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02/11/2021 | FRANCE | N°19BX00560

France | France, Cour administrative d'appel de Bordeaux, 3ème chambre, 02 novembre 2021, 19BX00560


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme B... Renaudin a demandé au tribunal administratif de La Réunion d'annuler l'arrêté du 3 juillet 2013 par lequel la ministre des affaires sociales et de la santé a prononcé à son encontre une sanction d'exclusion temporaire de deux ans et d'annuler l'arrêté du 15 juillet 2014 par lequel la ministre a prononcé à son encontre la sanction de révocation.

Par un jugement n° 1300973, 1400904 du 17 décembre 2018, le tribunal a rejeté ses demandes.

Procédure devant la cour :

Par une

requête enregistrée le 15 février 2019, Mme B... Renaudin, représentée par Me Bourdon, demande à...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme B... Renaudin a demandé au tribunal administratif de La Réunion d'annuler l'arrêté du 3 juillet 2013 par lequel la ministre des affaires sociales et de la santé a prononcé à son encontre une sanction d'exclusion temporaire de deux ans et d'annuler l'arrêté du 15 juillet 2014 par lequel la ministre a prononcé à son encontre la sanction de révocation.

Par un jugement n° 1300973, 1400904 du 17 décembre 2018, le tribunal a rejeté ses demandes.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 15 février 2019, Mme B... Renaudin, représentée par Me Bourdon, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement n° 1300973, 1400904 du tribunal ;

2°) d'annuler les sanctions en litige du 3 juillet 2013 et du 15 juillet 2014 ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient, en ce qui concerne la légalité de la sanction du 3 juillet 2013, que :

- cette sanction a été prise à l'issue d'une procédure qui n'a pas respecté le principe des droits de la défense ; ainsi, elle n'a pas reçu communication de la lettre du 29 janvier 2013 portant engagement de la procédure disciplinaire ni des documents relatifs à l'octroi des primes ni des comptes rendu d'entretien mentionnés dans le rapport d'enquête ni des documents relatifs aux faits de harcèlements qui lui ont été reprochés ni enfin des documents visés dans la sanction en litige ;

- la sanction repose sur des faits non établis et est entachée d'erreur d'appréciation ; l'administration aurait dû tenir compte des problèmes structurels existant au sein de la DEAL, qui n'étaient aucunement imputables à Mme Renaudin, tels que le tribunal correctionnel les avait relevés dans son jugement ; elle n'exerçait aucun contrôle sur l'octroi des primes et autres avantages au sein de la DEAL, mission qui relevait de la compétence du service financier des ressources humaines sur lequel elle n'avait aucun pouvoir ; elle n'a pas fait un usage indu des billets d'avion comme l'a relevé le tribunal administratif ; elle a été relaxée par le tribunal correctionnel de l'accusation de harcèlement moral à l'encontre des agents placés sous son autorité.

Elle soutient, en ce qui concerne la légalité de la sanction du 15 juillet 2014, que :

- il n'est pas établi que le conseil de discipline ait été régulièrement composé ;

- la sanction méconnait le principe de la présomption d'innocence dès lors qu'il lui est reproché d'avoir produit en mai 2013 devant le Défenseur des droits un document soi-disant falsifié alors qu'une instance pénale était en cours sur cette question et qu'aucune décision de condamnation n'était intervenue ; à cet égard, elle a été relaxée par le tribunal correctionnel au bénéfice du doute ;

- la sanction est disproportionnée car il est établi que le directeur adjoint de la DEAL de Mayotte ayant affirmé n'avoir jamais signé l'attestation du 16 juillet 2012, relative à l'octroi des primes et n'avoir pas eu connaissance du courrier du 2 août 2012, a menti.

Par un mémoire en défense, enregistré le 23 mars 2021, le ministre des solidarités et de la santé conclut au rejet de la requête.

Il soutient que tous les moyens de la requête doivent être écartés comme infondés.

Vu :

- les autres pièces du dossier ;

Vu :

- la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 ;

- la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984 ;

- le décret n° 82-451 du 28 mai 1982 ;

- le décret n° 84-961 du 25 octobre 1984 ;

- le décret n° 96-1028 du 27 novembre 1996 ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Frédéric Faïck,

- les conclusions de Mme Isabelle Le Bris, rapporteure publique,

Considérant ce qui suit :

1. Par un arrêté du 3 septembre 2009, le ministre du travail, des relations sociales, de la famille, A... la solidarité et de la ville et le ministre de la santé et des sports ont placé à sa demande Mme Renaudin, alors inspectrice principale de l'action sanitaire et sociale, en position normale d'activité auprès du ministère de l'écologie, de l'énergie, du développement durable et de la mer pour exercer à compter du 1er octobre 2009 les fonctions de secrétaire générale de la direction de l'environnement, de l'aménagement et du logement (DEAL) à Mayotte.

2. Fin 2011, la trésorerie générale a refusé de procéder au paiement d'une prime de 7 000 euros au profit de Mme Renaudin puis lancé un contrôle des primes et indemnités dont cette dernière avait bénéficié au cours des deux années précédentes. A la suite de ce contrôle, la trésorerie a évalué à 74 142,68 euros le trop-perçu de primes et indemnités servies à Mme Renaudin. Par ailleurs, en juin 2012, Mme Renaudin a été nommément mise en cause dans plusieurs articles de la presse locale relatant ses méthodes de management ainsi que sa gestion des rémunérations au sein du secrétariat général de la DEAL de Mayotte. Une visite de la mission d'inspection territoriale d'outre-mer, effectuée à titre périodique du 25 au 29 juin 2012, a ainsi relevé une " profonde dégradation du climat interne " au sein de la DEAL " face à des accusations portées sur la place publique et mêlant primes, voyages et remboursements de frais de déplacements et mettant en cause nominativement sa secrétaire générale ". A la demande du coordinateur de l'inspection territoriale d'outre-mer, le secrétaire général du ministère de l'écologie a confié au conseil général de l'environnement et du développement durable (CGEDD), en juillet 2012, une enquête administrative portant sur le fonctionnement de la DEAL de Mayotte et en particulier sur la gestion des rémunérations et autres frais de fonctionnement ainsi que sur les modalités de mise en œuvre de la chaîne de contrôle hiérarchique au sein de la structure.

3. Sans attendre les résultats de l'enquête, Mme Renaudin a adressé le 31 juillet 2012 une lettre au président de l'université de La Réunion présentant sa candidature au poste de chargé de mission auprès du directeur général des services de cette université puis à son ministère une demande de détachement du 17 septembre 2012. Ses demandes ont été acceptées et par un arrêté du 2 octobre 2012, la ministre des affaires sociales et de la santé, le ministre du travail et le ministre des sports et de la jeunesse ont, à compter du 10 octobre 2012, mis fin à la position d'activité de Mme Renaudin auprès du ministère de l'écologie, réintégré celle-ci dans son corps d'origine avant de la placer en position de détachement dans le corps des attachés de l'éducation nationale comme chargée de mission auprès du directeur général des services de l'université de La Réunion.

4. L'enquête administrative menée par le CGEDD a abouti, en novembre 2012, à un rapport préconisant qu'une procédure disciplinaire voire pénale soient mises en œuvre à l'encontre de Mme Renaudin. Une procédure disciplinaire a ainsi été engagée par une lettre ministérielle du 29 janvier 2013 et abouti, après consultation du conseil de discipline qui a rendu un avis du 25 juin 2013, à un arrêté du ministre des affaires sociales et de la santé, du ministre du travail et de l'emploi et du ministre des sports et de la jeunesse du 3 juillet 2013 prononçant à l'encontre de Mme Renaudin la sanction d'exclusion temporaire des fonctions d'une durée de deux ans.

5. A la suite de nouveaux faits portés à leur connaissance, et selon lesquels Mme Renaudin aurait élaboré et utilisé des documents falsifiés en vue d'obtenir le versement d'une indemnité d'éloignement, les ministres compétents ont engagé une nouvelle procédure disciplinaire le 23 décembre 2013. Cette seconde procédure a abouti, après avis du conseil de discipline du 2 juillet 2014, à un arrêté ministériel du 15 juillet 2014 prononçant la révocation de Mme Renaudin.

6. Mme Renaudin a saisi le tribunal administratif de La Réunion de deux requêtes tendant à l'annulation des sanctions du 3 juillet 2013 et du 15 juillet 2014. Elle relève appel du jugement rendu le 17 décembre 2018 par lequel le tribunal, après avoir joint ces deux requêtes, les a rejetées.

Sur la légalité de la sanction d'exclusion temporaire des fonctions de deux ans :

7. Aux termes de l'article 19 de la loi du 13 juillet 1983 : " Le pouvoir disciplinaire appartient à l'autorité investie du pouvoir de nomination. (...) Le fonctionnaire à l'encontre duquel une procédure disciplinaire est engagée a droit à la communication de l'intégralité de son dossier individuel et de tous les documents annexes et à l'assistance de défenseurs de son choix. L'administration doit informer le fonctionnaire de son droit à communication du dossier. (...) ".

8. Lorsqu'une enquête administrative a été diligentée sur le comportement d'un agent public ou porte sur des faits qui, s'ils sont établis, sont susceptibles de recevoir une qualification disciplinaire, le rapport établi à l'issue de cette enquête, y compris lorsqu'elle a été confiée à des corps d'inspection, ainsi que, lorsqu'ils existent, les procès-verbaux des auditions des personnes entendues sur le comportement de l'agent faisant l'objet de l'enquête font partie des pièces dont ce dernier doit recevoir communication en application de l'article 19 de la loi du 13 juillet 1983.

9. Il est constant que la décision d'engager une procédure disciplinaire à l'encontre de Mme Renaudin, laquelle a conduit au prononcé de la sanction d'exclusion temporaire des fonctions des fonctions de deux ans, a été prise au vu d'un rapport du CGEDD remis en novembre 2012.

10. Il ressort des pièces du dossier que les auditions des agents de la DEAL de Mayotte auxquelles les inspecteurs du CGEDD ont procédé durant l'enquête administrative ont donné lieu à de nombreux procès-verbaux cosignés et comportant, le cas échéant, les observations de ces agents sur le compte-rendu de leur entretien. Il ressort également des pièces du dossier que si Mme Renaudin a été destinataire avant la réunion du conseil de discipline du rapport d'enquête établi par le CGEDD et du rapport de saisine du conseil de discipline, les procès-verbaux des entretiens, qui ne figuraient pas dans les pièces annexées au rapport d'enquête, ne lui pas été communiqués. La circonstance que le rapport d'enquête comportait certains extraits, nécessairement partiels, des entretiens réalisés par les enquêteurs est sans incidence sur l'obligation qui pèse sur l'administration en application de la règle rappelée au point 8 ci-dessus. Ainsi, Mme Renaudin, qui n'a pas reçu communication des nombreux procès-verbaux d'auditions qu'elle était en droit d'obtenir en application de l'article 19 de la loi du 13 juillet 1983 et a ainsi été privée d'une des garanties de la procédure disciplinaire, est fondée à soutenir que la sanction qui lui a été infligée a été prise au terme d'une procédure irrégulière. Par suite, c'est à tort que le tribunal administratif de La Réunion a rejeté les conclusions à fin d'annulation présentées par Mme Renaudin à l'encontre de la sanction en litige.

11. Dès lors, le jugement attaqué doit être annulé ainsi que l'arrêté du 3 juillet 2013 prononçant à l'encontre de Mme Renaudin la sanction d'exclusion temporaire des fonctions d'une durée de deux ans sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens soulevés à l'encontre de cette dernière décision.

Sur la légalité de la sanction de révocation :

En ce qui concerne la légalité externe :

12. Aux termes de l'article 14 de la loi du 11 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique de l'Etat : " Dans chaque corps de fonctionnaires existent une ou plusieurs commissions administratives paritaires comprenant, en nombre égal, des représentants de l'administration et des représentants du personnel. (...) ". Aux termes de l'article 5 du décret du 28 mai 1982 relatif aux commissions administratives paritaires, ces commissions " comprennent en nombre égal des représentants de l'administration et des représentants du personnel. Elles ont des membres titulaires et un nombre égal de membres suppléants. ". Aux termes de l'article 34 du même décret : " Les commissions administratives siègent en formation restreinte lorsqu'elles sont saisies de questions résultant de l'application des articles (...) 67 (...) de la loi du 11 janvier 1984 (...). ". Aux termes de l'article 35 de ce décret : " Lorsque les commissions administratives paritaires siègent en formation restreinte, seuls les membres titulaires et, éventuellement, leurs suppléants représentant le grade auquel appartient le fonctionnaire intéressé et les membres titulaires ou suppléants représentant le grade immédiatement supérieur ainsi qu'un nombre égal de représentants de l'administration sont appelés à délibérer. ".

13. Alors qu'il ne ressort pas des pièces du dossier que Mme Renaudin ait demandé à l'administration de lui communiquer le procès-verbal de la réunion du conseil de discipline, elle n'est pas fondée à contester la régularité de la procédure suivie du seul fait qu'elle n'a pas été destinataire à cette pièce, ce qui ne lui aurait pas permis selon elle de vérifier la régularité de la composition du conseil de discipline et les modalités de déroulement des débats devant cette instance. Dans ces circonstances, et alors qu'aucune pièce du dossier soumis à la cour ne permet de douter de la régularité de la procédure suivie, le moyen soulevé doit être écarté.

En ce qui concerne la légalité interne :

14. Aux termes de l'article 66 de la loi du 11 janvier 1984 : " Les sanctions disciplinaires sont réparties en quatre groupes. (...) Troisième groupe : - la rétrogradation au grade immédiatement inférieur et à l'échelon correspondant à un indice égal ou, à défaut, immédiatement inférieur à celui afférent à l'échelon détenu par l'agent ; - l'exclusion temporaire de fonctions pour une durée de seize jours à deux ans. Quatrième groupe : - la mise à la retraite d'office ; - la révocation. ".

15. Il appartient au juge de l'excès de pouvoir, saisi de moyens en ce sens, de rechercher si les faits reprochés à un agent public ayant fait l'objet d'une sanction disciplinaire constituent des fautes de nature à justifier une sanction si la sanction retenue est proportionnée à la gravité de ces fautes.

16. Pour prononcer la sanction en litige, l'administration a retenu que Mme Renaudin a produit et usé des documents falsifiés reconnaissant son droit au versement de la seconde fraction de l'indemnité d'éloignement prévue par le décret n° 96-1028 du 27 novembre 1996 au titre de la prolongation de son séjour à Mayotte.

17. Il ressort des pièces du dossier que Mme Renaudin s'est prévalue à l'appui d'une action en référé-provision engagée le 7 février 2013 devant le tribunal administratif et au soutien de sa demande de versement de l'indemnité adressée au ministère de l'écologie le 13 mai 2013, d'une attestation datée du 16 juillet 2012 reconnaissant son droit à percevoir la totalité de l'indemnité d'éloignement. De plus, Mme Renaudin, à l'occasion des démarches qu'elle a engagées auprès du Défenseur des droits le 24 mai 2013, s'est de nouveau prévalue de cette attestation du 16 juillet 2012 ainsi que d'un autre courrier daté du 2 août 2012 censé établir son droit à percevoir l'indemnité.

18. Il ressort des pièces du dossier que le document daté du 16 juillet 2012 est ainsi rédigé : " Attestation. Je soussigné, P...M...directeur adjoint de la DEAL Mayotte atteste que Mme Renaudin, secrétaire générale au sein de la DEAL, doit bénéficier...de son indemnité d'éloignement dont le montant s'élève à 36 000 euros. Cette attestation est faite pour servir et valoir ce que de droit ". Ce document porte le nom et le prénom du directeur adjoint de la DEAL de Mayotte, un tampon de cet organisme et une signature manuscrite. Dans un courrier qu'il a adressé au ministère le 25 juillet 2013, le directeur adjoint de la DEAL a contesté l'authenticité du document produit et confirmé n'avoir jamais eu connaissance ni signé l'attestation du 16 juillet 2012. De plus, comme l'ont relevé les premiers juges, les termes employés dans l'attestation apparaissent peu rigoureux en ce qu'ils se bornent à affirmer un droit à l'indemnité d'éloignement sans précision factuelle ni référence à un texte précis et évoquent une somme arrondie à 36 000 euros dépourvue de toute explication sur ses modalités de calcul. Enfin, la signature figurant sur l'attestation du 16 juillet 2012 diffère de celle que le directeur adjoint de la DEAL a apposée sur son courrier au ministère du 25 juillet 2013. Au regard de ces éléments, le document dont s'est prévalue Mme Renaudin doit être regardé comme le résultat d'une falsification dont l'existence ne pouvait être ignorée par Mme Renaudin compte tenu des responsabilités qui étaient les siennes à la DEAL de Mayotte.

19. Quant au courrier du 2 août 2012 dont s'est également prévalue Mme Renaudin, et que celle-ci a reconnu avoir rédigé, s'il contient des références factuelles et juridiques plus précises relativement à son droit allégué à percevoir l'indemnité d'éloignement, il ne comporte aucune signature mais seulement le nom et le prénom du directeur adjoint de la DEAL de Mayotte, lequel a certifié dans son courrier précité du 25 juillet 2013 n'avoir jamais eu connaissance de cette lettre du 2 août 2012. Il ne ressort aucunement des pièces du dossier que le directeur-adjoint de la DEAL de Mayotte aurait en réalité, contrairement à ce qu'il a affirmé dans son courrier du 25 juillet 2013, agréé le contenu du document que Mme Renaudin a utilisé.

20. Il résulte des considérations qui précèdent que Mme Renaudin a élaboré et utilisé à des fins pécuniaires des documents falsifiés à l'appui de démarches qu'elle a engagées aussi bien devant le tribunal administratif qu'auprès de l'administration et du Défenseur des droits. Une telle attitude de la part d'un agent chargé de fonctions de direction et d'encadrement révèle un manquement particulièrement grave aux obligations d'intégrité et de probité qui s'imposent et caractérisent l'existence d'une faute de nature à justifier l'infliction d'une sanction disciplinaire. Ces faits attentatoires aux exigences de la déontologie professionnelle et qui ont porté atteinte à la réputation de la structure au sein de laquelle Mme Renaudin exerçait des fonctions d'encadrement, justifiaient légalement la sanction de révocation prononcée par l'autorité administrative.

21. Par ailleurs, la procédure disciplinaire est indépendante de la procédure pénale. Dans l'hypothèse où c'est à raison des mêmes faits que sont engagées parallèlement les deux procédures, l'autorité investie du pouvoir disciplinaire ne méconnaît pas le principe de la présomption d'innocence en prononçant une sanction sans attendre que les juridictions répressives aient définitivement statué. Par suite, l'administration n'a pas commis d'illégalité en prenant la sanction en litige alors que le tribunal correctionnel de Mamoudzou n'avait pas encore rendu sa décision sur les poursuites pénales engagées contre Mme Renaudin à raison des faits litigieux. Au demeurant, il ressort des pièces du dossier que le tribunal correctionnel a déclaré Mme Renaudin coupable d'infraction de faux et usage de faux pour avoir rédigé et utilisé la lettre précitée du 2 août 2012 dans sa décision du 25 novembre 2018 condamnant l'intéressée à une peine de 3 mois d'emprisonnement avec sursis et à une amende de 8 000 euros dont 4 000 euros avec sursis.

22. Il résulte de ce qui précède que Mme Renaudin n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de La Réunion a rejeté ses conclusions à fin d'annulation de la sanction de révocation prononcée le 15 juillet 2014.

Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

23. Il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire application de ces dispositions en mettant à la charge de l'Etat, qui n'est pas la partie principalement perdante à l'instance, la somme que demande Mme Renaudin au titre des frais non compris dans les dépens qu'elle a exposés.

DECIDE

Article 1er : Le jugement n° 1300973, 1400904 du tribunal administratif de La Réunion du 17 décembre 2018, en tant qu'il a rejeté les conclusions à fin d'annulation de l'arrêté du 3 juillet 2013 prononçant à l'encontre de Mme Renaudin une exclusion temporaire des fonctions d'une durée de deux ans, et l'arrêté du 3 juillet 2013 sont annulés.

Article 2 : Le surplus des conclusions de Mme Renaudin est rejeté.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à Mme B... Renaudin, au ministre des solidarités et de la santé et à la ministre de la transition écologique.

Délibéré après l'audience du 27 septembre 2021 à laquelle siégeaient :

M. Didier Artus, président,

M. Frédéric Faïck, président-assesseur,

M. Manuel Bourgeois, premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 2 novembre 2021.

Le rapporteur,

Frédéric Faïck

Le président,

Didier Artus

La greffière,

Sylvie Hayet

La République mande et ordonne au ministre des solidarités et de la santé et à la ministre de la transition écologique, chacun en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.

N° 19BX00560 - 4 -


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Bordeaux
Formation : 3ème chambre
Numéro d'arrêt : 19BX00560
Date de la décision : 02/11/2021
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

Fonctionnaires et agents publics - Discipline.

Fonctionnaires et agents publics - Discipline - Sanctions.

Fonctionnaires et agents publics - Discipline - Sanctions - Erreur manifeste d'appréciation.

Fonctionnaires et agents publics - Discipline - Procédure.


Composition du Tribunal
Président : M. ARTUS
Rapporteur ?: M. Frédéric FAÏCK
Rapporteur public ?: Mme LE BRIS
Avocat(s) : CABINET BOURDON ET FORESTIER

Origine de la décision
Date de l'import : 09/11/2021
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.bordeaux;arret;2021-11-02;19bx00560 ?
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