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06/07/2021 | FRANCE | N°20BX03773

France | France, Cour administrative d'appel de Bordeaux, 1ère chambre, 06 juillet 2021, 20BX03773


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Le préfet de la Gironde a demandé au tribunal administratif de Bordeaux d'annuler l'arrêté du 15 avril 2019 par lequel le maire de Soulac-sur-Mer a accordé un permis de construire à M. B... C..., en vue de la construction d'une maison d'habitation et de l'édification de clôtures sur la parcelle cadastrée section BA n° 136 située 70G boulevard de l'Amélie, ainsi que la décision du 22 juillet 2019 par laquelle le maire a refusé de retirer cet arrêté.

Par un jugement n° 1904675 du 23 septembr

e 2020, le tribunal administratif de Bordeaux a annulé l'arrêté du 15 avril 2019 et l...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Le préfet de la Gironde a demandé au tribunal administratif de Bordeaux d'annuler l'arrêté du 15 avril 2019 par lequel le maire de Soulac-sur-Mer a accordé un permis de construire à M. B... C..., en vue de la construction d'une maison d'habitation et de l'édification de clôtures sur la parcelle cadastrée section BA n° 136 située 70G boulevard de l'Amélie, ainsi que la décision du 22 juillet 2019 par laquelle le maire a refusé de retirer cet arrêté.

Par un jugement n° 1904675 du 23 septembre 2020, le tribunal administratif de Bordeaux a annulé l'arrêté du 15 avril 2019 et la décision du 22 juillet 2019.

Procédure devant la cour :

I. Par une requête n° 20BX03773 enregistrée le 20 novembre 2020, la commune de Soulac-sur-Mer, représentée par le cabinet d'avocats D...-Cazcarra, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Bordeaux ;

2°) de rejeter le déféré du préfet de la Gironde ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat le versement de la somme de 1 500 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- le projet est conforme au principe d'extension de l'urbanisation en continuité avec les agglomérations et villages existants ;

- le secteur du terrain d'assiette du projet présente les caractéristiques d'un hameau nouveau intégré à l'environnement au sens de la loi Littoral ;

- le projet constitue une extension de l'urbanisation de faible ampleur autorisée par le plan local d'urbanisme.

Par un mémoire en défense enregistré le 29 avril 2021, le préfet de la Gironde conclut au rejet de la requête.

Il soutient que le projet, situé dans une zone d'urbanisation diffuse distincte des agglomérations et villages existants, ne répond pas aux conditions posées par l'article L. 121-8 du code de l'urbanisme alors même que le permis de construire serait conforme au plan local d'urbanisme qui lui-même serait conforme au schéma de cohérence territoriale.

II. Par une requête n° 20BX03807 et un mémoire, enregistrés les 23 novembre 2020 et 31 mai 2021, M. C..., représenté par Me E..., demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Bordeaux ;

2°) de rejeter le déféré du préfet de la Gironde ;

3°) de mettre à la charge de la préfecture de la Gironde la somme de 2 000 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- c'est à tort que les premiers juges ont considéré que le permis de construire n'était pas conforme aux dispositions de l'article L. 121-8 du code de l'urbanisme dès lors que son projet est une simple opération de construction conforme à ces dispositions ;

- le permis de construire est conforme au plan local d'urbanisme qui classe la parcelle en zone Uda ;

- le projet se situe dans une zone équipée en éclairage public, en réseau de distribution d'eau et en électricité ;

- son projet se situe en continuité d'une zone déjà urbanisée et n'a pas pour effet d'élargir le périmètre urbanisé du secteur mais de s'y intégrer.

Par un mémoire en défense enregistré le 29 avril 2021, le préfet de la Gironde conclut au rejet de la requête.

Il soutient que le projet se situe dans une zone d'urbanisation diffuse distincte des agglomérations et villages existants ; le permis de construire litigieux méconnait les dispositions de l'article L. 121-8 du code de l'urbanisme.

Vu les autres pièces des dossiers.

Vu :

- le code de l'urbanisme ;

- la loi n° 2018-1021 du 23 novembre 2018 ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme F... A... ;

- les conclusions de M. Romain Roussel, rapporteur public ;

- et les observations de Me D..., représentant la commune de Soulac-sur-Mer, et de Me E..., représentant M. C....

Considérant ce qui suit :

1. M. B... C... a déposé auprès de la mairie de Soulac-sur-Mer, le 17 janvier 2019, une demande de permis de construire en vue de la construction d'une maison individuelle de 103,46 m² de surface de plancher, sur la parcelle cadastrée section BA n° 136, située 70G boulevard de l'Amélie. Le maire de Soulac-sur-Mer a, par un arrêté du 15 avril 2019, délivré le permis de construire sollicité. Par une lettre du 19 juin 2019, le sous-préfet de Lesparre-Médoc a, dans le cadre du contrôle de légalité, formé un recours gracieux contre cette décision mais par un courrier du 22 juillet 2019, le maire de Soulac-Sur-Mer a refusé de retirer son arrêté. Par une requête n° 20BX03773, la commune de Soulac-sur-Mer relève appel du jugement du 23 septembre 2020 par lequel le tribunal administratif de Bordeaux a annulé le permis de construire du 15 avril 2019 ainsi que la décision du 22 juillet 2019. Par une requête n° 20BX03807, M. C... relève appel du même jugement. Ces requêtes sont relatives au même jugement et ont fait l'objet d'une instruction commune. Il y a lieu de les joindre pour statuer sur un seul arrêt.

2. Aux termes de l'article L. 121-1 du code de l'urbanisme : " Les dispositions du présent chapitre déterminent les conditions d'utilisation des espaces terrestres, maritimes et lacustres : 1° Dans les communes littorales définies à l'article L. 321-2 du code de l'environnement ; (...) ". L'article L. 121-3 du même code, dans sa version applicable en l'espèce, dispose : " Les dispositions du présent chapitre sont applicables à toute personne publique ou privée pour l'exécution de tous travaux, constructions, défrichements, plantations, aménagements, installations et travaux divers, la création de lotissements, l'ouverture de terrains de camping ou de stationnement de caravanes, l'établissement de clôtures, l'ouverture de carrières, la recherche et l'exploitation de minerais et les installations classées pour la protection de l'environnement. ". Aux termes de l'article L. 121-8 du code de l'urbanisme dans sa rédaction en vigueur à la date de la décision litigieuse : " L'extension de l'urbanisation se réalise en continuité avec les agglomérations et villages existants. / Dans les secteurs déjà urbanisés autres que les agglomérations et villages identifiés par le schéma de cohérence territoriale et délimités par le plan local d'urbanisme, des constructions et installations peuvent être autorisées, en dehors de la bande littorale de cent mètres, des espaces proches du rivage et des rives des plans d'eau mentionnés à l'article L. 121-13, à des fins exclusives d'amélioration de l'offre de logement ou d'hébergement et d'implantation de services publics, lorsque ces constructions et installations n'ont pas pour effet d'étendre le périmètre bâti existant ni de modifier de manière significative les caractéristiques de ce bâti. Ces secteurs déjà urbanisés se distinguent des espaces d'urbanisation diffuse par, entre autres, la densité de l'urbanisation, sa continuité, sa structuration par des voies de circulation et des réseaux d'accès aux services publics de distribution d'eau potable, d'électricité, d'assainissement et de collecte de déchets, ou la présence d'équipements ou de lieux collectifs (...) ". Aux termes de l'article 42 de la loi du 23 novembre 2018 portant évolution du logement, de l'aménagement et du numérique : " (...) III. Jusqu'au 31 décembre 2021, des constructions et installations qui n'ont pas pour effet d'étendre le périmètre du bâti existant, ni de modifier de manière significative les caractéristiques de ce bâti, peuvent être autorisées avec l'accord de l'autorité administrative compétente de l'Etat, après avis de la commission départementale de la nature des paysages et des sites, dans les secteurs mentionnés au deuxième alinéa de l'article L. 121-8 du code de l'urbanisme, dans sa rédaction résultant de la présente loi, mais non identifiés par le schéma de cohérence territoriale ou non délimités par le plan local d'urbanisme en l'absence de modification ou de révision de ces documents initiée postérieurement à la publication de la présente loi ".

3. Il résulte de ces dispositions que, dans les communes littorales, ne peuvent être autorisées que les constructions réalisées en continuité avec les agglomérations et villages existants, c'est-à-dire avec les zones déjà urbanisées caractérisées par un nombre et une densité significatifs de constructions ou, sous certaines conditions, au sein des secteurs déjà urbanisés autres que les agglomérations et villages identifiés par le schéma de cohérence territoriale et délimités par le plan local d'urbanisme, se distinguant des espaces d'urbanisation diffuse par, entre autres, la densité de l'urbanisation, sa continuité, sa structuration par des voies de circulation et des réseaux d'accès aux services publics de distribution d'eau potable, d'électricité, d'assainissement et de collecte de déchets, ou la présence d'équipements ou de lieux collectifs. En revanche, aucune construction ne peut être autorisée, même en continuité avec d'autres, dans les zones d'urbanisation diffuse éloignées de ces agglomérations et villages ou de ces secteurs déjà urbanisés.

4. Il ressort des pièces du dossier que le terrain d'assiette du projet est constitué par la parcelle cadastrée BA n° 136 située au 70G boulevard de l'Amélie sur le territoire de Soulac-sur-Mer, commune littorale au sens de l'article L. 321-2 du code de l'environnement. Ce secteur prend la forme d'un groupe d'une dizaine de maisons, distant de plus de deux kilomètres du centre-bourg de Soulac-sur-Mer et d'environ neuf-cents mètres du lieu-dit l'Amélie, au sein d'une zone forestière. L'urbanisation dans ce secteur n'est pas caractérisée par une densité significative des constructions, en raison tant du faible nombre de constructions à usage d'habitation qui s'y trouvent que des espaces vides de construction qui jouxtent la parcelle au Nord et à l'Est. La seule circonstance que le secteur est équipé en réseaux de voirie, d'éclairage public et d'assainissement des eaux usées et pluviales n'est pas de nature à qualifier ce secteur d'espace urbanisé. Dans ces conditions, le projet envisagé, qui est situé dans une zone d'urbanisation diffuse, constitue une extension de l'urbanisation qui ne s'inscrit pas en continuité avec une agglomération ou un village existant, ni dans un secteur déjà urbanisé au sens des dispositions citées ci-dessus de l'article L. 121-8 du code de l'urbanisme issues de la loi du 23 novembre 2018. Par suite, ainsi que l'ont estimé à bon droit les premiers juges, le maire de Soulac-sur-Mer ne pouvait, sans méconnaître ces dispositions, délivrer le permis de construire sollicité alors même que la parcelle est située en zone UD, d'urbanisation diffuse, du plan local d'urbanisme de la commune et qu'elle serait incluse dans un secteur défini comme constituant un espace urbanisé par le schéma de cohérence territoriale de la Pointe du Médoc.

5. Il résulte de tout ce qui précède que la commune de Soulac-sur-Mer n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Bordeaux a annulé, à la demande du préfet de la Gironde, l'arrêté du maire du 15 avril 2019 accordant un permis de construire à M. C..., ainsi que la décision du 22 juillet 2019 par laquelle le maire a refusé de retirer cet arrêté.

6. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mis à la charge de l'Etat, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, le versement de la somme sollicitée par la commune de Soulac-sur-Mer et par M. C....

DECIDE :

Article 1er : La requête 20BX03773 présentée par la commune de Soulac-sur-Mer et la requête 20BX03807 présentée par M. C... sont rejetées.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié au ministre de la cohésion des territoires et des relations avec les collectivités territoriales, à la commune de Soulac-sur-Mer et à M. B... C....

Copie en sera transmise au préfet de la Gironde.

Délibéré après l'audience du 10 juin 2021 à laquelle siégeaient :

Mme Marianne Hardy, présidente,

M. Didier Salvi, président-assesseur,

Mme F... A..., première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 6 juillet 2021.

La rapporteure,

Nathalie A...La présidente,

Marianne Hardy

La greffière,

Sophie Lecarpentier

La République mande et ordonne au ministre de la cohésion des territoires et des relations avec les collectivités territoriales en ce qui le concerne et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun, contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.

N° 20BX03773, 20BX03807 2


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Bordeaux
Formation : 1ère chambre
Numéro d'arrêt : 20BX03773
Date de la décision : 06/07/2021
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

68-001-01-02-03 Urbanisme et aménagement du territoire. Règles générales d'utilisation du sol. Règles générales de l'urbanisme. Prescriptions d'aménagement et d'urbanisme. Régime issu de la loi du 3 janvier 1986 sur le littoral.


Composition du Tribunal
Président : Mme HARDY
Rapporteur ?: Mme Nathalie GAY
Rapporteur public ?: M. ROUSSEL
Avocat(s) : SCP NOYER - CAZCARRA;SCP NOYER - CAZCARRA;SCP NOYER - CAZCARRA

Origine de la décision
Date de l'import : 20/07/2021
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.bordeaux;arret;2021-07-06;20bx03773 ?
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