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19/11/2020 | FRANCE | N°20BX03696

France | France, Cour administrative d'appel de Bordeaux, 19 novembre 2020, 20BX03696


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Le préfet de la Martinique a demandé au juge des référés du tribunal administratif de la Martinique d'ordonner, sur le fondement des dispositions de l'article L. 554-1 du code de justice administrative, la suspension de l'arrêté du 17 février 2020 du maire de la commune du Prêcheur portant interdiction d'utilisation de pesticides dans certaines zones du territoire communal, jusqu'à ce qu'il soit statué au fond sur la légalité de cette décision.

Par ordonnance n° 2000517 du 23 octobre 2020, le

juge des référés du tribunal administratif de la Martinique a suspendu l'exécution...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Le préfet de la Martinique a demandé au juge des référés du tribunal administratif de la Martinique d'ordonner, sur le fondement des dispositions de l'article L. 554-1 du code de justice administrative, la suspension de l'arrêté du 17 février 2020 du maire de la commune du Prêcheur portant interdiction d'utilisation de pesticides dans certaines zones du territoire communal, jusqu'à ce qu'il soit statué au fond sur la légalité de cette décision.

Par ordonnance n° 2000517 du 23 octobre 2020, le juge des référés du tribunal administratif de la Martinique a suspendu l'exécution de l'arrêté précité.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 13 novembre 2020, la commune du Prêcheur, représentée par Me A..., demande au juge d'appel des référés de la cour :

1°) d'annuler cette ordonnance du 23 octobre 2020 du juge des référés du tribunal administratif de la Martinique ;

2°) de rejeter la demande du préfet tendant à la suspension de l'arrêté du 17 février 2020 du maire de la commune du Prêcheur portant interdiction d'utilisation de pesticides dans certaines zones du territoire communal, jusqu'à ce qu'il soit statué au fond sur la légalité de cette décision ;

3°) de mettre à la charge de l'État une somme de 3 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- la demande du préfet adressée au premier juge était irrecevable en ce qu'elle n'était pas accompagnée de la requête en annulation, en méconnaissance de l'article R. 522-1 du code de justice administrative ;

- par ailleurs, eu égard à la carence de l'État s'agissant de la protection de la population contre l'utilisation des pesticides, le maire était compétent pour prendre l'arrêté litigieux.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu le code de justice administrative.

Le président de la cour a désigné M. B... en application du livre V du code de justice administrative.

Considérant ce qui suit :

1. Par un arrêté n° 05/2020 du 17 février 2020, le maire du Prêcheur a interdit l'utilisation de produits phytopharmaceutiques à bases de néonicotinoïdes, ainsi que l'usage de tous autres pesticides néfastes à l'environnement et à la santé dans les zones de Morne Folie et Case Rolland. Le 25 juin 2020, le préfet de la Martinique a adressé ses observations à la commune et lui a demandé de retirer son arrêté. Par un courrier du 6 juillet 2020 le maire a informé l'autorité préfectorale de son refus de retirer cet acte.

2. La commune du Prêcheur relève appel de l'ordonnance du 23 octobre 2020 par laquelle le juge des référés du tribunal administratif de la Martinique a suspendu l'arrêté précité.

3. D'une part, le dernier alinéa de l'article R. 222-1 du code de justice administrative dispose que : " (...) les présidents des formations de jugement des cours peuvent, (...) par ordonnance, rejeter (...), après l'expiration du délai de recours ou, lorsqu'un mémoire complémentaire a été annoncé, après la production de ce mémoire les requêtes d'appel manifestement dépourvues de fondement. (...) ". Ces dispositions sont applicables au juge des référés de la cour statuant en appel sur une requête formée contre une décision du juge des référés du tribunal administratif statuant en premier ressort, notamment dans le cas prévu par l'article L. 554-1 du code de justice administrative.

4. D'autre part, aux termes du premier alinéa de l'article L. 2131-6 du code général des collectivités territoriales : " Le représentant de l'État dans le département défère au tribunal administratif les actes mentionnés à l'article L. 2131-2 qu'il estime contraires à la légalité dans les deux mois suivant leur transmission (...) ". Aux termes du troisième alinéa du même article, reproduit à l'article L. 554-1 du code de justice administrative : " Le représentant de l'État peut assortir son recours d'une demande de suspension. Il est fait droit à cette demande si l'un des moyens invoqués paraît, en l'état de l'instruction, propre à créer un doute sérieux quant à la légalité de l'acte attaqué. Il est statué dans un délai d'un mois ". Et aux termes du second alinéa de l'article R. 522-1 du code de justice administrative : " À peine d'irrecevabilité, les conclusions tendant à la suspension d'une décision administrative ou de certains de ses effets doivent être présentées par requête distincte de la requête à fin d'annulation ou de réformation et accompagnées d'une copie de cette dernière ".

5. En premier lieu, si la commune appelante soutient que la demande de suspension de l'arrêté litigieux était irrecevable en ce qu'elle n'était pas accompagnée d'une copie de la requête du préfet tendant à l'annulation de cet arrêté, il ressort des visas de l'ordonnance attaquée du juge des référés du tribunal administratif de la Martinique qu'ils comportent la mention de l'existence de cette requête au fond. Dès lors ledit juge des référés ne pouvait plus, en application de l'article R. 522-1 du code de justice administrative précité, rejeter comme irrecevable la demande de suspension présentée par le préfet.

6. En second lieu, il est constant qu'en vertu des dispositions combinées des articles L. 253-7 et suivants, R. 253-45 et D. 253-45-1 du code rural et de la pêche maritime, la police spéciale des produits phytopharmaceutiques est attribuée, selon les cas, aux ministres chargés de l'agriculture, de la santé, de l'environnement et de la consommation ou au préfet du département dans lequel ces produits sont utilisés. S'il appartient au maire, responsable de l'ordre public sur le territoire de sa commune, de prendre les mesures de police générale nécessaires au bon ordre, à la sûreté, à la sécurité et à la salubrité publique, tout en se gardant cependant d'édicter des interdictions générales ou absolues, ce dernier ne saurait intervenir dans le domaine régi par cette police spéciale qu'en cas de péril imminent et au regard de circonstances locales particulières.

7. En l'espèce, la commune du Prêcheur ne fournit aucun élément précis tendant à démontrer une situation évidente de péril imminent propre à la commune, compte tenu des particularités de sa situation et son environnement. Par ailleurs, la carence manifeste alléguée des autorités compétentes, même temporaire, dans leur exercice des polices spéciales propres aux produits en litige ne ressort pas des pièces du dossier.

8. Dans ces conditions, le juge des référés du tribunal administratif de la Martinique a pu retenir pour suspendre l'exécution de l'arrêté litigieux que le moyen du préfet relatif à l'empiètement du maire sur les compétences des autorités chargées de la police spéciale propre aux produits phytopharmaceutiques paraissait en l'état de l'instruction de nature à faire naître un doute sérieux sur la légalité de cet arrêté. Il en résulte que la commune du Prêcheur n'est manifestement pas fondée à soutenir que c'est à tort que par l'ordonnance attaquée le juge des référés a fait droit à la demande de suspension du préfet. Sa requête doit donc être rejetée en toutes ses conclusions.

ORDONNE :

Article 1er : La requête n° 20BX03696 de la commune du Prêcheur est rejetée.

Article 2 : La présente ordonnance sera notifiée à la commune du Prêcheur et au préfet de la Martinique.

Fait à Bordeaux, le 19 novembre 2020.

Le juge des référés,

B...

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur, en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente ordonnance.

Pour expédition certifiée conforme.

La greffière,

Angélique Bonkoungou

3

No 20BX03696


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Bordeaux
Numéro d'arrêt : 20BX03696
Date de la décision : 19/11/2020
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

54-035-02 Procédure. Procédures instituées par la loi du 30 juin 2000. Référé suspension (art. L. 521-1 du code de justice administrative).


Composition du Tribunal
Avocat(s) : LEBON

Origine de la décision
Date de l'import : 16/12/2020
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.bordeaux;arret;2020-11-19;20bx03696 ?
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