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25/06/2020 | FRANCE | N°18BX03361

France | France, Cour administrative d'appel de Bordeaux, 1ère chambre, 25 juin 2020, 18BX03361


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme E... C... a demandé au tribunal administratif de La Guadeloupe d'annuler l'arrêté du 1er décembre 2016 par lequel le recteur de l'académie de la Guadeloupe a prononcé à son encontre la sanction du déplacement d'office.

Par un jugement n° 1700268 du 29 juin 2018, le tribunal administratif de La Guadeloupe a annulé cet arrêté du 1er décembre 2016.

Procédure devant la cour :

Par une requête et un mémoire, enregistrés les 4 septembre 2018 et 14 mars 2019, le ministre de l'édu

cation nationale et de la jeunesse demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal admi...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme E... C... a demandé au tribunal administratif de La Guadeloupe d'annuler l'arrêté du 1er décembre 2016 par lequel le recteur de l'académie de la Guadeloupe a prononcé à son encontre la sanction du déplacement d'office.

Par un jugement n° 1700268 du 29 juin 2018, le tribunal administratif de La Guadeloupe a annulé cet arrêté du 1er décembre 2016.

Procédure devant la cour :

Par une requête et un mémoire, enregistrés les 4 septembre 2018 et 14 mars 2019, le ministre de l'éducation nationale et de la jeunesse demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de la Guadeloupe ;

2°) de rejeter la demande présentée par Mme C....

Il soutient que :

- Mme C... a été mise à même de prendre connaissance de son dossier administratif et de préparer ses observations en temps utiles ;

- Mme C... n'apporte aucun élément de nature à conforter ses affirmations selon lesquelles elle aurait fait l'objet de harcèlement moral et n'établit pas non plus que cette circonstance serait à l'origine de la dégradation de ses conditions de travail.

Par un mémoire en défense, enregistré le 3 décembre 2018, Mme C..., représentée par Me D..., conclut au rejet de la requête et à ce que soit mise à la charge de l'État une somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que les moyens soulevés par le ministre ne sont pas fondés.

Par ordonnance du 16 juillet 2019, la clôture de l'instruction a été fixée au 21 août 2019 à 12h00.

Un mémoire présenté pour Mme C... a été enregistré le 28 août 2019.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 ;

- le décret n° 84-961 du 25 octobre 1984 ;

- le décret n° 2009-1388 du 11 novembre 2009 ;

- le décret n° 2010-302 du 19 mars 2010 ;

- l'ordonnance n° 2020-305 du 25 mars 2020 portant adaptation des règles applicables devant les juridictions de l'ordre administratif ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. A... B...,

- et les conclusions de Mme Cécile Cabanne, rapporteur public.

Considérant ce qui suit :

1. Mme C..., secrétaire administrative de l'éducation nationale et de l'enseignement supérieur, a été affectée à compter du 1er septembre 2006 au collège Les Roches gravées de Trois-Rivières (Guadeloupe) en qualité d'adjoint gestionnaire. Par arrêté du 1er décembre 2016, elle a fait l'objet d'une sanction disciplinaire de déplacement d'office. Le ministre de l'éducation nationale et de la jeunesse relève appel du jugement du 29 juin 2018 par lequel le tribunal administratif de La Guadeloupe a annulé cet arrêté à la demande de Mme C....

Sur le bien-fondé du jugement :

2. Aux termes de l'alinéa 3 de l'article 19 de la loi du 13 juillet 1983 : " Le fonctionnaire à l'encontre duquel une procédure disciplinaire est engagée a droit à la communication de l'intégralité de son dossier individuel et de tous les documents annexes et à l'assistance de défenseurs de son choix. L'administration doit informer le fonctionnaire de son droit à communication du dossier (...) ". Aux termes de l'article premier du décret du 25 octobre 1984 relatif à la procédure disciplinaire concernant les fonctionnaires de l'État : " L'administration doit dans le cas où une procédure disciplinaire est engagée à l'encontre d'un fonctionnaire informer l'intéressé qu'il a le droit d'obtenir la communication intégrale de son dossier individuel et de tous les documents annexes et la possibilité de se faire assister par un ou plusieurs défenseurs de son choix (...) ".

3. Si les actes administratifs doivent être pris selon les formes et conformément aux procédures prévues par les lois et règlements, un vice affectant le déroulement d'une procédure administrative préalable, suivie à titre obligatoire ou facultatif, n'est de nature à entacher d'illégalité la décision prise que s'il ressort des pièces du dossier qu'il a été susceptible d'exercer, en l'espèce, une influence sur le sens de la décision prise ou qu'il a privé les intéressés d'une garantie. L'application de ce principe n'est pas exclue en cas d'omission d'une procédure obligatoire, à condition qu'une telle omission n'ait pas pour effet d'affecter la compétence de l'auteur de l'acte.

4. Il ressort des pièces du dossier que le courrier du 13 octobre 2016 par lequel Mme C... a été convoquée devant le conseil de discipline et a reçu communication du rapport disciplinaire la concernant ne comportait aucune mention l'informant de son droit à communication intégrale de son dossier individuel dans le cadre de la procédure disciplinaire ainsi engagée à son encontre. Cette omission constitue un vice entachant la procédure disciplinaire engagée contre Mme C....

5. Si le ministre fait valoir que cette circonstance n'a pas été de nature à priver Mme C... d'une garantie, dès lors que, par courrier du 9 juin 2016, elle a été invitée à consulter son dossier administratif, et qu'elle l'a effectivement consulté le 23 juin 2016, il ressort des pièces du dossier, d'une part, qu'à cette date, la procédure disciplinaire n'avait pas encore été engagée, d'autre part, que le courrier du 9 juin 2016 indiquait seulement que plusieurs rapports avaient mis en évidence " des manquements graves aux obligations incombant à tout agent public " sans les caractériser. Dans ces conditions, la consultation par Mme C... de son dossier le 23 juin 2016 ne lui a pas permis de préparer utilement sa défense, dès lors qu'elle ignorait à cette date la nature et la qualification des faits qui lui étaient reprochés. L'irrégularité relevée au point 4 doit donc être regardée comme ayant privé Mme C... d'une garantie.

6. Il résulte de ce qui précède que le ministre de l'éducation nationale et de la jeunesse n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de La Guadeloupe a annulé l'arrêté du 1er décembre 2016 par lequel le recteur de l'académie de la Guadeloupe a prononcé à l'encontre de Mme C... la sanction de déplacement d'office.

Sur les frais liés au litige :

7. Il y a lieu de mettre à la charge de l'État, partie perdante à l'instance, une somme de 1 500 euros au bénéfice de Mme C... au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

DECIDE :

Article 1er : La requête du ministre de l'éducation nationale et de la jeunesse est rejetée.

Article 2 : L'État versera à Mme C... une somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié au ministre de l'éducation nationale et de la jeunesse et à Mme E... C....

Copie en sera transmise pour information au recteur de l'académie de la Guadeloupe.

Délibéré après l'audience du 28 mai 2020 à laquelle siégeaient :

M. Didier Salvi, président,

M. A... B..., premier conseiller,

Mme Nathalie Gay-Sabourdy, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 25 juin 2020.

Le président,

Didier Salvi

La République mande et ordonne au ministre de l'éducation nationale et de la jeunesse, en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

2

N° 18BX03361


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Bordeaux
Formation : 1ère chambre
Numéro d'arrêt : 18BX03361
Date de la décision : 25/06/2020
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

36-09-05 Fonctionnaires et agents publics. Discipline. Procédure.


Composition du Tribunal
Président : M. SALVI
Rapporteur ?: M. David TERME
Rapporteur public ?: Mme CABANNE
Avocat(s) : DEPORCQ

Origine de la décision
Date de l'import : 28/07/2020
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.bordeaux;arret;2020-06-25;18bx03361 ?
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