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09/06/2020 | FRANCE | N°19BX04398

France | France, Cour administrative d'appel de Bordeaux, 2ème chambre, 09 juin 2020, 19BX04398


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. F... B... a demandé au tribunal administratif de Limoges d'annuler l'arrêté du 23 juillet 2019 par lequel le préfet de la Haute-Vienne a refusé de lui délivrer un titre

de séjour, lui a retiré son attestation de demandeur d'asile, lui a fait obligation de quitter

le territoire français dans un délai de trente jours, a fixé le pays de renvoi et lui a interdit le retour sur le territoire français pour une durée d'un an.

Par un jugement n° 1901451 du 8 octobre 2019, le magistrat

désigné par le président

du tribunal administratif de Limoges a rejeté sa demande.

Procédu...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. F... B... a demandé au tribunal administratif de Limoges d'annuler l'arrêté du 23 juillet 2019 par lequel le préfet de la Haute-Vienne a refusé de lui délivrer un titre

de séjour, lui a retiré son attestation de demandeur d'asile, lui a fait obligation de quitter

le territoire français dans un délai de trente jours, a fixé le pays de renvoi et lui a interdit le retour sur le territoire français pour une durée d'un an.

Par un jugement n° 1901451 du 8 octobre 2019, le magistrat désigné par le président

du tribunal administratif de Limoges a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 14 novembre 2019, M. B..., représenté par Me E..., demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement ;

2°) d'annuler l'arrêté du préfet de la Haute-Vienne du 23 juillet 2019 ;

3°) d'enjoindre au préfet de la Haute-Vienne de réexaminer sa situation au regard

de son droit au séjour dans le délai de deux mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat le versement au profit de son conseil d'une somme

de 1 800 euros au titre des dispositions combinées des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique.

Il soutient que :

- il justifie, par les éléments nouveaux produits en appel, relatifs à sa perte d'autonomie importante du fait d'une quasi-cécité, ainsi qu'à une tuberculose latente à l'origine de vomissements et de céphalées, pathologie pour laquelle il a bénéficié d'actes d'imagerie médicale et d'un traitement médicamenteux, que le caractère préoccupant de son état de santé justifie la délivrance du titre de séjour sollicité ;

- l'interdiction de retour est entachée d'erreur manifeste d'appréciation.

Par un mémoire en défense enregistré le 18 février 2020, le préfet de la Haute-Vienne conclut au rejet de la requête.

Il fait valoir que les moyens invoqués par M. B... ne sont pas fondés.

M. B... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision

du 5 mars 2020.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- l'arrêté du 27 décembre 2016 ;

- l'ordonnance n° 2020-305 du 25 mars 2020 portant adaptation des règles applicables devant les juridictions de l'ordre administratif ;

- le code de justice administrative.

La présidente de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur

sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le rapport de Mme C... a été entendu au cours de l'audience publique.

Considérant ce qui suit :

1. M. B..., de nationalité guinéenne, a déclaré être entré irrégulièrement en France

le 20 mars 2017. Après le rejet de sa demande d'asile par l'Office français de protection

des réfugiés et apatrides (OFPRA) le 29 juin 2018, il a sollicité la délivrance d'un titre de séjour en raison de son état de santé. Par une décision du 27 juin 2019, la Cour nationale du droit d'asile a rejeté son recours contre la décision de l'OFPRA. Par un arrêté du 23 juillet 2019, le préfet de la Haute-Vienne a rejeté sa demande de titre de séjour, lui a retiré son attestation de demandeur d'asile, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours, a fixé le pays de renvoi et lui a interdit le retour sur le territoire français pour une durée d'un an. M. B... relève appel du jugement du 8 octobre 2019 par lequel le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Limoges a rejeté sa demande d'annulation de cet arrêté.

2. Aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention "vie privée et familiale" est délivrée de plein droit : (...)11° A l'étranger résidant habituellement en France, si son état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait avoir pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité et si, eu égard à l'offre de soins et aux caractéristiques du système de santé dans le pays dont il est originaire, il ne pourrait pas y bénéficier effectivement d'un traitement approprié. / (...) / La décision de délivrer la carte de séjour est prise par l'autorité administrative après avis d'un collège de médecins du service médical de l'Office français de l'immigration et de l'intégration, dans des conditions définies par décret en Conseil d'Etat. (...). " Aux termes de l'article

R. 313-22 du même code : " Pour l'application du 11° de l'article L. 313-11, le préfet délivre la carte de séjour au vu d'un avis émis par un collège de médecins à compétence nationale de l'Office français de l'immigration et de l'intégration. / L'avis est émis dans les conditions fixées par arrêté du ministre chargé de l'immigration et du ministre chargé de la santé au vu, d'une part, d'un rapport médical établi par un médecin de l'Office français de l'immigration et de l'intégration et, d'autre part, des informations disponibles sur les possibilités de bénéficier effectivement d'un traitement approprié dans le pays d'origine de l'intéressé. / (...). " L'article 6 de l'arrêté du 27 décembre 2016 pris pour l'application de ces dispositions prévoit que l'avis précise " a) si l'état de santé de l'étranger nécessite ou non une prise en charge médicale ; / b) si le défaut de cette prise en charge peut ou non entraîner des conséquences d'une exceptionnelle gravité sur son état de santé ; / c) si, eu égard à l'offre de soins et aux caractéristiques du système de santé dans le pays dont le ressortissant étranger est originaire, il pourrait ou non y bénéficier effectivement d'un traitement approprié ; / d) la durée prévisible du traitement. Dans le cas où le ressortissant étranger pourrait bénéficier effectivement d'un traitement approprié, eu égard à l'offre de soins et aux caractéristiques du système de santé dans le pays dont il est originaire, le collège indique, au vu des éléments du dossier du demandeur, si l'état de santé de ce dernier lui permet de voyager sans risque vers ce pays. Cet avis mentionne les éléments de procédure. Le collège peut délibérer au moyen d'une conférence téléphonique ou audiovisuelle. L'avis émis à l'issue de la délibération est signé par chacun des trois médecins membres du collège. "

3. Par un avis du 14 mai 2019, le collège de médecins de l'OFII a estimé que l'état de santé de M. B... nécessite une prise en charge médicale dont le défaut ne devrait pas entraîner de conséquences d'une exceptionnelle gravité, et que son état de santé peut lui permettre de voyager sans risque vers son pays d'origine. Il ressort des pièces du dossier que M. B... présente une acuité visuelle inférieure à un dixième à chaque oeil en raison d'une neuropathie dégénérative de la rétine dite " de Leber ", affection d'origine héréditaire pour laquelle aucun traitement n'existe. Les éléments nouveaux dont le requérant se prévaut en appel ne sont pas relatifs à l'existence d'un traitement, mais à des dispositifs d'accompagnement social du handicap, lesquels ne relèvent pas du titre de séjour sollicité. La pathologie distincte de " douleur abdominale sans précision " pour laquelle il a été pris en charge le 1er octobre 2019 au service des urgences du CHU de Limoges, postérieure à la décision de refus de titre de séjour,

ne peut être utilement invoquée pour en contester la légalité. Enfin, l'invocation

d'une " tuberculose latente suivie en pathologie respiratoire " n'est pas assortie des précisions permettant d'en apprécier le bien-fondé. Par suite, M. B... n'est pas fondé à se prévaloir d'un droit au séjour sur le fondement du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.

4. Aux termes de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " (...) / III. - L'autorité administrative, par une décision motivée, assortit l'obligation de quitter le territoire français d'une interdiction de retour sur le territoire français, d'une durée maximale de trois ans à compter de l'exécution de l'obligation de quitter le territoire français, lorsque aucun délai de départ volontaire n'a été accordé à l'étranger. / Des circonstances humanitaires peuvent toutefois justifier que l'autorité administrative ne prononce pas d'interdiction de retour. / (...) / Lorsqu'elle ne se trouve pas en présence du cas prévu au premier alinéa du présent III, l'autorité administrative peut, par une décision motivée, assortir l'obligation de quitter le territoire français d'une interdiction de retour sur le territoire français d'une durée maximale de deux ans à compter de l'exécution de l'obligation de quitter le territoire français. / (...) / La durée de l'interdiction de retour mentionnée aux premier, sixième et septième alinéas du présent III ainsi que le prononcé et la durée de l'interdiction de retour mentionnée au quatrième alinéa sont décidés par l'autorité administrative en tenant compte de la durée de présence de l'étranger sur le territoire français, de la nature et de l'ancienneté de ses liens avec la France, de la circonstance qu'il a déjà fait l'objet ou non d'une mesure d'éloignement et de la menace pour l'ordre public que représente sa présence sur le territoire français. / (...). "

5. A la date de l'arrêté contesté, M. B... ne réside en France que depuis deux ans

et ne s'y prévaut d'aucun lien. En dépit de son handicap visuel, et alors même qu'il n'a pas fait l'objet d'une précédente mesure d'éloignement et ne présente aucune menace pour l'ordre public, l'interdiction de retour d'une durée d'un an n'est pas entachée d'erreur manifeste d'appréciation.

6. Il résulte de ce qui précède que M. B... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le magistrat désigné par le président du tribunal administratif

de Limoges a rejeté sa demande. Par voie de conséquence, ses conclusions à fin d'injonction

et celles présentées au titre des dispositions combinées des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique doivent être rejetées.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de M. B... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Abdoulaye B... et au ministre de l'intérieur.

Copie en sera adressée au préfet de la Haute-Vienne.

Délibéré après l'audience du 12 mai 2020 à laquelle siégeaient :

Mme D... G..., présidente,

Mme A... C..., présidente-assesseure,

Mme Marie-Pierre Beuve-Dupuy, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 9 juin 2020.

La présidente,

Brigitte G...

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.

2

N° 19BX04398


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Bordeaux
Formation : 2ème chambre
Numéro d'arrêt : 19BX04398
Date de la décision : 09/06/2020
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-03 Étrangers. Obligation de quitter le territoire français (OQTF) et reconduite à la frontière.


Composition du Tribunal
Président : Mme PHEMOLANT
Rapporteur ?: Mme anne MEYER
Rapporteur public ?: Mme CHAUVIN
Avocat(s) : CABINET AVOC'ARENES

Origine de la décision
Date de l'import : 28/07/2020
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.bordeaux;arret;2020-06-09;19bx04398 ?
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