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23/02/2021 | FRANCE | N°20BX01790

France | France, Cour administrative d'appel de Bordeaux, 1ère chambre, 23 février 2021, 20BX01790


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. C... F... a demandé au tribunal administratif de Bordeaux d'annuler l'arrêté du 23 mai 2019 par lequel le préfet de Lot-et-Garonne a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français dans le délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel il serait reconduit à l'issue de ce délai.

Mme H... F... a demandé au tribunal administratif de Bordeaux d'annuler l'arrêté du 23 mai 2019 par lequel le préfet de Lot-et-Garonne a refusé de lui déliv

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Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. C... F... a demandé au tribunal administratif de Bordeaux d'annuler l'arrêté du 23 mai 2019 par lequel le préfet de Lot-et-Garonne a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français dans le délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel il serait reconduit à l'issue de ce délai.

Mme H... F... a demandé au tribunal administratif de Bordeaux d'annuler l'arrêté du 23 mai 2019 par lequel le préfet de Lot-et-Garonne a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligée à quitter le territoire français dans le délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel elle serait reconduite à l'issue de ce délai.

Par un jugement n° 1903569, 1903570 du 18 décembre 2019, le tribunal administratif de Bordeaux a rejeté leur demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête et un mémoire, enregistrés les 31 mai 2020 et 6 janvier 2021, Mme H... F... et M. C... F..., représentés par Me D..., demandent à la cour :

1°) d'ordonner la production des pièces produites par le préfet devant le tribunal ;

2°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Bordeaux du 18 décembre 2019 ;

3°) d'annuler les arrêtés du 23 mai 2019 par lesquels le préfet de Lot-et-Garonne a refusé de leur délivrer un titre de séjour, les a obligés à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel ils seraient reconduits ;

4°) d'enjoindre au préfet de leur délivrer une autorisation provisoire de séjour en qualité de parents d'enfant malade, subsidiairement de réexaminer leur demande et de leur délivrer dans cette attente une autorisation provisoire de séjour, dans un délai de huit jours à compter de la notification de l'arrêt à intervenir sous astreinte de 150 euros par jour de retard, passé ce délai ;

5°) de mettre à la charge de l'État le paiement de la somme de 1 500 euros à verser à leur conseil en application des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991.

Ils soutiennent que :

s'agissant des refus de séjour :

- les décisions litigieuses sont insuffisamment motivées ;

- leur enfant atteint d'un autisme sévère ne peut avoir un accès effectif à un traitement approprié à son état de santé en Algérie, dans une structure de même nature que celle où il est accueilli en France, de sorte que les décisions litigieuses sont entachées d'une erreur manifeste d'appréciation ;

- les décisions litigieuses méconnaissent l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le préfet a méconnu l'article 3-1 de la convention internationale des droits de l'enfant ;

s'agissant des obligations de quitter le territoire français :

- les décisions sont illégales du fait de l'illégalité des décisions portant refus de séjour qui les fondent ;

- les décisions sont entachées d'une erreur de droit et d'une erreur manifeste d'appréciation ;

- elles méconnaissent l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et l'article 3-1 de la convention internationale des droits de l'enfant.

Par un mémoire en défense, enregistré le 14 décembre 2020, le préfet de Lot-et-Garonne conclut au rejet de la requête.

Il soutient que les moyens soulevés par les requérants ne sont pas fondés.

Mme F... a été admise au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 9 avril 2020.

M. F... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 9 avril 2020.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- la convention internationale relative aux droits de l'enfant ;

- l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le décret n° 2020-1406 du 18 novembre 2020 et notamment son article 5 ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. E... B...,

- et les observations de Me D..., représentant M. et Mme F....

Considérant ce qui suit :

1. M. et Mme F..., ressortissants algériens nés le 14 mars 1980 et le 16 septembre 1984, ainsi que leurs deux enfants mineurs, sont entrés en France le 16 janvier 2018 sous couvert d'un visa de court séjour. Ils ont sollicité le 21 novembre 2018 le bénéfice d'une autorisation provisoire de séjour en qualité d'accompagnant de leur fils malade, Abdelkader A... né le 9 février 2011. Par deux arrêtés du 23 mai 2019, le préfet de Lot-et-Garonne a refusé d'admettre chacun d'eux au séjour, les a obligés à quitter le territoire dans un délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel ils seraient reconduits. Mme et M. F... relèvent appel du jugement du 18 décembre 2019 par lequel le tribunal administratif de Bordeaux a rejeté leur demande tendant à l'annulation de ces arrêtés.

Sur la légalité des refus d'admission au séjour :

2. En premier lieu, les décisions litigieuses visent les conventions internationales et les dispositions légales dont il est fait application, comportent des éléments de faits relatifs à la situation des intéressés et notamment de leur fils malade et exposent avec précision les raisons pour lesquelles le préfet a refusé de les admettre au séjour. Ces indications étaient suffisantes pour permettre à M. et Mme F... de comprendre et de contester les mesures prises à leur encontre. Par suite, le moyen tiré de l'insuffisante motivation de ces décisions doit être écarté.

3. En deuxième lieu, et ainsi que l'a jugé à bon droit le tribunal, si les dispositions de l'article L. 311-12 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ne sont pas applicables aux ressortissants algériens, dont la situation est entièrement régie par les stipulations de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968, cette circonstance ne fait pas obstacle à ce que le préfet, dans le cadre de son pouvoir discrétionnaire d'appréciation, délivre à un tel ressortissant un certificat de résidence afin de permettre l'accompagnement de son enfant malade. Le préfet peut, dans le cadre de son pouvoir discrétionnaire d'appréciation, refuser de délivrer une telle autorisation, sous réserve de ne pas entacher sa décision à ce titre d'une erreur manifeste d'appréciation.

4. Il ressort des pièces des dossiers que le collège de médecins de l'Office français de l'immigration et de l'intégration a considéré, dans son avis du 11 mars 2019, que l'état de santé du jeune G... A... nécessite une prise en charge médicale dont le défaut peut entraîner des conséquences d'une exceptionnelle gravité mais que, eu égard à l'offre de soins et aux caractéristiques du système de santé dans le pays dont il est originaire, il peut y bénéficier effectivement d'un traitement approprié à son état de santé. M. et Mme F..., qui ont levé le secret médical, font valoir que leur fils présente des troubles autistiques sévères et qu'il est pris en charge en France en hôpital de jour. Cependant, les certificats médicaux qu'ils produisent, notamment celui du 25 mai 2020 établi par un praticien hospitalier de l'hôpital de jour et celui du 18 juin 2019 émanant d'un médecin chef de médecine légale d'Oran ne peuvent suffire à infirmer l'avis rendu collégialement sur l'accès effectif à un traitement approprié à la pathologie du jeune G... A... en Algérie alors même que les structures de soins pluridisciplinaires y seraient différentes de celles auxquelles il est susceptible d'accéder en France. À cet égard, les requérants ne peuvent utilement se prévaloir d'un avis rendu par un autre collège de médecins de l'Office français de l'immigration et de l'intégration à propos de la situation d'un autre enfant présentant des troubles autistiques. Par suite, le préfet n'a pas entaché ses décisions d'une erreur manifeste d'appréciation en refusant de délivrer à M. et Mme F... un certificat de résidence en qualité d'accompagnants d'enfant malade.

5. En troisième lieu, aux termes de l'article 3, paragraphe 1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant : " Dans toutes les décisions qui concernent des enfants, qu'elles soient le fait (...) des tribunaux, des autorités administratives (...), l'intérêt supérieur des enfants doit être une considération primordiale ".

6. S'il résulte des stipulations précitées que, dans son pouvoir d'appréciation, l'autorité administrative doit accorder une attention primordiale à l'intérêt supérieur des enfants dans toutes les décisions les concernant, le jeune G... A... pourra, ainsi qu'il a été dit, accéder effectivement à un traitement approprié à sa pathologie en Algérie même si les structures de soins y sont différentes de celles à caractère pluridisciplinaire auxquelles il est susceptible d'accéder en France, alors au surplus qu'il ressort des pièces du dossier, notamment d'un certificat médical du 25 mai 2020, que l'accès à un établissement de type internat médico-éducatif spécialisé dans la prise en charge de l'autisme requiert plusieurs années d'attente en France à la sortie d'un hôpital de jour. Par ailleurs, la décision litigieuse n'a ni pour objet ni pour effet de séparer les requérants de leurs enfants. Par suite, le moyen tiré de la méconnaissance de l'article 3-1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant doit être écarté.

7. En quatrième et dernier lieu, les appelants se bornent à reprendre en appel le moyen tiré de la méconnaissance de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales sans critique utile du jugement et sans apporter d'éléments de fait ou de droit nouveaux. Dans ces conditions, il y a lieu, par adoption des motifs pertinents retenus par les premiers juges, d'écarter ce moyen.

Sur la légalité des décisions portant obligation de quitter le territoire français :

8. Il résulte de ce qui précède que le moyen tiré de ce que les décisions portant obligation de quitter le territoire français seraient privées de base légale par voie de conséquence de l'illégalité des refus d'admission au séjour doit être écarté.

9. Le moyen tiré de la méconnaissance de l'article 3-1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant doit être écarté pour les mêmes motifs que ceux qui ont été développés au point 6 ci-dessus.

10. Les appelants se bornent à reprendre en appel le moyen tiré de la méconnaissance de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales sans critique utile du jugement et sans apporter d'éléments de fait ou de droit nouveaux. Dans ces conditions, il y a lieu, par adoption des motifs pertinents retenus par les premiers juges, d'écarter ce moyen.

11. Si les requérants soutiennent que les décisions litigieuses sont entachées d'une erreur de droit et d'une erreur manifeste d'appréciation, ils n'assortissent ces moyens d'aucune précision permettant d'en apprécier le bien-fondé, de sorte que ces moyens doivent être écartés.

12. Il résulte de tout ce qui précède, et sans qu'il soit besoin de procéder aux mesures d'instruction demandées, que M. et Mme F... ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Bordeaux a rejeté leurs demandes. Les conclusions aux fins d'injonction et d'astreinte et celles présentées en application des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 doivent, par voie de conséquence, être rejetées.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de M. et Mme F... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. C... F..., à Mme H... F... et au ministre de l'intérieur.

Copie en sera transmise, pour information, au préfet de Lot-et-Garonne.

Délibéré après l'audience du 21 janvier 2021 à laquelle siégeaient :

Mme Marianne Hardy, président,

M. E... B..., président-assesseur,

Mme Nathalie Gay-Sabourdy, premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 23 février 2021.

Le président,

Marianne Hardy

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.

2

N° 20BX01790


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Bordeaux
Formation : 1ère chambre
Numéro d'arrêt : 20BX01790
Date de la décision : 23/02/2021
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

Étrangers - Séjour des étrangers.

Étrangers - Obligation de quitter le territoire français (OQTF) et reconduite à la frontière.


Composition du Tribunal
Président : Mme HARDY
Rapporteur ?: M. Didier SALVI
Rapporteur public ?: M. ROUSSEL
Avocat(s) : DA ROS

Origine de la décision
Date de l'import : 04/03/2021
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.bordeaux;arret;2021-02-23;20bx01790 ?
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