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14/12/2020 | FRANCE | N°19BX03461

France | France, Cour administrative d'appel de Bordeaux, 6ème chambre, 14 décembre 2020, 19BX03461


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme B... C... a demandé au tribunal administratif de Pau d'annuler l'arrêté du 1er mars 2018 par lequel le président du centre intercommunal d'action sociale (CIAS) Bastides de Lomagne l'a placée en disponibilité à compter du 21 mars 2018 à titre conservatoire jusqu'à l'issue de la procédure de mise à la retraite pour invalidité.

Par un jugement n° 1800927 du 12 juillet 2019, le tribunal administratif de Pau a rejeté la demande de Mme C....

Procédure devant la cour :

Par une requ

ête, enregistrée le 9 septembre 2019, et un mémoire en réplique, enregistré le 22 mai 2020, Mme...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme B... C... a demandé au tribunal administratif de Pau d'annuler l'arrêté du 1er mars 2018 par lequel le président du centre intercommunal d'action sociale (CIAS) Bastides de Lomagne l'a placée en disponibilité à compter du 21 mars 2018 à titre conservatoire jusqu'à l'issue de la procédure de mise à la retraite pour invalidité.

Par un jugement n° 1800927 du 12 juillet 2019, le tribunal administratif de Pau a rejeté la demande de Mme C....

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 9 septembre 2019, et un mémoire en réplique, enregistré le 22 mai 2020, Mme C..., représentée par Me D..., demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Pau du 12 juillet 2019 ;

2°) d'annuler l'arrêté précité du 1er mars 2018 ;

3°) de mettre à la charge du CIAS Bastides de Lomagne la somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- le signataire de l'arrêté attaqué était incompétent ; le CIAS produit certes la délibération du 22 décembre 2014 et justifie de sa transmission à la préfecture, mais non de sa publication, en violation des articles L. 2131-1 et R. 2121-10 du code général des collectivités territoriales ;

- le médecin de prévention n'a pas été informé de la tenue de la séance du comité médical et n'a pas été en mesure ni de remettre un rapport, ni d'assister à la séance, en violation de l'article 9 du décret n° 87-602 du 30 juillet 1987 ;

- les dispositions de l'article 7 du décret n° 86-442 du 14 mars 1986 ont été méconnues, dès lors qu'elle n'a pu avoir accès à son dossier médical, malgré ses nombreuses demandes antérieures à la réunion du comité médical ;

- le comité médical s'est prononcé sur son aptitude totale et définitive, alors même qu'aucun médecin agréé n'avait fait une telle constatation et que le comité n'avait pas été invité à se prononcer sur son inaptitude, si bien qu'elle n'a pas été en mesure de préparer son dossier dans cette perspective ; le comité médical a été réuni pour émettre un avis sur une demande de prolongation de congé maladie, non pour se prononcer sur une mise en disponibilité pour inaptitude, en violation des articles 4, 17 et 38 du décret du 30 juillet 1987 ; il s'est substitué au médecin agréé pour déclarer, de lui-même, une inaptitude définitive, sans disposer du moindre certificat médical ;

- l'arrêté contesté est insuffisamment motivé au regard des articles L. 211-2 et 5 du code des relations entre le public et l'administration, d'autant plus qu'elle lui refuse le bénéfice des dispositions de l'article 57 de la loi du 26 janvier 1984, et notamment refus d'un congé au titre d'un accident de service ; il est insuffisamment motivé en droit comme en fait ;

- le placement en inaptitude totale et définitive à toute fonction n'est pas fondé, au regard des avis des docteurs Delpla, Mattar et Wolski ; de plus, aucun texte ne prévoit une inaptitude totale et définitive automatique à l'issue de 5 années d'absence ; lors de sa séance du 3 décembre 2019, le comité médical supérieur a émis l'avis selon lequel son inaptitude n'était totale et définitive qu'à ses fonctions, mais non à toutes fonctions ; par courrier du 12 février 2020, elle a été invitée à présenter une demande de reclassement et par un arrêté du même jour, a été placée en disponibilité d'office " le temps de la procédure de reclassement " ; l'édiction de ce nouvel arrêté établit l'absence de fondement de l'arrêté du 1er mars 2018 ;

- elle a été placée en disponibilité d'office par l'arrêté du 1er mars 2018, sans même avoir été invitée à présenter une demande de reclassement.

Par un mémoire en défense, enregistré le 2 avril 2020, et un mémoire en production de pièces, enregistré le 6 avril 2020, le CIAS Bastides de Lomagne, représenté par Me A..., conclut au rejet de la requête et à ce qu'il soit mis à la charge de Mme C... la somme de 2 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- les moyens soulevés par Mme C... ne sont pas fondés ; l'avis rendu par le comité médical supérieur le 3 décembre 2020 a logiquement conduit le CIAS à prendre un nouvel arrêté portant également mise en disponibilité d'office, dès lors que l'agent a épuisé ses droits à congé de maladie ordinaire ; ainsi, tant au regard de l'avis du comité médical départemental que du comité médical supérieur, le CIAS n'avait pas d'autre choix que de placer Mme C... en disponibilité d'office.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires ;

- la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique territoriale ;

- le décret n° 86-442 du 14 mars 1986 relatif à la désignation des médecins agréés, à l'organisation des comités médicaux et des commissions de réforme, aux conditions d'aptitude physique pour l'admission aux emplois publics et au régime de congés de maladie des fonctionnaires ;

- le décret n° 87-602 du 30 juillet 1987 pris pour l'application de la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique territoriale et relatif à l'organisation des comités médicaux, aux conditions d'aptitude physique et au régime des congés de maladie des fonctionnaires territoriaux ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme E...,

- les conclusions de M. Axel Basset, rapporteur public,

- et les observations de Mme C....

Une note en délibéré présentée par Mme C... a été enregistrée le 23 novembre 2020.

Considérant ce qui suit :

1. Mme B... C... a été recrutée le 1er janvier 2008, en tant qu'agent non titulaire à mi-temps, par le centre communal d'action sociale (CCAS) de Saint-Clar, aux droits et obligations desquels est venu le centre intercommunal d'action sociale (CIAS) Bastides de Lomagne, sur le poste de directrice du CCAS de Saint-Clar et de son service d'aide à domicile. Elle a été titularisée le 1er juin 2009, au grade de rédacteur territorial sur cet emploi, à temps non complet par arrêté du 31 mai 2009. Après avoir été placée en congé de maladie ordinaire, puis en congé de longue maladie du 24 avril 2012 au 23 avril 2013, elle a bénéficié d'un congé de longue durée à compter du 24 avril 2013. Par un arrêt du 23 mai 2016, devenu définitif le 11 octobre 2017 après rejet de l'admission du pourvoi en cassation formé à son encontre par le CIAS, la cour administrative d'appel de Bordeaux a annulé l'arrêté du 21 février 2013 par lequel le président du CCAS de Saint-Clar avait refusé de reconnaître l'imputabilité au service de l'accident dont Mme C... a été victime le 23 avril 2012, à l'origine de son placement en congé pour maladie, et lui a enjoint a de reconnaître cette imputabilité. En exécution de cet arrêt, par plusieurs arrêtés successifs, dont le premier a été édicté le 11 juillet 2016, elle a été rétroactivement replacée en congé maladie imputable au service à compter du 24 avril 2012. Par un arrêt n° 18BX04217 du même jour, la cour de céans a rejeté la demande de l'intéressée tendant à l'annulation des arrêtés des 4 août et 13 septembre 2017 mettant fin à son placement en congé imputable au service à compter du 21 mars 2017 et la plaçant en congé maladie ordinaire. Ce congé a été prolongé jusqu'au 20 mars 2018. A la suite de l'avis du comité médical départemental du 16 janvier 2018, en faveur d'une mise en disponibilité d'office et concluant à son inaptitude totale et définitive à toute fonction, le CIAS a, le 1er mars 2018, placé Mme C... en disponibilité d'office " à titre conservatoire et provisoire, à compter du 21 mars 2018, jusqu'à l'issue de la procédure de retraite pour invalidité. Mme C... a formé un recours devant le comité médical supérieur contre l'avis d'inaptitude totale et définitive à toute fonction, rendu par le comité médical départemental le 16 janvier 2018. Le 3 décembre 2019, le comité médical supérieur a rendu un avis " d'inaptitude totale et définitive à ses fonctions actuelles, mais pas à toutes fonctions ". A la suite de cet avis, le président du CIAS a, le 12 février 2020, édicté un arrêté plaçant Mme C... en disponibilité d'office à compter du 3 décembre 2019 " le temps de la procédure de reclassement ", abrogeant l'arrêté en date du 1er mars 2018 la plaçant en position de disponibilité d'office à titre conservatoire et précisant que le demi-traitement versé à l'agent, depuis la fin de ses congés maladie ordinaire, soit le 21 mars 2018 et jusqu'à la date à laquelle le comité médical supérieur avait statué, lui restait acquis. Mme C..., qui avait attaqué l'arrêté du 1er mars 21018, fait appel du jugement du tribunal administratif de Pau du 12 juillet 2019, qui a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 1er mars 2018.

Sur les conclusions à fin d'annulation de l'arrêté du 1er mars 2018 :

Sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens :

2. Aux termes des dispositions de l'article 7 du décret du 14 mars 1986 relatif à la désignation des médecins agréés, à l'organisation des comités médicaux et des commissions de réforme, aux conditions d'aptitude physique pour l'admission aux emplois publics et au régime de congés de maladie des fonctionnaires : " Les comités médicaux sont chargés de donner à l'autorité compétente, dans les conditions fixées par le présent décret, un avis sur les contestations d'ordre médical qui peuvent s'élever à propos de l'admission des candidats aux emplois publics, de l'octroi et du renouvellement des congés de maladie, de longue maladie et de longue durée et de la réintégration à l'issue de ces congés. (...) Le secrétariat du comité médical informe le fonctionnaire : - de la date à laquelle le comité médical examinera son dossier ; - de ses droits concernant la communication de son dossier et la possibilité de faire entendre le médecin de son choix (...) ".

3. Mme C... fait valoir qu'en méconnaissance de cet article, elle n'a pu avoir accès à son dossier médical, comme elle l'avait sollicité. Le tribunal administratif a écarté ce moyen, en indiquant que l'intéressée n'établissait pas avoir formé cette demande de communication avant la séance du comité médical au cours de laquelle son dossier a été examiné, soit le 16 janvier 2018. Toutefois, Mme C... produit pour la première fois en appel sa demande en ce sens, effectuée par lettre du 15 septembre 2017, donc antérieurement à la réunion du comité médical, et que le CIAS ne conteste à aucun moment qu'elle lui a bien été adressée. Contrairement à ce que fait valoir l'établissement, cette irrégularité de la procédure prévue à l'article 7 du décret du 14 mars 1986 doit être regardée comme ayant privé l'intéressée d'une garantie. Par suite, l'arrêté du 1er mars 2018 est entaché d'illégalité et doit être annulé.

Il résulte de tout ce qui précède que Mme C... est fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Pau a rejeté sa demande.

Sur les conclusions au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

4. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge du CIAS Bastides de Lomagne une somme de 1 500 euros que demande Mme C... sur ce fondement. En revanche, ces dispositions font obstacle à ce qu'il soit mis à la charge de cette dernière, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, la somme que demande le CIAS sur le même fondement.

DECIDE :

Article 1er : Le jugement n° 1800927 du 12 juillet 2019 du tribunal administratif de Pau est annulé.

Article 2 : L'arrêté du 1er mars 2018 du président du CIAS Bastides de Lomagne est annulé.

Article 3 : Le CIAS Bastides de Lomagne est condamné à verser à Mme C... la somme de 1 500 euros sur le fondement des dispositions de l'article L.761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : Les conclusions du CIAS présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à Mme B... C... et au centre intercommunal d'action sociale (CIAS) Bastides de Lomagne.

Rendu public par mise à disposition du greffe, le 14 décembre 2020.

Le rapporteur,

E...Le président,

Dominique Naves

Le greffier,

Cindy Virin

La République mande et ordonne au préfet du Gers, et à tous huissiers de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.

2

N° 19BX03461


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Bordeaux
Formation : 6ème chambre
Numéro d'arrêt : 19BX03461
Date de la décision : 14/12/2020
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

36-08 Fonctionnaires et agents publics. Rémunération.


Composition du Tribunal
Président : M. NAVES
Rapporteur ?: Mme Florence REY-GABRIAC
Rapporteur public ?: M. BASSET
Avocat(s) : SELARL ENARD-BAZIRE COLLIOU

Origine de la décision
Date de l'import : 26/12/2020
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.bordeaux;arret;2020-12-14;19bx03461 ?
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