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10/02/2020 | FRANCE | N°19BX03703

France | France, Cour administrative d'appel de Bordeaux, 6ème chambre, 10 février 2020, 19BX03703


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. F... A... a demandé au tribunal administratif de Toulouse d'annuler l'arrêté en date du 11 mars 2019 par lequel le préfet de la Haute-Garonne a décidé de son transfert vers l'Etat membre de l'Union européenne responsable de l'examen de sa demande d'asile.

Par un jugement n° 1901764 du 19 avril 2019 le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Toulouse a rejeté cette demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 26 septembre 2019, M.

F... A..., représentée par Me D..., demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement en date du ...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. F... A... a demandé au tribunal administratif de Toulouse d'annuler l'arrêté en date du 11 mars 2019 par lequel le préfet de la Haute-Garonne a décidé de son transfert vers l'Etat membre de l'Union européenne responsable de l'examen de sa demande d'asile.

Par un jugement n° 1901764 du 19 avril 2019 le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Toulouse a rejeté cette demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 26 septembre 2019, M. F... A..., représentée par Me D..., demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement en date du 19 avril 2019 du magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Toulouse ;

2°) d'annuler cet arrêté du préfet de la Haute-Garonne en date du 11 mars 2019 ;

3°) d'enjoindre au préfet d'enregistrer sa demande d'asile en procédure normale et de lui délivrer une attestation de demande d'asile un délai de quarante-huit heure à compter de la notification de l'arrêté à intervenir, sous astreinte de 50 euros par jours de retard ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros à verser à son conseil en application des dispositions combinées de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.

Il soutient que :

- le jugement attaqué est entaché d'omission à statuer aux moyens tirés de la méconnaissance des dispositions du paragraphe 2 de l'article 7 du règlement (UE) n° 604/2013 du Parlement européen et du Conseil du 26 juin 2013 et de l'erreur de fait tiré de ce que le préfet a, à tort, indiquer qu'il a été mis en mesure de présenter ses observations quant à la possibilité d'un transfert aux autorités allemandes ;

- la décision contestée méconnaît les dispositions du paragraphe 3 de l'article 26 du règlement (UE) n° 604/2013 du Parlement européen et du Conseil du 26 juin 2013 dès lors qu'elle lui a été notifié avec l'assistance d'un interprète par téléphone ;

- la décision contestée est entachée d'un défaut de motivation en droit dès lors qu'elle n'indique pas le critère ayant conduit l'autorité préfectorale à considérer que l'Allemagne était le pays responsable de l'examen de sa demande d'asile ;

- la désignation de l'Allemagne comme pays responsable de l'examen de sa demande d'asile résulte d'une application erronée des critères du règlement (UE) n° 604/2013 du Parlement européen et du Conseil du 26 juin 2013 ;

- cette décision est entachée d'erreur de fait dès lors qu'elle mentionne qu'il a été mis en mesure de présenter ses observations quant à la possibilité d'un transfert aux autorités allemandes ;

- cette décision méconnaît les dispositions du paragraphe 2 de l'article 7 du règlement (UE) n° 604/2013 du Parlement européen et du Conseil du 26 juin 2013 en désignant l'Allemagne comme responsable de l'examen de sa demande d'asile dès lors que sa situation lors de sa première demande d'asile aurait dû être prise en compte ;

- cette décision est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation au regard des dispositions de l'article 17 du règlement (UE) n° 604/2013 du Parlement européen et du Conseil du 26 juin 2013 dès lors qu'il s'est intégré en France où il a tissé des liens et que son médecin suspecterait qu'il soit atteint d'une tumeur ;

- le préfet s'est estimé en situation de compétence liée pour décider de son transfert aux autorités allemandes.

Par un mémoire en défense enregistré le 14 novembre 2019, le préfet de la Haute-Garonne conclut au rejet de la requête.

Il fait valoir que les moyens de la requête ne sont pas fondés.

Par ordonnance du 15 novembre 2019, la clôture d'instruction a été fixée au 18 décembre 2019 à midi.

M. A... a été admis dans le bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 5 septembre 2019.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- la directive 2003/109/CE du 25 novembre 2003 relative au statut des ressortissants de pays tiers résidents de longue durée ;

- le règlement (UE) n° 603/2013 du Parlement européen et du Conseil du 26 juin 2013 ;

- le règlement (UE) n° 604/2013 du Parlement européen et du Conseil du 26 juin 2013 ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code des relations entre le public et l'administration ;

- la loi n°91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le rapport de M. E... a été entendu au cours de l'audience publique.

Considérant ce qui suit :

1. M. A..., ressortissant nigérian, né le 15 février 1997 à Edo State, entré en France, selon ses déclarations, le 28 décembre 2018, relève appel du jugement en date du 19 avril 2019 par lequel le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Toulouse a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 11 mars 2019 par lequel le préfet de la Haute-Garonne a décidé de son transfert vers l'Etat membre de l'Union européenne responsable de l'examen de sa demande d'asile.

Sur la régularité du jugement :

2. M. A... soutient que le jugement attaqué n'a pas répondu aux moyens tirés de la méconnaissance des dispositions du paragraphe 2 de l'article 7 du règlement (UE) n° 604/2013 du Parlement européen et du Conseil du 26 juin 2013 et de l'erreur de fait tiré de ce que le préfet a, à tort, indiquer qu'il a été mis en mesure de présenter ses observations quant à la possibilité d'un transfert aux autorités allemandes. Toutefois, le premier juge, qui n'est pas tenu de répondre à tous les arguments soulevés par le requérant, a expressément écarté aux points 5 et 10 de sa décision les moyens susmentionnés. Par suite, le moyen tiré de ce que le jugement n'aurait pas répondu aux moyens tirés de la méconnaissance des dispositions du paragraphe 2 de l'article 7 du règlement (UE) n° 604/2013 du Parlement européen et du Conseil du 26 juin 2013 et de l'erreur de fait tiré de ce que le préfet aurait, à tort, indiquer qu'il a été mis en mesure de présenter ses observations quant à la possibilité d'un transfert aux autorités allemandes doit être écarté.

Sur le bien-fondé du jugement attaqué :

3. En premier lieu, l'arrêté du 11 mars 2019 contesté vise notamment le règlement (UE) n° 604/2013 du Parlement européen et du Conseil du 26 juin 2013, et précise les circonstances de l'entrée et du séjour irréguliers de M. A... sur le territoire français. Il énonce que le relevé de ses empreintes décadactylaires a relevé que M. A... a sollicité l'asile auprès des autorités suisses, italiennes et allemandes, et que les autorités suisses et italiennes ont été saisies le 13 février 2019 d'une demande de reprise en charge, en application du b) du paragraphe 1 de l'article 18 du règlement (UE) n° 604/2013 du Parlement européen et du Conseil du 26 juin 2013. L'arrêté contesté précise également que les autorités suisses ont refusé de reprendre en charge le demandeur le 14 février 2019, mais que les autorités allemandes ont fait connaître leur accord explicite à la reprise en charge le 18 février 2019, sur le fondement du b) du 1 de l'article 18 du même règlement. Ces motifs permettent d'identifier le critère prévu par le règlement (UE) n° 604/2013 du Parlement européen et du Conseil du 26 juin 2013 dont le préfet de la Haute-Garonne a entendu faire application pour désigner l'Allemagne comme le pays vers lequel M. A... pourra être transféré. Par suite, les motifs figurant dans l'arrêté contesté sont suffisamment précis pour permettre à l'intéressé de bénéficier du recours effectif mentionné au paragraphe 1 de l'article 27 du règlement, et comporte l'énoncé des considérations de droit et de fait sur lesquelles se fonde la décision de transfert en litige qui est ainsi suffisamment motivée.

4. En deuxième lieu, Aux termes de l'article 26 du règlement (UE) n° 614/2013 susvisé du 26 juin 2013 : " (...) 2. La décision visée au paragraphe 1 contient des informations sur les voies de recours disponibles, y compris sur le droit de demander un effet suspensif, le cas échéant, et sur les délais applicables à l'exercice de ces voies de recours et à la mise oeuvre du transfert et comporte, si nécessaire, des informations relatives au lieu et à la date auxquels la personne concernée doit se présenter si cette personne se rend par ses propres moyens dans l'Etat membre responsable. Les Etats membres veillent à ce que des informations sur les personnes ou entités susceptibles de fournir une assistance juridique à la personne concernée soient communiquées à la personne concernée avec la décision visée au paragraphe 1, si ces informations ne lui ont pas encore été communiquées (...) ".

5. M. A... ne saurait utilement se prévaloir de ce que les services de l'interprète, pour la notification de la décision contestée, ont été fournis par téléphone sans que le préfet n'en ait justifié la nécessité, dès lors que les modalités techniques du déroulement de cette notification ne l'ont pas privé de la garantie liée au bénéfice d'un interprète assermenté. Par suite, le moyen tiré de l'irrégularité de la procédure à l'issue de laquelle a été prise la décision contestée ne peut qu'être écartée.

6. En troisième lieu, il ressort du compte-rendu de l'entretien individuel de M. A... effectué en préfecture le 5 février 2019, que celui-ci a cheminé par la Suisse, l'Italie et l'Allemagne. Lors de cet entretien M. A... s'est vu expliquer la procédure prévue par le règlement (UE) n° 604/2013 susvisé du 26 juin 2013, dans une langue qu'il comprend, de sorte qu'il a été mis à même de présenter ses observations sur un éventuel transfert vers l'un de ces trois Etats. Par suite, le moyen tiré de ce que le préfet aurait entaché sa décision d'erreur de fait en indiquant que M. A... a été mis en mesure de présenter ses observations quant à la possibilité d'un transfert aux autorités allemandes doit être écarté.

7. En quatrième lieu, le paragraphe 2 de l'article 7 du règlement (UE) n° 604/2013 du 26 juin 2013 prévoit que " la détermination de l'État membre responsable en application des critères énoncés dans le présent chapitre se fait sur la base de la situation qui existait au moment où le demandeur a introduit sa demande de protection internationale pour la première fois auprès d'un État membre ". Il résulte clairement des dispositions de l'article 7 du règlement (UE) n° 604/2013 que la détermination de l'État membre en principe responsable de l'examen de la demande de protection internationale s'effectue une fois pour toutes à l'occasion de la première demande d'asile, au vu de la situation prévalant à cette date.

8. M. A... soutient que la décision contestée méconnaît les dispositions du paragraphe 2 de l'article 7 du règlement (UE) n° 604/2013 du Parlement européen et du Conseil du 26 juin 2013. Toutefois, en se bornant à soutenir que le préfet, pour déterminer l'État membre en principe responsable de l'examen de sa demande d'asile, ne se serait pas fondé au vu de la situation prévalant à la date de sa première demande d'asile, sans indiquer dans la mise en oeuvre de quel critère, parmi ceux énoncés au chapitre III du règlement (UE) n° 604/2013 du Parlement européen et du Conseil du 26 juin 2013, le préfet aurait méconnu les dispositions précitées du paragraphe 2 de l'article 7, M. A... n'assorti pas de précisions nécessaires permettant d'apprécier le bien-fondé d'un tel moyen.

9. En cinquième lieu, il ressort des mentions de l'arrêté contesté que le préfet a examiné la possibilité de faire usage, en l'espèce, des dispositions du 1 de l'article 17 du règlement (UE) n° 604/2013 du 26 juin 2013, qui permettent à un État d'examiner la demande d'asile d'un demandeur même si cet examen ne lui incombe pas en application des critères fixés dans ce règlement.

10. En dernier lieu M. A..., reprend en appel, sans invoquer d'éléments de fait ou de droit nouveaux par rapport à l'argumentation développée en première instance et sans critiquer la réponse qui lui a été apportée par le tribunal administratif, les moyens tirés de ce que l'arrêté contesté est entaché d'une erreur manifeste d'appréciation au regard des dispositions de l'article 17 du règlement (UE) n° 604/2013 du Parlement européen et du Conseil du 26 juin 2013 et d'une erreur de droit tiré de ce que le préfet a désigné l'Allemagne comme pays étant le pays responsable de l'examen de sa demande d'asile. Il y a lieu d'écarter ce moyen par adoption des motifs pertinents retenus le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Toulouse.

11. Il résulte de tout ce qui précède que M. A... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que le magistrat désigné du tribunal administratif de Toulouse a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 11 mars 2019 par lequel le préfet de la Haute-Garonne a décidé de son transfert auprès des autorités allemandes. Par voie de conséquence il y a lieu de rejeter ses conclusions à fins d'injonction, ainsi que celles présentées au titre des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991.

DECIDE :

Article 1er : La requête de M. A... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. F... A... et au ministre de l'intérieur. Copie en sera adressée au préfet de la Haute-Garonne.

Délibéré après l'audience du 13 janvier 2020, à laquelle siégeaient :

M. Pierre E..., président,

Mme C... B..., présidente assesseure,

Mme Florence Rey-Gabriac, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 10 février 2020.

La présidente assesseure,

Karine B...

Le président,

Pierre E...

Le greffier,

Cindy Virin

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur, et à tous huissiers de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.

2

N° 19BX03703


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Bordeaux
Formation : 6ème chambre
Numéro d'arrêt : 19BX03703
Date de la décision : 10/02/2020
Type d'affaire : Administrative

Analyses

095-02-03


Composition du Tribunal
Président : M. LARROUMEC
Rapporteur ?: M. Pierre LARROUMEC
Rapporteur public ?: M. BASSET
Avocat(s) : DURAND CLEMENCE

Origine de la décision
Date de l'import : 18/02/2020
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.bordeaux;arret;2020-02-10;19bx03703 ?
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