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19/10/2020 | FRANCE | N°20BX01360

France | France, Cour administrative d'appel de Bordeaux, 6ème chambre, 19 octobre 2020, 20BX01360


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. E... A... a demandé au tribunal administratif de Toulouse d'annuler l'arrêté du 21 décembre 2018 par lequel le préfet de la Haute-Garonne lui a refusé la délivrance d'un titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français dans le délai de trente jours et a fixé le pays de destination.

Par un jugement n° 1902834 du 5 novembre 2019 le tribunal administratif de Toulouse a rejeté cette demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 16 avril 2020,

M. A..., représenté par Me Seignalet Mauhourat, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement ;

...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. E... A... a demandé au tribunal administratif de Toulouse d'annuler l'arrêté du 21 décembre 2018 par lequel le préfet de la Haute-Garonne lui a refusé la délivrance d'un titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français dans le délai de trente jours et a fixé le pays de destination.

Par un jugement n° 1902834 du 5 novembre 2019 le tribunal administratif de Toulouse a rejeté cette demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 16 avril 2020, M. A..., représenté par Me Seignalet Mauhourat, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement ;

2°) d'annuler cet arrêté ;

3°) d'enjoindre au préfet de la Haute-Garonne de lui délivrer un titre de séjour portant la mention " vie privée et familiale ", ou à défaut, de procéder au réexamen de sa situation dans un délai de quinze jours à compter de la notification de l'arrêté à intervenir ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 800 euros à verser à son conseil en application des dispositions combinées de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.

Il soutient que :

- les premiers juges et le collège de médecins de l'Office français de l'immigration et de l'intégration (OFII) ont commis une erreur d'appréciation dès lors que la décision portant refus de titre de séjour méconnaît les dispositions de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dans la mesure où le défaut de prise en charge de son état de santé est susceptible d'entraîner des conséquences d'une exceptionnelle gravité et qu'il ne pourrait bénéficier ni d'un traitement approprié ni d'un suivi médical dans son pays d'origine ;

- le collège de médecins de l'OFII ne s'est pas prononcé sur la possibilité de bénéficier effectivement d'un traitement approprié à son état de santé dans son pays d'origine.

Par un mémoire enregistré le 24 juin 2020, le préfet de la Haute-Garonne conclut au rejet de la requête de M. A....

Il soutient que les moyens ne sont pas fondés.

M. A... a été admis dans le bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 19 mars 2020.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'Homme et des libertés fondamentales ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code des relations entre le public et l'administration ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- l'arrêté du 27 décembre 2016 relatif aux conditions d'établissement et de transmission des certificats médicaux, rapports médicaux et avis mentionnés aux articles R. 313-22, R. 313-23 et R. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- l'arrêté du 5 janvier 2017 fixant les orientations générales pour l'exercice par les médecins de l'Office français de l'immigration et de l'intégration, de leurs missions, prévues à l'article L. 313-11 (11°) du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le rapport de M. Naves a été entendu au cours de l'audience publique.

Considérant ce qui suit :

1. M. A..., ressortissant nigérian, né le 17 août 1970 à Umuhaia, est entré en France, le 2 mars 2015, où son admission au bénéfice de l'asile lui a été refusé par une décision devenue définitive de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides en date du 29 décembre 2015. Il a sollicité son admission au séjour en qualité d'étranger malade le 11 septembre 2017. Par un arrêté en date du 21 décembre 2018 le préfet de la Haute-Garonne lui a refusé le séjour, l'a obligé à quitter le territoire français dans le délai de trente jours et a fixé le pays de destination. M. A... relève appel du jugement en date du 5 novembre 2019 par lequel le tribunal administratif de Toulouse a rejeté sa demande a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté du 21 décembre 2018.

2. Aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention "vie privée et familiale" est délivrée de plein droit : (...) 11° A l'étranger résidant habituellement en France, si son état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait avoir pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité et si, eu égard à l'offre de soins et aux caractéristiques du système de santé dans le pays dont il est originaire, il ne pourrait pas y bénéficier effectivement d'un traitement approprié. (...) La décision de délivrer la carte de séjour est prise par l'autorité administrative après avis d'un collège de médecins du service médical de l'Office français de l'immigration et de l'intégration, dans des conditions définies par décret en Conseil d'Etat. (...) ". L'article 6 de l'arrêté du 27 décembre 2016 relatif aux conditions d'établissement et de transmission des certificats médicaux, rapports médicaux et avis mentionnés aux articles R. 313-22, R. 313-23 et R. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile précise que : " Au vu du rapport médical mentionné à l'article 3, un collège de médecins désigné pour chaque dossier dans les conditions prévues à l'article 5 émet un avis, conformément au modèle figurant à l'annexe C du présent arrêté, précisant : a) si l'état de santé de l'étranger nécessite ou non une prise en charge médicale ; b) si le défaut de cette prise en charge peut ou non entraîner des conséquences d'une exceptionnelle gravité sur son état de santé ; c) si, eu égard à l'offre de soins et aux caractéristiques du système de santé dans le pays dont le ressortissant étranger est originaire, il pourrait ou non y bénéficier effectivement d'un traitement approprié ; d) la durée prévisible du traitement. Dans le cas où le ressortissant étranger pourrait bénéficier effectivement d'un traitement approprié, eu égard à l'offre de soins et aux caractéristiques du système de santé dans le pays dont il est originaire, le collège indique, au vu des éléments du dossier du demandeur, si l'état de santé de ce dernier lui permet de voyager sans risque vers ce pays. Cet avis mentionne les éléments de procédure. Le collège peut délibérer au moyen d'une conférence téléphonique ou audiovisuelle. L'avis émis à l'issue de la délibération est signé par chacun des trois médecins membres du collège. ". L'article 4 de l'arrêté du 5 janvier 2017 fixant les orientations générales pour l'exercice par les médecins de l'Office français de l'immigration et de l'intégration de cette mission précise : " Les conséquences d'une exceptionnelle gravité résultant d'un défaut de prise en charge médicale, mentionnées au 11° de l'article L. 313-11 du CESEDA, sont appréciées sur la base des trois critères suivants : degré de gravité (mise en cause du pronostic vital de l'intéressé ou détérioration d'une de ses fonctions importantes), probabilité et délai présumé de survenance de ces conséquences. Cette condition des conséquences d'une exceptionnelle gravité résultant d'un défaut de prise en charge doit être regardée comme remplie chaque fois que l'état de santé de l'étranger concerné présente, en l'absence de la prise en charge médicale que son état de santé requiert, une probabilité élevée à un horizon temporel qui ne saurait être trop éloigné de mise en jeu du pronostic vital, d'une atteinte à son intégrité physique ou d'une altération significative d'une fonction importante. Lorsque les conséquences d'une exceptionnelle gravité ne sont susceptibles de ne survenir qu'à moyen terme avec une probabilité élevée (pathologies chroniques évolutives), l'exceptionnelle gravité est appréciée en examinant les conséquences sur l'état de santé de l'intéressé de l'interruption du traitement dont il bénéficie actuellement en France (rupture de la continuité des soins). Cette appréciation est effectuée en tenant compte des soins dont la personne peut bénéficier dans son pays d'origine. ".

3. Il ressort des pièces du dossier que pour refuser de délivrer un titre de séjour à M. A... sur le fondement des dispositions du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile le préfet, qui s'est notamment fondé sur l'avis du collège de médecins de l'Office français de l'immigration et de l'intégration du 5 mars 2018, a considéré que, si l'état de santé de l'intéressé nécessitait une prise en charge médicale, le défaut d'une telle prise en charge ne devrait pas entraîner des conséquences d'une exceptionnelle gravité.

4. La partie qui justifie d'un avis du collège de médecins de l'Office français de l'immigration et de l'intégration qui lui est favorable doit être regardée comme apportant des éléments de fait susceptibles de faire présumer l'existence ou l'absence d'un état de santé de nature à justifier la délivrance ou le refus d'un titre de séjour. Dans ce cas, il appartient à l'autre partie, dans le respect des règles relatives au secret médical, de produire tous éléments permettant d'apprécier l'état de santé de l'étranger et, le cas échéant, l'existence ou l'absence d'un traitement approprié dans le pays de renvoi. La conviction du juge, à qui il revient d'apprécier si l'état de santé d'un étranger justifie la délivrance d'un titre de séjour dans les conditions ci-dessus rappelées, se détermine au vu de ces échanges contradictoires. En cas de doute, il lui appartient de compléter ces échanges en ordonnant toute mesure d'instruction utile.

5. M. A..., qui souffre d'hypertension artérielle, compliquée d'une hypertrophie ventriculaire gauche associé à un syndrome d'apnées du sommeil, a produit, en première instance et en appel, plusieurs documents médicaux, dont certains, s'ils sont postérieurs à la date de l'arrêté litigieux peuvent être pris en compte dans la mesure où ils décrivent l'état de santé de l'intéressé avant cette date, et notamment des rapports médicaux émanant du docteur Laurencin, médecin généraliste, dont celui en date du 28 novembre 2019, indiquant que des complications potentielles sont susceptibles d'apparaître en cas d'absence de traitement de l'état de santé de l'intéressé, qui présente déjà une hypertrophie ventriculaire gauche. Il ressort également d'un courrier du docteur Souletie, praticien hospitalier, en date du 7 mai 2019, que M. A... présente une tension artérielle à 16/10, une auscultation cardiaque et pulmonaire normale, que les pouls périphériques sont correctement perçus et qu'il n'y a pas de signe d'insuffisance cardiaque. Les risques de complications ainsi invoqués par M. A..., dont la probabilité et le délai de survenance ne sont pas précisés, ne peuvent, en l'état des précisions fournies, être qualifiées de conséquence d'une exceptionnelle gravité au sens des dispositions précitées de l'arrêté du 5 janvier 2017. Par ailleurs, M. A... n'établit pas par la production d'éléments généraux sur les faiblesses du système de santé au Nigéria et des captures d'écran du site internet du " NAFDAC " qu'il serait dans l'impossibilité de bénéficier d'un traitement hypertenseur équivalent dans son pays d'origine. Enfin, le collège des médecins de l'Office n'était pas tenu de se prononcer sur la possibilité pour M. A... de bénéficier effectivement dans son pays d'origine d'un traitement approprié dès lors qu'il a estimé que le défaut de prise en charge médicale ne devrait pas entraîner pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité. Par suite, M. A... n'est pas fondé à soutenir que la décision contestée portant refus de séjour méconnait les dispositions du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.

6. Il résulte de tout ce qui précède que M. A... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que le tribunal administratif de Toulouse a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 21 décembre 2018 par lequel le préfet de la Haute-Garonne lui a refusé la délivrance d'un titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français dans le délai de trente jours et a fixé le pays de destination. Par voie de conséquence il y a lieu de rejeter ses conclusions à fins d'injonction, ainsi que celles présentées au titre des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991.

DECIDE :

Article 1er : La requête de M. A... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. E... A... et au ministre de l'intérieur. Copie en sera adressée au préfet de la Haute-Garonne.

Délibéré après l'audience du 21 septembre 2020, à laquelle siégeaient :

M. Dominique Naves, président,

Mme Karine Butéri, présidente assesseure,

Mme Déborah De Paz, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 19 octobre 2020.

La présidente assesseure,

Karine Butéri

Le président,

Dominique Naves

Le greffier,

Cindy Virin

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur, et à tous huissiers de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.

2

N° 20BX01360


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Bordeaux
Formation : 6ème chambre
Numéro d'arrêt : 20BX01360
Date de la décision : 19/10/2020
Type d'affaire : Administrative

Analyses

335-01-03 Étrangers. Séjour des étrangers. Refus de séjour.


Composition du Tribunal
Président : M. NAVES
Rapporteur ?: M. Dominique NAVES
Rapporteur public ?: M. BASSET
Avocat(s) : SEIGNALET MAUHOURAT

Origine de la décision
Date de l'import : 05/11/2020
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.bordeaux;arret;2020-10-19;20bx01360 ?
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