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27/09/2021 | FRANCE | N°21BX01921

France | France, Cour administrative d'appel de Bordeaux, 3ème chambre, 27 septembre 2021, 21BX01921


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B... A... a demandé au tribunal administratif de Toulouse d'annuler l'arrêté du 13 janvier 2021 par lequel le préfet de la Haute-Garonne lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et fixé le pays de renvoi.

Par un jugement n° 2100715 du 23 mars 2021, la magistrate désignée du tribunal administratif a annulé l'arrêté du 13 janvier 2021.

Procédure devant la cour :

I - Par une requête enregistrée sous le n° 21BX01921 le 23 avril 2021 e

t un mémoire du 11 mai 2021, le préfet de la Haute-Garonne demande à la cour d'annuler ce jugemen...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B... A... a demandé au tribunal administratif de Toulouse d'annuler l'arrêté du 13 janvier 2021 par lequel le préfet de la Haute-Garonne lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et fixé le pays de renvoi.

Par un jugement n° 2100715 du 23 mars 2021, la magistrate désignée du tribunal administratif a annulé l'arrêté du 13 janvier 2021.

Procédure devant la cour :

I - Par une requête enregistrée sous le n° 21BX01921 le 23 avril 2021 et un mémoire du 11 mai 2021, le préfet de la Haute-Garonne demande à la cour d'annuler ce jugement n° 2100715 de la magistrate désignée du tribunal.

Il soutient que c'est à tort que la magistrate désignée a annulé son arrêté au motif qu'il n'était pas établi que l'ordonnance de la Cour nationale du droit d'asile rejetant la demande d'asile de M. A... avait été notifiée à ce dernier avant la mesure d'éloignement en litige ; la cour a rejeté la demande d'asile non par ordonnance mais par une décision lue en audience publique le 31 décembre 2020 ; dans ce cas, l'article L. 743-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile prévoit que l'étranger a le droit de demeurer sur le territoire français jusqu'au jour de la lecture de la décision de la cour ; la mesure d'éloignement en litige a été prise après cette décision ; elle est donc légalement intervenue.

II - Par une requête enregistrée sous le n° 21BX01922 le 23 avril 2021, le préfet de la Haute-Garonne demande à la cour de surseoir à l'exécution du jugement n° 2100715 de la magistrate désignée du tribunal.

Il soutient que les conditions prévues à l'article R. 811-15 du code de justice administrative, pour qu'il soit sursis à l'exécution du jugement, sont remplies.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le rapport de M. Frédéric Faïck a été entendu au cours de l'audience publique.

Considérant ce qui suit :

1. Bouyagui A... est un ressortissant malien né le 30 janvier 1998 qui est entré sur le territoire français en octobre 2018 pour y déposer une demande d'asile. Celle-ci a été rejetée par une décision de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides (OFPRA) du 11 octobre 2019 confirmée le 31 décembre 2020 par la Cour nationale du droit d'asile (CNDA). Après quoi, le préfet a pris à l'encontre de M. A... un arrêté du 13 janvier 2021 portant obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et fixation du pays de renvoi. A la demande de M. A..., la magistrate désignée du tribunal administratif de Toulouse a annulé cet arrêté du 13 janvier 2021 par un jugement rendu le 23 mars 2021. Par deux requêtes enregistrées respectivement sous les n° 21BX01921 et 21BX01922, le préfet de la Haute-Garonne demande à la cour d'annuler ce jugement et de surseoir à son exécution.

Sur la requête n° 21BX01921 :

En ce qui concerne le bien-fondé du motif d'annulation retenu par le premier juge :

2. Aux termes de l'article L. 743-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Le demandeur d'asile (...) qui a introduit sa demande auprès de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides bénéficie du droit de se maintenir sur le territoire français jusqu'à la notification de la décision de l'office ou, si un recours a été formé (...) contre une décision de rejet de l'office, soit jusqu'à la date de la lecture en audience publique de la décision de la Cour nationale du droit d'asile, soit, s'il est statué par ordonnance, jusqu'à la date de la notification de celle-ci. (...) ". Aux termes de l'article R. 733-31 du même code : " Les décisions de la cour sont lues en audience publique (...) ". Aux termes de l'article R. 733-32 de ce code : " Le secrétaire général de la cour notifie la décision de la cour au requérant par lettre recommandée avec demande d'avis de réception (...) ".

3. Il résulte de ces dispositions que le demandeur d'asile qui forme un recours devant la CNDA contre la décision de l'OFPRA rejetant sa demande a le droit de se maintenir sur le territoire français jusqu'à la date de lecture en audience publique de la décision de la Cour ou, si celle-ci statue par ordonnance, jusqu'à ce qu'il ait reçu notification de celle-ci par lettre recommandée avec demande d'avis de réception.

4. Il ressort des pièces du dossier d'appel que, contrairement à ce qu'a jugé le magistrat désigné, la CNDA a rejeté la demande de M. A... non par ordonnance mais par une décision lue en audience publique le 31 décembre 2020. Par suite, c'est à tort que la magistrate désignée du tribunal a jugé que, faute pour le préfet d'établir que l'ordonnance de la CNDA avait été notifiée à M. A... avant l'édiction de la mesure d'éloignement en litige, celle-ci avait méconnu les dispositions précitées de l'article L. 743-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.

5. Il y a lieu pour la cour, saisie du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens soulevés en première instance par M. A....

En ce qui concerne la légalité de l'obligation de quitter le territoire français :

6. Il ressort des dispositions de l'arrêté n° 31-2019-12-17-001 du 17 décembre 2019, régulièrement publié au recueil des actes administratifs spécial n° 31-2019-329 du même jour, que la Directrice des Migrations et de l'Intégration de la préfecture de la Haute-Garonne s'est vue délivrer, par le préfet du département, une délégation de signature à l'effet de signer les décisions d'éloignement des étrangers en situation irrégulière. Par suite, le moyen tiré de l'incompétence de la signataire de l'acte doit être écarté.

7. En deuxième lieu, il ressort des motifs de la décision contestée que le préfet a retracé les conditions d'entrée et de séjour en France de M. A..., rappelé que sa demande d'asile a été rejetée par l'OFPRA puis par la CNDA avant de conclure qu'il ne disposait plus du droit de séjourner en France en application de l'article L. 743-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Le préfet a relevé que M. A... est célibataire sans charge de famille, que ses liens avec la France sont dépourvus de caractère ancien, intense et stable en raison du fait qu'il a vécu dans son pays d'origine jusqu'à l'âge de 20 ans. Le préfet a encore relevé que M. A... n'établissait pas être exposé à des peines ou à des traitements contraires à l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales en cas de retour dans son pays d'origine. Ce faisant, le préfet a suffisamment motivé la décision en litige.

8. En troisième lieu, il ressort de la motivation de sa décision que le préfet a procédé à un examen circonstancié de la situation personnelle de M. A....

9. En quatrième lieu, les motifs de la décision contestée montrent que le préfet a exercé son pouvoir d'appréciation avant de décider d'éloigner M. A... sans s'estimer lié, au prix d'une erreur de droit, par les décisions de l'OFPRA et de la CNDA rejetant la demande d'asile de l'intéressé.

10. En cinquième lieu, M A... n'apporte aucun élément suffisamment circonstancié qui permettrait de faire regarder la décision en litige comme entachée d'une erreur manifeste dans l'appréciation de ses conséquences sur sa situation personnelle.

En ce qui concerne la décision fixant le pays de renvoi :

11. En premier lieu, il résulte de la motivation de la décision contestée que le préfet a procédé à un examen circonstancié de la situation de M. A... avant de fixer le pays de renvoi.

12. En deuxième lieu, les motifs de la décision révèlent que le préfet ne s'est pas abstenu d'exercer son pouvoir d'appréciation avant de fixer le pays de renvoi.

13. En troisième lieu, M. A... allègue qu'un retour dans son pays d'origine l'exposerait à des peines ou à des traitements contraires à l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales en raison de son appartenance à la caste des esclaves de la région de Kayes au Mali. Il ne produit cependant aucun élément en ce sens alors au demeurant que sa demande d'asile a été rejetée tant par l'OFPRA que par la CNDA. Par suite, le moyen tiré de la méconnaissance de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales doit être écarté.

14. Il résulte de tout ce qui précède que le préfet de la Haute-Garonne est fondé que c'est à tort que, par le jugement attaqué, la magistrate désignée du tribunal administratif de Toulouse a annulé son arrêté du 13 janvier 2021. Ce jugement doit, dès lors, être annulé et la demande de première instance présentée par M. A... doit être rejetée.

Sur la requête n° 21BX01922 :

15. Le présent arrêt statuant au fond sur les conclusions du préfet de la Haute-Garonne, sa requête aux fins de sursis à exécution est devenue sans objet.

DECIDE

Article 1er : Il n'y a pas lieu de statuer sur les conclusions de la requête n° 21BX01922 tendant à ce qu'il soit sursis à exécution du jugement n° 2100715 du 23 mars 2021 du magistrat désigné du tribunal administratif de Toulouse.

Article 2 : Le jugement n° 2100715 du 23 mars 2021 de la magistrate désignée du tribunal administratif de Toulouse est annulé.

Article 3 : La demande de première instance présentée par M. A... est rejetée.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... A... et au ministre de l'intérieur. Copie pour information en sera délivrée au préfet de la Haute-Garonne.

Délibéré après l'audience du 30 août 2021 à laquelle siégeaient :

M. Didier Artus, président,

M. Frédéric Faïck, président-assesseur,

M. Manuel Bourgeois, premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 27 septembre 2021.

Le rapporteur,

Frédéric Faïck

Le président,

Didier Artus

La greffière,

Sylvie Hayet

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.

N° 21BX01921 , 21BX01922 4


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Bordeaux
Formation : 3ème chambre
Numéro d'arrêt : 21BX01921
Date de la décision : 27/09/2021
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-03 Étrangers. - Obligation de quitter le territoire français (OQTF) et reconduite à la frontière.


Composition du Tribunal
Président : M. ARTUS
Rapporteur ?: M. Frédéric FAÏCK
Rapporteur public ?: Mme MOLINA-ANDREO
Avocat(s) : TOUBOUL

Origine de la décision
Date de l'import : 05/10/2021
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.bordeaux;arret;2021-09-27;21bx01921 ?
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