu'un expert avait été désigné pour examiner l'intéressée et avait rendu son rapport, l'absence d'une telle information n'a pas privé l'intéressée d'une garantie procédurale susceptible d'exercer, dans les circonstances de l'espèce, une influence sur le sens de la décision prise, dès lors en outre qu'il n'est pas soutenu que l'avis du médecin de prévention aurait été de nature à éclairer davantage la commission de réforme sur l'état de santé de Mme F....

11. En dernier lieu, selon l'article 6 du décret n°86-442 du 24 mars 1986 : " (...) Le secrétariat de chaque comité est assuré par un médecin désigné par le directeur départemental chargé de la cohésion sociale et placé sous l'autorité de celui-ci. ".

12. En tout état de cause, il ne ressort pas des pièces du dossier que le secrétariat de la commission de réforme n'aurait pas été assuré par un médecin. La circonstance, à la supposer établie que des agents non médecins assurent des tâches de secrétariat du comité médical ou de la commission de réforme, ne révèle pas, contrairement à ce que Mme F... soutient, une méconnaissance des dispositions citées ci-dessus.

En ce qui concerne la légalité interne :

13. Il ressort des pièces du dossier, que Mme F... a subi un accident reconnu imputable au service le 3 février 2015 en chutant à vélo sur une route dégradée et en se blessant au genou droit. Les conclusions de l'expertise médicale du 7 novembre 2016, ordonnée par le juge des référés du tribunal administratif de Toulouse le 27 janvier 2016, ainsi que l'examen clinique du docteur Lafontan du 4 juin 2015 et le compte-rendu de l'IRM réalisée, permettent d'éliminer la participation du genou à la boîterie. L'ensemble des éléments médicaux indiquent en outre que les conséquences de cet accident sont une atteinte minime de ce genou dont l'incapacité a déjà été prise en compte lors d'un précédent accident de service. Les médecins indiquent également que la boîterie résistante de Mme F... a pour origine une aponévrose plantaire sans lien avec le traumatisme du genou lors de l'accident du 3 février 2015. Et il ne ressort pas des pièces du dossier et notamment des éléments produits par Mme F... qu'il existerait un lien de causalité entre les douleurs et boîterie qu'elle présentait après le 4 juin 2015, date de la consolidation de son état, et l'accident de service du 3 février 2015. Par suite, elle n'est pas fondée à soutenir que les lésions imputables à l'accident de service en cause, ne pouvaient être regardées comme étant consolidées à compter du 4 juin 2015.

14. Il résulte de ce qui précède que La Poste est fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Toulouse a annulé sa décision du 6 novembre 2015.

Sur les frais d'expertise :

15. Compte tenu du rejet de la demande de Mme F... tel qu'exposé au point 13, il y a lieu de mettre à la charge définitive de cette dernière, les frais d'expertise, taxés et liquidés à la somme de 800 euros par l'ordonnance n°1505678 du président du tribunal administratif de Toulouse du 17 novembre 2016.

Sur les autres conclusions :

16. En conséquence de l'annulation du jugement du tribunal administratif de Toulouse du 6 juillet 2017 par le présent arrêt, les conclusions de Mme F... tendant à ce qu'il soit enjoint à La Poste de prendre une nouvelle décision dans un délai d'un mois sous astreinte de 150 euros par jour de retard, à ce que le jugement soit annulé en tant qu'il a mis à sa charge les frais d'expertise, et à ce que soit rectifiée l'erreur matérielle dans le dispositif du jugement en ce qui concerne les frais de procès, doivent être rejetées.

17. Enfin, les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce qu'une somme soit mise à la charge de La Poste au titre de ces dispositions, dès lors qu'elle n'est pas dans la présente instance la partie perdante. Il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de Mme F... la somme que La Poste demande sur le même fondement.

DECIDE :

Article 1er : Le jugement n°1505679 du 6 juillet 2017 du tribunal administratif de Toulouse est annulé.

Article 2 : La demande présentée par Mme F... devant le tribunal administratif de Toulouse ainsi que ses conclusions d'appel sont rejetées.

Article 3 : Les frais d'expertise, taxés et liquidés à la somme de 800 euros, sont mis à la charge définitive de Mme F....

Article 4 : Les conclusions de La Poste liées aux frais d'instance sont rejetées.

Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à Mme G... F... et à La Poste.

Délibéré après l'audience du 15 octobre 2019 à laquelle siégeaient :

M. Dominique Naves, président,

Mme E... H..., présidente-assesseure,

Mme Déborah de Paz, premier conseiller,

Lu en audience publique, le 12 novembre 2019.

La rapporteure,

Fabienne H... Le président,

Dominique NAVES Le greffier,

Christophe PELLETIER

La République mande et ordonne au ministre de l'économie et des finances en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.

2

N° 17BX03096


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Bordeaux
Formation : 3ème chambre
Numéro d'arrêt : 17BX03096
Date de la décision : 12/11/2019
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

36-05-04-01-03 Fonctionnaires et agents publics. Positions. Congés. Congés de maladie. Accidents de service.


Composition du Tribunal
Président : M. NAVES
Rapporteur ?: Mme Fabienne ZUCCARELLO
Rapporteur public ?: Mme MOLINA-ANDREO
Avocat(s) : DALBIN

Origine de la décision
Date de l'import : 16/12/2019
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.bordeaux;arret;2019-11-12;17bx03096 ?
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