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09/07/2020 | FRANCE | N°19BX03936

France | France, Cour administrative d'appel de Bordeaux, 3ème chambre, 09 juillet 2020, 19BX03936


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B... A... a demandé au tribunal administratif de Bordeaux d'annuler l'arrêté du préfet de la Gironde en date du 17 octobre 2018 portant à son encontre refus de séjour, obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours, décisions fixant le pays de destination et interdiction de retour sur le territoire français pendant deux ans.

Par un jugement n° 1900526 du 23 avril 2019, le tribunal administratif de Bordeaux a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :


Par une requête enregistrée le 8 octobre 2019, et un mémoire enregistré le 25 mars 2020, ...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B... A... a demandé au tribunal administratif de Bordeaux d'annuler l'arrêté du préfet de la Gironde en date du 17 octobre 2018 portant à son encontre refus de séjour, obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours, décisions fixant le pays de destination et interdiction de retour sur le territoire français pendant deux ans.

Par un jugement n° 1900526 du 23 avril 2019, le tribunal administratif de Bordeaux a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 8 octobre 2019, et un mémoire enregistré le 25 mars 2020, M. A..., représenté par Me C..., demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Bordeaux ;

2°) d'annuler l'arrêté du préfet de la Gironde du 17 octobre 2018 ;

3°) d'enjoindre au préfet de la Gironde de procéder à l'effacement de son signalement aux fins de non-admission dans le système d'information Schengen et de lui délivrer un titre de séjour portant la mention "vie privée et familiale" ou, à défaut, de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour et de réexaminer sa situation dans un délai de huit jours à compter de la notification de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 150 euros par jour de retard ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 500 euros à verser à son conseil en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.

Il soutient que :

En ce qui concerne le refus de titre de séjour :

- il est insuffisamment motivé, car sa demande de titre de séjour n'a pas été examinée au regard de l'article L. 311-12 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, ce qui révèle également un défaut d'examen approfondi de sa situation personnelle ;

- la circonstance qu'il ait répondu à cette demande dans l'arrêté du même jour refusant le séjour à sa femme, qui de surcroît, n'a pas reçu cette décision, ne peut pallier l'absence de motivation sur ce point ;

- l'avis du collège des médecins de l'OFFI émis sur l'état de santé de son enfant n'est pas visé dans l'arrêté en litige ;

- il n'est pas établi que le médecin rapporteur de son dossier n'ait pas siégé au sein du collège des médecins de l'OFFI ;

- il n'est pas établi que les médecins du collège de l'OFFI aient régulièrement délibéré ;

- le refus de titre de séjour est entaché d'une erreur de droit, dès lors qu'il ne statue pas sur sa demande de titre de séjour présentée sur le fondement de l'article L. 311-12 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et en s'estimant à tort lié par l'avis du collège de médecins de l'OFFI ;

- le refus de titre de séjour méconnaît l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour et du droit d'asile ;

- il méconnaît l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'Homme et des libertés fondamentales ;

En ce qui concerne la décision portant obligation de quitter le territoire :

- elle est entachée d'illégalité par voie de conséquence de l'illégalité entachant le refus de titre de séjour ;

- elle est entachée d'erreur de droit, d'erreur manifeste d'appréciation et méconnaît l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'Homme et des libertés fondamentales ;

En ce qui concerne la décision portant interdiction de retour :

- elle n'est pas suffisamment motivée ;

- elle est entachée d'une erreur de droit et d'erreur manifeste d'appréciation.

Par un mémoire enregistré le 5 mars 2020, le préfet de la Gironde demande à la cour de rejeter la requête de M. A....

Il indique s'en remettre à ses écritures de première instance.

M. A... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 5 septembre 2019.

Vu :

- les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- l'arrêté du 27 décembre 2016 relatif aux conditions d'établissement et de transmission des certificats médicaux, rapports médicaux et avis mentionnés aux articles R. 313-22, R. 313-23 et R. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code de justice administrative et l'ordonnance n° 2020-305 du 25 mars 2020.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme E... D...,

- et les observations de Me C..., représentant M. A..., présent.

Considérant ce qui suit :

1. M. A..., de nationalité kosovare, est entré en France irrégulièrement, selon ses dires, en 2014. Après le rejet de sa demande d'asile, le préfet de la Nièvre a pris à son encontre une première obligation de quitter le territoire français, le 28 juillet 2017. Il a sollicité un titre de séjour en qualité d'étranger malade sur le fondement du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et de l'article L. 311-12 du même code, le 21 septembre 2017. Le préfet de la Gironde a pris un arrêté en date du 17 octobre 2018 portant à son encontre refus de séjour, obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours, décision fixant le pays de destination et interdiction de retour sur le territoire français pendant deux ans. M. A... a contesté cet arrêté devant le tribunal administratif de Bordeaux. Il relève appel du jugement du 23 avril 2019 par lequel le tribunal administratif a rejeté sa demande.

Sur les conclusions en annulation :

2. Aux termes des dispositions de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile: " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " est délivrée de plein droit : / (...) 11° A l'étranger résidant habituellement en France, si son état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait avoir pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité et si, eu égard à l'offre de soins et aux caractéristiques du système de santé dans le pays dont il est originaire, il ne pourrait pas y bénéficier effectivement d'un traitement approprié (...) La décision de délivrer la carte de séjour est prise par l'autorité administrative après avis d'un collège de médecins du service médical de l'Office français de l'immigration et de l'intégration, dans des conditions définies par décret en Conseil d'Etat (...) ". Aux termes de l'article L. 311-12 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Sauf si leur présence constitue une menace pour l'ordre public, une autorisation provisoire de séjour est délivrée aux parents étrangers de l'étranger mineur qui remplit les conditions mentionnées au 11° de l'article L. 313-11, ou à l'étranger titulaire d'un jugement lui ayant conféré l'exercice de l'autorité parentale sur ce mineur, sous réserve qu'ils justifient résider habituellement en France avec lui et subvenir à son entretien et à son éducation, sans que la condition prévue à l'article L. 313-2 soit exigée (...) ".

3. Ainsi qu'il a été dit au point 1 ci-dessus, M. A... a sollicité auprès du préfet de la Gironde son admission au séjour en qualité d'étranger malade sur le fondement de l'article L.313-11 11° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, ou à défaut, en qualité de parent d'un enfant malade sur le fondement de l'article L. 313-12 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Il ne ressort d'aucune mention de l'arrêté attaqué que le préfet a procédé à l'examen de la demande d'admission au séjour en qualité de parent d'un enfant malade dont il était pourtant saisi. Dès lors, et sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens, M. A... est fondé à demander l'annulation de l'arrêté du préfet de la Gironde en date du 17 octobre 2018 portant à son encontre refus de séjour.

4. Par voie de conséquence, l'annulation de la décision portant refus de titre de séjour prive de base légale l'obligation de quitter le territoire français, ainsi que les décisions fixant le pays de destination de son éloignement et lui interdisant le retour sur le territoire français pendant une durée de deux ans.

5. Il résulte de ce qui précède, sans qu'il soit besoin de statuer sur les autres moyens de la requête, que M. A... est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Bordeaux a rejeté sa demande.

Sur les conclusions aux fins d'injonction :

6. Aux termes de l'article L. 911-1 du code de justice administrative : " Lorsque sa décision implique nécessairement qu'une personne morale de droit public ou un organisme de droit privé chargé de la gestion d'un service public prenne une mesure d'exécution dans un sens déterminé, la juridiction, saisie de conclusions en ce sens, prescrit, par la même décision, cette mesure assortie, le cas échéant, d'un délai d'exécution. ". Aux termes de l'article L. 911-2 du code de justice administrative : " Lorsque sa décision implique nécessairement qu'une personne morale de droit public ou un organisme de droit privé chargé de la gestion d'un service public prenne à nouveau une décision après une nouvelle instruction, la juridiction, saisie de conclusions en ce sens, prescrit, par la même décision juridictionnelle, que cette nouvelle décision doit intervenir dans un délai déterminé ".

7. Eu égard aux motifs de l'annulation de l'arrêté en litige et compte tenu du fait qu'aucun des autres moyens soulevés par M. A..., tant devant le tribunal administratif de Bordeaux que devant la cour, n'est de nature à justifier qu'il soit fait droit à ses conclusions aux fins d'injonction à la délivrance d'un titre de séjour, il y a lieu seulement d'enjoindre à la préfète de la Gironde de procéder au réexamen de la demande présentée par M. A... dans le délai de trois mois à compter de la notification du présent arrêt et de procéder à l'effacement de son signalement aux fins de non-admission dans le système d'information Schengen effectué en application de la décision portant interdiction de retour sur le territoire national. Il n'y a pas lieu, en revanche, d'assortir cette injonction d'une astreinte.

Sur les frais d'instance :

8. M. A... a obtenu le bénéfice de l'aide juridictionnelle. Par suite, son conseil peut se prévaloir des dispositions des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, et sous réserve que Me C..., avocat de M. A..., renonce à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'État, de mettre à la charge de l'Etat le versement à Me C... de la somme de 800 euros.

DECIDE :

Article 1 : Le jugement du tribunal administratif de Bordeaux du 23 avril 2019 et l'arrêté de la préfète de la Gironde du 17 octobre 2018 sont annulés.

Article 2 : Il est enjoint à la préfète de la Gironde de procéder au réexamen de la demande présentée par M. A... dans le délai de trois mois à compter de la notification du présent arrêt et de procéder à l'effacement de son signalement aux fins de non-admission dans le système d'information Schengen.

Article 3 : L'Etat versera une somme de 800 euros en application des dispositions du deuxième alinéa de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 à Me C... sous réserve que celle-ci renonce à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'Etat.

Article 4 : Le surplus des conclusions de la requête de M. A... est rejeté.

Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... A... et au ministre de l'intérieur. Une copie en sera transmise à la préfète de la Gironde.

Délibéré après l'audience du 30 juin 2020 à laquelle siégeaient :

M. Dominique Naves, président,

Mme F... G..., présidente-assesseure,

Mme E... D..., premier conseiller.

Lu en audience publique, le 9 juillet 2020.

Le président,

Dominique NAVES La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.

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N° 19BX03936


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Bordeaux
Formation : 3ème chambre
Numéro d'arrêt : 19BX03936
Date de la décision : 09/07/2020
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

Étrangers - Séjour des étrangers - Refus de séjour.

Étrangers - Obligation de quitter le territoire français (OQTF) et reconduite à la frontière.


Composition du Tribunal
Président : M. NAVES
Rapporteur ?: Mme Déborah DE PAZ
Rapporteur public ?: Mme MOLINA-ANDREO
Avocat(s) : DA ROS

Origine de la décision
Date de l'import : 28/07/2020
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.bordeaux;arret;2020-07-09;19bx03936 ?
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