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17/12/2020 | FRANCE | N°18BX04472,20BX01096,20BX01099

France | France, Cour administrative d'appel de Bordeaux, 7ème chambre (formation à 3), 17 décembre 2020, 18BX04472,20BX01096,20BX01099


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A... B... a demandé au tribunal administratif de Toulouse de le décharger des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de prélèvements sociaux auxquelles il a été assujetti au titre des années 2011, 2012 et 2013.

Par trois jugements n° 1605405, n° 1803723 et n° 1803700 des 25 octobre 2018 et 10 février 2020, le tribunal administratif de Toulouse a constaté qu'il n'y avait plus lieu à statuer sur ces demandes à concurrence des dégrèvements intervenus au titre des années 2011

et 2013 et a rejeté le surplus des conclusions de M. B....

Procédure devant la cour :...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A... B... a demandé au tribunal administratif de Toulouse de le décharger des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de prélèvements sociaux auxquelles il a été assujetti au titre des années 2011, 2012 et 2013.

Par trois jugements n° 1605405, n° 1803723 et n° 1803700 des 25 octobre 2018 et 10 février 2020, le tribunal administratif de Toulouse a constaté qu'il n'y avait plus lieu à statuer sur ces demandes à concurrence des dégrèvements intervenus au titre des années 2011 et 2013 et a rejeté le surplus des conclusions de M. B....

Procédure devant la cour :

I. Par une requête, enregistrée le 31 décembre 2018 sous le n° 18BX04472, et un mémoire, enregistré le 12 novembre 2020, M. B..., représenté par Me D..., demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Toulouse n° 1605405 du 25 octobre 2018 ;

2°) de prononcer la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de prélèvements sociaux auxquelles il a été assujetti au titre de l'année 2011 ;

3°) de mettre à la charge de l'État les frais qu'il a engagés pour la procédure.

Il soutient que :

- l'administration ne lui a pas transmis les documents obtenus par l'exercice du droit de communication ;

- les factures de la société Atout bois rejetées par le service correspondent à des dépenses réellement engagées par cette société ;

- il n'a pas personnellement disposé des sommes correspondantes.

Par un mémoire en défense, enregistré le 15 juillet 2019, le ministre de l'économie, des finances et de la relance conclut au rejet de la requête.

Il soutient que les moyens invoqués par l'appelant ne sont pas fondés.

II. Par une requête, enregistrée le 24 mars 2020 sous le n° 20BX01096, et un mémoire, enregistré le 12 novembre 2020, M. B..., représenté par Me D..., demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Toulouse n° 1803723 du 10 février 2020 ;

2°) de prononcer la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de prélèvements sociaux auxquelles il a été assujetti au titre de l'année 2012 ;

3°) de mettre à la charge de l'État les frais qu'il a engagés pour la procédure.

Il soutient que :

- l'administration ne lui a pas transmis les documents obtenus par l'exercice du droit de communication ;

- les factures de la société Atout bois rejetées par le service correspondent à des dépenses réellement engagées par cette société ;

- cette société n'a pas omis de comptabiliser une facture ;

- il n'a pas personnellement disposé des sommes correspondantes.

Par un mémoire en défense, enregistré le 2 octobre 2020, le ministre de l'économie, des finances et de la relance conclut au rejet de la requête.

Il soutient que les moyens invoqués par l'appelant ne sont pas fondés.

III. Par une requête, enregistrée le 24 mars 2020 sous le n° 20BX01099, et un mémoire, enregistré le 12 novembre 2020, M. B..., représenté par Me D..., demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Toulouse n° 1803700 du 10 février 2020 ;

2°) de prononcer la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de prélèvements sociaux auxquelles il a été assujetti au titre de l'année 2013 ;

3°) de mettre à la charge de l'État les frais qu'il a engagés pour la procédure.

Il soutient que :

- l'administration ne lui a pas transmis les documents obtenus par l'exercice du droit de communication ;

- les factures de la société Atout bois rejetées par le service correspondent à des dépenses réellement engagées par cette société ;

- cette société n'a pas omis de comptabiliser une facture ;

- il n'a pas personnellement disposé des sommes correspondantes.

Par un mémoire en défense, enregistré le 2 octobre 2020, le ministre de l'économie, des finances et de la relance conclut au rejet de la requête.

Il soutient que les moyens invoqués par l'appelant ne sont pas fondés.

Vu les autres pièces de ces trois dossiers ;

Vu :

- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

- le décret n° 2020-1406 du 18 novembre 2020 portant adaptation des règles applicables devant les juridictions de l'ordre administratif ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. C...,

- et les conclusions de Mme Aurélie Chauvin, rapporteur public.

Considérant ce qui suit :

1. Les requêtes n° 18BX04472, n° 20BX01096 et n° 20BX01099 concernent un même contribuable, donnent à juger des questions semblables et ont fait l'objet d'une instruction commune. Par suite, il y a lieu de les joindre pour y statuer par un seul arrêt.

2. À la suite de la vérification de comptabilité dont a fait l'objet la société Atout bois service, M. B..., actionnaire à 99 % et gérant de cette entreprise de menuiserie, a lui-même fait l'objet d'un examen de situation fiscale personnelle au titre des années 2011, 2012 et 2013. À l'issue de cet examen, M. B... a été assujetti à des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de prélèvements sociaux au titre des mêmes années. Il doit être regardé comme demandant à la cour, d'une part, de réformer les jugements n° 1605405 et n° 1803700 des 24 octobre 2018 et 10 février 2020 par lesquels le tribunal administratif de Toulouse, après avoir constaté qu'il n'y avait plus lieu de statuer sur les demandes de M. B... à concurrence des dégrèvements intervenus en cours d'instance, a rejeté le surplus de ses demandes tendant à la décharge des cotisations supplémentaires auxquelles il a été assujetti au titre des années 2011 et 2013, d'autre part, d'annuler le jugement n° 1803723 du 10 février 2020 par lequel le tribunal administratif de Toulouse a rejeté sa demande tendant à la décharge des cotisations supplémentaires auxquelles il a été assujetti au titre de l'année 2012.

Sur la procédure d'imposition :

3. Eu égard à l'indépendance des procédures d'imposition, l'irrégularité de la vérification de comptabilité d'une société de capitaux est sans incidence sur la régularité de la procédure de redressement engagée à l'encontre de l'un de ses associés. Par suite, M. B... ne peut pas utilement soutenir que l'administration aurait omis de lui adresser les documents résultant de l'exercice de son droit de communication auprès des clients et fournisseurs de la société Atout Bois Service dès lors que ceux n'ont été utilisés que pour établir le montant du bénéfice imposable de cette société.

Sur la déductibilité des charges rejetées par l'administration :

4. Aux termes du 1 de l'article 39 du code général des impôts, applicable pour la détermination de l'impôt sur les sociétés en vertu de l'article 209 du même code : " Le bénéfice net est établi sous déduction de toutes charges, celles-ci comprenant (...) notamment : 1° Les frais généraux de toute nature (...) ".

5. En premier lieu si, en vertu des règles gouvernant l'attribution de la charge de la preuve devant le juge administratif, applicables sauf loi contraire, il incombe, en principe, à chaque partie d'établir les faits qu'elle invoque au soutien de ses prétentions, les éléments de preuve qu'une partie est seule en mesure de détenir ne sauraient être réclamés qu'à celle-ci. Il appartient, dès lors, au contribuable, pour l'application des dispositions précitées du code général des impôts, de justifier tant du montant des charges qu'il entend déduire du bénéfice net défini à l'article 38 du code général des impôts que de la correction de leur inscription en comptabilité, c'est-à-dire du principe même de leur déductibilité. Le contribuable apporte cette justification par la production de tous éléments suffisamment précis portant sur la nature de la charge en cause, ainsi que sur l'existence et la valeur de la contrepartie qu'il en a retirée. Dans l'hypothèse où le contribuable s'acquitte de cette obligation, il incombe ensuite au service, s'il s'y croit fondé, d'apporter la preuve de ce que la charge en cause n'est pas déductible par nature, qu'elle est dépourvue de contrepartie, qu'elle a une contrepartie dépourvue d'intérêt pour le contribuable ou que la rémunération de cette contrepartie est excessive. En l'occurrence, il résulte de l'instruction et n'est pas contesté que M. B... s'est abstenu de répondre dans le délai légal à la proposition de rectification relative à ses revenus de l'année 2011, de sorte qu'en application des dispositions de l'article R. 194-1 du livre des procédures fiscales, il supporte la charge d'établir le caractère exagéré des cotisations supplémentaires auxquelles il a été assujetti au titre de la même année.

6. En deuxième lieu, M. B... ne peut pas utilement se prévaloir de l'enquête diligentée le 20 janvier 2013 par la brigade de contrôle et de recherche du Tarn dans le cadre de la procédure prévue par les articles L. 80 F et L. 80 H du livre des procédures fiscales, qui a pour seul objet de rechercher les manquements aux règles de facturation qui s'imposent aux assujettis à la taxe sur la valeur ajoutée, dès lors que cette enquête ne constitue pas un contrôle au sens des articles L. 12 et L. 13 du livre des procédures fiscales.

7. En troisième lieu, M. B... conteste le rejet par l'administration de factures qu'auraient établies les entreprises Aranda Mas, Pascal Passot, Amari, Luis Gomes de Almeida, Olivier Leuchter et CG Multi Services au titre des années concernées. Toutefois, d'une part, l'administration a exercé son droit de communication auprès de ces entreprises et, à cette occasion, MM Passot et Amari ainsi que la société Aranda Mas lui ont indiqué que la société Atout Bois Service ne figurait pas parmi leurs clients au titre de la période vérifiée tandis que les factures qu'aurait émises la société Aranda Mas sont assorties, à tort, d'une dispense de TVA. De plus, MM. Leuchter et Gomes de Almeida ont indiqué n'avoir exercé leur activité qu'à compter, respectivement, des mois d'avril et d'octobre 2013, soit postérieurement aux dates portées sur les factures concernées. Enfin, la clôture de la liquidation judiciaire pour insuffisance d'actif de la société CG Multi Services est intervenue par jugement du 17 mars 2009. D'autre part, M. B..., qui supporte la charge de la preuve, n'établit pas qu'il aurait réglé ces factures en liquide pour des montants supérieurs à 3 000 euros et en méconnaissance des dispositions de l'article D. 112-3 du code monétaire et financier ainsi qu'il le soutient. Dans ces conditions, l'administration a pu, à bon droit, remettre en cause la déductibilité des dépenses correspondantes au motif qu'elles ne correspondent pas à des prestations réellement réalisées par les entreprises susmentionnées pour le compte de la société Atout Bois Service.

8. En troisième lieu, à l'appui du moyen tiré de ce que c'est à tort que l'administration a remis en cause le caractère déductible des dépenses de nourriture comptabilisées par la société Atout Bois Service au titre des années considérées, M. B... ne se prévaut devant la cour d'aucun élément de fait ou de droit nouveau par rapport à l'argumentation développée en première instance, à l'exception d'une attestation établie par un ancien salarié de la société ne présentant qu'un caractère probant très limité, et ne critique pas utilement la réponse apportée par le tribunal administratif. Par suite, il y a lieu d'écarter ce moyen par adoption des motifs pertinemment retenus par les premiers juges.

Sur le rehaussement du bénéfice imposable de la société Atout Bois Service :

9. En application de l'article 38 du code général des impôts, applicable, en matière d'impôt sur les sociétés en vertu de l'article 209 du même code, le bénéfice imposable correspond au bénéfice net déterminé d'après les résultats d'ensemble des opérations de toute nature effectuées par l'entreprise. Selon les dispositions du 2 de cet article, le bénéfice net est constitué par la différence entre les valeurs de l'actif net à la clôture et à l'ouverture de la période dont les résultats doivent servir de base à l'impôt diminuée des suppléments d'apports et augmentée des prélèvements effectués au cours de cette période par l'exploitant ou par les associés. L'actif net s'entend de l'excédent des valeurs d'actifs sur le total formé au passif par les créances des tiers, les amortissements et les provisions justifiés. Pour l'application des 1 et 2, les produits correspondant à des créances sur la clientèle ou à des versements reçus à l'avance en paiement du prix sont rattachés à l'exercice au cours duquel intervient la livraison des biens pour les ventes ou opérations assimilées et l'achèvement des prestations pour les fournitures de services.

10. À l'appui du moyen tiré de ce que c'est à tort que l'administration a procédé à la réintégration dans les bénéfices de la société Atout Bois des factures adressées à quatre clients mais qui n'ont pas été comptabilisées par cette société au titre des années considérées, M. B... ne se prévaut devant la cour d'aucun élément de fait ou de droit nouveau par rapport à l'argumentation développée en première instance et ne critique pas utilement la réponse apportée par le tribunal administratif. Par suite, il y a lieu d'écarter ce moyen par adoption des motifs pertinemment retenus par les premiers juges.

Sur l'appréhension des revenus distribués :

11. Aux termes de l'article 109 du code général des impôts : " 1. Sont considérés comme revenus distribués : / 1° Tous les bénéfices ou produits qui ne sont pas mis en réserve ou incorporés au capital ; (...) ". Aux termes de l'article 110 du même code : " Pour l'application du 1° du 1 de l'article 109, les bénéfices s'entendent de ceux qui ont été retenus pour l'assiette de l'impôt sur les sociétés ". En cas de refus des propositions de rectifications par le contribuable qu'elle entend imposer comme bénéficiaire de sommes regardées comme distribuées, il incombe à l'administration d'apporter la preuve que celui-ci en a effectivement disposé. Pour l'application de ces dispositions, le contribuable qui, disposant seul des pouvoirs les plus étendus au sein de la société, est en mesure d'user sans contrôle de ses biens comme de biens qui lui sont propres et doit ainsi être regardé comme le seul maître de l'affaire est présumé avoir appréhendé les distributions effectuées par la société qu'il contrôle.

12. Ainsi qu'il a été dit au point 2 du présent arrêt, M. B... est propriétaire de 99 % des parts de la société Atout Bois Service et en est l'unique gérant. Ainsi, il dispose seul des pouvoirs les plus étendus au sein de la société et doit, dès lors, être regardé comme le seul maître de l'affaire. Par suite, il est présumé avoir appréhendé les sommes devant être comme distribuées par cette société après rectification de son bénéfice imposable. Si l'appelant soutient qu'il ne les a néanmoins pas appréhendées, il ne produit aucun élément permettant de faire échec à cette présomption. Dans ces conditions, il n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que l'administration a considéré qu'il avait disposé de ces sommes au titre des années considérées.

13. Il résulte de tout ce qui précède que M. B... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par les jugements attaqués, le tribunal administratif de Toulouse, après avoir constaté qu'il n'y avait plus lieu de statuer sur ses demandes à concurrence des dégrèvements intervenus en cours d'instance, a rejeté ses conclusions tendant à la décharge des cotisations supplémentaires à l'impôt sur le revenu et aux contributions sociales auxquelles il a été assujetti au titre des années 2011 à 2013. Par suite, les requêtes doivent être rejetées, y compris leurs conclusions tendant au remboursement des frais qu'il a exposés pour l'instance, au demeurant non chiffrées.

DÉCIDE :

Article 1er : Les requêtes n° 18BX04472, n° 20BX01096 et n° 20BX01099 sont rejetées.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... B... et au ministre de l'économie, des finances et de la relance.

Copie en sera adressée à la direction de contrôle fiscal Sud-Ouest.

Délibéré après l'audience du 19 novembre 2020 à laquelle siégeaient :

M. Éric Rey-Bèthbéder, président,

Mme E..., présidente-assesseure,

M. Manuel C..., premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe, le 17 décembre 2020.

Le président de chambre,

Éric Rey-Bèthbéder

La République mande et ordonne au ministre de l'économie, des finances et de la relance, en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.

7

N°18BX04472-20BX01096-20BX01099


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Bordeaux
Formation : 7ème chambre (formation à 3)
Numéro d'arrêt : 18BX04472,20BX01096,20BX01099
Date de la décision : 17/12/2020
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Composition du Tribunal
Président : M. REY-BETHBEDER
Rapporteur ?: M. Manuel BOURGEOIS
Rapporteur public ?: Mme CHAUVIN
Avocat(s) : SCP LALANNE - DERRIEN-LALANNE

Origine de la décision
Date de l'import : 27/01/2021
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.bordeaux;arret;2020-12-17;18bx04472.20bx01096.20bx01099 ?
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