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28/11/2019 | FRANCE | N°17BX00221

France | France, Cour administrative d'appel de Bordeaux, 4ème chambre, 28 novembre 2019, 17BX00221


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La SARL Tarens a demandé au tribunal administratif de Poitier d'annuler la décision du 23 juillet 2014 par laquelle le directeur départemental des finances publiques de Charente-Maritime a refusé de lui accorder le bénéfice de l'option pour le régime d'intégration fiscale prévue par l'article 223 A du code général des impôts.

Par une ordonnance n° 1402619 du 18 novembre 2016, le président du tribunal administratif de Poitiers a rejeté cette demande.

Procédure devant la cour :

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r une requête et un mémoire, enregistrés le 19 janvier 2017 et le 19 mars 2019, la SARL Tarens, ...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La SARL Tarens a demandé au tribunal administratif de Poitier d'annuler la décision du 23 juillet 2014 par laquelle le directeur départemental des finances publiques de Charente-Maritime a refusé de lui accorder le bénéfice de l'option pour le régime d'intégration fiscale prévue par l'article 223 A du code général des impôts.

Par une ordonnance n° 1402619 du 18 novembre 2016, le président du tribunal administratif de Poitiers a rejeté cette demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête et un mémoire, enregistrés le 19 janvier 2017 et le 19 mars 2019, la SARL Tarens, représentée par la SELARL Thomas et associés, demande à la cour :

1°) d'annuler l'ordonnance rendue par le président du tribunal administratif de Poitiers le 18 novembre 2016 ;

2°) d'annuler la décision du 23 juillet 2014 par laquelle le directeur départemental des finances publiques de Charente-Maritime a refusé de lui accorder le bénéfice de son option pour le régime d'intégration fiscale prévue par l'article 223 A du code général des impôts ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- la décision attaquée est une décision détachable de la procédure d'imposition, pouvant faire l'objet d'un recours pour excès de pouvoir ; d'ailleurs la décision contestée a été prise sans mise en oeuvre de la procédure de rectification de l'impôt déclaré et des garanties associées à la procédure de rectification ;

- la société et ses filiales ont concrétisé les demandes d'option pour la mise en oeuvre du régime de l'intégration fiscale dans les délais prescrits par le deuxième alinéa du 1 de l'article 223 du code général des impôts ; elle est ainsi fondée à revendiquer le bénéfice des dispositions de l'article 223 A du code général des impôts.

Par un mémoire en défense enregistré le 3 août 2017, le ministre de l'action et des comptes publics conclut au rejet de la requête.

Il fait valoir que :

- la décision relative aux conditions de mise en oeuvre de l'option pour le régime de groupe ne présente pas le caractère d'un acte détachable. Cette décision a été prise dans le cadre de la procédure d'imposition et ne peut donc être déférée au juge de l'excès de pouvoir. La validité de l'option exercée ne peut être examinée que dans le cadre d'un recours contentieux formé dans les conditions prévues aux articles R. 190-1 et suivants du livre des procédures fiscales. Le recours pour excès de pouvoir exercé n'est donc pas recevable. Par ailleurs, en refusant à la requérante le bénéfice de l'option pour le régime de groupe, l'administration n'a jamais entendu notifier au contribuable un quelconque rehaussement.

- la société ne remplit pas les conditions permettant de bénéfice de l'option pour le régime de l'intégration fiscale ; le délai prévu au 7ème alinéa de l'article 223 A et au 2ème alinéa du 1 de l'article 223 du CGI pour faire la demande d'option n'a pas été respecté ; par ailleurs, en application des dispositions du III de l'article 223 A du CGI, les exercices des sociétés du groupe n'ayant pas été ouverts aux mêmes dates, le dispositif d'intégration ne pouvait s'appliquer ; enfin, deux des sociétés du groupe ayant été créées le 11 janvier 2013, la condition relative à la clôture d'un premier exercice avant l'entrée dans le groupe ne pouvait pas être remplie.

Par ordonnance du 20 février 2019, la clôture d'instruction a été fixée au 20 mars 2019 à 12h00.

Un mémoire présenté pour la SARL Tarens a été enregistré le 22 octobre 2019.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. B... A...,

- et les conclusions de Mme Sabrina Ladoire, rapporteur public.

Considérant ce qui suit :

1. La SARL Tarens exploite une activité de gestion de fonds. Elle détient intégralement la société Tardet Transports, ayant une activité de transports routiers de fret interurbains, ainsi que 98 % des parts des sociétés Tardet Loc et Tarens Lr opérant dans la location de camions avec chauffeur, la location et la location-bail de camions. La SARL Tarens a adressé à l'administration fiscale le 25 juin 2014 un courriel transmettant des lettres d'option pour le régime d'intégration fiscale prévu par les articles 223 A et suivants du code général des impôts, à compter du 1er janvier 2013. Par un courrier du 1er juillet 2014, puis par une lettre du 23 juillet 2014, le directeur départemental des finances publiques de Charente-Maritime a rejeté la demande d'option pour tardiveté. La SARL Tarens interjette appel de l'ordonnance par laquelle le président du tribunal administratif de Poitiers a rejeté sa requête qu'il a regardée comme dirigée contre un acte insusceptible de recours et pouvant seulement être contesté dans un litige de plein contentieux devant le juge de l'impôt.

2. Aux termes du deuxième alinéa du 1 de l'article 223 du code général des impôts dans sa rédaction applicable au litige : " (...) la déclaration du bénéfice ou du déficit est faite dans les trois mois de la clôture de l'exercice. Si l'exercice est clos le 31 décembre ou si aucun exercice n'est clos au cours d'une année, la déclaration est à déposer jusqu'à une date fixée par décret et au plus tard le deuxième jour ouvré suivant le 1er mai ". Aux termes du premier alinéa de l'article 223 A du code général des impôts dans sa rédaction applicable au litige : " Une société peut se constituer seule redevable de l'impôt sur les sociétés dû sur l'ensemble des résultats du groupe formé par elle-même et les sociétés dont elle détient 95 % au moins du capital, de manière continue au cours de l'exercice, directement ou indirectement par l'intermédiaire de sociétés ou d'établissements stables membres du groupe (...) ". Aux termes du 7ème alinéa du même article : " Les sociétés du groupe et, sous réserve de la réglementation étrangère qui leur est applicable, les sociétés intermédiaires doivent ouvrir et clore leurs exercices aux mêmes dates ; les exercices ont en principe, une durée de douze mois. Par exception, la durée d'un exercice des sociétés du groupe peut être inférieure ou supérieure à douze mois, sans préjudice des dispositions de l'article 37. Cette exception ne peut s'appliquer qu'une seule fois au cours d'une période couverte par une même option. La modification de la date de clôture de l'exercice doit être notifiée au plus tard à l'expiration du délai prévu au deuxième alinéa du 1 de l'article 223 pour le dépôt de la déclaration de résultat de l'exercice précédant le premier exercice concerné. Les options mentionnées aux premier, deuxième ou troisième alinéas sont notifiées au plus tard à l'expiration du délai prévu au deuxième alinéa du 1 de l'article 223 pour le dépôt de la déclaration de résultat de l'exercice précédant celui au titre duquel le régime défini au présent article s'applique (...) ". Aux termes de l'article 46 quater-0 ZD de l'annexe III à ce code : " Les options mentionnées aux premier, deuxième et troisième alinéas de l'article 223 A du code général des impôts sont notifiées au service des impôts auprès duquel est souscrite la déclaration du résultat d'ensemble. / La société mère adresse à ce même service : / 1. Lors de la notification de l'option : / a) la liste des personnes morales et des établissements stables qui seront membres du groupe. (...) / b) Des attestations par lesquelles les sociétés filiales font connaître leur accord pour que la société mère retienne leurs propres résultats pour la détermination du résultat d'ensemble ; / (...) 2. Au plus tard à l'expiration du délai de dépôt de la déclaration de résultat de chacun des exercices arrêtés au cours de la période de validité de l'option : / a) La liste des sociétés qui seront membres du groupe défini à l'article 223 A du code général des impôts, au titre de l'exercice suivant ; (...) ". Enfin, aux termes de l'article 46 quater-0 ZE de l'annexe III au même code : " Les sociétés filiales qui acceptent de faire partie du groupe défini à l'article 223 A du code général des impôts adressent l'attestation mentionnée à l'article 46 quater-0 ZD au service dont elles relèvent au plus tard à l'expiration du délai de dépôt de la déclaration de résultat de l'exercice précédant celui au titre duquel le régime défini à l'article 223 A précité s'applique (...) ".

3. Lorsqu'une société notifie au service des impôts dont elle relève l'option pour la constitution d'un groupe fiscal intégré dans les conditions définies à l'article 46 quater-0 ZD de l'annexe III au code général des impôts, le refus que lui oppose l'administration au motif qu'elle ne remplit pas les conditions pour bénéficier du régime de l'intégration fiscale prévu aux articles 223 A et suivants de ce code présente le caractère d'une décision faisant grief, eu égard aux effets qu'elle emporte pour cette société comme pour ses filiales. Compte tenu des enjeux économiques qui motivent l'option pour l'intégration fiscale et des effets notables autres que fiscaux qui sont susceptibles de résulter du refus opposé par l'administration pour les sociétés concernées, cette décision peut être contestée par la voie du recours pour excès de pouvoir, nonobstant la circonstance que les sociétés concernées pourraient ultérieurement former un recours de plein contentieux devant le juge de l'impôt en vue d'obtenir, le cas échéant, les restitutions d'impôt résultant de la constitution d'un groupe fiscal intégré.

4. Il résulte de ce qui précède que c'est à tort que le président du tribunal administratif de Poitiers a rejeté la demande de la société comme étant dirigée contre un acte insusceptible de recours pour excès de pouvoir.

5. Il y a lieu pour la Cour, de se prononcer par la voie de l'évocation sur les conclusions à fin d'annulation présentées par la SARL Tarens.

6. Pour rejeter la demande d'option pour le régime d'intégration fiscale formulée par la SARL Tarens, l'administration fiscale a considéré que cette option n'avait pas été effectuée dans le délai prévu au 2ème alinéa du 1 de l'article 223 du code général des impôts auquel renvoie l'article 223 A du même code. Il résulte de ces dispositions que l'option pour le régime de groupe par la société mère doit être notifiée à l'administration fiscale au plus tard à l'expiration du délai prévu pour le dépôt de la déclaration de résultats de l'exercice précédant celui au titre duquel le régime s'applique. Ce délai est fixé au dernier jour du troisième mois suivant celui de la clôture de l'exercice ou pour les exercices qui coïncident avec l'année civile, au deuxième jour ouvré suivant le 1er mai, soit en l'espèce le 3 mai 2013. Par ailleurs, il résulte des dispositions précitées des articles 46 quater-0 ZD et ZE de l'annexe III au code général des impôts que la demande d'option qui peut être notifiée jusqu'à la date de dépôt de la déclaration de résultats de l'exercice précédant celui au titre duquel elle est exercée, doit être accompagnée de l'accord formel des sociétés qui remplissent les conditions requises pour faire partie du périmètre d'intégration ainsi que de la liste des sociétés qui seront membres du groupe. En l'espèce, il ressort des pièces du dossier, que la société requérante a produit dans un courriel adressé à l'administration fiscale le 25 juin 2014, les lettres d'option et d'accord des sociétés intégrées en faisant valoir qu'il s'agissait de copies des documents originaux adressés à l'administration fiscale le 18 janvier 2013 et le 5 février 2013. Toutefois, comme le fait valoir l'administration, les bordereaux de recommandés datés des 21 janvier 2013 et 19 février 2013 ne permettent pas de justifier des documents envoyés.

7. D'autre part, pour rejeter la demande d'option de la société requérante, l'administration a également constaté que les sociétés Tardet Loc et Tarens Lr n'avaient pas retenu les mêmes dates d'ouverture d'exercice que la société requérante, société mère, contrairement à ce que prévoient les dispositions précitées de l'article 223 A du code général des impôts. En effet, il est constant que la date d'ouverture d'exercice de ces deux sociétés était le 11 janvier 2013, date de leur création, alors que celle de la société requérante et de la société Tardet Transports était fixée au 1er janvier 2013. Dès lors, les exercices des sociétés du groupe n'ayant pas été ouverts aux mêmes dates, c'est à bon droit que l'administration a estimé que le dispositif d'intégration fiscale, en tout état de cause, ne pouvait s'appliquer à compter du 1er janvier 2013 comme l'avait demandé la SARL Tarens.

8. Il résulte de ce qui précède que la SARL Tarens n'est pas fondée à demander l'annulation de la décision attaquée.

9. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que l'Etat, qui n'a pas la qualité de partie perdante dans la présente instance, verse une quelconque somme à la SARL Tarens au titre des frais qu'elle a exposés à l'occasion du litige.

DECIDE :

Article 1er : L'ordonnance du président du tribunal administratif de Poitiers du 18 novembre 2016 est annulée.

Article 2 : Le surplus des conclusions de la requête de la SARL Tarens est rejeté.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à la SARL Tarens et au ministre de l'action et des comptes publics.

Copie en sera adressée à la direction spécialisée de contrôle fiscal sud-ouest.

Délibéré après l'audience du 31 octobre 2019, à laquelle siégeaient :

M. Philippe Pouzoulet, président,

M. B... A..., président-assesseur,

M. Stéphane Gueguein, premier conseiller,

Lu en audience publique, le 28 novembre 2019.

Le rapporteur,

Dominique A...Le président

Philippe PouzouletLe greffier,

Sylvie Hayet

La République mande et ordonne au ministre de l'action et des comptes publics et à tous huissiers de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.

N° 17BX00221 2


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Bordeaux
Formation : 4ème chambre
Numéro d'arrêt : 17BX00221
Date de la décision : 28/11/2019
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

Contributions et taxes - Règles de procédure contentieuse spéciales - Questions communes - Pouvoirs du juge fiscal - Recours pour excès de pouvoir - Décisions susceptibles de recours.

Procédure - Introduction de l'instance - Décisions pouvant ou non faire l'objet d'un recours - Actes constituant des décisions susceptibles de recours - Actes détachables d'une opération relevant du plein contentieux.


Composition du Tribunal
Président : M. POUZOULET
Rapporteur ?: M. Dominique FERRARI
Rapporteur public ?: Mme LADOIRE
Avocat(s) : SELARL THOMAS et ASSOCIES

Origine de la décision
Date de l'import : 16/12/2019
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.bordeaux;arret;2019-11-28;17bx00221 ?
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