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04/05/2021 | FRANCE | N°20BX03756

France | France, Cour administrative d'appel de Bordeaux, 2ème chambre, 04 mai 2021, 20BX03756


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme L... H... et la SELARL Pharmacie Pierre Millet Lacombe ont demandé au tribunal administratif de Limoges d'annuler l'arrêté du 29 juin 2018 par lequel le directeur de l'agence régionale de santé (ARS) de Nouvelle-Aquitaine a autorisé le transfert de l'officine de pharmacie exploitée par la SARL Pharmacie E... au 9 rue Pasteur à Nexon vers un local situé à proximité du pôle Super U, route de la Meyze, dans la même commune.

Par un jugement n° 1801298 du 21 octobre 2020, le tribunal administrat

if de Limoges a annulé cet arrêté du 29 juin 2018 et mis à la charge de l'Etat une...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme L... H... et la SELARL Pharmacie Pierre Millet Lacombe ont demandé au tribunal administratif de Limoges d'annuler l'arrêté du 29 juin 2018 par lequel le directeur de l'agence régionale de santé (ARS) de Nouvelle-Aquitaine a autorisé le transfert de l'officine de pharmacie exploitée par la SARL Pharmacie E... au 9 rue Pasteur à Nexon vers un local situé à proximité du pôle Super U, route de la Meyze, dans la même commune.

Par un jugement n° 1801298 du 21 octobre 2020, le tribunal administratif de Limoges a annulé cet arrêté du 29 juin 2018 et mis à la charge de l'Etat une somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 19 novembre 2020, la société Pharmacie E..., représentée par Me J..., demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Limoges du 21 octobre 2020 ;

2°) de rejeter la demande présentée par Mme H... et la SELARL Pharmacie Pierre Millet Lacombe devant le tribunal administratif de Limoges ;

3°) de mettre à la charge de Mme H... et de la SELARL Pharmacie Pierre Millet Lacombe une somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- Mme H... et la Pharmacie Pierre Millet Lacombe, qui ne se prévalent que de considérations commerciales alors que l'ARS a établi que l'impact financier du transfert serait pour ce qui les concerne respectivement nul ou limité, n'avaient pas intérêt à demander l'annulation de l'arrêté du 29 juin 2018 ; en outre, la Pharmacie Pierre Millet Lacombe est distante de plus de douze kilomètres du lieu du transfert ;

- c'est à tort que les premiers juges ont retenu que l'arrêté du 29 juin 2018 méconnaît l'autorité de la chose jugée qui s'attache au jugement du tribunal du 28 septembre 2017 et à l'arrêt de la cour du 11 janvier 2018 alors que la nouvelle demande d'autorisation qu'elle a soumise à l'ARS fait état de circonstances nouvelles, soit la délivrance de permis de construire dans le quartier d'accueil, la nécessité de prendre en compte la population des communes avoisinantes dépourvues de pharmacie ainsi que la population saisonnière et les données issues de l'exploitation effective de son officine par la Pharmacie E... sur le lieu du transfert ;

- le transfert satisfait aux conditions fixées par l'article L. 5125-3 du code de la santé publique ; il permet en particulier de répondre de façon optimale aux besoins en médicaments de la population, notamment au sud de la commune, et il n'y a pas lieu d'analyser si le transfert n'a pas pour effet de compromettre l'approvisionnement nécessaire en médicaments de la population du quartier d'origine dès lors que la commune de Nexon n'est constituée que d'un seul quartier au sens des dispositions applicables du code de la santé publique ; le nouvel emplacement est plus sûr, permet l'exploitation de locaux plus vastes et modernes, dispose d'un stationnement facilité et est accessible aux personnes à mobilité réduite conformément aux exigences de la loi n° 2005-102 du 11 février 2005.

Par une intervention, enregistrée le 14 décembre 2020 et présentée à l'appui de la requête, Me I... C..., commissaire à l'exécution du plan de redressement de la Pharmacie E..., représenté par Me G..., demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Limoges du 21 octobre 2020 ;

2°) de rejeter la demande présentée par Mme H... et la SELARL Pharmacie Pierre Millet Lacombe devant le tribunal administratif de Limoges ;

3°) de mettre à la charge solidaire de Mme H... et de la SELARL Pharmacie Pierre Millet Lacombe une somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient qu'il a intérêt pour intervenir dans la présente instance en vertu du 4° de l'article L. 626-25 du code du commerce et il reprend l'ensemble des moyens exposés par la société Pharmacie E....

Par un mémoire, enregistré le 17 novembre 2020, l'ARS de Nouvelle-Aquitaine demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Limoges du 21 octobre 2020 ;

2°) de rejeter la demande présentée par Mme H... et la SELARL Pharmacie Pierre Millet Lacombe devant le tribunal administratif de Limoges.

Elle soutient que :

- Mme H... et la Pharmacie Pierre Millet Lacombe, qui ne se prévalent que de considérations commerciales alors que l'impact financier du transfert serait pour ce qui les concerne respectivement nul ou limité, n'avaient pas intérêt à demander l'annulation de l'arrêté du 29 juin 2018 ; en outre, la Pharmacie Pierre Millet Lacombe est distante de plus de douze kilomètres du lieu du transfert ;

- l'arrêté n'était entaché d'aucune illégalité externe ainsi que l'a jugé le tribunal ;

- cet arrêté n'a pas méconnu l'autorité de la chose jugée qui s'attache au jugement du tribunal du 28 septembre 2017 et à l'arrêt de la cour du 11 janvier 2018 dès lors que l'autorisation de transfert était justifiée par des circonstances de fait nouvelles ; le transfert doit permettre d'assurer l'approvisionnement en médicaments de la population du sud de la commune ainsi que des communes avoisinantes qui sont toutes actuellement dépourvues d'officine de pharmacie ; l'exploitation de l'officine sur le lieu de transfert pendant une durée de deux ans constitue une circonstance nouvelle et a permis d'apprécier le respect de l'ensemble des conditions d'installation et l'impact positif de ce transfert ;

- le transfert satisfait à l'ensemble des conditions fixées par l'article L. 5125-3 du code de la santé publique ; il n'entraîne pas d'abandon de la population du quartier d'origine, il permet d'optimiser l'accès aux médicaments de la population du sud de la commune et des communes avoisinantes ainsi que de la population saisonnière ;

- le transfert répond à un impératif d'intérêt général, particulièrement en période de crise sanitaire.

Par un mémoire en défense, enregistré le 27 janvier 2021, Mme H... et la SELARL Pharmacie Pierre Millet Lacombe concluent au rejet de la requête et à ce qu'une somme de 5 000 euros soit mise à la charge de la Pharmacie E... au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elles soutiennent que :

- l'intervention de Me I... C... est irrecevable car il défend un intérêt identique à celui de la Pharmacie E... ;

- elles disposent bien d'un intérêt pour agir en raison de l'impact qu'aura le transfert de l'officine de la Pharmacie E... sur leur propre activité ; les données fournies quant à leur chiffre d'affaires sont inexactes et le transfert de la pharmacie E... entre le

21 septembre 2015 et le 28 septembre 2017 a d'ores et déjà conduit à une baisse sensible de leur activité et au placement de la Pharmacie Pierre Millet Lacombe en procédure de sauvegarde de justice ;

- les autres moyens soulevés par la Pharmacie E... ne sont pas fondés.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code de commerce ;

- le code de la santé publique ;

- l'ordonnance n° 2018-3 du 3 janvier 2018, notamment son article 5 ;

- le code de justice administrative et le décret n° 2020-1406 du 18 novembre 2020.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme A... D...,

- les conclusions de Mme Marie-Pierre Beuve Dupuy, rapporteure publique,

- et les observations de Me F..., représentant la SARL Pharmacie E..., de M. K..., représentant l'ARS de Nouvelle-Aquitaine et de Me B..., représentant Mme H... et la SELARL Pharmacie Pierre Millet Lacombe.

Considérant ce qui suit :

1. M. E..., gérant de la SARL Pharmacie E..., a sollicité le 20 février 2014 l'autorisation de transférer son officine, située 9 rue Pasteur à Nexon (Haute-Vienne) vers un local situé à 1,8 kilomètres de distance, route de la Meyze, sur le territoire de la même commune. Cette demande a été rejetée par un arrêté du directeur de l'ARS de Nouvelle-Aquitaine du

3 juin 2014 contre lequel M. E... a formé un recours hiérarchique. Par un arrêté du

9 décembre 2014, la ministre chargée de la santé a fait droit à ce recours et autorisé le transfert. A la demande notamment de Mme H..., exploitant une pharmacie dans la commune de La Meyze, et de la Pharmacie Pierre Millet Lacombe, située à Ladignac-le-Long, le tribunal administratif de Limoges a, par un jugement n° 1500252 du 28 septembre 2017, annulé cet arrêté au motif que le transfert ne permettait pas de répondre de façon optimale aux besoins du quartier d'accueil. Cette décision a été confirmée par un arrêt de la cour n° 17BX03256,17BX03326, 17BX03500 du 8 février 2018. La Pharmacie E... a présenté une nouvelle demande de transfert concernant le même emplacement le 12 avril 2018 et, par un arrêté du 29 juin 2018, l'ARS de Nouvelle Aquitaine lui a délivré l'autorisation de transfert sollicitée. La Pharmacie E... relève appel du jugement du 21 octobre 2020 par lequel le tribunal administratif de Limoges a annulé cet arrêté à la demande de Mme H... et de la Pharmacie Pierre Millet Lacombe.

Sur l'intervention de Me C..., commissaire à l'exécution du plan de redressement de la Pharmacie E... :

2. En sa qualité de commissaire à l'exécution du plan de redressement de la Pharmacie E..., Me C... a intérêt à l'annulation du jugement attaqué. Contrairement à ce que font valoir Mme H... et la SELARL Pharmacie Pierre Millet Lacombe, la circonstance que Me C... ait un intérêt identique à celui de la Pharmacie E... ne saurait être de nature à rendre son intervention irrecevable, une intervention ne pouvant être admise que si son auteur s'associe soit aux conclusions du requérant, soit à celles du défendeur. Par suite, la fin de

non-recevoir soulevée par Mme H... et la SELARL Pharmacie Pierre Millet Lacombe à l'encontre de l'intervention de Me C... doit être écartée.

Sur la recevabilité de la demande :

3. La Pharmacie E..., Me C... et l'ARS de Nouvelle Aquitaine soutiennent que c'est à tort que le tribunal administratif de Limoges a fait droit à la demande de Mme H... et de la pharmacie Pierre Millet Lacombe alors qu'ils étaient dépourvus d'intérêt pour demander l'annulation de l'arrêté du 29 juin 2018. Toutefois, les éléments produits au dossier par les demandeurs pour justifier de leur chiffre d'affaires depuis 2015, qui ne sont pas sérieusement contestés par l'ARS bien qu'ils fassent état de données en partie différentes de celles

qu'elle-même fournit, révèlent que l'activité tant de la Pharmacie H... que de la Pharmacie Pierre Millet Lacombe a évolué à la baisse pendant la période où la Pharmacie E... a effectivement exploité son officine sur le lieu de transfert, après autorisation de la ministre chargée de la santé par l'arrêté du 9 décembre 2014. En outre, quand bien même cette baisse d'activité pourrait s'expliquer par d'autres facteurs, il ressort des pièces du dossier que l'implantation de la Pharmacie E... à proximité immédiate du magasin Super U situé sur le territoire de la commune de Nexon a pour effet de rapprocher cette officine de celles exploitées par Mme H... et par la SELARL Pharmacie Pierre Millet Lacombe qui en seraient respectivement distantes de 6,7 et 12,5 kilomètres. Cette nouvelle localisation permettrait à la Pharmacie E..., dans un territoire rural, de bénéficier de la forte attractivité du centre commercial pour la population des territoires avoisinants, en particulier celle de la commune de La Meyze où est implantée la pharmacie exploitée par Mme H..., mais également, de la population habitant le long de l'axe de la route départementale n° 11 qui relie le Super U de la commune de La Meyze à la commune de Ladignac-le-Long où est implantée la Pharmacie Pierre Millet Lacombe. Dans ces conditions, tant l'activité de Mme H... que de la Pharmacie Pierre Millet Lacombe apparaissent susceptibles d'être concurrencées par la nouvelle localisation de la Pharmacie E.... Par suite, la fin de non-recevoir opposée par la Pharmacie E..., Me C... et l'ARS Nouvelle Aquitaine doit être écartée, ainsi que l'ont retenu les premiers juges.

Sur la légalité de l'arrêté du 29 juin 2018 :

4. Aux termes de l'article L. 5125-3 du code de la santé publique, dans sa version applicable en l'espèce au regard de la date du dépôt de la demande : " Les créations, les transferts et les regroupements d'officines de pharmacie doivent permettre de répondre de façon optimale aux besoins en médicaments de la population résidant dans les quartiers d'accueil de ces officines. Les transferts et les regroupements ne peuvent être accordés que s'ils n'ont pas pour effet de compromettre l'approvisionnement nécessaire en médicaments de la population résidente de la commune ou du quartier d'origine. (...) ".

5. Il résulte de ces dispositions que le transfert d'une officine pharmaceutique au sein de la même commune ne peut être autorisé que si la nouvelle implantation répond de façon optimale aux besoins de la population du quartier d'accueil. Pour l'application de ces dispositions, il appartient à l'autorité administrative d'apprécier les effets du transfert envisagé sur l'approvisionnement en médicaments du quartier, ainsi que, le cas échéant, des autres quartiers pour lesquels ce transfert est susceptible de modifier significativement l'approvisionnement en médicaments. La population résidente, au sens des mêmes dispositions, doit s'entendre, outre éventuellement de la population saisonnière, de la seule population domiciliée dans ces quartiers ou y ayant une résidence stable. L'administration peut tenir compte, pour apprécier cette population, des éventuels projets immobiliers en cours ou certains à la date de sa décision. En revanche, elle ne peut légalement prendre en compte la population de passage fréquentant, par exemple, un supermarché. Enfin, le caractère optimal de la réponse apportée par le projet de transfert ne saurait résulter du seul fait que ce projet apporte une amélioration relative de la desserte par rapport à la situation d'origine.

6. Pour rejeter l'appel formé par la Pharmacie E... et le ministre de la solidarité et de la santé contre le jugement n° 1500252 du 28 septembre 2017 par lequel le tribunal administratif de Limoges a annulé l'arrêté du 9 décembre 2014 autorisant le transfert de la Pharmacie E... à proximité du Super U de la commune de Nexon, la cour administrative d'appel de Bordeaux, par un arrêt du 8 février 2018 devenu définitif, s'est fondée sur les motifs tirés de ce que le tribunal administratif de Limoges avait à juste titre retenu que le quartier d'accueil de l'officine transférée devait être délimité abstraction faite du sud du bourg et du secteur n° 8 de la commune, qu'il ne pouvait être tenu compte de l'effet attractif du centre commercial qui est sans incidence sur la population résidente et que le transfert litigieux n'apportait pas une réponse optimale aux besoins de la population en médicaments.

7. L'autorité de chose jugée qui s'attache au dispositif d'une décision juridictionnelle d'annulation et aux motifs qui en sont le support nécessaire fait obstacle à ce que, à la suite de l'annulation d'une décision ayant accordé une autorisation et en l'absence de modification de la situation de droit ou de fait, la même demande fasse l'objet d'une nouvelle autorisation pour des motifs identiques à ceux qui ont été censurés par la décision juridictionnelle.

8. Il ressort des termes de l'arrêté litigieux du 29 juin 2018 que l'ARS

Nouvelle-Aquitaine a accordé à la Pharmacie E... l'autorisation de transfert sollicitée notamment au motif que ce nouvel emplacement améliorera de façon certaine la desserte en médicaments de la population de la zone d'implantation choisie ainsi que la desserte des communes limitrophes.

9. Si les requérants soutiennent que le nouvel emplacement de la pharmacie E... répond pleinement aux critères posés par les nouvelles dispositions de l'article L. 5125-3 du code de la santé publique issues de l'article premier de l'ordonnance du 3 janvier 2018 relative à l'adaptation des conditions de création, transfert, regroupement et cession des officines de pharmacie, en particulier que ce projet permet de répondre de façon optimale aux besoins en médicaments de la population du quartier d'accueil sans compromettre l'approvisionnement de la population du quartier d'origine, il ressort des termes de l'article 5 de cette ordonnance que ces nouvelles dispositions ne sont pas applicables en l'espèce, la demande de la pharmacie E... ayant été déclarée complète le 12 avril 2018, soit avant son entrée en vigueur. Dans ces conditions, aucune modification de la situation de droit n'est intervenue depuis l'arrêté du

9 décembre 2014.

10. D'autre part, il ressort des pièces du dossier que le projet de transfert pour lequel la Pharmacie E... a sollicité de l'ARS une nouvelle autorisation est identique à celui ayant été autorisé par l'arrêté du 9 décembre 2014 annulé par le jugement du tribunal administratif de Limoges du 28 septembre 2017, confirmé par la cour administrative d'appel de Bordeaux le

8 février 2018. Contrairement à ce que soutiennent la Pharmacie E..., Me C... et l'ARS, le besoin des populations des communes avoisinantes dépourvues de pharmacies et l'existence d'une population saisonnière en raison de l'existence d'un festival de cirque, dont il n'est ni établi ni même allégué qu'ils auraient connu une quelconque évolution depuis 2014, ne constituent pas une modification dans la situation de fait dès lors qu'il pouvait déjà en être fait état à l'occasion de l'instance contentieuse consacrée à l'arrêté du 9 décembre 2014. Par ailleurs, ainsi que l'a justement relevé le tribunal, la circonstance que le maire de la commune de Nexon ait délivré dix-sept permis de construire pour des maisons individuelles dans le secteur du lieu de transfert de la Pharmacie E... entre le 1er janvier 2015 et le 1er novembre 2019 ne saurait constituer une circonstance de fait nouvelle susceptible de permettre de se soustraire à l'autorité de la chose jugée compte tenu du caractère très limité du nombre de ces permis ainsi que de l'augmentation de la population qui pourrait en résulter et alors, en outre, que les pièces versées au dossier ne permettent pas d'établir combien de ces permis de construire avaient été délivrés à la date de l'arrêté litigieux, le 29 juin 2018 ni si leur délivrance était prévisible à cette date. Le classement " en agglomération " par une délibération du 5 avril 2018 du conseil municipal de la commune de Nexon de la portion de la route de La Meyze située en aval du centre commercial est sans incidence sur la délimitation des quartiers d'accueil et d'origine sur laquelle repose la solution de l'arrêt de la cour du 8 février 2018 et ne constitue, par suite, pas davantage une circonstance de fait nouvelle permettant de déroger à l'autorité de la chose jugée qui s'attache à cet arrêt. Enfin, la Pharmacie E..., Me C... et l'ARS ne sauraient utilement se prévaloir des données issues de l'activité de la Pharmacie E... sur l'emplacement envisagé pour le transfert entre le 30 novembre 2015 et le 26 octobre 2017 et de l'intérêt général qui s'attache à ce transfert, particulièrement en période de crise sanitaire, dès lors que de tels éléments sont dépourvus d'incidence sur l'appréciation devant être portée par l'administration pour l'application des dispositions précitées de l'article L. 5125-3 du code de la santé publique.

11. Il résulte de ce qui précède que c'est à bon droit que les premiers juges ont retenu que l'arrêté litigieux du 29 juin 2018 méconnaissait l'autorité de la chose jugée qui s'attache au jugement du tribunal administratif de Limoges du 28 septembre 2017 et à l'arrêt de la cour administrative d'appel de Bordeaux du 8 février 2018. Par suite, sans qu'il soit besoin d'examiner une nouvelle fois si le transfert sollicité par la Pharmacie E... remplit les conditions prévues par les dispositions de l'article L. 5125-3 du code de la santé publique, la Pharmacie E..., Me C... et l'ARS ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Limoges a annulé l'arrêté du 29 juin 2018 autorisant le transfert de la Pharmacie E....

Sur les frais exposés par les parties à l'occasion du litige :

12. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que les sommes que demandent la Pharmacie E... et Me C... soient mises à la charge de Mme H... et de la SELARL Pierre Millet Lacombe, qui ne sont pas les parties perdantes dans la présente instance. Il n'y a pas lieu, dans les circonstances particulières de l'espèce, de mettre à la charge de la Pharmacie E... la somme que demandent Mme H... et de la SELARL Pierre Millet Lacombe au même titre.

DÉCIDE :

Article 1er : L'intervention de Me C..., commissaire à l'exécution du plan de redressement de la Pharmacie E..., est admise.

Article 2 : La requête de la Pharmacie E... et les conclusions présentées par Me C... et l'ARS Nouvelle-Aquitaine sont rejetées.

Article 3 : Les conclusions présentées par Mme H... et la SELARL Pierre Millet Lacombe au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à la SARL Pharmacie E..., à Me I... C..., à Mme L... H..., à la SELARL Pharmacie Pierre Millet Lacombe et au ministre des solidarités et de la santé.

Copie en sera adressée à l'Agence régionale de Santé Nouvelle-Aquitaine.

Délibéré après l'audience du 6 avril 2021 à laquelle siégeaient :

Mme Brigitte Phémolant, présidente,

Mme Anne Meyer, présidente-assesseure,

Mme A... D..., conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe, le 4 mai 2021.

La présidente,

Brigitte Phémolant

La République mande et ordonne au ministre des solidarités et de la santé en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.

2

N° 20BX03756


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Bordeaux
Formation : 2ème chambre
Numéro d'arrêt : 20BX03756
Date de la décision : 04/05/2021
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

Actes législatifs et administratifs - Validité des actes administratifs - violation directe de la règle de droit - Chose jugée - Chose jugée par le juge administratif.

Procédure - Jugements - Chose jugée - Chose jugée par la juridiction administrative - Existence.

Professions - charges et offices - Conditions d'exercice des professions - Pharmaciens - Autorisation d'ouverture ou de transfert d'officine.


Composition du Tribunal
Président : Mme PHEMOLANT
Rapporteur ?: Mme Kolia GALLIER
Rapporteur public ?: Mme BEUVE-DUPUY
Avocat(s) : SCP CHRISTOPHE PEREIRE-NICOLAS CHAIGNEAU

Origine de la décision
Date de l'import : 11/05/2021
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.bordeaux;arret;2021-05-04;20bx03756 ?
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