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01/04/2021 | FRANCE | N°20BX03711

France | France, Cour administrative d'appel de Bordeaux, 1ère chambre, 01 avril 2021, 20BX03711


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme E... C... a demandé au tribunal administratif de la Guadeloupe d'annuler l'arrêté du 18 décembre 2019 par lequel le préfet de la Guadeloupe a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligée à quitter le territoire français dans un délai de trente jours, a fixé le pays à destination duquel elle serait reconduite à l'issue de ce délai et a interdit son retour sur le territoire français pour une durée d'un an.

Par un jugement n° 2000028 du 1er octobre 2020, le tribunal administrati

f de la Guadeloupe a annulé cet arrêté et a enjoint au préfet de la Guadeloupe de déliv...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme E... C... a demandé au tribunal administratif de la Guadeloupe d'annuler l'arrêté du 18 décembre 2019 par lequel le préfet de la Guadeloupe a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligée à quitter le territoire français dans un délai de trente jours, a fixé le pays à destination duquel elle serait reconduite à l'issue de ce délai et a interdit son retour sur le territoire français pour une durée d'un an.

Par un jugement n° 2000028 du 1er octobre 2020, le tribunal administratif de la Guadeloupe a annulé cet arrêté et a enjoint au préfet de la Guadeloupe de délivrer à Mme C... un titre de séjour portant la mention " vie privée et familiale " dans le délai de deux mois suivant la notification du jugement.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 13 novembre 2020, le préfet de la Guadeloupe demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de la Guadeloupe du 1er octobre 2020 ;

2°) de rejeter la demande présentée par Mme C... devant le tribunal administratif de la Guadeloupe.

Il soutient que :

- il n'a méconnu ni les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, ni les dispositions du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- il n'a pas méconnu les stipulations de l'article 3-1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant.

Mme C... a été admise au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 28 janvier 2021.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le décret n° 2020-1406 du 18 novembre 2020, et notamment son article 5 ;

- le code de justice administrative.

La présidente de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le rapport de M. B... A... a été entendu au cours de l'audience publique.

Considérant ce qui suit :

1. Mme C..., ressortissante haïtienne née le 28 avril 1989, est entrée irrégulièrement en France selon ses déclarations au cours de l'année 2013. Elle a déposé, le 25 mars 2019, une demande de titre de séjour sur le fondement du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Par un arrêté du 18 décembre 2019, le préfet de la Guadeloupe a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligée à quitter le territoire français dans un délai de trente jours, a fixé le pays à destination duquel elle serait reconduite à l'issue de ce délai et a interdit son retour sur le territoire français pour une durée d'un an. Le préfet de la Guadeloupe relève appel du jugement du 1er octobre 2020 par lequel le tribunal administratif de la Guadeloupe a annulé cet arrêté et lui a enjoint de délivrer à Mme C... un titre de séjour portant la mention " vie privée et familiale ".

2. Aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. / 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui. ". Aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention "vie privée et familiale" est délivrée de plein droit : / (...) 7° À l'étranger ne vivant pas en état de polygamie, qui n'entre pas dans les catégories précédentes ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, dont les liens personnels et familiaux en France, appréciés notamment au regard de leur intensité, de leur ancienneté et de leur stabilité, des conditions d'existence de l'intéressé, de son insertion dans la société française ainsi que de la nature de ses liens avec la famille restée dans le pays d'origine, sont tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus, sans que la condition prévue à l'article L. 313-2 soit exigée. L'insertion de l'étranger dans la société française est évaluée en tenant compte notamment de sa connaissance des valeurs de la République (...) ".

3. Il ressort des pièces du dossier, notamment des mentions concordantes portées sur les documents établis par les services de sécurité sociale et les services de protection maternelle et infantile, corroborées par les quittances de loyer et les nombreuses attestations présentées, en particulier celle de la propriétaire du logement loué, que Mme C... vit maritalement depuis le milieu de l'année 2015 avec un compatriote, salarié et titulaire d'une carte de résident qui lui donne vocation à rester durablement sur le territoire français. Le couple a donné naissance à une fille née le 16 avril 2016, scolarisée dès l'année scolaire 2018/2019 et à l'entretien et l'éducation de laquelle le père contribue effectivement. Ainsi, dans ces circonstances particulières, l'arrêté litigieux a porté au droit de Mme C... au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels il a été pris et a ainsi méconnu les dispositions du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, alors même que le préfet fait valoir que l'entrée et le séjour en France de Mme C... sont irréguliers.

4. Il résulte de tout ce qui précède que le préfet de la Guadeloupe n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de la Guadeloupe a annulé son arrêté du 18 décembre 2019 et lui a enjoint de délivrer à Mme C... un titre de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale ".

DÉCIDE :

Article 1er : La requête est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié au ministre de l'intérieur et à Mme E... C....

Copie en sera transmise, pour information, au préfet de la Guadeloupe.

Délibéré après l'audience du 4 mars 2021 à laquelle siégeaient :

Mme Marianne Hardy, présidente,

M. B... A..., président-assesseur,

Mme D..., première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 1er avril 2021.

La présidente,

Marianne Hardy

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.

4

N° 20BX03711


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Bordeaux
Formation : 1ère chambre
Numéro d'arrêt : 20BX03711
Date de la décision : 01/04/2021
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

Étrangers - Séjour des étrangers.

Étrangers - Obligation de quitter le territoire français (OQTF) et reconduite à la frontière.


Composition du Tribunal
Président : Mme HARDY
Rapporteur ?: M. Didier SALVI
Rapporteur public ?: M. ROUSSEL
Avocat(s) : RODES

Origine de la décision
Date de l'import : 07/04/2021
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.bordeaux;arret;2021-04-01;20bx03711 ?
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