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04/11/2021 | FRANCE | N°19BX02532

France | France, Cour administrative d'appel de Bordeaux, 2ème chambre, 04 novembre 2021, 19BX02532


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. D... C... et Mme A... C... ont demandé au tribunal administratif de Toulouse de condamner la commune de Lacaune-les-Bains à leur verser une indemnité d'un montant total de 375 456,92 euros en réparation de désordres qu'ils attribuent à des travaux réalisés en 2001 sur le réseau public d'assainissement.

Par un jugement n° 1701951 du 21 mars 2019, le tribunal a rejeté leur demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 12 juin 2019 et des mémoires enregistr

s les 2 et 12 décembre 2019, M. et Mme C..., représentés par la SELARL Alary, Femenia, Rimaillo...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. D... C... et Mme A... C... ont demandé au tribunal administratif de Toulouse de condamner la commune de Lacaune-les-Bains à leur verser une indemnité d'un montant total de 375 456,92 euros en réparation de désordres qu'ils attribuent à des travaux réalisés en 2001 sur le réseau public d'assainissement.

Par un jugement n° 1701951 du 21 mars 2019, le tribunal a rejeté leur demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 12 juin 2019 et des mémoires enregistrés les 2 et 12 décembre 2019, M. et Mme C..., représentés par la SELARL Alary, Femenia, Rimaillot, demandent à la cour, dans le dernier état de leurs écritures :

1°) d'annuler ce jugement ;

2°) de condamner la commune de Lacaune-les-Bains à leur verser une indemnité d'un montant total de 324 933,15 euros ;

3°) de mettre à la charge de la commune de Lacaune-les-Bains une somme de 5 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Ils soutiennent que :

- leur demande devant le tribunal n'était pas tardive dès lors que faute d'avoir été mentionnés dans la décision, les délais de recours ne sont pas opposables en cas de décision implicite, et qu'elle a été présentée dans un délai raisonnable ;

- ce n'est que lors du dépôt du rapport de l'expertise qui a révélé la responsabilité de la commune en janvier 2016 qu'ils ont eu connaissance de leur créance, qui n'était pas prescrite ;

- contrairement à ce qu'ont retenu les premiers juges, le rapport d'expertise judiciaire déposé le 29 janvier 2016 se prononce sur l'origine des désordres dès lors qu'il exclut le phénomène de sécheresse et les vibrations causées par la circulation des poids-lourds pour retenir les " travaux de VRD " réalisés en 2000 par la commune ; ces travaux sont à l'origine des désordres dès lors qu'ils ont modifié l'écoulement naturel des eaux du sous-sol, que les lits de pose en gravier créent un drainage et que la partie publique du réseau des eaux usées présente un défaut d'étanchéité ; si l'expert retient plusieurs causes, toutes sont en lien avec les travaux réalisés par la commune ;

- ils ont acquis la maison en 1986 et ont constaté des désordres à partir de 2001, peu après l'achèvement des travaux et la mise en service du réseau d'assainissement, ce qui confirme le lien de causalité ;

- les travaux de remise en état ont été évalués à 157 140,46 euros par l'expert ;

- les murs présentent des fissures majeures et le taux d'humidité du parquet du salon est de 79 %, ce qui compromet sa solidité ; l'état très dégradé de la maison ne permet ni son occupation, ni sa vente ; ils sollicitent une somme de 250 euros chacun par mois en réparation de leur trouble de jouissance depuis 2001, soit 114 000 euros pour une durée de 228 mois ;

- ils sollicitent 60 000 euros au titre de leur préjudice moral, dont l'existence n'est pas contestable dès lors qu'ils ont vécu plusieurs années dans une habitation devenue progressivement insalubre ;

- dès lors qu'ils ont dû quitter leur maison devenue inhabitable et faire l'acquisition d'un autre logement, ils sont fondés à demander le remboursement des intérêts et de l'assurance de l'emprunt contracté à cet effet, soit au total 15 816,46 euros ;

- ils ont exposé 37 976,22 euros de frais et d'honoraires d'avocat, d'expertises et d'huissier, dont ils sont fondés à demander le remboursement par la commune, leur assurance de protection juridique devant récupérer les sommes qu'elle a prises en charge.

Par des mémoires en défense enregistrés les 4 novembre et 5 décembre 2019, la commune de Lacaune-les-Bains, représentée par Me Clamens, conclut à titre principal au rejet de la requête et à ce qu'une somme de 3 000 euros soit mise à la charge de M. et Mme C... au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, et à titre subsidiaire à ce que son obligation de réparation soit limitée aux travaux de reprise.

Elle fait valoir que :

- la demande de première instance était irrecevable dès lors qu'elle a été présentée après l'expiration d'un délai de deux mois suivant la naissance le 10 mars 2016 d'une décision implicite de rejet de la réclamation préalable ;

- quelle que soit l'origine des désordres, M. et Mme C... en avaient connaissance depuis 2002 ou au plus tard 2005 en ce qui concerne leur aggravation, de sorte que la prescription quadriennale était acquise le 31 décembre 2010 ;

- c'est à bon droit que le tribunal a jugé que le lien de causalité entre les désordres et les fuites du réseau d'eaux usées n'était pas établi ;

- à titre subsidiaire, la somme demandée au titre du préjudice de jouissance réclamé est excessive, l'existence d'un préjudice moral n'est pas démontrée et la commune n'a pas à supporter le coût de l'emprunt contracté par M. et Mme C....

Par lettre du 30 septembre 2021, les parties ont été informées, en application de l'article R. 611-7 du code de justice administrative, de ce que la cour est susceptible de soulever d'office l'irrecevabilité pour tardiveté de la requête d'appel.

Des observations présentées pour M. et Mme C... ont été enregistrées le 11 octobre 2021.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme B...,

- les conclusions de Mme Gallier, rapporteure publique.

Considérant ce qui suit :

1. M. et Mme C... ont acquis le 15 janvier 1986 une maison d'habitation construite en 1950, située à l'angle de la rue Jean-Baptiste Cavaillès et du boulevard Jean Jaurès à Lacaune-les-Bains (Tarn). M. C... a alerté le maire de cette commune sur l'aggravation de fissures qu'il attribuait aux vibrations causées par le passage de camions devant la maison, une première fois en juin 2005, puis une seconde fois en juillet 2008, sans engager de procédure contentieuse. Après la reconnaissance d'un état de catastrophe naturelle dans la commune de Lacaune-les-Bains, par arrêté interministériel du 9 février 2009, en raison des mouvements de terrain différentiels consécutifs à la sécheresse et à la réhydratation des sols de janvier à mars 2007, M. et Mme C... ont attribué les fissures affectant leur maison à ces mouvements de terrain et ont saisi leur assureur, lequel a refusé de les indemniser. A leur demande, le juge des référés du tribunal de grande instance de Castres a ordonné une première expertise, dont le rapport daté du 2 avril 2012 a attribué l'origine des désordres principalement à un affaissement du sol causé par des soutirages karstiques, en lien avec la qualité du terrain d'assiette de la maison, pouvant avoir été favorisé par les vibrations produites par la circulation de poids lourds, la sécheresse n'ayant pu avoir qu'une influence aggravante mineure. Le même expert a été à nouveau désigné par ordonnance du même juge des référés du 11 février 2014 afin de rechercher la part de responsabilité de chacune de ces deux causes aggravantes. Les mesures réalisées ayant permis d'exclure une incidence des vibrations dues à la circulation de poids lourds, l'expert a conclu, dans son rapport daté du 29 janvier 2016, que l'origine des désordres, qui n'était pas davantage imputable à la sécheresse, ne pouvait être rattachée qu'à une modification des circulations d'eau du fait de travaux d'aménagement de la rue Cavaillès dans le cadre d'un marché public de septembre 2000, du " lit de pose " des réseaux constituant un drainage néfaste des eaux, et d'un défaut d'étanchéité ponctuel affectant le réseau public des eaux usées. M. et Mme C... ont présenté à la commune une réclamation préalable, notifiée le 12 janvier 2017, en se prévalant de ce rapport d'expertise attribuant, selon eux, les désordres évolutifs constatés sur leur immeuble au " caractère fuyard du réseau public d'assainissement suite aux travaux engagés " au cours de l'année 2001. En l'absence de réponse, ils ont saisi le 27 avril 2017 le tribunal administratif de Toulouse d'une demande de condamnation de la commune de Lacaune-les-Bains à leur verser une indemnité d'un montant total de 375 456,92 euros. Ils relèvent appel du jugement du 21 mars 2019 par lequel le tribunal a rejeté cette demande.

2. Aux termes de l'article R. 811-2 du code de justice administrative : " Sauf disposition contraire, le délai d'appel est de deux mois. Il court contre toute partie à l'instance à compter du jour où la notification a été faite à cette partie dans les conditions prévues aux articles R. 751-3 à R. 751-4-1. / (...). " Aux termes de l'article R. 751-3 du même code : " Sauf disposition contraire, les décisions sont notifiées le même jour à toutes les parties en cause et adressées à leur domicile réel, par lettre recommandée avec demande d'avis de réception (...). " Ces dernières dispositions impliquent nécessairement que les requérants fassent connaître leurs changements d'adresse au greffe du tribunal administratif. Lorsque l'accusé de réception de la notification du jugement ne fait pas apparaître la date de distribution du pli, le délai d'appel court à compter de la date de réexpédition de cet accusé au tribunal.

3. Il ressort des pièces du dossier que le greffe du tribunal administratif de Toulouse a envoyé le jugement attaqué le 28 mars 2019, par courrier recommandé, à l'adresse indiquée par M. et Mme C... dans leurs écritures, et que le pli lui a été retourné le 1er avril suivant avec la mention " destinataire inconnu à l'adresse ". Le jugement est ainsi réputé régulièrement notifié le 1er avril 2019, de sorte que la requête d'appel enregistrée le 12 juin 2019 est tardive, sans que puisse y faire obstacle la circonstance qu'une copie, qui n'avait pas à préciser les voies et délais de recours dès lors qu'elle ne constituait pas une nouvelle notification, a été ultérieurement envoyée à la nouvelle adresse que le conseil des requérants a communiquée au tribunal par un courrier du 10 avril 2019. Par suite, la requête ne peut qu'être rejetée pour irrecevabilité.

4. M. et Mme C..., qui sont la partie perdante, ne sont pas fondés à demander l'allocation d'une somme au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre une somme à leur charge au titre des frais exposés par la commune de Lacaune-les-Bains à l'occasion du présent litige.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de M. et Mme C... est rejetée.

Article 2 : Les conclusions présentées par la commune de Lacaune-les-Bains au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à Bernard C... et Mme A... C..., et à la commune de Lacaune-les-Bains.

Délibéré après l'audience du 12 octobre 2021 à laquelle siégeaient :

Mme Catherine Girault, présidente,

Mme Anne Meyer, présidente-assesseure,

Mme Marie-Pierre Beuve Dupuy, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 4 novembre 2021.

La rapporteure,

Anne B...

La présidente,

Catherine GiraultLa greffière,

Virginie Guillout

La République mande et ordonne au préfet du Tarn en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.

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N° 19BX02532


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Bordeaux
Formation : 2ème chambre
Numéro d'arrêt : 19BX02532
Date de la décision : 04/11/2021
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

54-08-01-01-03 Procédure. - Voies de recours. - Appel. - Recevabilité. - Délai d'appel.


Composition du Tribunal
Président : Mme GIRAULT
Rapporteur ?: Mme Anne MEYER
Rapporteur public ?: Mme GALLIER
Avocat(s) : CABINET CLAMENS CONSEIL

Origine de la décision
Date de l'import : 17/05/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.bordeaux;arret;2021-11-04;19bx02532 ?
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