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23/02/2021 | FRANCE | N°20BX01299

France | France, Cour administrative d'appel de Bordeaux, 5ème chambre, 23 février 2021, 20BX01299


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

M. A... D... a demandé au tribunal administratif C... d'annuler l'arrêté du 3 mai 2019 par lequel le préfet du Tarn a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination.

Par un jugement n°1903486 du 20 décembre 2019, le tribunal administratif C... a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 8 avril 2020, M. D..., représenté par Me B..., demande

à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif C... du 20 décembre 2019 ;

2°) d'...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

M. A... D... a demandé au tribunal administratif C... d'annuler l'arrêté du 3 mai 2019 par lequel le préfet du Tarn a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination.

Par un jugement n°1903486 du 20 décembre 2019, le tribunal administratif C... a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 8 avril 2020, M. D..., représenté par Me B..., demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif C... du 20 décembre 2019 ;

2°) d'annuler l'arrêté préfectoral du 3 mai 2019 ;

3°) d'enjoindre au préfet du Tarn de lui délivrer un titre de séjour " salarié " ou à défaut, un titre de séjour portant la mention " vie privée et familiale ", dans un délai de quinze jours à compter de la décision à intervenir, sous astreinte de 100 euros par jour de retard ou de procéder au réexamen de sa situation dans un délai de quinze jours et sous astreinte ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros à verser à son conseil en application des dispositions combinées de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.

Il soutient que :

- en omettant de répondre au moyen tiré d'erreurs de fait substantielles commises par le préfet, le tribunal a entaché son jugement d'irrégularité ; le préfet n'a pas mentionné qu'il a été placé sous autorisations provisoires de séjour en toute illégalité alors qu'il aurait dû se voir délivrer un titre de séjour salarié et n'a pas davantage tenu compte de sa résidence habituelle en France depuis plus de cinq ans, des diplômes obtenus, des liens tissés en France ni de l'absence de tout lien avec son pays d'origine ;

- le tribunal a insuffisamment motivé le rejet du moyen tiré du défaut d'examen réel et sérieux de sa situation personnelle ; à la supposer établie, la motivation suffisante de la décision portant refus de séjour n'implique pas nécessairement que le préfet ait procédé à un examen sérieux de sa situation ;

- la décision portant refus de titre de séjour est insuffisamment motivée au regard des dispositions des articles L. 211-2 et L. 211-5 du code des relations entre le public et l'administration ; le préfet n'a pas suffisamment motivé sa décision sur l'examen du droit au séjour au titre de l'article L. 313-14 en se fondant uniquement sur l'absence de contrat de travail, sans prise en compte de l'ensemble de sa situation personnelle ; l'article L. 313-11 7° n'est pas visé et aucun élément n'apparaît sur la procédure contentieuse précédant la délivrance du titre de séjour étudiant alors que la circonstance qu'il a été maintenu sous autorisation provisoire de séjour, puis titre de séjour " étudiant " en toute illégalité, constituent des circonstances particulières qui auraient dû être prises en compte ;

- elle est entachée d'un défaut d'examen particulier de sa situation et est entachée d'erreurs de fait substantielles ;

- elle méconnaît l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; c'est à tort que le tribunal a considéré que les missions d'intérim ne pouvaient être considérées comme un contrat de travail pour la délivrance d'un titre de séjour " salarié " sur le fondement de ces dispositions ;

- c'est à tort que le tribunal a considéré que la décision attaquée ne méconnaissait pas les dispositions du 7° de l'article L.313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales :

- cette décision est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation de sa situation ;

- la décision portant obligation de quitter le territoire est dépourvue de base légale ;

- elle méconnaît l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- la décision fixant le pays de destination est dépourvue de base légale.

Par un mémoire en défense, enregistré le 18 novembre 2020, la préfète du Tarn conclut au rejet de la requête.

Elle fait valoir que les moyens soulevés par M. D... ne sont pas fondés.

M. D... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par décision du 26 mars 2020.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code des relations entre le public et l'administration ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le code de justice administrative et le décret n° 1406-2020 du 18 novembre 2020.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le rapport de Mme E... a été entendu au cours de l'audience publique.

Considérant ce qui suit :

1. M. A... D..., ressortissant congolais, né le 3 août 1997, qui déclare être entré en France en septembre 2013 à l'âge de 16 ans, a été pris en charge par les services de l'aide sociale à l'enfance du Tarn à compter du 25 septembre 2013. Le 4 septembre 2015, il a sollicité la délivrance d'un titre de séjour portant la mention " salarié " sur le fondement des dispositions de l'article L. 313-15 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Par jugement du 5 mars 2048, le tribunal administratif C... a annulé le refus du préfet de lui délivrer ce titre et a enjoint à cette autorité de lui délivrer le titre de séjour sollicité. L'intéressé n'ayant pas produit de contrat de travail, le préfet a seulement maintenu à l'intéressé le bénéfice du titre de séjour qui lui avait précédemment été délivré en qualité d'étudiant. A l'expiration de son titre de séjour étudiant, M. D... a sollicité le 19 septembre 2018, la délivrance d'un titre de séjour " vie privée et familiale " ou " salarié ". Par arrêté du 3 mai 2019, la préfète du Tarn a refusé de lui délivrer le titre de séjour sollicité, l'a obligé à quitter le territoire français dans le délai de trente jours et a fixé le pays de destination. M. D... relève appel du jugement du 20 décembre 2019 par lequel le tribunal administratif C... a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté.

Sur la régularité du jugement attaqué :

2. La circonstance que M. D... ait été maintenu sous autorisation provisoire de séjour du 22 septembre 2015 au 30 août 2016 et que le préfet ait délivré un titre de séjour " étudiant " en lieu et place du titre de séjour " salarié " ordonné par le tribunal administratif C... dans son jugement du 5 mars 2018 est sans incidence sur la légalité de l'arrêté du 3 mars 2019 contesté dans la présente instance. Par suite, le tribunal, en ne faisant pas état de ces circonstances, n'a pas omis de se prononcer sur le moyen tiré d'erreurs de fait substantielles.

3. Si M. D... soutient que le jugement attaqué est entaché d'insuffisance de motivation sur le moyen tiré du défaut d'examen réel et sérieux de sa situation, la critique du bien-fondé du jugement qu'il expose sur ce point est sans incidence sur sa régularité.

Sur la légalité de la décision refusant la délivrance d'un titre de séjour :

4. En premier lieu, M. D..., repend ses moyens de première instance tirés de ce que le refus de titre de séjour est insuffisamment motivé et est entaché d'un défaut d'examen réel et sérieux de sa situation personnelle. Toutefois, l'arrêté contesté vise les articles 3 et 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et les dispositions applicables du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Il mentionne que M. D... qui a déclaré être entré en France sans passeport ni visa, en septembre 2013, a été confié à l'aide sociale à l'enfance du département du Tarn par jugement du tribunal pour enfants C... du 25 septembre 2013, jusqu'à sa majorité et qu'il a conclu un contrat jeune majeur, renouvelé qu'au 31 juillet 2017. Il précise qu'après avoir été titulaire d'une autorisation provisoire de séjour, le 22 septembre 2015, renouvelée jusqu'au 5 août 2017, il a obtenu un baccalauréat professionnel " électrotechnique " en juin 2017 puis a bénéficié d'un titre de séjour étudiant valable du 1er septembre 2017 au 31 août 2018, pour suivre une formation complémentaire en qualité de technicien de réseaux électriques, qu'il a terminée, et que n'ayant fourni aucune promesse d'embauche ou contrat de travail, à l'exception de missions intérimaires ponctuelles, il ne pouvait prétendre à un titre de séjour en qualité de salarié sur le fondement des dispositions des articles R. 313-15 et R. 313-16 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Par ailleurs, le préfet indique qu'il n'est pas porté une atteinte disproportionnée au droit au respect de sa vie privée et familiale dès lors que M. D..., âgé de 22 ans, célibataire, sans enfant, sans ressources, n'est pas dépourvu de liens au Congo où réside ses sept frères et soeurs. Dans ces conditions, la décision en litige est suffisamment motivée au regard des dispositions de l'article L. 211-5 du code des relations entre le public et l'administration. Le caractère suffisant de cette motivation, laquelle ne se confond pas avec le bien-fondé des motifs de la décision, révèle, en outre, que le préfet, qui n'avait pas à reprendre dans ses décisions l'ensemble des éléments caractérisant la situation personnelle de l'intéressé, s'est livré, sans commettre d'erreur de droit, à un examen de la situation personnelle de M. D....

5. En deuxième lieu, aux termes du premier alinéa de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " La carte de séjour temporaire mentionnée à l'article L. 313-11 ou la carte de séjour temporaire mentionnée aux 1° et 2° de l'article L. 313-10 peut être délivrée, sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, à l'étranger ne vivant pas en état de polygamie dont l'admission au séjour répond à des considérations humanitaires ou se justifie au regard des motifs exceptionnels qu'il fait valoir, sans que soit opposable la condition prévue à l'article L. 313-2. ".

6. D'une part, il ressort des motifs de la décision en litige que, après avoir rappelé l'ancienneté du séjour en France de M. D... et ses démarches en vue d'y régulariser sa situation administrative, la préfète du Tarn a constaté que l'intéressé qui avait été invité par courrier du 2 octobre 2018 à fournir une promesse d'embauche ou un contrat de travail, n'a produit que quelques contrats de missions intérimaires ponctuelles. Dans ces conditions, l'autorité administrative a pris en compte les éléments transmis par M. D... et s'est livrée à l'examen qui lui incombait au titre de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Par suite, le moyen tiré de l'erreur de droit doit être écarté.

7. D'autre part, il ressort des pièces du dossier que M. D... est entré irrégulièrement en France en septembre 2013, alors qu'il était âgé de 16 ans, et qu'il a été pris en charge, à compter du 25 septembre 2013, par les services de l'aide sociale à l'enfance. Il n'est pas contesté que l'intéressé s'est investi dans ses études et a obtenu, en septembre 2017, un baccalauréat professionnel dans le domaine électrotechnique, complété d'une spécialisation en qualité de technicien de réseaux électriques. Le requérant justifie avoir effectué de courtes missions en intérim dans sa qualification et avoir été titulaire d'un contrat de travail d'une durée de deux mois de mars 2019 au 31 mai 2019 afin d'assurer les astreintes au sein d'un établissement hôtelier. Toutefois, le parcours scolaire et professionnel de M. D..., pour méritoire qu'il soit, ne suffit pas pour permettre d'estimer que son admission exceptionnelle au séjour répondrait à des considérations humanitaires ou se justifierait au regard de motifs exceptionnels. Par suite, le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour en France et du droit d'asile doit être écarté.

8. En troisième lieu, M. D... se borne à reprendre en appel, sans apporter aucun élément de fait ou de droit nouveau, les moyens tirés de la méconnaissance de l'article L. 313-11 7° code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et de l'erreur manifeste d'appréciation de sa situation personnelle. Il y a lieu d'écarter ces moyens par adoption des motifs retenus à bon droit par les premiers juges.

Sur la légalité de l'obligation de quitter le territoire français :

9. Compte tenu de ce qui a été dit précédemment, le requérant n'est pas fondé à soutenir que la décision en litige serait illégale en raison de l'illégalité de la décision portant refus de délivrance d'un titre de séjour sur laquelle elle se fonde.

10. M. D... se borne à reprendre en appel, sans apporter aucun élément de fait ou de droit nouveau, le moyen tiré de la méconnaissance des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et de l'erreur manifeste d'appréciation de sa situation personnelle. Il y a lieu d'écarter ce moyen par adoption des motifs retenus à bon droit par les premiers juges.

Sur la légalité de la décision fixant le pays de destination :

11. Il résulte de ce qui a été dit ci-dessus que le moyen tiré de ce que la décision fixant le pays de renvoi est privée de base légale en raison des illégalités entachant les décisions portant refus de titre de séjour et obligation de quitter le territoire français doit être écarté

12. Il résulte de tout ce qui précède que M. D... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif C... a rejeté sa demande. Par voie de conséquence, sa requête doit être rejetée, y compris ses conclusions aux fins d'injonction sous astreinte et celles présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique.

DECIDE :

Article 1er : La requête de M. D... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... D... et au ministre de l'intérieur. Copie en sera adressée à la préfète du Tarn.

Délibéré après l'audience du 26 janvier 2021 à laquelle siégeaient :

Mme Elisabeth Jayat, président,

M. Frédéric Faïck, président-assesseur,

Mme Birsen E..., premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 23 février 2021.

Le président,

Elisabeth Jayat La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur, en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun, contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.

4

N° 20BX01299


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Bordeaux
Formation : 5ème chambre
Numéro d'arrêt : 20BX01299
Date de la décision : 23/02/2021
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-03 Étrangers. Obligation de quitter le territoire français (OQTF) et reconduite à la frontière.


Composition du Tribunal
Président : Mme JAYAT
Rapporteur ?: Mme Birsen SARAC-DELEIGNE
Rapporteur public ?: Mme PERDU
Avocat(s) : DUJARDIN

Origine de la décision
Date de l'import : 06/03/2021
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.bordeaux;arret;2021-02-23;20bx01299 ?
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