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20/07/2020 | FRANCE | N°20BX00729

France | France, Cour administrative d'appel de Bordeaux, 20 juillet 2020, 20BX00729


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A... B... a demandé au tribunal administratif de Toulouse d'annuler l'arrêté du 29 janvier 2019 par lequel le préfet du Tarn a refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination.

Par un jugement n° 1902631 du 3 octobre 2019, le tribunal administratif de Toulouse a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour administrative d'appel :

Par une requête, enregistrée le 17 f

évrier 2020, M. B..., représenté par Me C..., demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement du...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A... B... a demandé au tribunal administratif de Toulouse d'annuler l'arrêté du 29 janvier 2019 par lequel le préfet du Tarn a refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination.

Par un jugement n° 1902631 du 3 octobre 2019, le tribunal administratif de Toulouse a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour administrative d'appel :

Par une requête, enregistrée le 17 février 2020, M. B..., représenté par Me C..., demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Toulouse du 3 octobre 2019 ;

2°) d'annuler l'arrêté du 29 janvier 2019 du préfet du Tarn ;

3°) d'enjoindre au préfet de lui délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " ou en qualité de salarié ou de travailleur temporaire, ou à défaut, de réexaminer sa demande et de lui délivrer dans cette attente une autorisation provisoire de séjour avec autorisation de travail ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat le versement d'une somme de 1 500 euros sur le fondement des dispositions combinées des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique.

Il soutient que :

En ce qui concerne la régularité du jugement :

- le tribunal a insuffisamment motivé sa réponse au moyen tiré du défaut d'examen sérieux de sa situation ;

- le tribunal ne s'est pas prononcé sur le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le tribunal a commis une erreur d'appréciation de sa situation personnelle et familiale, dès lors que le classement sans suite de sa demande de placement auprès de l'aide sociale à l'enfance du département du Tarn est uniquement le fait du parquet, que malgré la saisine du juge des enfants, aucune décision juridictionnelle n'est intervenue et qu'il n'a plus aucune attache dans son pays d'origine, n'ayant jamais connu son père et sa mère étant décédée ;

- le tribunal a dénaturé les pièces du dossier en considérant que la décision de refus de titre de séjour ne portait pas une atteinte disproportionnée à son droit au respect de sa vie privée et familiale, tel que garanti par les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et que le préfet n'a pas commis une erreur manifeste d'appréciation des conséquences de sa décision sur sa situation personnelle ;

En ce qui concerne la décision portant refus de titre de séjour :

- elle est insuffisamment motivée au regard des dispositions de l'article L. 211-5 du code des relations entre le public et l'administration dès lors qu'elle ne fait pas mention de ses années de présence en France, des liens tissés avec son entourage, des difficultés de procédure administrative rencontrées, de sa très bonne intégration, de sa formation et de l'absence de prise en charge par l'aide sociale à l'enfance ;

- ce défaut de motivation révèle un défaut d'examen réel et sérieux de sa situation personnelle ;

- elle est entachée d'une erreur de droit dès lors que le préfet a méconnu l'étendue de sa compétence en s'estimant lié, à tort, par le fait qu'il présentait un contrat d'apprentissage et non un contrat de travail ;

- elle est entachée d'une erreur de fait dès lors que le juge des enfants D... n'a pas statué au fond sur sa majorité et qu'il n'est pas sans ressources ;

- le préfet a commis une erreur de droit dans l'application de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile en n'instruisant pas sa demande au titre de la vie privée et familiale ;

- cette décision méconnaît les dispositions de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dès lors qu'il fait valoir des motifs exceptionnels au soutien de sa demande ; il bénéficie d'une formation professionnelle en CAP en lycée professionnel et a tissé des liens avec son entourage ;

- elle porte une atteinte disproportionnée au droit au respect de sa vie privée et familiale et méconnait ainsi les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- elle est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation de sa situation ;

En ce qui concerne la décision portant obligation de quitter le territoire français :

-elle est illégale en raison de l'illégalité de la décision portant refus de titre de séjour ;

- elle est insuffisamment motivée, ce qui révèle un défaut d'examen de sa situation ;

- elle méconnait les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- elle est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation des conséquences qu'elle emporte sur sa situation personnelle ;

En ce qui concerne la décision fixant le pays de destination :

- elle est illégale en raison de l'illégalité des décisions portant refus de séjour et obligation de quitter le territoire français.

M. B... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision n°2019/023928 du bureau d'aide juridictionnelle près le tribunal de grande instance de Bordeaux du 16 janvier 2020.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code des relations entre le public et l'administration ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le code de justice administrative.

Considérant ce qui suit :

1. Aux termes du dernier alinéa de l'article R. 222-1 du code de justice administrative : " Les présidents des cours administratives d'appel, les premiers vice-présidents des cours et les présidents des formations de jugement des cours, ainsi que les autres magistrats ayant le grade de président désignés à cet effet par le président de la cour peuvent, en outre, par ordonnance, rejeter (...), après l'expiration du délai de recours ou, lorsqu'un mémoire complémentaire a été annoncé, après la production de ce mémoire les requêtes d'appel manifestement dépourvues de fondement. (...) ".

2. M. B..., ressortissant camerounais, relève appel du jugement du 3 octobre 2019 par lequel le tribunal administratif de Toulouse a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 29 janvier 2019 par lequel le préfet du Tarn a refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination.

Sur la régularité du jugement attaqué :

3. En premier lieu, aux termes de l'article L. 9 du code de justice administrative : " Les jugements doivent être motivés. ". Contrairement à ce que soutient l'appelant, les premiers juges, en estimant qu'il ne ressort ni de la motivation des décisions contestées ni des pièces du dossier que le préfet n'aurait pas procédé à un examen particulier de la situation du requérant, ont suffisamment motivé leur réponse au moyen tiré du défaut d'examen sérieux de situation.

4. En deuxième lieu, si M. B... soutient que les premiers juges ont omis de se prononcer sur le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, il ressort des termes mêmes du jugement attaqué que les premiers juges ont expressément répondu à ce moyen au point 7 de leur jugement. Dans ces conditions, le moyen ne peut qu'être écarté.

5. En dernier lieu, si M. B... soutient que le jugement attaqué est entaché d'une erreur d'appréciation de sa situation personnelle et de dénaturation des pièces du dossier, la critique du bien-fondé d'un jugement est sans incidence sur sa régularité.

Sur les conclusions à fin d'annulation :

6. En premier lieu, M. B... reprend ses moyens de première instance tirés de ce que les décisions portant refus de titre de séjour et obligation de quitter le territoire français sont insuffisamment motivées et sont entachées d'un défaut d'examen réel et sérieux de sa situation personnelle. Toutefois, l'arrêté contesté vise les articles 3 et 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et les dispositions applicables du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Il mentionne que M. B... est entré irrégulièrement en France, le 13 juin 2017, avec un acte de naissance authentique mais démuni d'un passeport et que sa demande de placement auprès de l'aide sociale à l'enfance du département du Tarn a été classée sans suite, le 17 octobre 2017, au vu du rapport d'évaluation qui a conclu à sa majorité. Il précise que si M. B... a suivi à partir de 2017 une formation d'installateur thermique au sein du lycée professionnel Le Sidobre à Castres, qu'il s'est ensuite inscrit en CAP maçonnerie et que dans le cadre de cette formation la société EIRL SADA lui a proposé un contrat d'apprentissage, il ne peut prétendre à une régularisation " salarié " en application des dispositions de l'article L. 313 10 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile puisqu'il présente un contrat d'apprentissage et non un contrat de travail. Il ajoute que M. B... ne justifie pas d'une entrée régulière sur le territoire français avec un visa et des moyens d'existence suffisants pour prétendre à la délivrance d'un titre de séjour " étudiant " et qu'il peut poursuivre la formation de CAP maçonnerie au Cameroun. Par ailleurs, le préfet indique qu'il n'est pas porté une atteinte disproportionnée au droit au respect de sa vie privée et familiale dès lors que M. B..., âgé de 18 ans, arrivé récemment en France, célibataire, sans enfant, sans ressources, n'est pas dépourvu de liens au Cameroun où réside toute sa famille. Dans ces conditions, les décisions en litige sont suffisamment motivées au regard des dispositions de l'article L. 211-5 du code des relations entre le public et l'administration. Le caractère suffisant de cette motivation, laquelle ne se confond pas avec le bien-fondé des motifs des décisions, révèle, en outre, que le préfet, qui n'avait pas à reprendre dans ses décisions l'ensemble des éléments caractérisant la situation personnelle de l'intéressé, s'est livré, sans commettre d'erreur de droit, à un examen de la situation personnelle de M. B....

7. En deuxième lieu, M. B... reprend ses moyens de première instance tirés de ce que les décisions portant refus de titre de séjour et obligation de quitter le territoire portent une atteinte disproportionnée au droit au respect de sa vie privée et familiale garanti par les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et sont entachées d'une erreur manifeste d'appréciation de sa situation. Il fait valoir qu'il réside depuis près de deux ans en France, qu'il y est entré en étant mineur isolé, que le classement sans suite en raison de sa majorité de sa demande de prise en charge par l'aide sociale à l'enfance est uniquement le fait du parquet, aucune décision du juge des enfants n'étant intervenue, qu'il a suivi une formation et est inscrit en CAP maçonnerie, qu'il peut être inséré professionnellement, qu'il maîtrise parfaitement le français, que l'essentiel de ses liens privés se trouvent en France et qu'il ne dispose plus d'attaches au Cameroun. Toutefois, il ressort des pièces du dossier que M. B... est entré irrégulièrement sur le territoire français le 13 juin 2017, selon ses déclarations, soit à une date récente et s'y est maintenu. En outre, il est constant qu'à la date de l'arrêté contesté, il était majeur, célibataire et sans charge de famille. S'il produit plusieurs attestations de ses éducateurs, de ses professeurs et de membres de l'association Entraide Protestante qui lui vient en aide financièrement, il ne démontre pas avoir noué des liens personnels présentant un caractère ancien, intense et stable en France. Par ailleurs, s'il se prévaut d'un contrat d'apprentissage avec la société EIRL SADA dans le cadre de son CAP maçonnerie et d'une promesse d'embauche de cette société, ils ne suffisent pas à caractériser une insertion professionnelle particulière et ancienne en France. Enfin, s'il fait valoir qu'il n'a plus d'attaches dans son pays d'origine, n'ayant jamais connu son père et sa mère étant décédée, il ne justifie pas qu'il n'aurait pas au Cameroun où il a vécu jusqu'à l'âge de 17 ans, d'autres attaches familiales ou privées. Dans ces conditions, en dépit des efforts d'insertion et de formation dont M. B... se prévaut, les décisions contestées n'ont pas porté à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels elles ont été prises et ne méconnaissent pas, dès lors, les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales. Pour les mêmes motifs, ces décisions ne sont pas entachées d'une erreur manifeste d'appréciation.

8. En dernier lieu, M. B... reprend, dans des termes identiques et sans critique utile du jugement, les autres moyens invoqués en première instance visés ci-dessus. Il n'apporte ainsi aucun élément de droit ou de fait nouveau à l'appui de ces moyens auxquels le tribunal a suffisamment et pertinemment répondu. Il y a lieu, dès lors, de les écarter par adoption des motifs retenus par les premiers juges.

9. Il résulte de ce qui précède que la requête d'appel est manifestement dépourvue de fondement et doit être rejetée selon la procédure prévue par les dispositions précitées du dernier alinéa de l'article R. 222-1 du code de justice administrative. Les conclusions à fins d'injonction et celles tendant à l'application des dispositions combinées des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique ne peuvent qu'être rejetées par voie de conséquence.

ORDONNE :

Article 1er : La requête de M. B... est rejetée.

Article 2 : La présente ordonnance sera notifiée à M. A... B.... Une copie sera transmise pour information au préfet du Tarn.

Fait à Bordeaux, 20 juillet 2020.

Pierre LARROUMEC

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun, contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente ordonnance.

2

N° 20BX00729


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Bordeaux
Numéro d'arrêt : 20BX00729
Date de la décision : 20/07/2020
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335 Étrangers.

Procédure - Pouvoirs et devoirs du juge.


Composition du Tribunal
Avocat(s) : DUJARDIN

Origine de la décision
Date de l'import : 28/07/2020
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.bordeaux;arret;2020-07-20;20bx00729 ?
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