La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

09/03/2021 | FRANCE | N°19BX00877

France | France, Cour administrative d'appel de Bordeaux, 5ème chambre, 09 mars 2021, 19BX00877


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. D... G... et Mme I... E... ont demandé au tribunal administratif de la Guyane d'annuler le permis de construire une villa délivré le 8 décembre 2015 par le maire de Cayenne à M. H....

Par un jugement n° 1700141 du 27 décembre 2018, le tribunal a rejeté leur demande comme irrecevable.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 1er mars 2019, M. D... G... et Mme I... E..., représentés par Me O..., demandent à la cour :

1°) d'annuler ce jugement n° 1700141

du 27 décembre 2018 ;

2°) d'annuler le permis de construire du 8 décembre 2015 ;

3°) de mettre à l...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. D... G... et Mme I... E... ont demandé au tribunal administratif de la Guyane d'annuler le permis de construire une villa délivré le 8 décembre 2015 par le maire de Cayenne à M. H....

Par un jugement n° 1700141 du 27 décembre 2018, le tribunal a rejeté leur demande comme irrecevable.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 1er mars 2019, M. D... G... et Mme I... E..., représentés par Me O..., demandent à la cour :

1°) d'annuler ce jugement n° 1700141 du 27 décembre 2018 ;

2°) d'annuler le permis de construire du 8 décembre 2015 ;

3°) de mettre à la charge de la commune de Cayenne et de M. H... la somme de 2 000 euros à verser à M. G... au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et la même somme à verser à Mme E... au titre de ces mêmes dispositions.

Ils soutiennent, en ce qui concerne la recevabilité de leur demande de première instance, que :

- c'est à tort que le tribunal a rejeté comme irrecevable leur demande d'annulation du permis de construire au motif qu'ils ont présenté après la clôture de l'instruction seulement les justificatifs de l'accomplissement des formalités de notification prévues à l'article R. 600-1 du code de l'urbanisme ; un tel motif d'irrecevabilité ne pouvait leur être opposé dès lors que l'affichage du permis de construire en litige ne comportait pas les mentions prévues à l'article R. 424-15 du code de l'urbanisme et en particulier l'obligation pour l'auteur du recours de satisfaire aux formalités de l'article R. 600-1 du même code ;

- le délai de recours prévu à l'article R. 600-2 du code de l'urbanisme ne peut leur être opposé dès lors que le permis contesté a été affiché sur le terrain le 22 décembre 2016 seulement et de manière irrégulière dès lors que le panneau installé ne précisait pas l'identité du bénéficiaire, la date de délivrance de l'autorisation et la nature des travaux ;

- ils justifient d'un intérêt à contester le permis de construire conformément à l'article L. 600-1-2 du code de l'urbanisme car ils sont propriétaires d'une parcelle sur laquelle est édifiée leur maison immédiatement voisine du terrain d'assiette du projet ; ils subiront une gêne visuelle importante en provenance de la construction autorisée qui comporte trois niveaux et se caractérise par ses dimensions importantes.

Ils soutiennent, en ce qui concerne la légalité du permis de construire, que :

- la construction projetée étant située dans le champ de visibilité d'un monument historique et à moins de 500 mètres de celui-ci, le permis de construire ne pouvait être délivré sans l'avis préalable de l'architecte des bâtiments de France en application de l'article L. 621-30 du code du patrimoine ;

- le permis de construire ne respecte pas la règle d'implantation des constructions par rapport aux limites séparatives fixées par l'article U 4.7.1 du plan local d'urbanisme ; en effet, la construction est implantée sur deux limites séparatives ou à moins de trois mètres de l'une de ces limites, ce qui est contraire à la règle de recul fixée par cet article U 4.7 ;

- le permis de construire ne respecte pas la règle de hauteur et de profondeur fixée par l'article 4.7.2 du plan local d'urbanisme ; la construction est située à 16,30 mètres de l'alignement alors que la limite imposée par l'article U 4.7.2 est fixée à 15 mètres ; sa hauteur est de 10,94 mètres alors que la limite fixée au plan local d'urbanisme est de 7 mètres ;

- le permis de construire ne respecte pas la règle prévue à l'article U 4.10 du plan local d'urbanisme selon laquelle la hauteur des constructions est mesurée à l'égout du toit pour le calcul de la hauteur maximale des 7 mètres et au faîtage pour le calcul de la hauteur maximale au faîtage ; ces deux limites sont dépassées par la construction autorisée ;

- l'emprise au sol de la construction autorisée excède le seuil de 45 % de la superficie de la parcelle fixé à l'article U 4.9 du plan local d'urbanisme.

Par un mémoire en défense, enregistré le 23 juin 2019, M. F... H..., représenté par Me N..., conclut au rejet de la requête et à ce qu'il soit mis à la charge des requérants la somme de 3 000 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que la requête d'appel est irrecevable car elle ne lui a pas été notifiée, ainsi qu'à la commune de Cayenne, en application de l'article R. 600-1 du code de l'urbanisme.

Par ordonnance du 19 octobre 2020, la clôture d'instruction a été fixée au 26 novembre 2020 à 12h00.

Par une lettre du 4 février 2021, les parties ont été invitées à présenter leurs observations sur la possibilité pour la cour de surseoir à statuer sur la requête, en application de l'article L. 600-5-1 du code de l'urbanisme, afin de permettre la régularisation des vices affectant le permis de construire tirés de l'absence d'accord de l'architecte des bâtiments de France et de la méconnaissance de l'article U 4.7 du plan local d'urbanisme et de l'article U 4.10 du même plan.

M. H... a présenté des observations le 8 février 2021.

La commune de Cayenne, représentée par Me C..., a présenté des observations le 9 février 2021.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code du patrimoine ;

- le code de l'urbanisme ;

- le code de justice administrative et le décret n° 2020-1406 du 18 novembre 2020.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. K... A...,

- les conclusions de Mme P..., rapporteure publique,

Considérant ce qui suit :

1. Le 8 décembre 2015, le maire de Cayenne a délivré à M. H..., au nom de la commune, un permis de construire une villa sur la parcelle cadastrée section BM n° 254 (devenue BM n° 686) située route de Bourda. M. G... et Mme E... ont demandé au tribunal administratif de Cayenne d'annuler ce permis de construire. Par jugement du 27 décembre 2018, le tribunal a rejeté cette demande comme irrecevable au motif que M. G... et Mme E... n'avaient pas justifié avant la clôture de l'instruction de l'accomplissement des formalités prévues à l'article R. 600-1 du code de l'urbanisme, en cas de recours contentieux à l'encontre d'un permis de construire. M. G... et Mme E... relèvent appel de ce jugement.

Sur la recevabilité de l'appel :

2. Aux termes de l'article R. 600-1 du code de l'urbanisme : " En cas (...) de recours contentieux à l'encontre (...) d'une décision relative à l'occupation ou l'utilisation du sol régie par le présent code, (...) l'auteur du recours est tenu, à peine d'irrecevabilité, de notifier son recours à l'auteur de la décision et au titulaire de l'autorisation. Cette notification doit également être effectuée dans les mêmes conditions en cas de demande tendant à l'annulation (...) d'une décision juridictionnelle concernant (...) une décision relative à l'occupation ou l'utilisation du sol régie par le présent code. (...) La notification (...) doit intervenir par lettre recommandée avec accusé de réception, dans un délai de quinze jours francs à compter du dépôt (...) du recours (...) ". Aux termes de l'article R. 424-15 du même code : " Mention du permis (...) doit être affichée sur le terrain, de manière visible de l'extérieur, par les soins de son bénéficiaire, dès la notification de l'arrêté (...) et pendant toute la durée du chantier. (...) Cet affichage mentionne également l'obligation, prévue à peine d'irrecevabilité par l'article R. 600-1, de notifier tout recours (...) contentieux à l'auteur de la décision et au bénéficiaire du permis (...) ".

3. Il résulte de la combinaison de ces dispositions que l'irrecevabilité tirée de l'absence d'accomplissement des formalités de notification prescrites par l'article R. 600-1 du code de l'urbanisme ne peut être opposée, en première instance ou en appel, qu'à la condition, prévue à l'article R. 424-15 du même code, que l'obligation de procéder à cette notification ait été mentionnée dans l'affichage du permis de construire.

4. Il ressort des pièces du dossier de première instance que M. G... et Mme E... ont, le 22 décembre 2016, informé le maire de Cayenne qu'ils avaient constaté ce même jour la présence, sur le terrain d'assiette du projet, d'un panneau d'affichage comportant, comme seule mention, le numéro du permis de construire délivré à M. H.... Les éléments du dossier ne font pas apparaître que cet affichage comportait, en réalité, les autres informations prescrites par l'article R. 424-15 du code de l'urbanisme, en particulier l'obligation de notifier, à peine d'irrecevabilité, tout recours contentieux à l'auteur et au bénéficiaire du permis de construire en application de l'article R. 600-1 du même code. Par suite, l'appel que M. G... et Mme E... ont formé contre le jugement du tribunal rejetant leur demande n'est pas soumis à la formalité de notification prévue à l'article R. 600-1 du code de l'urbanisme. La fin de non-recevoir opposée par M. H... et tirée de l'absence de l'accomplissement de cette formalité doit, dès lors, être écartée.

Sur la régularité du jugement attaqué :

5. Comme il vient d'être dit, la demande d'annulation du permis en litige, présentée par M. G... et Mme E... devant le tribunal, n'était pas soumise à la formalité de l'article R. 600-1 du code de l'urbanisme. Par suite, les premiers juges ne pouvaient rejeter cette demande comme irrecevable au motif que les intéressés ont produit seulement après la clôture de l'instruction les pièces établissant la notification de leur recours contre le permis de construire à l'auteur et au bénéficiaire de celui-ci.

6. Aux termes de l'article L. 600-1-2 du code de l'urbanisme : " Une personne autre que l'Etat, les collectivités territoriales ou leurs groupements ou une association n'est recevable à former un recours pour excès de pouvoir contre une décision relative à l'occupation ou à l'utilisation du sol régie par le présent code que si la construction, l'aménagement ou le projet autorisé sont de nature à affecter directement les conditions d'occupation, d'utilisation ou de jouissance du bien qu'elle détient ou occupe régulièrement (...) ". Eu égard à sa situation particulière, le voisin immédiat justifie, en principe, d'un intérêt à agir lorsqu'il fait état devant le juge, qui statue au vu de l'ensemble des pièces du dossier, d'éléments relatifs à la nature, à l'importance ou à la localisation du projet de construction.

7. Il ressort des pièces du dossier que M. G... et Mme E... sont propriétaires de la parcelle cadastrée section BM n° 255 sur laquelle est édifiée leur maison et qui est immédiatement voisine du terrain d'assiette du projet en litige. Les plans joints à la demande de permis montrent que la construction projetée, qui comporte trois niveaux, doit être implantée à moins de 10 mètres de la demeure de M. G... et Mme E... qui sont ainsi susceptibles de subir des nuisances liées à une perte d'ensoleillement et de vue, notamment sur la mer. Dans ces circonstances, M. G... et Mme E... justifient d'un intérêt à agir à l'encontre du permis de construire du 8 décembre 2015 en litige.

8. En rejetant pour irrecevabilité la requête de M. G... et Mme E..., le tribunal a entaché son jugement d'une irrégularité. Il y a lieu pour la cour d'annuler ce jugement et de statuer par la voie de l'évocation sur la demande de première instance dirigée contre le permis de construire du 8 décembre 2015.

Sur la légalité du permis de construire du 8 décembre 2015 :

9. En premier lieu, aux termes de l'article L. 621-30 du code du patrimoine : " (...) Est considéré (...) comme étant situé dans le champ de visibilité d'un immeuble classé ou inscrit au titre des monuments historiques tout autre immeuble, nu ou bâti, visible du premier ou visible en même temps que lui et situé dans un périmètre déterminé par une distance de 500 mètres du monument (...) ". Aux termes du premier alinéa de l'article L. 621-31 du même code, dans sa version applicable au litige : " Lorsqu'un immeuble est (...) situé dans le champ de visibilité d'un édifice classé ou inscrit au titre des monuments historiques, il ne peut faire l'objet (...) d'aucune construction nouvelle (...) sans une autorisation préalable (...) ". Aux termes de l'article L. 621-32 du même code, dans sa version alors applicable : " I. - Le permis de construire (...) tient lieu de l'autorisation prévue au premier alinéa de l'article L. 621-31 si l'architecte des Bâtiments de France a donné son accord (...) ".

10. Il résulte de ces dispositions combinées qu'un projet de construction situé dans le champ de visibilité d'un immeuble protégé au titre des monuments historiques ne peut être autorisé sans l'accord de l'architecte des bâtiments de France.

11. Par un arrêté du 24 décembre 2013, le préfet de la région Guyane, compétent en vertu de l'article R. 621-54 du code du patrimoine alors en vigueur, a inscrit la résidence préfectorale dite " Chalet Bourda ", située à Cayenne, au titre des monuments historiques. Eu égard à son objet, cet arrêté n'est pas une décision individuelle mais une décision d'espèce dont l'entrée en vigueur est subordonnée non pas à sa notification à la commune et au département, à supposer d'ailleurs que cette formalité ait été omise, mais à sa publication qui n'est pas contestée. Par ailleurs, si cet arrêté ne mentionne pas le nom et le prénom de son auteur, il ne ressort pas des pièces du dossier que cette omission de forme a privé les tiers d'une garantie. Elle n'a pas non plus exercé une influence sur le contenu de la décision prise. Il résulte de ce qui précède que l'arrêté du 24 décembre 2013 était en vigueur à la date du permis de construire attaqué et n'était pas entaché d'une illégalité de nature à faire obstacle à son application.

12. Il ressort des pièces du dossier que la résidence " Chalet Bourda " est située sur la parcelle cadastrée section AB n°253 qui jouxte le terrain d'assiette du projet en litige. La commune de Cayenne ne produit aucun élément permettant d'estimer qu'en dépit de cette proximité, le projet de M. H... ne serait pas dans le champ de visibilité de la résidence inscrite, pareille conclusion ne pouvant être tirée de l'avis rendu le 6 mars 2017 par l'architecte des bâtiments de France pour un autre projet situé à une adresse différente, sur la parcelle n° 68. Dans ces conditions, le permis de construire du 8 décembre 2015 ne pouvait être délivré sans l'accord de l'architecte des bâtiments de France et il ressort des pièces du dossier que cet accord n'a pas été sollicité. Par suite, le permis est entaché d'un vice qui affecte la compétence de son auteur.

13. En deuxième lieu, aux termes de l'article U4.7 du règlement du plan local d'urbanisme de la commune de Cayenne : " Implantation des constructions par rapport aux limites séparatives. 1. Les constructions, y compris les terrasses et les balcons, doivent être implantées à la distance (L) des limites séparatives aboutissant aux voies au moins égales à la moitié de la hauteur (H) du bâtiment, mesurée à l'égout du toit. Cette distance (L) ne peut être inférieure à 3 m (...) 2. Les pignons aveugles des constructions peuvent être implantés sur une des limites séparatives aboutissant aux voies si elles respectent les deux clauses suivantes : être réalisées sur une profondeur maximale de 15 m à partir de l'alignement ; avoir une hauteur maximum inférieure à 7 m à l'égout et à condition qu'un bâtiment à usage d'habitation existant sur la parcelle voisine et ayant des pièces principales qui y prennent jour ne soit pas situé à moins de 3 m de la limite séparative (...) ".

14. Il ressort des plans joints à la demande de permis que la construction projetée doit être implantée sur une des limites séparatives du terrain d'assiette aboutissant à une voie et non à trois mètres au moins de cette limite comme l'imposent les dispositions précitées du 1. de l'article U 4.7 du règlement du plan local d'urbanisme. Il est vrai que les dispositions, également précitées, du 2. de l'article U.4. 7 autorisent l'implantation d'un pignon aveugle de la construction sur une limite séparative aboutissant aux voies dans les conditions rappelées ci-dessus et qui sont cumulatives. Il ressort toutefois des pièces du dossier que l'une de ces conditions n'est pas remplie en l'espèce dès lors que le plan de masse PC 2 montre que la construction projetée, qui présente un recul de trois mètres par rapport à l'alignement, doit être implantée à une profondeur totale supérieure à 15 mètres calculée à partir de cet alignement. Par suite, M. G... et Mme E... sont fondés à soutenir que le permis a litige a méconnu les dispositions du 1. de l'article U.4.7 du plan local d'urbanisme relatives à l'implantation des constructions par rapport aux limites séparatives.

15. En troisième lieu, aux termes de l'article U 4.10 du règlement du plan local d'urbanisme : " Hauteur maximale des constructions. 1. La hauteur des constructions individuelles ne pourra excéder 7.20 m, cette hauteur étant mesurée à l'égout du toit et 12 m au faîtage (...) ". Aux termes de l'article 5 des dispositions générales du même règlement : " Définition de la hauteur maximale. La hauteur maximale fixée à l'article 10 du règlement de chaque zone, est la différence d'altitude maximale admise entre le point de référence cité dans le règlement et sa projection verticale sur le sol naturel, tel qu'il apparaît au levé altimétrique effectué avant tous les travaux d'adaptation du terrain lié au projet considéré (...) "

16. Il ressort des pièces du dossier et notamment des plans de coupe et de façade que la différence d'altitude maximale entre l'égout du toit de la construction projetée, situé à 3,63 m de haut, et sa projection verticale sur le sol naturel est de 8,97 mètres (5,34 m + 3,63 mètres). Cette hauteur, calculée en ne tenant pas compte des travaux d'adaptation du terrain que le projet rend nécessaires, comme l'exigent les dispositions précitées de l'article 5 du plan local d'urbanisme, est supérieure à la hauteur de 7,20 mètres à l'égout du toit imposée par le règlement du plan. Par ailleurs, la construction présente au faîtage une hauteur de 12,34 mètres (7 m + 5,34 m) qui excède la limite des 12 mètres prévue pour ce point de référence. Par suite, M. G... et Mme E... sont fondés à soutenir que le permis en litige méconnait les règles de hauteur prévues à l'article U4.10 du règlement du plan local d'urbanisme.

17. Enfin, aux termes de l'article U 4.9 du règlement du plan local d'urbanisme : " Emprise au sol. L'emprise au sol des bâtiments ne doit pas excéder 45 % de la superficie de la parcelle ". L'article R. 420-1 du code de l'urbanisme définit l'emprise au sol comme la projection verticale du volume de la construction, tous débords et surplombs inclus.

18. Il ressort des pièces du dossier que compte tenu de la superficie du terrain d'assiette du projet, dont il est constant qu'elle est de 237 m², l'emprise de la construction en projet ne doit pas dépasser 106,65 m². Selon les documents joints à la demande de permis de construire, l'emprise au sol du projet est de 101,90 m² et en l'absence de disposition particulière du plan local d'urbanisme, il ne doit pas être tenu compte, contrairement à ce que soutiennent les requérants, des surfaces ne dépassant pas le niveau du sol, telles que les voiries bétonnées. Dans ces conditions, le moyen tiré de la méconnaissance de l'article U 4.9 du règlement du plan local d'urbanisme doit être écarté.

Sur les conséquences des illégalités du permis de construire :

19. Aux termes de l'article L. 600-5-1 du code de l'urbanisme, dans sa rédaction issue de la loi du 23 novembre 2018 portant évolution du logement, de l'aménagement et du numérique : " (...) le juge administratif qui, saisi de conclusions dirigées contre un permis de construire (...) estime, après avoir constaté que les autres moyens ne sont pas fondés, qu'un vice entraînant l'illégalité de cet acte est susceptible d'être régularisé, sursoit à statuer, après avoir invité les parties à présenter leurs observations, jusqu'à l'expiration du délai qu'il fixe pour cette régularisation, même après l'achèvement des travaux. Si une mesure de régularisation est notifiée dans ce délai au juge, celui-ci statue après avoir invité les parties à présenter leurs observations. Le refus par le juge de faire droit à une demande de sursis à statuer est motivé. ".

20. Il résulte de ces dispositions que lorsque le ou les vices affectant la légalité du permis de construire dont l'annulation est demandée, sont susceptibles d'être régularisés, le juge doit surseoir à statuer sur les conclusions dont il est saisi contre cette autorisation. Il invite au préalable les parties à présenter leurs observations sur la possibilité de régulariser le ou les vices affectant la légalité de l'autorisation d'urbanisme. Le juge n'est toutefois pas tenu de surseoir à statuer, d'une part, si les conditions de l'article L. 600-5 du code de l'urbanisme sont réunies et qu'il fait le choix d'y recourir, d'autre part, si le bénéficiaire de l'autorisation lui a indiqué qu'il ne souhaitait pas bénéficier d'une mesure de régularisation. Un vice entachant le bien-fondé de l'autorisation d'urbanisme est susceptible d'être régularisé, même si cette régularisation implique de revoir l'économie générale du projet en cause, dès lors que les règles d'urbanisme en vigueur à la date à laquelle le juge statue permettent une mesure de régularisation qui n'implique pas d'apporter à ce projet un bouleversement tel qu'il en changerait la nature même.

21. Les illégalités relevées aux points 12, 14 et 16 du présent arrêt sont susceptibles de régularisation par l'intervention d'un accord de l'architecte des bâtiments de France, par la modification de la hauteur de la construction à l'égout du toit et au faîtage et par la modification de la profondeur de l'implantation du bâtiment à l'alignement. Il résulte de ce qui a été dit ci-dessus que l'autre moyen invoqué n'est pas fondé. Il ne ressort par ailleurs pas des pièces du dossier que la régularisation des illégalités retenues impliquerait un bouleversement du projet de nature à changer sa nature même. Par suite, il y a lieu de surseoir à statuer sur les conclusions de la requête et d'impartir au pétitionnaire un délai de quatre mois à compter de la notification du présent arrêt aux fins d'obtenir la régularisation du vice relevé.

DECIDE :

Article 1er : Le jugement n° 1700141 du tribunal administratif de la Guyane du 27 décembre 2018 est annulé.

Article 2r : Il est sursis à statuer sur la légalité du permis de construire du 8 décembre 2015 jusqu'à l'expiration d'un délai de quatre mois à compter de la notification du présent arrêt pour permettre à M. H... de notifier le cas échéant à la cour une mesure de régularisation des irrégularités relevées aux points 12, 14 et 16 du présent arrêt.

Article 3 : Tous droits et moyens des parties sur lesquels il n'est pas expressément statué par le présent arrêt sont réservés jusqu'en fin d'instance.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à M. D... G..., à Mme I... E..., à M. F... H... et à la commune de Cayenne.

Copie en sera transmise au procureur de la République près le tribunal judiciaire de Cayenne en application de l'article R. 751-11 du code de justice administrative.

Copie pour information en sera délivrée au préfet de la Guyane.

Délibéré après l'audience du 9 février 2021 à laquelle siégeaient :

Mme M... B..., présidente,

M. K... A..., président-assesseur,

Mme J... L..., première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 9 mars 2021.

La présidente,

Elisabeth B...

La République mande et ordonne au préfet de la Guyane en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.

8

N° 19BX00877


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Bordeaux
Formation : 5ème chambre
Numéro d'arrêt : 19BX00877
Date de la décision : 09/03/2021
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

Urbanisme et aménagement du territoire - Permis de construire - Procédure d'attribution - Instruction de la demande.

Urbanisme et aménagement du territoire - Permis de construire - Légalité interne du permis de construire.

Urbanisme et aménagement du territoire - Règles de procédure contentieuse spéciales - Introduction de l'instance - Obligation de notification du recours.


Composition du Tribunal
Président : Mme JAYAT
Rapporteur ?: M. Frédéric FAÏCK
Rapporteur public ?: Mme PERDU
Avocat(s) : SCP CHONG-SIT et DOUTRELONG

Origine de la décision
Date de l'import : 16/03/2021
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.bordeaux;arret;2021-03-09;19bx00877 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award