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14/11/2019 | FRANCE | N°17BX01856

France | France, Cour administrative d'appel de Bordeaux, 4ème chambre, 14 novembre 2019, 17BX01856


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme D... E... a demandé au tribunal administratif de Toulouse de prononcer la décharge des compléments d'impôt sur le revenu et de contributions sociales auxquels elle a été assujettie au titre des années 2008 et 2009 ainsi que des pénalités y afférentes et, à titre subsidiaire, de prononcer la décharge de la majoration de 40 % qui lui a été appliquée au titre de l'article 1728 du code général des impôts.

Par un jugement n° 1403628 du 18 avril 2017, le tribunal administratif de Toulouse a

rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 13 jui...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme D... E... a demandé au tribunal administratif de Toulouse de prononcer la décharge des compléments d'impôt sur le revenu et de contributions sociales auxquels elle a été assujettie au titre des années 2008 et 2009 ainsi que des pénalités y afférentes et, à titre subsidiaire, de prononcer la décharge de la majoration de 40 % qui lui a été appliquée au titre de l'article 1728 du code général des impôts.

Par un jugement n° 1403628 du 18 avril 2017, le tribunal administratif de Toulouse a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 13 juin 2017, Mme E..., représentée par Me A..., demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Toulouse du 18 avril 2017 ;

2°) de prononcer la décharge des suppléments d'impôt sur le revenu et de prélèvements sociaux sociales mis à sa charge au titre des années 2008 et 2009 et, à titre subsidiaire, de prononcer la décharge de la majoration de 40 % ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 2 000 euros au titre des frais exposés et non compris dans les dépens.

Elle soutient que :

- s'agissant du compte ouvert à la Banque Postale sous le n° 0315201435 F, elle a produit des justificatifs pour l'ensemble des sommes qu'elle a reçues de Mme B... par mandats internationaux et qu'elle a reversées à son fils, M. F... J... ; l'absence de corrélation exacte entre les sommes qu'elle a encaissées et celles qu'elle a reversées ne peut suffire à retenir une absence de cause et d'origine de ces sommes, d'autant que l'administration a reconnu que 90 % des sommes versées par Mme B... étaient justifiées ; l'administration devait admettre que les sommes restantes, soit 21 813 euros en 2008 et 11 930 euros en 2009, provenaient également des sommes que Mme B... versait à son fils par son intermédiaire ;

- dès lors que l'administration a reconnu que 90 % des crédits inscrits au compte n° 0315201435 F étaient justifiés, elle doit admettre que ceux apparaissant sur ses autres comptes, soit 47 740 euros et 27 050 euros respectivement en 2008 et 2009, le sont aussi puisqu'ils ont la même origine ; elle justifie par des pièces probantes que les sommes, provenant de Mme B... et portées au crédit de ses autres comptes, ont été reversées à son fils ;

- les sommes de 10 950 euros et 11 250 euros regardées comme étant d'origine indéterminée proviennent de prêts amicaux consentis par des amies de longue date, Mmes K..., C... et G... ; le montant des sommes prêtées, sauf à une occasion, ne dépassent pas le seuil de 1 500 euros prévu par les dispositions de l'article 1341 du code civil ; elle justifie de l'existence de ces prêts par la production d'attestation constituant des commencements de preuve écrite ; l'exigence de production de preuve écrite ne peut pas lui être opposée car elle ne maîtrise pas la langue française ; les montants des versements provenant de Mmes C... et G... sont tellement dérisoires qu'il ne peut s'agir que de prêts amicaux visant à procurer une aide momentanée ; il s'agit de prêts consentis dans le cadre de relations amicales et familiales étroites, il appartient au service d'établir leur caractère imposable ;

- la décision de lui appliquer la majoration de 40 % aurait dû être signée par un inspecteur principal conformément aux dispositions de l'article L. 80 E du livre des procédures fiscales ;

- l'administration ne démontre pas qu'elle était tenue de souscrire une déclaration de revenu global en vertu de l'article 170 du code général des impôts, si bien que la procédure ayant conduit à l'application d'une majoration de 40 % au titre de l'article 1728-1-b du code général des impôts est viciée ; en effet, les mises en demeure de déclarer auraient dû être précédées d'un débat oral et contradictoire ; or, en l'espèce, leur notification était concomitante à celle de l'avis de vérification ;

- la sanction prévue par l'article 1758 A du code général des impôts est définie en fonction des droits supplémentaires ou de la créance indue à l'exclusion des impositions initiales et ne peut être cumulée avec celle prévu par l'article 1728 du même code.

Par un mémoire, enregistré le 4 décembre 2017, le ministre de l'action et des comptes publics conclut au rejet de la requête. Il soutient que les moyens soulevés par la requérante ne sont pas fondés.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. I... H...,

- et les conclusions de Mme Sabrina Ladoire, rapporteur public.

Considérant ce qui suit :

1. Mme E... a fait l'objet d'un examen contradictoire de sa situation fiscale personnelle portant sur les années 2007 à 2009 à l'issue duquel l'administration fiscale a notamment imposé au titre des années 2008 et 2009 des revenus d'origine indéterminée. Mme E... relève appel du jugement en date du 18 avril 2017 par lequel le tribunal administratif de Toulouse a rejeté sa demande en décharge des compléments d'impôt sur le revenu auxquels elle a été assujettie ainsi que des pénalités y afférentes, y compris la majoration de 40 % qui lui a été appliquée au titre de l'article 1728 du code général des impôts.

Sur le bien-fondé des impositions :

2. Mme E... n'a justifié qu'une partie des discordances constatées par le service fiscal à l'examen de ses comptes bancaires entre les revenus déclarés et les crédits à sa disposition. Le surplus des crédits dont l'origine est demeurée injustifiée a été taxé d'office en application des articles L. 16 et L. 69 du livre des procédures fiscales. En vertu des articles L. 193 et R. 193-1 du livre des procédures fiscales, il appartient au contribuable qui entend contester devant le juge de l'impôt le bien-fondé de l'imposition de sommes régulièrement taxées d'office d'apporter la preuve du caractère exagéré des impositions mises à sa charge.

3. En premier lieu, il résulte de l'instruction que l'administration a constaté l'existence de dépôt d'espèces sur le compte n° 0315201435 F de Mme E... à la Banque postale pour des montants de 234 018 euros en 2008 et 137 480 euros en 2009. Sur ces sommes, l'administration a admis que l'origine des sommes de 212 205 euros en 2008 et de 137 480 euros en 2009 et leur nature étaient justifiées par la contribuable qui a établi qu'il s'agissait de versements de Mme B... destinés à son fils, M. J... qui avaient transité sur son compte bancaire. En revanche, Mme E... ne justifie pas que le solde de ces crédits d'origine injustifiée détectés par le service, sans que ce dernier se soit d'ailleurs livré à une analyse des débits du compte, correspondait également à des versements de fonds destinés à son fils et ayant seulement transité par son compte bancaire, sur la base d'une simple attestation de Mme B..., l'intéressée ne pouvant se fonder sur aucune présomption d'origine des crédits encore en litige du fait que l'administration a déjà admis les transferts justifiés.

4. En deuxième lieu, Mme E... n'apporte aucun élément permettant de justifier l'origine et la nature des dépôts d'espèces de 47 740 euros en 2008 et 27 050 euros en 2009, effectués sur les comptes n° 1072811R037 ouvert à la Banque Postale, n° 00020012960 et 00020012940 ouverts au Crédit Mutuel et n° 04550638600 ouvert à la Caisse d'Epargne. Elle ne peut prétendre que ces comptes servaient au transit de fonds destinés à son fils en l'absence de tout élément probant permettant de le démontrer et au seul motif que l'administration avait admis cette explication pour la majeure partie des crédits identifiés sur son compte à la Banque postale.

5. Enfin, Mme E... affirme que les versements de 9 700 euros en 2008 et de 11 500 euros en 2009 encaissées par chèques sur les comptes n° 1072811R037 ouvert à la Banque Postale, n° 00020012960 et 00020012940 ouverts au Crédit Mutuel et n° 04550638600 ouvert à la Caisse d'Epargne correspondent à des sommes prêtées par des amies.

6. Toutefois, Mme E... ne justifie d'aucun lien familial avec Mmes K..., C... et G... dont elle soutient qu'elles lui auraient consenti de tels prêts. Elle ne peut donc se prévaloir d'une présomption d'existence de prêts familiaux. Et elle ne justifie pas non plus de la réalité de prêts sur la base d'attestations de Mme K... et de Mme C... dépourvues de précision et de toute valeur probante et ne permettant pas d'établir l'existence de contrats de prêt et les modalités de leur remboursement. La circonstance qu'elle ne maîtrise pas le français et que certaines sommes sont d'un faible montant ne saurait l'exonérer de justifier de l'origine des versements en litige.

7. C'est ainsi à bon droit que l'administration a qualifié à bon droit les sommes restant en litige de revenus d'origine indéterminée.

Sur les pénalités :

8. Aux termes de l'article 170 du code général des impôts: " 1. En vue de l'établissement de l'impôt sur le revenu, toute personne imposable audit impôt est tenue de souscrire et de faire parvenir à l'administration une déclaration détaillée de ses revenus et bénéfices, de ses charges de famille et des autres éléments nécessaires au calcul de l'impôt sur le revenu (...) Lorsque le contribuable n'est pas imposable à raison de l'ensemble de ses revenus ou bénéfices, la déclaration est limitée à l'indication de ceux de ces revenus ou bénéfices qui sont soumis à l'impôt sur le revenu (...) ". Aux termes de l'article 1728 du même code : " 1. Le défaut de production dans les délais prescrits d'une déclaration ou d'un acte comportant l'indication d'éléments à retenir pour l'assiette ou la liquidation de l'impôt entraîne l'application, sur le montant des droits mis à la charge du contribuable ou résultant de la déclaration ou de l'acte déposé tardivement, d'une majoration de : / (...) b. 40 % lorsque la déclaration ou l'acte n'a pas été déposé dans les trente jours suivant la réception d'une mise en demeure, notifiée par pli recommandé, d'avoir à le produire dans ce délai ".

9. En premier lieu, il n'est pas contesté que Mme E... était domiciliée en France au sens des dispositions de l'article 4 B du code général des impôts. Par suite, elle était tenue de souscrire une déclaration de revenus au titre de chacune des années 2008 et 2009, quels que soient le montant de ses ressources et la nature de son activité et sans que l'administration ait à engager un débat oral et contradictoire. L'administration était fondée à appliquer la majoration de 40 % prévue par le b du 1 de l'article 1728 du code général des impôts dès lors qu'elle justifie que Mme E... n'avait déposé les déclarations de ses revenus des années 2008 et 2009 que le 3 septembre 2010, en dépit de la réception, le 29 juin 2010, des mises en demeure lui demandant de souscrire les déclarations dans le délai de trente jours.

10. Enfin, Mme E... ne peut utilement se prévaloir des dispositions de l'article L. 80 E du livre des procédures fiscales ou de celles de l'article 1758 A du code général des impôts qui ne sont pas applicables lorsqu'une majoration a été infligée sur le fondement du b du 1 de l'article 1728 du code général des impôts.

11. Il résulte de tout ce qui précède que Mme E... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que le tribunal administratif de Toulouse a rejeté ses demandes.

Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

13. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce qu'il soit mis à la charge de l'État, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, la somme que demande Mme E... au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens.

DECIDE :

Article 1er : La requête de Mme E... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme D... E... et au ministre de l'action et des comptes publics.

Copie en sera adressée à la direction spécialisée de contrôle fiscal sud-ouest.

Délibéré après l'audience du 17 octobre 2019 à laquelle siégeaient :

M. Philippe Pouzoulet, président,

M. Dominique Ferrari, président assesseur,

M. I... H..., premier conseiller,

Lu en audience publique, le 14 novembre 2019.

Le rapporteur,

Stéphane H...Le président,

Philippe PouzouletLa greffière,

Sylvie Hayet

La République mande et ordonne au ministre de l'action et des comptes publics en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.

2

N° 17BX01856


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Bordeaux
Formation : 4ème chambre
Numéro d'arrêt : 17BX01856
Date de la décision : 14/11/2019
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

19-04 Contributions et taxes. Impôts sur les revenus et bénéfices.


Composition du Tribunal
Président : M. POUZOULET
Rapporteur ?: M. Stéphane GUEGUEIN
Rapporteur public ?: Mme LADOIRE
Avocat(s) : DUPEY

Origine de la décision
Date de l'import : 16/12/2019
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.bordeaux;arret;2019-11-14;17bx01856 ?
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