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24/09/2020 | FRANCE | N°20BX01257,20BX01269

France | France, Cour administrative d'appel de Bordeaux, 1ère chambre, 24 septembre 2020, 20BX01257,20BX01269


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A... C... a demandé au tribunal administratif de Pau d'annuler l'arrêté du 22 janvier 2020 par lequel le préfet des Landes l'a obligé à quitter le territoire français sans délai, a fixé le pays à destination duquel il pourrait être renvoyé et a prononcé à son encontre une interdiction de circulation pour une durée de deux ans.

Par une ordonnance n° 2000178 du 27 février 2020, le tribunal administratif de Pau a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

I. Par une re

quête enregistrée sous le n° 20BX01257 et deux mémoires enregistrés les 4 avril, 20 et 21 août 2020...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A... C... a demandé au tribunal administratif de Pau d'annuler l'arrêté du 22 janvier 2020 par lequel le préfet des Landes l'a obligé à quitter le territoire français sans délai, a fixé le pays à destination duquel il pourrait être renvoyé et a prononcé à son encontre une interdiction de circulation pour une durée de deux ans.

Par une ordonnance n° 2000178 du 27 février 2020, le tribunal administratif de Pau a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

I. Par une requête enregistrée sous le n° 20BX01257 et deux mémoires enregistrés les 4 avril, 20 et 21 août 2020, M. C..., représenté par Me Bordes, demande à la cour :

1°) d'annuler l'ordonnance du tribunal administratif de Pau du 27 février 2020 ;

2°) d'annuler l'arrêté du préfet des Landes du 22 janvier 2020 ;

3°) d'enjoindre au préfet des Landes de procéder au réexamen de sa situation dans un délai d'un mois et de lui délivrer dans l'attente une autorisation provisoire de séjour en application de l'article L. 512-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 2 000 euros en application des dispositions combinées des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991.

Il soutient que :

- la demande de première instance n'était pas tardive dès lors que l'arrêté attaqué a été notifié le vendredi 24 janvier 2020 et que les services du greffe du centre pénitentiaire ne fonctionnent pas du vendredi 18 heures au lundi 8 heures ;

En ce qui concerne l'obligation de quitter le territoire français :

- la décision a été édictée par une autorité incompétente ;

- il ne pouvait faire l'objet d'une obligation de quitter le territoire français en ce qu'il est en France depuis 1967 et est protégé par les dispositions des 2°, 4° et 5° de l'article L. 511-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; la décision est entachée d'erreur de droit ;

- la décision méconnait les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- la décision est entachée d'une erreur manifeste quant à l'appréciation de ses conséquences sur sa situation personnelle ;

En ce qui concerne la décision refusant de lui accorder un délai de départ volontaire :

- la décision est privée de base légale en ce que l'obligation de quitter le territoire méconnait les dispositions de l'article L. 511-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la décision méconnait les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- la décision est entachée d'une erreur manifeste quant à l'appréciation de ses conséquences sur sa situation personnelle ;

En ce qui concerne la décision fixant le pays de destination de la mesure d'éloignement :

- la décision a été édictée par une personne incompétente ;

- la décision est privée de base légale en ce qu'elle se fonde sur une obligation de quitter le territoire français illégale ;

- la décision méconnait les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

En ce qui concerne l'interdiction de retour sur le territoire français :

- la décision est privée de base légale en ce qu'elle se fonde sur une obligation de quitter le territoire français illégale ;

- la décision méconnait les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- la décision est entachée d'une erreur manifeste quant à l'appréciation de ses conséquences sur sa situation personnelle.

Par un mémoire enregistré le 14 août 2020, le préfet des Landes conclut au rejet de la requête. Il sollicite, en outre, sur le fondement de l'article L. 741-2 du code de justice administrative, la suppression d'un passage figurant en page 2 de la requête.

Il fait valoir que les moyens développés par M. C... ne sont pas fondés.

Le préfet des Landes a produit un mémoire enregistré le 26 août 2020 qui n'a pas été communiqué.

II. Par une requête enregistrée sous le n° 20BX01269 le 6 avril 2020, M. C..., représenté par Me Bordes, demande à la cour :

1°) d'ordonner le sursis à exécution de l'ordonnance n° 2000178 du 27 février 2020 par laquelle le président de la 2ème chambre du tribunal administratif de Pau a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 22 janvier 2020 par lequel le préfet des Landes l'a obligé à quitter le territoire français sans délai, a fixé le pays à destination de la mesure d'éloignement et a prononcé à son encontre une interdiction de retour sur le territoire français pour une durée de deux ans ;

2°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 2 000 euros, à verser à son conseil, au titre des dispositions combinées des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique.

Il soutient que l'exécution de la décision de première instance attaquée risque d'entraîner des conséquences difficilement réparables et les moyens énoncés dans la requête au fond paraissent sérieux et de nature à justifier l'annulation du jugement. Toutes les conditions prévues par l'article R. 811-17 sont donc remplies.

Par un mémoire en défense, enregistré le 14 août 2020, le préfet des Landes conclut au rejet de la requête de M. C.... Il sollicite, en outre, sur le fondement de l'article L. 741-2 du code de justice administrative, la suppression d'un passage figurant en page 2 de la requête.

Il fait valoir que les moyens développés par M. C... ne sont pas fondés.

M. C... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 11 juin 2020.

Vu les autres pièces des dossiers.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Nathalie Gay-Sabourdy,

- et les observations de Me Bordes, représentant M. C....

Une note en délibéré présentée par Me Bordes pour M. D... a été enregistrée le 14 septembre 2020.

Considérant ce qui suit :

1. Par un arrêté du 22 janvier 2020, le préfet des Landes a obligé M. A... C..., de nationalité portugaise, né le 1er juillet 1964, à quitter le territoire français sans délai sur le fondement des dispositions du 3° de l'article L. 511-3-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, a fixé le pays à destination duquel il pourrait être reconduit et a prononcé à son encontre une interdiction de circulation sur le territoire français pour une durée de deux ans. M. C... relève appel de l'ordonnance du 27 février 2020 par laquelle le président de la 2ème chambre du tribunal administratif de Pau a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté.

Sur la jonction :

2. Les requêtes enregistrées sous les n° 20BX01257 et 20BX01269, présentées pour M. C..., concernent la situation d'une même personne. Il y a lieu de les joindre pour qu'elles fassent l'objet d'un seul arrêt.

Sur la régularité de l'ordonnance :

3. Aux termes de l'article L. 512-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " (...) II. L'étranger qui fait l'objet d'une obligation de quitter le territoire sans délai peut, dans les quarante-huit heures suivant sa notification par voie administrative, demander au président du tribunal administratif l'annulation de cette décision, ainsi que l'annulation de la décision relative au séjour, de la décision refusant un délai de départ volontaire, de la décision mentionnant le pays de destination et de la décision d'interdiction de retour sur le territoire français ou d'interdiction de circulation sur le territoire français qui l'accompagnent le cas échéant (...) ". Aux termes de l'article L. 512-2 du même code : " Dès notification de l'obligation de quitter le territoire français, l'étranger auquel aucun délai de départ volontaire n'a été accordé est mis en mesure, dans les meilleurs délais, d'avertir un conseil, son consulat ou une personne de son choix. L'étranger est informé qu'il peut recevoir communication des principaux éléments des décisions qui lui sont notifiées en application de l'article L. 511-1. Ces éléments lui sont alors communiqués dans une langue qu'il comprend ou dont il est raisonnable de supposer qu'il la comprend ". Aux termes de l'article R. 776-2 du code de justice administrative : " (...) II. Conformément aux dispositions du II de l'article L. 512-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, la notification par voie administrative d'une obligation de quitter sans délai le territoire français fait courir un délai de quarante-huit heures pour contester cette obligation et les décisions relatives au séjour, à la suppression du délai de départ volontaire, au pays de renvoi et à l'interdiction de retour ou à l'interdiction de circulation notifiées simultanément (...) ".

4. Il ressort des pièces du dossier que l'arrêté du préfet des Landes du 22 janvier 2020 l'obligeant à quitter le territoire français sans délai, qui comportait la mention des voies et délais de recours, a été notifié à M. C... le vendredi 24 janvier 2020 à 10 heures 15 alors que l'étranger se trouvait incarcéré à la maison d'arrêt de Mont-de-Marsan. L'appelant soutient toutefois qu'il n'a pu disposer au sein de ce centre pénitentiaire ni d'un téléphone, ni d'une télécopie le mettant en mesure d'avertir un avocat, une association ou une personne compétente, en raison de la fermeture du service du greffe du service pénitentiaire du vendredi 18 heures au lundi 8 heures, ainsi qu'en attestent la directrice du centre pénitentiaire et la responsable du greffe, de sorte qu'il n'a pas été en mesure d'organiser la défense de ses droits dans le délai de quarante-huit heures imparti par les dispositions précitées de l'article L. 512-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Eu égard aux conditions matérielles et aux contraintes résultant de sa détention, M. C... doit être regardé comme n'ayant pu exercer effectivement son droit au recours avant l'expiration du délai requis. Dans ces conditions, le délai de quarante-huit heures prévu à l'article L. 512-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ne pouvait lui être opposé. Par suite, sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 22 janvier 2020, dont il avait saisi le tribunal administratif de Pau par une requête enregistrée au greffe le 27 janvier 2020, n'était pas tardive. M. C... est ainsi fondé à soutenir que c'est à tort que, par l'ordonnance attaquée, le président de la 2ème chambre du tribunal administratif de Pau a rejeté sa demande comme irrecevable. Il s'ensuit que l'ordonnance du 27 février 2020 doit être annulée.

5. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, d'évoquer et de statuer immédiatement sur la demande présentée par M. C... devant le tribunal administratif de Pau.

Sur les conclusions à fin d'annulation de l'arrêté du 22 janvier 2020 :

En ce qui concerne le moyen tiré de l'incompétence de l'auteur de l'arrêté du 22 janvier 2020 :

6. L'arrêté du 22 janvier 2020 est signé par M. Loïc Grosse, secrétaire général de la préfecture des Landes, qui disposait d'une délégation régulièrement consentie par arrêté du préfet de ce département du 6 septembre 2019 publié au recueil spécial des actes administratifs de la préfecture le 11 septembre suivant, aux fins de signer tous actes, arrêtés et décisions, y compris les mesures prévues par le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, relevant des attributions du préfet dans le département à l'exception de certains actes au nombre desquels ne figurent pas les actes attaqués. Dès lors, le moyen tiré d'un vice d'incompétence doit être écarté comme manquant en fait.

En ce qui concerne l'obligation de quitter le territoire français :

7. Aux termes de l'article L. 511-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Ne peuvent faire l'objet d'une obligation de quitter le territoire français : (...) / 2° L'étranger qui justifie par tous moyens résider habituellement en France depuis qu'il a atteint au plus l'âge de treize ans ; / (...) 4° L'étranger qui réside régulièrement en France depuis plus de dix ans, sauf s'il a été, pendant toute cette période, titulaire d'une carte de séjour temporaire ou pluriannuelle portant la mention " étudiant " ; / 5° L'étranger qui réside régulièrement en France depuis plus de vingt ans (...) ".

8. M. C... invoque les dispositions précitées en soutenant résider en France depuis son entrée en novembre 1967 à l'âge de trois ans. Toutefois, s'il verse au dossier le titre de séjour de sa mère entrée en France en novembre 1967, il ne produit aucun document permettant d'établir qu'il accompagnait sa mère lors de son entrée en France, ni qu'il y a résidé habituellement depuis cette date. Par ailleurs, la production du document récapitulant les droits acquis depuis le début de sa carrière dans tous les régimes de retraite obligatoires, qui ne mentionne d'ailleurs aucune activité professionnelle depuis 2007, ne permet pas de justifier d'une résidence régulière en France depuis dix ans à la date de la décision attaquée. Dans ces conditions, le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions des 2°, 4° et 5° de l'article L. 511-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile doit être écarté.

9. Aux termes de l'article L. 511-3-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'autorité administrative compétente peut, par décision motivée, obliger un ressortissant d'un Etat membre de l'Union européenne, d'un autre Etat partie à l'accord sur l'Espace économique européen ou de la Confédération suisse, ou un membre de sa famille à quitter le territoire français lorsqu'elle constate : / (...) 3° Ou que son comportement personnel constitue, du point de vue de l'ordre public ou de la sécurité publique, une menace réelle, actuelle et suffisamment grave à l'encontre d'un intérêt fondamental de la société. / L'autorité administrative compétente tient compte de l'ensemble des circonstances relatives à sa situation, notamment la durée du séjour de l'intéressé en France, son âge, son état de santé, sa situation familiale et économique, son intégration sociale et culturelle en France, et de l'intensité de ses liens avec son pays d'origine. (...) ".

10. En application de ces dispositions, il appartient à l'autorité administrative, qui ne saurait se fonder sur la seule existence d'une infraction à la loi, d'examiner, d'après l'ensemble des circonstances de l'affaire, si la présence de l'intéressé sur le territoire français est de nature à constituer une menace réelle, actuelle et suffisamment grave pour un intérêt fondamental de la société française, ces conditions étant appréciées en fonction de sa situation individuelle, notamment de la durée de son séjour en France, de sa situation familiale et économique et de son intégration.

11. Il ressort des pièces du dossier que M. C... a été condamné à un mois d'emprisonnement pour détention et acquisition non autorisée de stupéfiants, le 8 octobre 2003, à trois mois d'emprisonnement pour transport prohibé d'armes, le 2 octobre 2006, à un mois d'emprisonnement pour violence par une personne étant ou ayant été concubin suivie d'une incapacité n'excédant pas huit jours, le 8 février 2007, à deux mois d'emprisonnement pour conduite d'un véhicule à moteur malgré l'annulation judiciaire du permis de conduire, le 24 octobre 2013, à quatre mois d'emprisonnement pour transport, détention, offre ou cession, acquisition non autorisés de stupéfiants, le 28 juillet 2015, à trois mois d'emprisonnement dont deux mois avec sursis, pour des faits de conduite d'un véhicule en ayant fait usage de substances ou de plantes classées comme stupéfiants, le 8 octobre 2018, à dix mois d'emprisonnement pour des faits de violence suivie d'incapacité n'excédant pas 8 jours par une personne étant ou ayant été conjoint, concubin ou partenaire lié par un pacte de solidarité en récidive, le 27 septembre 2019. En outre, si M. C... est père de trois enfants nés en France, il n'en a pas la charge et est séparé de sa compagne depuis 2002. Par ailleurs, si six de ses frères et soeurs vivent en France, il n'est pas dépourvu d'attaches familiales au Portugal où résident un frère et une soeur. Dans ces circonstances, et eu égard, d'une part, à la réitération des faits commis par l'intéressé, au caractère rapproché des deux dernières condamnations et, d'autre part, à sa situation personnelle en France, le préfet des Landes n'a pas fait une inexacte application de l'article L. 511-3-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile en l'obligeant à quitter le territoire français sur le fondement de ces dispositions.

12. Pour les mêmes motifs, le préfet n'a pas entaché cette mesure d'éloignement d'une erreur de droit ou d'une erreur manifeste des conséquences qu'elle emporte sur la situation de l'intéressé et n'a pas porté une atteinte excessive à son droit au respect de sa vie privée familiale au sens des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.

13. Aux termes de l'article L. 511-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Ne peuvent faire l'objet d'une obligation de quitter le territoire français : / (...) 11° Le ressortissant d'un Etat membre de l'Union européenne, d'un autre Etat partie à l'accord sur l'Espace économique européen ou de la Confédération suisse, ainsi que les membres de sa famille, qui bénéficient du droit au séjour permanent prévu par l'article L. 122-1 ". Aux termes de l'article L. 122-1 du même code : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, le ressortissant visé à l'article L. 121-1 qui a résidé de manière légale et ininterrompue en France pendant les cinq années précédentes acquiert un droit au séjour permanent sur l'ensemble du territoire français (...) ". L'article L. 121-1 du même code dispose : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, tout citoyen de l'Union européenne, tout ressortissant d'un autre Etat partie à l'accord sur l'Espace économique européen ou de la Confédération suisse a le droit de séjourner en France pour une durée supérieure à trois mois s'il satisfait à l'une des conditions suivantes : / 1° S'il exerce une activité professionnelle en France ; / (...) 4° S'il est un descendant direct âgé de moins de vingt et un ans ou à charge, ascendant direct à charge, conjoint, ascendant ou descendant direct à charge du conjoint, accompagnant ou rejoignant un ressortissant qui satisfait aux conditions énoncées aux 1° ou 2° (...) ".

14. Pour les mêmes motifs que ceux indiqués au point 11, la présence de M. C... constitue une menace pour l'ordre public. Par suite, M. C... ne peut se prévaloir d'un droit au séjour permanent en application de l'article L. 122-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Dès lors, le moyen tiré de la méconnaissance du 11° de l'article L. 511-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile doit être écarté.

15. M. C... ne peut utilement se prévaloir des dispositions de l'article 28 de la directive 2004/38/CE qui ont été transposées en droit interne par la loi n° 2011-672 du 16 juin 2011.

En ce qui concerne la décision refusant de lui accorder un délai de départ volontaire :

16. Il résulte de ce qui précède que M. C... n'est pas fondé à soutenir que la décision refusant de lui octroyer un délai de départ volontaire serait illégale par voie de conséquence de l'illégalité de la décision l'obligeant à quitter le territoire français.

17. Aux termes du troisième alinéa de l'article L. 511-3-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " (...) L'étranger dispose, pour satisfaire à l'obligation qui lui a été faite de quitter le territoire français, d'un délai qui, sauf urgence, ne peut être inférieur à trente jours à compter de sa notification. À titre exceptionnel, l'autorité administrative peut accorder un délai de départ volontaire supérieur à trente jours ".

18. Eu égard à ce qui a été dit au point 11 du présent arrêt, c'est sans commettre d'erreur de droit ni d'erreur d'appréciation que le préfet a estimé, compte tenu de la gravité des faits, en particulier ceux récemment commis par l'appelant, et du risque de récidive, que son éloignement présentait un caractère d'urgence au sens des dispositions de l'article L. 511-3-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.

19. Ainsi qu'il a été indiqué au point 11 du présent arrêt, M. C... est séparé de sa compagne depuis 2002, sans enfant à charge et n'est pas dépourvu d'attaches dans son pays d'origine. Par suite, la décision refusant de lui accorder un délai de départ volontaire n'a pas porté une atteinte excessive à son droit au respect de la vie privée familiale au sens des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales. Le préfet des Landes n'a pas davantage commis une erreur manifeste quant à l'appréciation des conséquences de cette décision sur la situation personnelle de M. C....

En ce qui concerne la décision fixant le pays de destination de la mesure d'éloignement :

20. Compte tenu de ce qui précède, le moyen tiré, par la voie de l'exception, de l'illégalité de l'obligation de quitter le territoire français doit être écarté.

21. Pour les mêmes motifs que ceux exposés au point 11, la décision fixant le Portugal comme pays de destination de la mesure d'éloignement n'a pas porté une atteinte excessive au droit de M. C... au respect de la vie privée familiale au sens des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.

En ce qui concerne l'interdiction de circulation sur le territoire français :

22. Il résulte de ce qui précède que M. C... n'est pas fondé à soutenir que la décision prononçant à son encontre une interdiction de circulation sur le territoire français serait illégale par voie de conséquence de l'illégalité de la décision l'obligeant à quitter le territoire français.

23. Aux termes de l'article L. 511-3-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'autorité administrative peut, par décision motivée, assortir l'obligation de quitter le territoire français prononcée en application des 2° et 3° de l'article L. 511-3-1 d'une interdiction de circulation sur le territoire français d'une durée maximale de trois ans (...) Les quatre derniers alinéas de l'article L. 511-3-1 sont applicables ". Aux termes du cinquième aliéna de l'article L. 511-3-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'autorité administrative compétente tient compte de l'ensemble des circonstances relatives à sa situation, notamment la durée du séjour de l'intéressé en France, son âge, son état de santé, sa situation familiale et économique, son intégration sociale et culturelle en France, et de l'intensité de ses liens avec son pays d'origine (...) ".

24. Si M. C... a travaillé en France, a vécu en concubinage avec une ressortissante de nationalité française de 1987 à 2002 et est père de trois enfants résidant en France, il n'établit pas avoir conservé des liens avec ses enfants, dont il n'a pas la charge. A la date de la décision attaquée, il ne justifie d'aucune insertion socio-professionnelle, déclare disposer comme seules ressources des prestations sociales et n'apporte pas d'élément permettant de considérer qu'il serait dépourvu de toute attache familiale dans son pays d'origine. Par suite, eu égard à la gravité des faits mentionnés au point 11 pour lesquels il a été condamné et à leur réitération, en prenant une décision d'interdiction de circulation sur le territoire français pour une durée de deux ans, le préfet des Landes n'a pas fait une inexacte application de l'article L. 511-3-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ni entaché sa décision d'un défaut d'examen de sa situation. Ainsi, les moyens tirés de l'erreur manifeste d'appréciation et de la méconnaissance des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales doivent être écartés.

25. Il résulte de tout ce qui précède que M. C... n'est pas fondé à demander l'annulation de l'arrêté du 22 janvier 2020 par lequel le préfet des Landes l'a obligé à quitter le territoire français sans délai, a fixé le pays à destination duquel il pourrait être renvoyé et a prononcé à son encontre une interdiction de circulation pour une durée de deux ans. Par voie de conséquence, ses conclusions à fin d'injonction ainsi que celles présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ne peuvent qu'être rejetées.

Sur les conclusions à fin de sursis à exécution de l'ordonnance du 27 février 2020 :

26. La cour statuant par le présent arrêt sur les conclusions de la requête de M. C... tendant à l'annulation de l'ordonnance attaquée, les conclusions de sa requête n° 20BX01269 tendant à ce qu'il soit sursis à l'exécution de cette ordonnance sont privées d'objet. Il n'y a pas lieu, par suite, d'y statuer.

Sur les conclusions tendant à la suppression de passages injurieux, outrageants ou diffamatoires :

27. Aux termes de l'article L. 741-2 du code de justice administrative : " (...) Ne donneront lieu à aucune action en diffamation, injure ou outrage, ni le compte rendu fidèle fait de bonne foi des débats judiciaires, ni les discours prononcés ou les écrits produits devant les tribunaux. / Pourront néanmoins les juges, saisis de la cause et statuant sur le fond, prononcer la suppression des discours injurieux, outrageants ou diffamatoires, et condamner qui il appartiendra à des dommages-intérêts (...) ".

28. Pour regrettable et excessif qu'il soit, le passage de la requête de M. C... incriminé par le préfet des Landes ne peut être regardé comme injurieux, outrageant ou diffamatoire au sens des dispositions précitées. Par suite, celui-ci n'est pas fondé à en demander la suppression.

DECIDE :

Article 1er : Il n'y a pas lieu de statuer sur les conclusions de la requête n° 20BX01269 tendant à ce qu'il soit sursis à l'exécution de l'ordonnance n° 2000178 du 27 février 2020 du tribunal administratif de Pau.

Article 2 : L'ordonnance n° 2000178 du 27 février 2020 du tribunal administratif de Pau est annulée.

Article 3 : La demande de M. C... présentée devant le tribunal administratif de Pau et le surplus de ses conclusions d'appel sont rejetés.

Article 4 : Les conclusions du préfet des Landes tendant à l'application de l'article L. 741-2 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... C... et au ministre de l'intérieur.

Copie en sera adressée, pour information, au préfet des Landes.

Délibéré après l'audience du 27 août 2020 à laquelle siégeaient :

Mme Marianne Hardy, président,

M. Didier Salvi, président-assesseur,

Mme Nathalie Gay-Sabourdy, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 24 septembre 2020.

Le rapporteur,

Nathalie Gay-SabourdyLe président,

Marianne Hardy

Le greffier,

Sophie Lecarpentier

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun, contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.

N° 20BX01257, 20BX01269 2


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Bordeaux
Formation : 1ère chambre
Numéro d'arrêt : 20BX01257,20BX01269
Date de la décision : 24/09/2020
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-01-03 Étrangers. Séjour des étrangers. Refus de séjour.


Composition du Tribunal
Président : Mme HARDY
Rapporteur ?: Mme Nathalie GAY-SABOURDY
Rapporteur public ?: M. ROUSSEL
Avocat(s) : BORDES

Origine de la décision
Date de l'import : 06/10/2020
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.bordeaux;arret;2020-09-24;20bx01257.20bx01269 ?
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