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04/02/2020 | FRANCE | N°17BX03001

France | France, Cour administrative d'appel de Bordeaux, 5ème chambre, 04 février 2020, 17BX03001


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société Saforj, société à responsabilité limitée (SARL), a demandé au tribunal administratif de Bordeaux d'annuler l'arrêté du 2 juin 2015 par lequel le maire de la commune de Trélissac a accordé au groupement agricole d'exploitation en commun (GAEC) des Deux Étangs, un permis de construire en vue de l'extension d'une porcherie, l'installation d'une ligne de cheminée de ventilation et la création d'un silo, sur les parcelles cadastrées section BS n° 0007, 0046, 0054, 0056 et section BV n° 0127,

0128, 0166, 0238, 0242 et 0245, et la décision du 18 septembre 2015 par laquell...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société Saforj, société à responsabilité limitée (SARL), a demandé au tribunal administratif de Bordeaux d'annuler l'arrêté du 2 juin 2015 par lequel le maire de la commune de Trélissac a accordé au groupement agricole d'exploitation en commun (GAEC) des Deux Étangs, un permis de construire en vue de l'extension d'une porcherie, l'installation d'une ligne de cheminée de ventilation et la création d'un silo, sur les parcelles cadastrées section BS n° 0007, 0046, 0054, 0056 et section BV n° 0127, 0128, 0166, 0238, 0242 et 0245, et la décision du 18 septembre 2015 par laquelle cette même autorité a rejeté son recours gracieux formé contre cet arrêté.

Par un jugement n° 1504743 du 30 juin 2017, le tribunal administratif de Bordeaux a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête, des mémoires et des pièces, enregistrés le 1er septembre 2017, le 13 septembre 2017, le 7 juin 2019, le 12 juillet 2019 et le 13 septembre 2019, le 16 septembre 2019, le 29 octobre 2019 et le 15 novembre 2019, la SARL Saforj, représentée par Me G..., demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Bordeaux du 30 juin 2017 ;

2°) d'annuler l'arrêté du maire de la commune de Trélissac du 2 juin 2015 et la décision du 18 septembre 2015 mentionnés ci-dessus ;

3°) subsidiairement d'ordonner une expertise relative au nombre d'animaux présents dans son exploitation, à la réalité et à l'intensité des nuisances olfactives que créerait l'exploitation pour les occupants des habitations voisines et à la situation et au mode de fonctionnement de l'exploitation ;

4°) en tout état de cause, de mettre à la charge de la commune de Trélissac et du GAEC des Deux Etangs la somme de 5 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- contrairement à ce qu'a jugé le tribunal, elle justifie d'un intérêt direct lui permettant de contester les décisions en litige eu égard aux nuisances olfactives et à la pollution des eaux pluviales induites par le projet d'extension de la porcherie ; en outre elle conserve une vue directe sur l'exploitation compte tenu de l'ampleur de l'extension ;

- l'installation en litige est soumise à l'article R. 122-2 du code de l'environnement ; dès lors, en application de l'article R. 431-16 du code de l'urbanisme le projet aurait dû faire l'objet d'une étude d'impact ou, à défaut, d'une décision de l'autorité environnementale ;

- le projet méconnait les articles A2 et A4 du plan local d'urbanisme (PLU) en l'absence de traitement des eaux pluviales et de référence aux modalités d'évacuation des effluents et des eaux usées ;

- le projet méconnait l'article A3 du PLU en l'absence de desserte suffisante du projet ;

- le projet méconnait l'article A8 du PLU relative aux règles d'implantation des bâtiments ;

- le projet méconnait l'article 12 du PLU en l'absence dans le projet d'aires de stationnement nécessaires aux véhicules ;

- le projet méconnait l'article A 11 du PLU en l'absence de respect des règles relatives à l'aspect extérieur des constructions ;

- le projet méconnait l'article R. 111-2 du code de l'urbanisme dès lors qu'il ne respecte pas le principe de sécurité publique :

- le projet méconnait l'article R. 111-15 du code de l'urbanisme dès lors qu'il porte atteinte à l'environnement ;

- le traitement des litières cumulées n'étant pas précisé, le projet ne pouvait recevoir autorisation.

Par des mémoires en défense, enregistrés le 9 avril 2019, le 10 juillet 2019 et le 16 septembre 2019, la commune de Trélissac, représentée par Me B..., conclut au rejet de la requête et à ce qu'il soit mis à la charge de la société Saforj la somme de 2 500 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que la demande de première instance était irrecevable à défaut d'intérêt pour agir de la société Saforj et subsidiairement qu'aucun des moyens de la requête n'est fondé.

Par des mémoires en défense, enregistrés le 7 juin 2019, le 11 juillet 2019, le 13 septembre 2019, le 16 septembre 2019 et le 28 octobre 2019, le groupement agricole d'exploitation en commun (GAEC) des Deux Etangs venant aux droits de l'exploitation agricole à responsabilité limitée (EARL) Domaine de la Jarthe, représenté par Me A..., conclut au rejet de la requête et à ce qu'il soit mis à la charge de la SARL Saforj une somme de 5 000 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- la demande de première instance était irrecevable à défaut de justification d'une demande préalable d'annulation ayant pu proroger le délai de recours ; ainsi, le recours de la société Saforj est tardif ; la société ne justifie pas de sa qualité et d'un intérêt pour agir ;

- subsidiairement, aucun des moyens de la requête n'est fondé.

Par ordonnance du 31 octobre 2019, la clôture d'instruction a été fixée, en dernier lieu, au 15 novembre 2019 à 12h00.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code général des collectivités territoriales ;

- le code de l'environnement ;

- le code de l'urbanisme ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme D... F...,

- les conclusions de Mme Sylvande Perdu, rapporteur public,

- et les observations de Me G..., représentant la SARL Saforj, de Me B... du cabinet Seban Nouvelle Aquitaine substituant le cabinet Chapon, représentant la commune de Trélissac, et de Me A..., représentant le GAEC des Deux Etangs.

Considérant ce qui suit :

1. Par un arrêté du 2 juin 2015, le maire de la commune de Trélissac (Dordogne) a délivré au nom de la commune, au groupement agricole d'exploitation en commun (GAEC) des Deux étangs, un permis de construire en vue de l'extension d'une porcherie, de l'installation d'une ligne de cheminée de ventilation et de la création d'un silo. Par décision du 18 septembre 2015, cette même autorité a rejeté le recours gracieux formé le 16 juillet 2015 par la société Saforj contre cet arrêté. La société Saforj relève appel du jugement par lequel le tribunal administratif de Bordeaux a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté précité et de la décision rejetant son recours gracieux.

Sur la régularité du jugement attaqué :

2. Il résulte de l'article L. 600-1-2 du code de l'urbanisme qu'il appartient, en particulier, à tout requérant qui saisit le juge administratif d'un recours pour excès de pouvoir tendant à l'annulation d'un permis de construire, de démolir ou d'aménager, de préciser l'atteinte qu'il invoque pour justifier d'un intérêt lui donnant qualité pour agir, en faisant état de tous éléments suffisamment précis et étayés de nature à établir que cette atteinte est susceptible d'affecter directement les conditions d'occupation, d'utilisation ou de jouissance de son bien. Il appartient au défendeur, s'il entend contester l'intérêt à agir du requérant, d'apporter tous éléments de nature à établir que les atteintes alléguées sont dépourvues de réalité. Le juge de l'excès de pouvoir apprécie la recevabilité de la requête au vu des éléments ainsi versés au dossier par les parties, en écartant le cas échéant les allégations qu'il jugerait insuffisamment étayées mais sans pour autant exiger de l'auteur du recours qu'il apporte la preuve du caractère certain des atteintes qu'il invoque au soutien de la recevabilité de celui-ci. Eu égard à sa situation particulière, le voisin immédiat justifie, en principe, d'un intérêt à agir lorsqu'il fait état devant le juge, qui statue au vu de l'ensemble des pièces du dossier, d'éléments relatifs à la nature, à l'importance ou à la localisation du projet de construction.

3. Il ressort des pièces du dossier que le projet prévoit en vue de restructurer la porcherie, l'installation d'une ligne de cheminée de ventilation, la création d'un silo, mais aussi la construction d'un nouveau bâtiment destiné à abriter 264 animaux. Il n'est pas contesté que les habitations les plus proches de ce nouveau bâtiment, dont la société Saforj est propriétaire, se trouveront à moins de 150 mètres et que le jardin de ces habitations est quant à lui à seulement 50 mètres du bâtiment d'extension ce qui permet d'établir, alors même que le nombre des animaux accueillis sera E..., selon les affirmations du GAEC des Deux étangs, que les nuisances olfactives liées à la présence d'animaux sont susceptibles d'être accrues. Dans ces conditions, la société Saforj, en sa qualité de voisin immédiat du projet d'extension, justifie d'un intérêt suffisamment direct et étayé pour contester l'arrêté en litige.

4. Par suite c'est à tort que le tribunal a jugé que la requête de la société Saforj était irrecevable au motif qu'elle ne justifiait pas d'un intérêt suffisant pour agir.

5. Le GAEC des Deux étangs soutient que la demande de première instance était irrecevable car tardive, en l'absence de recours préalable de la société demanderesse ayant conservé le délai, dès lors que le recours gracieux a été présenté par une société dénommée Saforg et non Saforj. Il ressort des pièces du dossier qu'à la suite de l'affichage du permis en litige le 9 juin 2015, un recours gracieux a été présenté le 16 juillet 2015 par voie de lettre recommandée avec demande d'accusé de réception et qu'en réponse à ce recours gracieux, un courrier de rejet, en date du 18 septembre 2015, a été adressé à maitre Pommier, représentant la société Saforj. En l'absence de risque de confusion avec une autre société, l'erreur sur la dénomination de la société auteur du recours doit être regardée comme une simple erreur de plume, sans incidence sur la régularité du recours gracieux qui a ainsi prorogé le délai de recours contentieux. Par suite, la demande introduite le 20 octobre 2015 par la société Saforj n'était pas tardive.

6. Contrairement à ce que soutient le GAEC des Deux étangs, il ressort par ailleurs des pièces du dossier que la société Saforj est inscrite au registre du commerce et des sociétés. Il ressort également des baux qu'elle produit concernant les habitations qu'elle donne en location que la société Saforj est propriétaire des parcelles voisines du projet. Par suite, elle justifie de sa capacité et de sa qualité pour demander l'annulation du permis de construire contesté.

7. Il résulte de ce qui précède que c'est à tort que le tribunal rejeté la requête de la société Saforj comme irrecevable. Il y a lieu, par suite, d'annuler le jugement attaqué, d'évoquer et de statuer sur la demande de première instance.

Sur la légalité du permis de construire du 2 juin 2015 :

En ce qui concerne l'incompétence du signataire de l'arrêté en litige :

8. Il ressort des pièces du dossier que par un arrêté du 11 juillet 2014 régulièrement publié au registre des arrêtés du maire et transmis en préfecture le 17 juillet suivant, le maire de la commune de Trélissac a délégué M. C... E..., adjoint au maire, à l'urbanisme, l'arrêté précisant que cette délégation concerne les " fonctions et missions relatives aux questions liées à l'instruction et à la délivrance des autorisations d'urbanisme et d'utilisation des sols énoncés au code de l'urbanisme : (...) - Permis de construire et d'aménager (...) ". Ainsi, le moyen tiré de ce que M. C... E... n'aurait pas été compétent pour prendre l'arrêté contesté doit être écarté.

En ce qui concerne la méconnaissance de l'article R. 122-2 du code de l'urbanisme :

9. Aux termes de l'article R. 122-2 du code de l'environnement, dans sa version applicable : " I.-Les travaux, ouvrages ou aménagements énumérés dans le tableau annexé au présent article sont soumis à une étude d'impact soit de façon systématique, soit après un examen au cas par cas, en fonction des critères précisés dans ce tableau. /II.-Sont soumis à la réalisation d'une étude d'impact de façon systématique ou après un examen au cas par cas les modifications ou extensions des travaux, ouvrages ou aménagements lorsqu'elles répondent par elles-mêmes aux seuils de soumission à étude d'impact en fonction des critères précisés dans le tableau susmentionné. /III.-En outre, les dispositions des I et II du présent article sont applicables : /1° Si les travaux, ouvrages ou aménagements visés au présent article n'ont pas déjà fait l'objet d'une étude d'impact, lorsque ces modifications ou extensions font entrer ces derniers pris dans leur totalité dans les seuils de soumission à étude d'impact en fonction des critères précisés dans le tableau susmentionné. Sont exclus les travaux, ouvrages ou aménagements autorisés avant l'entrée en vigueur du décret n° 2011-2019 du 29 décembre 2011 portant réforme des études d'impact des projets de travaux, d'ouvrages ou d'aménagements ; (...) ". Un permis de construire a pour seul objet, en vertu de l'article L. 421-6 du code de l'urbanisme, de vérifier que les travaux projetés sont conformes aux dispositions législatives ou réglementaires relatives à l'utilisation des sols, à l'implantation, la destination, la nature, l'architecture, les dimensions, l'assainissement des constructions et à l'aménagement de leurs abords. L'article R. 431-16 du même code, relatif à certaines pièces complémentaires qui doivent être jointes à la demande de permis de construire en fonction de la situation ou de la nature du projet, dans sa rédaction alors en vigueur, dispose : " Le dossier joint à la demande de permis de construire comprend en outre, selon les cas : a) L'étude d'impact, lorsqu'elle est prévue en application du code de l'environnement, ou la décision de l'autorité administrative de l'Etat compétente en matière d'environnement dispensant le demandeur de réaliser une étude d'impact (...) ".

10. Il ressort de l'ensemble de ces dispositions que l'obligation de joindre l'étude d'impact au dossier de demande de permis de construire prévue par l'article R. 431-16 du code de l'urbanisme ne concerne que les cas où l'étude d'impact est exigée en vertu des dispositions du code de l'urbanisme. Les seuls travaux, ouvrages ou aménagements relevant du régime des permis de construire soumis à une étude d'impact étaient, selon les dispositions alors en vigueur de l'article R. 122-2 du code de l'environnement, les travaux ou constructions réalisés en une ou plusieurs phases, lorsque l'opération crée une surface hors oeuvre nette supérieure ou égale à 40 000 mètres carrés. Le permis de construire obtenu par la société Saforj n'entrait pas dans un tel cas de figure et ne nécessitait donc pas au préalable la réalisation d'une étude d'impact.

En ce qui concerne la méconnaissance des articles A2 et A4 du règlement du plan local d'urbanisme :

11. Aux termes de l'article A2 du règlement du plan local d'urbanisme alors applicable : " Eaux usées : (...) Les déjections solides ou liquides ainsi que les éventuelles eaux de lavage des bâtiments d'élevage, de même que les jus d'ensilage, doivent être collectés, stockés ou traités selon les cas, soit conformément aux prescriptions relatives à l'hygiène en milieu rural, soit conformément à la règlementation concernant les installations classées (...) ". Aux termes de l'article A4 du règlement du plan local d'urbanisme alors applicable relatif aux conditions de desserte des terrains par les réseaux publics : " Assainissement - Eaux pluviales: Les constructeurs doivent prévoir les aménagements nécessaires à l'absorption des eaux pluviales résultant de l'imperméabilisation des soles sur leur terrain, sauf impossibilité technique. (...) La commune peut exiger un dispositif de prétraitement des eaux pluviales pour les projets qui comportent un risque de pollution. (...) Les rejets d'eau pluviale devront, le cas échéant, faire l'objet d'une mise en conformité avec le code de l'environnement (loi sur l'eau) ".

12. D'une part, la société Saforj soutient qu'en l'absence d'aménagements nécessaires à l'absorption des eaux pluviales résultant de l'imperméabilisation des sols, le projet viole l'article A4 du PLU. Toutefois, il ressort des pièces du dossier de demande de permis de construire et notamment du plan de coupe n°3 (PC 3), du plan de coupe n° 4 (PC4) et de la notice descriptive que le projet prévoit le recueil des eaux pluviales avant qu'elles n'entrent en contact avec le sol et les effluents d'élevage. Il ressort de l'examen de ces pièces que le recueil des eaux doit s'effectuer au moyen de gouttières installées sur la porcherie existante et son extension qui permettront d'évacuer les eaux pluviales, par un réseau particulier, dans le milieu naturel en contre-bas en évitant tout contact avec d'éventuels polluants. A cet égard, aucun élément du dossier ne permet de considérer que les eaux pluviales seraient évacuées par un terrain appartenant à la société Saforj. Enfin, dans ces conditions, aucun traitement de ces eaux pluviales n'apparait nécessaire quand bien même le sol présente une forte déclivité.

13. D'autre part, conformément au plan de prévention des risques de retrait et gonflement des argiles, le pétitionnaire s'est engagé dans sa demande à respecter les mesures constructives édictées par le règlement compte tenu de la situation du terrain en forte déclivité et en zone d'aléa fort, particulièrement en ce qui concerne les eaux pluviales du nouveau bâtiment, qui seront dirigées via des canalisations en PVC vers les étangs en contre-bas des installations d'élevage, à une distance de 35 à 50 mètres des installations et en ce qui concerne la mise en place d'un système de drainage périphérique autour des nouvelles installations.

14. Enfin, il ressort des pièces du dossier de demande de permis de construire et notamment de la notice descriptive, que les lisiers et eaux de nettoyage seront collectés par des préfosses lesquelles apparaissent sur le plan PC3 et canalisés vers les ouvrages de stockage composés de fosses. Par suite, l'évacuation des eaux usées et des effluents a été prévue par le pétitionnaire et n'est nullement destinée à être déversée dans le milieu naturel. Dès lors, en l'absence de risque de pollution résultant du projet tel qu'il a été présenté dans la demande, aucune mesure de prétraitement n'avait à être prévue.

En ce qui concerne la méconnaissance de l'article A3 du règlement du plan local d'urbanisme :

15. Aux termes des dispositions de l'article A3 du règlement du plan local d'urbanisme alors applicable : " Les voies publiques ou privées doivent desservir les terrains dans les conditions répondant à l'importance ou à la destination des constructions qui y sont édifiées. Les caractéristiques de ces voies doivent notamment permettre la circulation et l'utilisation des engins de lutte contre l'incendie ".

16. Il ressort du plan de situation joint au dossier de demande de permis de construire et notamment du document PC1, que le terrain est desservi par la voie communale n° 4 puis par un ancien chemin rural. Il ressort également des pièces du dossier et notamment des affirmations non contredites de la commune, que cet ancien chemin rural a été cédé par la commune à la société Saforj, qu'il est devenu la parcelle cadastrée BV n° 0286, qu'il présente une largeur de plus de 5 mètres permettant le passage de camions et des matériels agricoles nécessaires à l'exploitation ainsi que des véhicules de secours, et que la société Saforj a consenti sur cet ancien chemin rural, lorsqu'elle a vendu la porcherie qui lui appartenait initialement, une servitude de passage vers cette porcherie. Dans ces conditions, le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions précitées doit être écarté.

En ce qui concerne la méconnaissance de l'article A8 du règlement du plan local d'urbanisme :

17. Aux termes de l'article A8 du règlement du plan local d'urbanisme alors applicable : " La distance entre deux constructions édifiées sur un même terrain doit être au moins égale à 8 mètres (...). Lorsque les constructions en vis-à-vis sont des bâtiments à usage d'exploitation agricole, et à condition que les règles minimales de sécurité soient observées, notamment pour éviter la propagation des incendies, il n'est pas fixé de distance minimale ".

18. Cet article n'impose aucune distance minimale entre deux bâtiments à usage d'exploitation agricole à condition que les règles minimales de sécurité soient observées. En l'espèce, il ne ressort d'aucune pièce du dossier que les règles de sécurité ne seraient pas respectées, la distance entre les bâtiments étant supérieure à 6 mètres et, ainsi qu'il a été dit, les véhicules de secours pouvant accéder aux bâtiments via le chemin rural.

En ce qui concerne la méconnaissance de l'article A12 du règlement du plan local d'urbanisme :

19. Aux termes de l'article A 12 du règlement du plan local d'urbanisme alors applicable : " Le stationnement des véhicules correspondant aux besoins des constructions ou installations doit être assuré en dehors des voies ouvertes à la circulation publique ".

20. Il ressort du dossier de demande de permis de construire que, compte tenu de la configuration du site de la porcherie, les véhicules correspondant aux besoins de la construction peuvent stationner aux abords des bâtiments hors voie communale n° 4 sur deux parkings de 160 m2 et de 48 m2. Par suite le moyen doit être écarté.

En ce qui concerne la méconnaissance de l'article A 11 du règlement du plan local d'urbanisme :

21. Aux termes de l'article A 11 du règlement du plan local d'urbanisme alors applicable : " Les constructions, par leur situation, leur architecture, leur aspect extérieur, leur dimension ou l'aspect extérieur des bâtiments à édifier ou à modifier, ne devront pas être de nature à porter atteinte au caractère ou à l'intérêt des lieux avoisinants, aux sites, aux paysages naturels ou urbains, ainsi qu'à la conservation des perspectives monumentales. L'implantation des constructions individuelles sur les déblais ou remblais modifiant la topographie du terrain naturel est soumise aux conditions suivantes (...) / Les matériaux suivants sont interdits : parpaings ou briques creuses non revêtues d'un enduit ".

22. La société Saforj soutient que la construction ne respecte pas les règles tenant à la hauteur des constructions réalisées sur déblai et remblai. Toutefois ces règles ne s'appliquent, aux termes mêmes des dispositions précitées du règlement, qu'aux constructions individuelles. Par ailleurs, le projet qui prévoit la construction de murs en béton préfabriqué gris assortis de bardage ajouré translucide étanche et non, comme il est soutenu, de parpaings non enduits, ne méconnaissent pas les dispositions précitées.

En ce qui concerne la méconnaissance de l'article R. 111-2 du code de l'urbanisme et de la circulaire interministérielle du 10 décembre 1951 :

23. Aux termes de l'article R. 111-2 du code de l'urbanisme, alors applicable : " Le projet peut être refusé ou n'être accepté que sous réserve de l'observation de prescriptions spéciales s'il est de nature à porter atteinte à la salubrité ou à la sécurité publique du fait de sa situation, de ses caractéristiques, de son importance ou de son implantation à proximité d'autres installations. "

24. Il ressort des pièces du dossier que le projet prévoit la mise en place dans le nouveau bâtiment d'extincteurs portatifs ainsi que d'un extincteur d'oxyde de carbone faisant l'objet de vérifications périodiques. Au surplus, les étangs présents sur l'exploitation en contre-bas et accessibles facilement par voierie permettent de disposer de la capacité totale de 4000 m3 d'eau. Enfin, à moins de 100 mètres de l'exploitation se trouve une réserve d'eau pour la défense contre l'incendie ainsi que l'a relevé le constat d'huissier produit au dossier. L'absence de consultation du service départemental d'incendie et de secours et de la commission de sécurité ne traduit pas par elle-même une méconnaissance des dispositions précitées. Compte tenu de la capacité, de l'accessibilité et de la qualité des réserves d'eau disponibles, la société n'est pas davantage fondée à soutenir que la circulaire interministérielle n° 435 du 10 décembre 1951, alors applicable dès lors qu'elle n'a été abrogée que par arrêté du 15 décembre 2015 fixant le référentiel national de la défense extérieure contre l'incendie, aurait été méconnue.

En ce qui concerne la méconnaissance de l'article R. 111-15 du code de l'urbanisme :

25. Aux termes de l'article R. 111-15 du code de l'urbanisme, devenu R. 111-26 : " Le permis ou la décision prise sur la déclaration préalable doit respecter les préoccupations d'environnement définies aux articles L. 110-1 et L. 110-2 du code de l'environnement. Le projet peut n'être accepté que sous réserve de l'observation de prescriptions spéciales si, par son importance, sa situation ou sa destination, il est de nature à avoir des conséquences dommageables pour l'environnement. "

26. La société Saforj soutient que le projet présente un risque de pollution aux eaux pluviales et un risque de pollution aux effluents. A cet égard il résulte de ce qui a été dit aux points 12 à 14 du présent arrêt que le projet prévoit, tel qu'il est présenté, le recueil des eaux pluviales avant qu'elles n'entrent en contact avec le sol et les effluents d'élevage par un réseau particulier dans le milieu naturel présent en contre-bas en évitant tout contact avec d'éventuels polluants et que, s'agissant de la pollution aux effluents, le projet prévoit la collecte des lisiers et eaux de nettoyage par des préfosses canalisées vers les ouvrages de stockage composés de fosses. Par suite, l'évacuation des eaux usées et des effluents, au vu du dossier présenté, a été prévue sans déversement dans le milieu naturel.

27. En outre, contrairement à ce que soutient la société Saforj, en ce qui concerne le traitement des litières cumulées, il ressort de la notice explicative que le projet prévoit des aires de vie des animaux équipées de sols en béton étanches et que les fumiers compacts d'ailleurs situés sur l'aire bétonnée du nouveau bâtiment d'élevage, seront épandus directement ou stockés aux champs après deux mois de présence sous les animaux en conformité avec les dispositions règlementaires du point 2.3 de l'arrêté du 27 décembre 2013. Par suite, au vu du dossier du pétitionnaire, le permis contesté ne peut être regardé comme entaché d'erreur manifeste d'appréciation au regard des dispositions précitées.

28. Il résulte de tout ce qui précède, sans qu'il soit besoin d'ordonner l'expertise sollicitée, que la société Saforj n'est pas fondée à demander l'annulation du permis de construire contesté et de la décision portant rejet de son recours gracieux.

Sur les conclusions à fin d'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

29. Ces dispositions font obstacle à ce que soit mise à la charge la commune de Trélissac et du GAEC des Deux étangs qui ne sont pas dans la présente instance les parties perdantes, la somme que la requérante demande au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de la société Saforj la somme de 1 500 euros à verser à la commune de Trélissac et la somme de 1 500 euros à verser au GAEC des Deux étangs au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

DECIDE :

Article 1er : Le jugement du tribunal administratif de Bordeaux du 30 juin 2017 est annulé.

Article 2 : La demande de la société Saforj et le surplus de ses conclusions d'appel sont rejetés.

Article 3 : La société Saforj versera une somme de 1 500 euros à la commune de Trélissac et une somme de 1 500 euros au GAEC des Deux étangs en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à la société Saforj, au GAEC des Deux étangs et à la commune de Trélissac.

Délibéré après l'audience du 7 janvier 2020 à laquelle siégeaient :

Mme Elisabeth Jayat, président,

M. Frédéric Faïck, président-assesseur,

Mme D... F..., premier conseiller,

Lu en audience publique, le 4 février 2020.

Le rapporteur,

Caroline F...Le président,

Elisabeth Jayat

Le greffier,

Virginie Marty

La République mande et ordonne au préfet de la Dordogne en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.

2

N° 17BX03001


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Bordeaux
Formation : 5ème chambre
Numéro d'arrêt : 17BX03001
Date de la décision : 04/02/2020
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : Mme JAYAT
Rapporteur ?: Mme Caroline GAILLARD
Rapporteur public ?: Mme PERDU
Avocat(s) : CABINET GRAND BARATEAU NOEL

Origine de la décision
Date de l'import : 11/02/2020
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.bordeaux;arret;2020-02-04;17bx03001 ?
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