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18/06/2020 | FRANCE | N°18BX03894

France | France, Cour administrative d'appel de Bordeaux, 7ème chambre (formation à 3), 18 juin 2020, 18BX03894


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A... C... a demandé au tribunal administratif de Toulouse de prononcer la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de contributions sociales auxquelles il a été assujetti au titre des années 2011 et 2012 et du complément de taxe sur la valeur ajoutée qui lui a été réclamé au titre de la période du 1er janvier au 9 décembre 2011.

Par un jugement n° 1601287, n° 1601521, n° 1704400 du 18 septembre 2018, le tribunal administratif de Toulouse a prononcé un non-lieu

statuer à hauteur du dégrèvement du complément de taxe sur la valeur ajoutée pour un m...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A... C... a demandé au tribunal administratif de Toulouse de prononcer la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de contributions sociales auxquelles il a été assujetti au titre des années 2011 et 2012 et du complément de taxe sur la valeur ajoutée qui lui a été réclamé au titre de la période du 1er janvier au 9 décembre 2011.

Par un jugement n° 1601287, n° 1601521, n° 1704400 du 18 septembre 2018, le tribunal administratif de Toulouse a prononcé un non-lieu à statuer à hauteur du dégrèvement du complément de taxe sur la valeur ajoutée pour un montant total de 6 051 euros et rejeté le surplus de ses demandes.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 12 novembre 2018, M. C..., représenté par M. B..., demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Toulouse du 18 septembre 2018 ;

2°) de prononcer la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de contributions sociales auxquelles il a été assujetti au titre des années 2011 et 2012 et du complément de taxe sur la valeur ajoutée qui lui a été réclamé au titre de la période du 1er janvier au 9 décembre 2011 restant en litige ;

3°) de mettre à la charge de l'État la somme de 2 000 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- l'administration n'établit pas que les rôles sur lesquels il figure au titre des années 2011 et 2012 revêtent les mentions requises par la jurisprudence et l'article 24 du décret du 7 novembre 2012 et qui conditionnent leur régularité et leur caractère interruptif de prescription ;

- il a été privé d'une garantie substantielle pour 2011, l'administration n'ayant pas fait droit à sa demande de saisir la commission départementale des impôts directs et des taxes sur le chiffre d'affaires ;

- pour 2012, l'administration ne pouvait utiliser l'article L. 47 C du livre des procédures fiscales pour taxer ses bénéfices, et devait engager une vérification de comptabilité et adresser des mises en demeure de déposer ses déclarations catégorielles ;

- l'administration ne pouvait retenir les encaissements figurant sur les comptes de son père Gino pour reconstituer le chiffre d'affaires de 2011 et devait retenir les seuls encaissements constatés sur ses comptes bancaires ;

- les sommes qualifiées de charges de sous-traitance n'ont pas été incluses dans l'estimation forfaitaire de l'administration de 70 % des charges ;

- les attestations clients permettant l'application du taux réduit de TVA ont été établies à l'émission des factures, même si elles n'ont été produites qu'après le contrôle ;

- la majoration de 40 % pour défaut de déclaration doit être déchargée car son application est motivée en fait par un manquement délibéré ;

- la majoration de 80 % appliquée en 2012 aux rappels d'impôt sur le revenu et contributions sociales doit être déchargée en l'absence d'activité occulte.

Par un mémoire en défense, enregistré le 22 mai 2019, le ministre de l'action et des comptes publics conclut au non-lieu à statuer à hauteur du dégrèvement prononcé et au rejet du surplus de la requête.

Il soutient qu'il est fait droit au moyen tiré de l'irrégularité de l'application des dispositions de l'article L. 47 C du livre des procédures fiscales pour taxer les BIC réalisés en 2012 sans lui adresser une mise en demeure préalable, et que les autres moyens soulevés par M. C... ne sont pas fondés.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

- l'ordonnance n° 2020-305 du 25 mars 2020 portant adaptation des règles applicables devant les juridictions de l'ordre administratif ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Florence Madelaigue, rapporteur,

- les conclusions de M. Nicolas Normand, rapporteur public.

Considérant ce qui suit :

1. M. C... a fait l'objet d'un examen contradictoire de situation fiscale personnelle portant sur les années 2011 et 2012. Dans ce cadre, une demande d'éclaircissements et de justifications lui a été adressée le 5 septembre 2014. L'insuffisance de réponse a entraîné la notification d'une mise en demeure le 20 novembre 2014. Par propositions de rectifications du 25 novembre 2014 pour 2011 et du 13 février 2015 pour 2012, qui lui ont été notifiées selon la procédure de taxation d'office de l'article L. 69 du livre des procédures fiscales, l'intéressé a été informé par le service de son intention de soumettre à l'impôt sur le revenu dans la catégorie des revenus d'origine indéterminée les crédits bancaires dont il n'a pu justifier l'origine. Concomitamment, la comptabilité de son activité individuelle de couvreur relevant des bénéfices industriels et commerciaux a été vérifiée au titre de la période du 1er janvier au 9 décembre 2011, date de radiation de son entreprise du registre du commerce et des sociétés. Le service a reconstitué le chiffre d'affaires de l'année 2012 à partir des encaissements bancaires. En l'absence de dépôt de déclaration dans les trente jours d'une première mise en demeure, la procédure d'évaluation d'office du 1° de l'article L. 73 du livre des procédures fiscales a été appliquée et les rectifications issues de la vérification de comptabilité ont été notifiées par proposition de rectification du 5 septembre 2014. M. C... relève appel du jugement du tribunal administratif de Toulouse en tant qu'il a rejeté ses demandes en décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de contributions sociales auxquelles il a été assujetti au titre des années 2011 et 2012 et du complément de taxe sur la valeur ajoutée qui lui a été réclamé au titre de la période du 1er janvier au 9 décembre 2011, suppléments et complément trouvant leur origine dans l'examen contradictoire de situation fiscale personnelle et la vérification de comptabilité précités.

Sur l'étendue du litige :

2. Par une décision du 28 mai 2019, postérieure à l'introduction de la requête, l'administration a prononcé le dégrèvement, en principal et pénalités, à concurrence de la somme totale de 5 257 euros, des cotisations d'impôt sur le revenu et de contributions sociales au titre de l'année 2012 à raison de la mise en oeuvre irrégulière des dispositions de l'article L. 47 C du livre des procédures fiscales pour imposer les bénéfices industriels et commerciaux réalisés en 2012 sans lui adresser une mise en demeure préalable. Les conclusions de la requête de M. C... sont, dans cette mesure, devenues sans objet.

Sur le surplus des conclusions en décharge :

En ce qui concerne la régularité de la procédure :

3. Il n'est pas contesté que M. C... qui relevait du régime réel simplifié d'imposition pour son activité de couvreur était, de ce fait, tenu de souscrire des déclarations annuelles CA 12 en matière de taxe sur la valeur ajoutée et des déclarations de résultats au titre de chaque exercice en matière de bénéfices industriels et commerciaux, n'a pas respecté ses obligations déclaratives, y compris après la notification de la mise en demeure du 22 juillet 2014. L'appelant s'est ainsi exposé, en application des dispositions du 3° de l'article L. 66 du livre des procédures fiscales et du 1° de l'article L. 73 du même livre, à la mise en oeuvre des procédures de taxation d'office en matière de taxe sur la valeur ajoutée et d'évaluation d'office en matière de bénéfices industriels et commerciaux.

4. Aux termes de l'article L. 56 du livre des procédures fiscales : " La procédure de rectification contradictoire n'est pas applicable : / (...) / 4°) Dans le cas de taxation ou évaluation d'office des bases d'imposition ". M. C..., qui, ainsi qu'il a été dit ci-dessus, a à bon droit fait l'objet d'impositions établies sur des bases évaluées d'office sur le fondement du 1° de l'article L. 73 du livre des procédures fiscales s'agissant de ses bénéfices industriels et commerciaux et sur des bases taxées d'office sur le fondement du 3° de l'article L. 66 du même livre s'agissant de la taxe sur la valeur ajoutée, n'est pas fondé à soutenir que l'administration aurait irrégulièrement omis de lui proposer de saisir la commission départementale des impôts directs et des taxes sur le chiffre d'affaires, dont la consultation n'est prévue, en vertu de l'article L. 59 du livre des procédures fiscales, que dans le cadre de la procédure de redressement contradictoire, ainsi que, en vertu de l'article L. 76 du même livre, lorsque le contribuable est taxé d'office en application de l'article L. 69 du même livre à l'issue d'un examen contradictoire de sa situation fiscale personnelle.

5. Il résulte de ce qui précède que M. C... n'est pas fondé à soutenir que les droits en matière de taxe sur la valeur ajoutée et de bénéfice industriel et commercial auraient été mis à sa charge à la suite d'une procédure irrégulière.

En ce qui concerne la régularité des rôles :

6. Les rôles produits par l'administration mentionnent les bases d'imposition et indiquent des dates de mise en recouvrement au 30 juin 2015 (rôle n° 301) et au 30 septembre 2015 (rôles n° 927), conformes à celles figurant sur l'extrait de rôle et l'avis d'imposition joint par l'appelant. Dans ces conditions, M. C... ne peut, en tout état de cause, se prévaloir de l'irrégularité de l'extrait de rôle et de l'avis d'imposition, dès lors que l'administration apporte la preuve de l'homologation des rôles et de leur date de mise en recouvrement.

En ce qui concerne le bien-fondé des impositions :

7. Aux termes de l'article L. 193 du livre des procédures fiscales : " Dans tous les cas où une imposition a été établie d'office, la charge de la preuve incombe au contribuable qui demande la décharge ou la réduction de l'imposition. ". Aux termes de l'article R. 193-1 du même livre : " Dans le cas prévu à l'article L. 193, le contribuable peut obtenir la décharge ou la réduction de l'imposition mise à sa charge en démontrant son caractère exagéré ".

Quant aux bénéfices industriels et commerciaux de l'année 2011 :

8. En l'absence de comptabilité et de toutes pièces justificatives, le service a reconstitué le bénéfice imposable de M. C.... Il a déterminé le montant des recettes en s'appuyant sur les éléments obtenus dans le cadre du droit de communication exercé auprès du tribunal de grande instance de Toulouse, et des explications de l'appelant, qui ont permis de constater que certaines prestations facturées avaient été encaissées sur le compte bancaire de son père, Gino C.... Le service a comptabilisé les encaissements figurant sur les comptes bancaires de l'appelant, et ceux identifiés comme ayant une origine professionnelle encaissés sur le compte bancaire de son père. Puis le vérificateur a retenu un montant de charges déterminé à 70 % du chiffre d'affaires HT, correspondant aux ratios relevés dans trois autres entreprises exerçant la même activité. En se bornant à soutenir en appel que ces sommes correspondraient à des charges de sous-traitance sans fournir le moindre élément de nature à l'établir, M. C... n'apporte pas la preuve qui lui incombe de l'exagération des impositions en litige.

Quant à la taxe sur la valeur ajoutée :

9. Aux termes de l'article 279-0 bis du code général des impôts dans sa version applicable à l'espèce : " 1. La taxe sur la valeur ajoutée est perçue au taux réduit sur les travaux d'amélioration, de transformation, d'aménagement et d'entretien portant sur des locaux à usage d'habitation, achevés depuis plus de deux ans (...) / 3. Le taux réduit prévu au 1 est applicable aux travaux facturés au propriétaire ou, le cas échéant, au syndicat de copropriétaires, au locataire, à l'occupant des locaux ou à leur représentant à condition que le preneur atteste que ces travaux se rapportent à des locaux d'habitation achevés depuis plus de deux ans et ne répondent pas aux conditions mentionnées au 2. Le prestataire est tenu de conserver cette attestation à l'appui de sa comptabilité. / Le preneur doit conserver copie de cette attestation, ainsi que les factures ou notes émises par les entreprises ayant réalisé des travaux jusqu'au 31 décembre de la cinquième année suivant la réalisation de ces travaux ".

10. Il résulte de ces dispositions que l'application du taux réduit est soumis à la double condition que le preneur établisse, à la date du fait générateur de la taxe, ou au plus tard à celle de la facturation, une attestation selon laquelle les travaux effectués remplissent les conditions posées par cet article et que la personne qui réalise ces travaux, et qui établit la facturation, conserve cette attestation à l'appui de sa comptabilité.

11. Par suite, l'administration a pu légalement faire application de la taxe sur la valeur ajoutée au taux normal de 19,6 % pour toutes les factures établies au taux réduit de 5,5 % qui n'étaient pas accompagnées, lors du contrôle, de l'attestation du preneur prévue par les dispositions précitées, alors même que M. C... aurait récupéré les attestations manquantes auprès de ses clients et qu'il les aurait produites après le contrôle.

En ce qui concerne les pénalités :

12. Aux termes de l'article 1728 du code général des impôts, dans sa rédaction applicable aux pénalités en litige : " 1. Le défaut de production dans les délais prescrits d'une déclaration ou d'un acte comportant l'indication d'éléments à retenir pour l'assiette ou la liquidation de l'impôt entraîne l'application, sur le montant des droits mis à la charge du contribuable ou résultant de la déclaration ou de l'acte déposé tardivement, d'une majoration de : / (...) b. 40 % lorsque la déclaration ou l'acte n'a pas été déposé dans les trente jours suivant la réception d'une mise en demeure, notifiée par pli recommandé, d'avoir à le produire dans ce délai (...) ".

13. Contrairement à ce que fait valoir M. C..., les pénalités contestées sanctionnent le défaut de production dans les délais prescrits des déclarations en matière de bénéfices industriels et commerciaux. Par conséquent, c'est à bon droit que l'administration a retenu, conformément aux dispositions du b du 1 de l'article 1728 du code général des impôts, le taux de 40 % au motif que le contribuable n'avait pas produit ses déclarations dans les trente jours suivant la réception d'une mise en demeure. Ainsi que l'a jugé le tribunal, cette circonstance est de nature à justifier l'application de la pénalité, suffisamment motivée, prévue par le b du 1 de l'article 1728 du code général des impôts.

14. Si M. C... entend faire valoir qu'il serait de bonne foi, cette circonstance est sans incidence sur le bien-fondé de ces pénalités, qui lui ont été appliquées pour défaut ou retard de paiement malgré la réception d'une mise en demeure.

15. Eu égard au dégrèvement prononcé au titre de l'année 2012, visé au point 3, la contestation de la majoration de 80 % appliquée en 2012 aux rectifications d'impôt sur le revenu est sans objet.

16. Il résulte de tout ce qui précède que M. C... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Toulouse a rejeté le surplus de ses demandes.

17. Dans les circonstances de l'espèce, les conclusions présentées par M. C... sur le fondement des articles L. 761-1 du code de justice administrative doivent être rejetées.

DÉCIDE :

Article 1er : Il n'y a plus lieu de statuer sur les conclusions en décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de contributions sociales au titre de l'année 2012 à concurrence du dégrèvement prononcé d'un montant total de 5 257 euros.

Article 2 : Le surplus des conclusions de la requête de M. C... est rejeté.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... C... et au ministre de l'action et des comptes publics.

Copie en sera adressée au directeur du contrôle fiscal Sud-Ouest.

Délibéré après l'audience du 20 mai 2020 à laquelle siégeaient :

M. Éric Rey-Bèthbéder, président,

Mme D..., présidente-assesseure,

Mme Florence Madelaigue, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 18 juin 2020.

Le président,

Éric Rey-Bèthbéder

La République mande et ordonne au ministre de l'action et des comptes publics en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.

2

N° 18BX03894


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Bordeaux
Formation : 7ème chambre (formation à 3)
Numéro d'arrêt : 18BX03894
Date de la décision : 18/06/2020
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

Contributions et taxes - Généralités - Règles générales d'établissement de l'impôt - Contrôle fiscal - Vérification de comptabilité.

Contributions et taxes - Généralités - Règles générales d'établissement de l'impôt - Contrôle fiscal - Examen de la situation fiscale personnelle (ex VASFE).


Composition du Tribunal
Président : M. REY-BETHBEDER
Rapporteur ?: Mme Florence MADELAIGUE
Rapporteur public ?: M. NORMAND
Avocat(s) : CABINET CAMILLE et ASSOCIES

Origine de la décision
Date de l'import : 27/06/2020
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.bordeaux;arret;2020-06-18;18bx03894 ?
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