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04/11/2021 | FRANCE | N°19BX05025

France | France, Cour administrative d'appel de Bordeaux, 7ème chambre (formation à 3), 04 novembre 2021, 19BX05025


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société par actions simplifiée Les deux arbres a demandé au tribunal administratif de Poitiers :

1°) d'annuler la décision du 17 octobre 2017 par laquelle le président de la communauté de communes Vienne et Gartempe a rejeté sa demande tendant, d'une part, à ce que soient modifiées rétroactivement les modalités de calcul de la redevance du contrat de délégation de service public conclu le 23 décembre 2010 pour la gestion et l'exploitation du circuit de vitesse du Val de Vienne et, d'autre

part, à ce que la communauté de communes Vienne et Gartempe l'indemnise de son préj...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société par actions simplifiée Les deux arbres a demandé au tribunal administratif de Poitiers :

1°) d'annuler la décision du 17 octobre 2017 par laquelle le président de la communauté de communes Vienne et Gartempe a rejeté sa demande tendant, d'une part, à ce que soient modifiées rétroactivement les modalités de calcul de la redevance du contrat de délégation de service public conclu le 23 décembre 2010 pour la gestion et l'exploitation du circuit de vitesse du Val de Vienne et, d'autre part, à ce que la communauté de communes Vienne et Gartempe l'indemnise de son préjudice ;

2°) d'interpréter l'article 31-1 du contrat de délégation de service public en ce sens que la fraction de la redevance de 1 % du chiffre d'affaire vise uniquement le chiffre d'affaire afférent à l'exploitation du circuit lui-même à l'exclusion des autres activités périphériques ;

3°) de déclarer rétroactivement nulles les clauses d'indexation prévues aux articles 30 et 31-3 du contrat de délégation de service public et de réviser en conséquences les loyers versés à compter de l'année 2013 ;

4°) de condamner la communauté de communes Vienne et Gartempe à l'indemniser, à hauteur de 14 028,28 euros HT, de la perte de chiffre d'affaires résultant de la réalisation tardive de travaux, à hauteur de 83 454,61 euros HT, de la perte de chiffre d'affaires résultant de sa carence dans la réalisation des travaux permettant aux usagers du circuit de bénéficier d'un réseau internet suffisant et, à hauteur de 50 000 euros, pour comportement déloyal et entrave à la bonne exécution de la mission déléguée.

Par un jugement n° 1702832 du 30 octobre 2019, le tribunal administratif de Poitiers a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête et un mémoire, enregistrés les 31 décembre 2019 et 27 novembre 2020, ce dernier mémoire n'ayant pas été communiqué, la société Les deux arbres, représentée par la SCP KPL avocats, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Poitiers du 30 octobre 2019 ;

2°) de faire droit à ses conclusions de première instance notamment en ce qu'elles tendent à faire constater l'illicéité de la clause de révision des redevances prévues par l'article 31.3 de la convention ;

3°) de mettre à la charge de la communauté de communes Vienne et Gartempe la somme de 3 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

La société Les deux arbres soutient que :

- s'agissant des conclusions en interprétation, c'est à tort que le tribunal administratif a estimé que l'article 31-1 n'était pas ambigu ;

- s'agissant de la contestation de la clause de révision de la redevance de l'article 31-3, elle méconnaît les dispositions de l'article L. 111-2 du code monétaire et financier, dès lors que la très complexe formule d'indexation de la redevance ne peut être regardée comme ayant une relation directe avec l'objet de la délégation ;

- elle n'a pas donné son accord à la substitution rétroactive des indices par les indices " salaire mensuel de base des activités de services " et " loyers commerciaux " ;

- s'agissant de la demande indemnitaire, elle est fondée, du fait de l'illégalité de la clause, à solliciter l'indemnisation de son préjudice.

Par un mémoire en défense, enregistré le 29 octobre 2020, la communauté de communes Vienne et Gartempe, représentée par Me Drouineau, conclut au rejet de la requête et à ce que la somme de 2 500 euros soit mise à la charge de la société Les deux arbres au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, et soutient que les moyens de la requête ne sont pas fondés.

Par ordonnance du 2 novembre 2020, la clôture d'instruction a été fixée au 30 novembre 2020.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- Le code monétaire et financier ;

- Le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Munoz-Pauziès,

- les conclusions de Mme A...,

- et les observations de Me Kolenc, représentant la société Les deux arbres, et de Me Pérotin, représentant la communauté de communes Vienne et Gartempe.

Considérant ce qui suit :

1. Par un contrat de délégation de service public conclu le 23 décembre 2010, le syndicat mixte du Pays Montmorillonnais, aux droits duquel vient la communauté de communes Vienne et Gartempe, a confié à la société Les deux arbres la gestion et l'exploitation du circuit de vitesse du Val de Vienne, situé sur le territoire de la commune du Vigeant.

Sur les conclusions dirigées contre la décision du 17 octobre 2017 :

2. Si la société Les deux arbres demande à la cour de " faire droit à ses conclusions de première instance ", elle ne développe strictement aucun moyen s'agissant des conclusions dirigées contre la décision du 17 octobre 2017, auxquelles elle ne fait plus référence, et ne conteste pas la réponse aux moyens apportée par les premiers juges. Dès lors, ces conclusions ne peuvent qu'être rejetées.

Sur les conclusions aux fins d'interprétation de l'article 31-1 de la convention :

3. Un recours en interprétation de stipulations contractuelles n'est recevable que dans la mesure notamment où il peut être valablement soutenu que ces stipulations sont obscures ou ambiguës.

4. Aux termes de l'article 31.1 de la convention en cause, intitulé " redevances pour mise à disposition au délégataire des éléments du circuit préexistants " : " À compter du début de l'exploitation du circuit par le délégataire et en contrepartie du droit qui lui est concédé par le syndicat d'exploiter les ouvrages déjà existants dans le cadre du présent contrat, le délégataire versement au syndicat une redevance calculée comme suit : 30.000 € + 1 % du chiffre d'affaires hors taxes de l'exercice en cour. (...) ".

5. Ces stipulations, qui ne restreignent pas le chiffre d'affaires auquel elles se réfèrent à celui tiré de la seule exploitation du circuit en excluant celui engendré par les activités périphériques, ne présentent aucune obscurité ni ambiguïté. Les conclusions tendant à obtenir du juge leur interprétation sont, par suite, irrecevables et doivent être rejetées.

Sur les conclusions tendant à la nullité de l'article 31.3 du contrat :

6. Les parties à un contrat administratif peuvent saisir le juge d'un recours de plein contentieux contestant la validité du contrat qui les lie ou de l'une de ses clauses. Il appartient alors au juge, lorsqu'il constate l'existence d'irrégularités, d'en apprécier l'importance et les conséquences, après avoir vérifié que les irrégularités dont se prévalent les parties sont de celles qu'elles peuvent, eu égard à l'exigence de loyauté des relations contractuelles, invoquer devant lui. Il lui revient, après avoir pris en considération la nature de l'illégalité commise et en tenant compte de l'objectif de stabilité des relations contractuelles, soit de décider que la poursuite de l'exécution du contrat est possible, éventuellement sous réserve de mesures de régularisation prises par la personne publique ou convenues entre les parties, soit de prononcer, le cas échéant avec un effet différé, après avoir vérifié que sa décision ne portera pas une atteinte excessive à l'intérêt général, la résiliation du contrat ou, en raison seulement d'une irrégularité invoquée par une partie ou relevée d'office par lui, tenant au caractère illicite du contenu du contrat ou à un vice d'une particulière gravité relatif notamment aux conditions dans lesquelles les parties ont donné leur consentement, son annulation.

7. Aux termes de l'article L. 112-2 du code monétaire et financier : " Dans les dispositions statutaires ou conventionnelles, est interdite toute clause prévoyant des indexations fondées sur le salaire minimum de croissance, sur le niveau général des prix ou des salaires ou sur les prix des biens, produits ou services n'ayant pas de relation directe avec l'objet du statut ou de la convention ou avec l'activité de l'une des parties. Est réputée en relation directe avec l'objet d'une convention relative à un immeuble bâti toute clause prévoyant une indexation sur la variation de l'indice national du coût de la construction publié par l'Institut national des statistiques et des études économiques ou, pour des activités commerciales définies par décret, sur la variation de l'indice trimestriel des loyers commerciaux publié dans des conditions fixées par ce même décret par l'Institut national de la statistique et des études économiques. (...) ".

8. L'article 31.3 de la convention, intitulé " Indexations des redevances ", prévoit que : " Les redevances, formules, seuils, forfaits et plus largement toute somme visée dans le cadre du présent contrat seront révisés au premier janvier de chaque année, par l'application d'un coefficient K calculé selon la formule d'indexation ci-après : / K = 0,10 + 0,50* S/So + 0,15* EGC/EGCo + 0,15* 12E/12Eo + 0,10* BT01/BT01o / Dans laquelle : / So est la dernière valeur connue au mois de juin 2010 de l'indice ICHTTS2, coût horaire du travail - tous salariés compris - services aux entreprises, / 12Eo est la dernière valeur connue au mois de juin 2010 de l'indice des prix à la consommation Autres biens et services publié au BOCCRF (Bulletin officiel de la Concurrence, de la Consommation et de la Répression des fraudes). / EGCo est la dernière valeur connue au mois de juin 2010 de 1'indice " Electricité, Gaz et Chaleur ", / BT01o est la dernière valeur connue au mois de juin 2010 de l'index général tous corps d'état publié au Journal Officiel, / S, 12E, EGC et BT 01 sont les valeurs du 1er janvier de l'année considérée publiées au BOCCRF (Bulletin officiel de la Concurrence, de la Consommation et de la Répression des fraudes). / En cas de disparition d'un ou plusieurs indices, les parties se rapprocheront pour adopter d'un commun accord de nouveaux indices équivalents ".

9. Le moyen tiré de ce que l'article 31.3 de la convention méconnaîtrait les dispositions de l'article L. 112-2 du code monétaire et financier se rattache à la même cause juridique que les moyens soulevés devant les premiers juges et relatifs à la validité de cette clause contractuelle. La communauté de communes de Vienne et Gartempe n'est, par suite, pas fondée à soutenir qu'il s'agirait d'un moyen nouveau en appel.

10. Les stipulations de l'article 31.3 de la convention prévoient l'indexation des sommes prévues par le contrat sur, notamment, l'indice des prix à la consommation et l'indice du coût horaire du travail dans les entreprises de services aux entreprises. Eu égard aux missions confiées par la convention à la société Les deux arbres et à l'activité de cette société, cette indexation était en relation directe avec l'activité de l'une des parties à la convention. Par suite, la société Les deux arbres n'est pas fondée à soutenir que l'article 31.3 de la convention méconnaîtrait les dispositions de l'article L. 112-2 du code monétaire et financier.

11. La circonstance que, postérieurement à la signature du contrat, certains des indices auxquels l'article 31.3 fait référence ont disparu, n'entache pas la clause d'irrégularité, une telle disparition entrant au demeurant dans les prévisions de cet article, pas plus que la circonstance que la société Les deux arbres n'aurait pas donné son accord à l'utilisation des nouveaux indices proposés par la communauté de communes Vienne et Gartempe.

Sur les conclusions indemnitaires :

12. En premier lieu, si la société Les deux arbres demande à la cour de " faire droit à ses conclusions de première instance ", elle ne développe strictement aucun moyen et ne fait plus référence aux conclusions tendant à ce que la communauté de communes Vienne et Gartempe soit condamnée à l'indemniser, à hauteur de 14 028,28 euros HT, de la perte de chiffre d'affaire résultant de la réalisation tardive de travaux, à hauteur de 83 454,61 euros HT, de la perte de chiffre d'affaire résultant de la carence dans la réalisation des travaux permettant aux usagers du circuit de bénéficier d'un réseau internet suffisant et, à hauteur de 50 000 euros, pour comportement déloyal et entrave à la bonne exécution de la mission déléguée. Dès lors, ces conclusions ne peuvent qu'être rejetées.

13. En second lieu, la société Les deux arbres demande que lui soit remboursée la part des redevances pour mise à disposition des éléments du circuit préexistants, versées de 2013 à 2016 du fait de l'application de la clause d'indexation de l'article 31.3. Toutefois, cette clause n'étant pas irrégulière, les conclusions indemnitaires ne peuvent qu'être rejetées.

14. Il résulte de ce qui précède que la société Les deux arbres n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Poitiers a rejeté sa demande. Par voie de conséquence, il y a lieu de rejeter ses conclusions tendant au bénéfice des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de mettre à sa charge, sur le fondement de ces dispositions, la somme de 1 500 euros.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de la société Les deux arbres est rejetée.

Article 2 : La société Les deux arbres versera à la communauté de communes Vienne et Gartempe la somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à la société par actions simplifiée Les deux arbres et à la communauté de communes Vienne et Gartempe.

Délibéré après l'audience du 7 octobre 2021 à laquelle siégeaient :

M. Rey-Bèthbéder, président,

Mme Munoz-Pauziès, présidente-assesseure,

Mme Florence Rey-Gabriac, première conseillère.

Rendu public par dépôt au greffe le 4 novembre 2021.

La rapporteure,

Mme Frédérique Munoz-Pauziès

Le président,

Éric Rey-Bèthbéder

La greffière,

Angélique Bonkoungou

La République mande et ordonne au préfet de la Vienne en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.

5

N° 19BX05025


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Bordeaux
Formation : 7ème chambre (formation à 3)
Numéro d'arrêt : 19BX05025
Date de la décision : 04/11/2021
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Composition du Tribunal
Président : M. REY-BETHBEDER
Rapporteur ?: Mme Frédérique MUNOZ-PAUZIES
Rapporteur public ?: Mme MADELAIGUE
Avocat(s) : SCP DROUINEAU COSSET BACLE LE LAIN

Origine de la décision
Date de l'import : 07/12/2021
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.bordeaux;arret;2021-11-04;19bx05025 ?
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