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16/11/2020 | FRANCE | N°20BX01210

France | France, Cour administrative d'appel de Bordeaux, 3ème chambre, 16 novembre 2020, 20BX01210


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme H... B... a demandé au tribunal administratif de Toulouse d'annuler l'arrêté du 18 juin 2019 par lequel le préfet de la Haute-Garonne lui a refusé la délivrance d'un titre de séjour, l'a obligée à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination de la mesure d'éloignement.

Par un jugement n° 1903648 du 25 octobre 2019, le tribunal administratif de Toulouse a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistr

e le 31 mars 2020, Mme B..., représentée par Me I..., demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugem...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme H... B... a demandé au tribunal administratif de Toulouse d'annuler l'arrêté du 18 juin 2019 par lequel le préfet de la Haute-Garonne lui a refusé la délivrance d'un titre de séjour, l'a obligée à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination de la mesure d'éloignement.

Par un jugement n° 1903648 du 25 octobre 2019, le tribunal administratif de Toulouse a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 31 mars 2020, Mme B..., représentée par Me I..., demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement ;

2°) d'annuler l'arrêté du 18 juin 2019 par lequel le préfet de la Haute-Garonne lui a refusé la délivrance d'un titre de séjour, l'a obligée à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination de la mesure d'éloignement ;

3°) d'enjoindre au préfet de la Haute-Garonne de lui délivrer un titre de séjour temporaire et à défaut de procéder au réexamen de sa demande, dans un délai de 15 jours à compter de la notification de l'arrêt à intervenir et, ce, sous astreinte de 100 euros par jour de retard ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 2 000 euros à verser à son conseil qui en cas de succès renoncera au bénéfice de l'aide juridictionnelle, conformément aux dispositions combinées de l'article 37 alinéa 2 de la loi du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique et aux dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- la décision du préfet de la Haute-Garonne est entachée d'un vice de procédure car le refus de titre de séjour est intervenu plus de dix-huit mois après la date de la demande en méconnaissance de l'article R. 121-15 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Si l'instruction avait été faite dans le délai légal, son mari aurait conservé un droit au séjour en tant que travailleur jusqu'au 23 juillet 2018 ;

- son époux dispose de ressources suffisantes pour subvenir à leurs besoins ;

- le refus méconnaît le droit communautaire, où le droit au séjour est reconnu à un ressortissant communautaire à qui un organisme officiel a versé une prestation sociale soumise à condition de régularité du séjour. En l'espèce, en versant le revenu de solidarité active, l'administration française a reconnu à son époux son droit au séjour, si bien qu'un droit au séjour doit lui être reconnu par ricochet.

Par un mémoire en défense, enregistré le 17 juin 2020, le préfet de la Haute-Garonne demande à la cour de rejeter la requête de Mme B....

Il soutient qu'aucun moyen n'est fondé.

Mme B... a été admise au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du bureau d'aide juridictionnelle du 12 mars 2020.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le Traité sur le fonctionnement de l'Union européenne ;

- le règlement (UE) n° 429/2011 du Parlement européen et du Conseil du 5 avril 2011 relatif à la libre circulation des travailleurs à l'intérieur de l'Union ;

- la directive 2004/38/CE du Parlement européen et du Conseil du 29 avril 2004 ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Le rapport de Mme E... C... a été entendu au cours de l'audience publique.

Considérant ce qui suit :

1. Mme H... B..., de nationalité argentine, est entrée en France le 9 avril 2017 sous couvert d'un passeport en cours de validité. Elle a sollicité le 6 décembre 2017 une carte de séjour en qualité de conjoint d'un ressortissant de l'Union Européenne du fait de la nationalité espagnole de son mari, M. A... D.... Par un arrêté du 18 juin 2019, le préfet de la Haute-Garonne lui a refusé la délivrance d'un titre de séjour, l'a obligée à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination de la mesure d'éloignement. Mme B... a contesté cet arrêté devant le tribunal administratif de Toulouse et relève appel du jugement du 25 octobre 2019 par lequel le tribunal administratif de Toulouse a rejeté sa demande.

Sur les conclusions en annulation :

2. En premier lieu, si les dispositions de l'article R. 121-15 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile prévoient que : " Il est remis un récépissé à tout ressortissant qui sollicite la délivrance ou le renouvellement d'une carte de séjour. La délivrance d'une carte de séjour aux ressortissants d'un Etat tiers intervient au plus tard dans les six mois suivant le dépôt de la demande ", ces dispositions n'interdisent pas à l'autorité administrative de prendre légalement une décision de refus de séjour, passé ce délai. Par suite, la circonstance que l'instruction de la demande de titre de séjour présentée par Mme B... ait duré plus de douze mois est sans incidence sur la légalité de la décision en litige lui refusant un titre de séjour.

3. En second lieu, aux termes de l'article L. 121-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, tout citoyen de l'Union européenne (...) a le droit de séjourner en France pour une durée supérieure à trois mois s'il satisfait à l'une des conditions suivantes : 1° S'il exerce une activité professionnelle en France ; 2° S'il dispose pour lui et pour les membres de sa famille tels que visés au 4° de ressources suffisantes afin de ne pas devenir une charge pour le système d'assistance sociale, ainsi que d'une assurance maladie ; (...) ; / 4° S'il est un descendant direct âgé de moins de vingt et un ans ou à charge, ascendant direct à charge, conjoint, ascendant ou descendant direct à charge du conjoint, accompagnant ou rejoignant un ressortissant qui satisfait aux conditions énoncées aux 1° ou 2° ; (...). ". Aux termes de l'article L. 121-3 du même code : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, le membre de famille visé au 4° ou 5° de l'article L. 121-1 selon la situation de la personne qu'il accompagne ou rejoint, ressortissant d'un Etat tiers, a le droit de séjourner sur l'ensemble du territoire français pour une durée supérieure à trois mois. (...). ".

4. Aux termes de l'article R. 121-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, dans sa rédaction applicable à la date de l'arrêté attaqué : " Les ressortissants qui remplissent les conditions mentionnées à l'article L. 121-1 doivent être munis de l'un des deux documents prévus pour l'entrée sur le territoire français par l'article R. 121-1. / L'assurance maladie mentionnée à l'article L. 121-1 doit couvrir les prestations prévues aux articles L. 321-1 et L. 331-2 du code de la sécurité sociale. / Lorsqu'il est exigé, le caractère suffisant des ressources est apprécié en tenant compte de la situation personnelle de l'intéressé. En aucun cas, le montant exigé ne peut excéder le montant forfaitaire du revenu de solidarité active mentionné à l'article L. 262-2 du code de l'action sociale et des familles ou, si l'intéressé remplit les conditions d'âge pour l'obtenir, au montant de l'allocation de solidarité aux personnes âgées mentionnée à l'article L. 815-1 du code de la sécurité sociale. / La charge pour le système d'assistance sociale que peut constituer le ressortissant mentionné à l'article L. 121-1 est évaluée en prenant notamment en compte le montant des prestations sociales non contributives qui lui ont été accordées, la durée de ses difficultés et de son séjour. (...). ". Aux termes de l'article R. 121-6 du même code, dans sa version applicable au litige : " I. - Les ressortissants mentionnés au 1° de l'article L. 121-1 conservent leur droit au séjour en qualité de travailleur salarié ou de non-salarié : (...) ; / 2° S'ils se trouvent en chômage involontaire dûment constaté après avoir été employés pendant plus d'un an et se sont fait enregistrer en qualité de demandeur d'emploi auprès du service de l'emploi compétent ; (...). / II. - Ils conservent au même titre leur droit de séjour pendant six mois : / 1° S'ils se trouvent en chômage involontaire dûment constaté à la fin de leur contrat de travail à durée déterminée inférieure à un an ; / 2° S'ils sont involontairement privés d'emploi dans les douze premiers mois qui suivent la conclusion de leur contrat de travail et sont enregistrés en qualité de demandeur d'emploi auprès du service de l'emploi compétent. ".

5. Un ressortissant de l'Union européenne ne dispose d'un droit au séjour en France en application des dispositions de l'article L. 121-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile que dans la mesure où il remplit les conditions fixées au 1° ou au 2° du même article, qui sont alternatives et non cumulatives. Pour l'application du 1°, selon la jurisprudence de la Cour de justice de l'Union européenne, doit être regardé comme travailleur, au sens du droit de l'Union européenne, toute personne qui exerce une activité réelle et effective, à l'exclusion d'activités tellement réduites qu'elles se présentent comme purement marginales et accessoires. Pour l'application du 2°, il appartient à l'autorité administrative d'établir que les intéressés sont devenus, pendant cette période, une charge déraisonnable pour le système d'assurance sociale en ayant effectivement recours à cette assistance ou en bénéficiant d'aides ou de prestations sociales dans des conditions telles que le droit au séjour puisse leur être refusé.

6. Pour refuser la délivrance du titre de séjour sollicité, le préfet de la Haute-Garonne s'est fondé sur la circonstance que M. A..., époux de la requérante, ne justifiait pas, à la date de l'arrêté attaqué, exercer une activité professionnelle, ni disposer de ressources suffisantes pour lui-même et pour les membres de sa famille.

7. Il ressort des pièces du dossier que M. A... n'exerce plus d'activité professionnelle depuis le mois de janvier 2018 et les seules ressources dont il disposait à la date de l'arrêté attaqué étaient l'allocation logement et le revenu de solidarité active, c'est-à-dire des prestations sociales non contributives. Par ailleurs, le couple bénéficiait de la couverture maladie universelle. Dans ces conditions, eu égard à ce qui précède, Mme B... ne peut être regardée comme ne constituant pas une charge déraisonnable pour le système d'assurance sociale. Par suite, en refusant de lui délivrer un titre de séjour, le préfet n'a ni méconnu les dispositions précitées de l'article L. 121-1 ni commis d'erreur d'appréciation.

8. Il résulte de ce qui précède que Mme B... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Toulouse a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 18 juin 2019 par lequel le préfet de la Haute-Garonne lui a refusé la délivrance d'un titre de séjour, l'a obligée à quitter le territoire français dans le délai de trente jours et a fixé le pays de renvoi. Par voie de conséquence, ses conclusions à fin d'injonction ainsi que celles tendant au paiement des frais exposés et non compris dans les dépens doivent être rejetées.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de Mme B... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme H... B... et au ministre de l'intérieur. Copie en sera adressée au préfet de la Haute-Garonne

Délibéré après l'audience du 12 octobre 2020 à laquelle siégeaient :

M. Didier Artus, président,

Mme F... G..., présidente-assesseure,

Mme E... C..., premier conseiller.

Lu en audience publique, le 16 novembre 2020.

Le rapporteur,

Déborah C...Le président,

Didier ARTUSLe greffier,

Christophe PELLETIER

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.

N° 20BX01210 5


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Bordeaux
Formation : 3ème chambre
Numéro d'arrêt : 20BX01210
Date de la décision : 16/11/2020
Type d'affaire : Administrative

Analyses

335-01-03 Étrangers. Séjour des étrangers. Refus de séjour.


Composition du Tribunal
Président : M. ARTUS
Rapporteur ?: Mme Déborah DE PAZ
Rapporteur public ?: Mme MOLINA-ANDREO
Avocat(s) : SEIGNALET MAUHOURAT

Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2020
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.bordeaux;arret;2020-11-16;20bx01210 ?
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