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17/11/2021 | FRANCE | N°19BX01723

France | France, Cour administrative d'appel de Bordeaux, 1ère chambre, 17 novembre 2021, 19BX01723


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. et Mme A... B... ont demandé au tribunal administratif de Bordeaux d'annuler la délibération du 11 octobre 2017 par laquelle le conseil municipal de Cussac-Fort-Médoc a approuvé le périmètre de protection modifié autour du Château de Bernones.

Par un jugement n° 1705248 du 28 février 2019, le tribunal administratif de Bordeaux a rejeté la requête de M. et Mme B....

Procédure devant la cour :

Par une requête et un mémoire, enregistrés le 26 avril 2019 et le 18 décembre 2020,

M. et Mme B..., représentés par Me Paul, demandent à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du trib...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. et Mme A... B... ont demandé au tribunal administratif de Bordeaux d'annuler la délibération du 11 octobre 2017 par laquelle le conseil municipal de Cussac-Fort-Médoc a approuvé le périmètre de protection modifié autour du Château de Bernones.

Par un jugement n° 1705248 du 28 février 2019, le tribunal administratif de Bordeaux a rejeté la requête de M. et Mme B....

Procédure devant la cour :

Par une requête et un mémoire, enregistrés le 26 avril 2019 et le 18 décembre 2020, M. et Mme B..., représentés par Me Paul, demandent à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Bordeaux du 28 février 2019 ;

2°) d'annuler la délibération du 11 octobre 2017 par laquelle le conseil municipal de Cussac-Fort-Médoc a approuvé le périmètre de protection modifié autour du Château de Bernones ;

3°) de mettre à la charge de la commune de Cussac-Fort-Médoc une somme de 3 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Ils soutiennent que :

- le jugement est irrégulier car il ne comporte pas les signatures exigées par l'article R. 741-7 du code de justice administrative ;

- la commune a méconnu les dispositions des articles L. 2121-10 et L. 2121-13 du code général des collectivités territoriales en ce que les dispositions applicables à la convocation des conseillers municipaux n'ont pas été respectées ;

- en réduisant le périmètre de protection du Château de Bernones, la commune a commis une erreur manifeste d'appréciation ; elle a également commis une erreur de droit dès lors qu'elle n'a pas respecté la règle de la covisibilité alors qu'elle a tenu compte de ce critère pour le classement de l'AMVAP, ce qui rend les deux classements incohérents.

Par un mémoire en défense, enregistré le 19 novembre 2020, la commune de Cussac-Fort-Médoc, représentée par Me Boissy, conclut au rejet de la requête et à ce qu'une somme de 1 500 euros soit mise à la charge des époux B... au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient qu'aucun des moyens n'est fondé.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code de l'environnement ;

- le code général des collectivités territoriales ;

- le code du patrimoine ;

- le code de l'urbanisme ;

- la loi n° 2016-925 du 7 juillet 2016 ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Fabienne Zuccarello,

- les conclusions de M. Romain Roussel, rapporteur public,

- et les observations de Me Paul, représentant M.et Mme B..., et de Me Sebert, représentant la commune de Cussac-Fort-Médoc.

Considérant ce qui suit :

1. Les communes de Cussac-Fort-Médoc et de Blaye ont décidé, dès 2006, de mettre à l'étude la création de la zone de protection du patrimoine architectural urbain et paysager (ZPPAUP) du Verrou de l'Estuaire, à laquelle s'est substituée une aire de mise en valeur de l'architecture et du patrimoine (AMVAP) du Verrou de l'Estuaire. Le Château de Bernones, situé sur la commune de Cussac-Fort-Médoc, a été inscrit au titre des monuments historiques en 2012 et comptait alors un périmètre de protection délimité par un espace de 500 mètres autour de l'édifice. Dans le cadre de la création de l'AMVAP, l'architecte des Bâtiments de France a proposé la modification du périmètre de protection de façon à faire correspondre la servitude avec les limites de l'AMVAP. Par une délibération du 11 octobre 2017, le conseil municipal de Cussac-Fort-Médoc a approuvé le périmètre de protection modifié autour du Château de Bernones. M. et Mme B..., exploitants agricoles et propriétaires de plusieurs terrains situés aux lieux-dits Vieux Cussac et La Taste-Capeyron à Cussac-Fort-Médoc, ont demandé au tribunal administratif de Bordeaux l'annulation de cette dernière délibération. Ils relèvent appel du jugement du 28 février 2019 par lequel ce tribunal a rejeté leur demande.

Sur la régularité du jugement :

2. Aux termes de l'article R. 741-7 du code de justice administrative : " Dans les tribunaux administratifs et les cours administratives d'appel, la minute de la décision est signée par le président de la formation de jugement, le rapporteur et le greffier d'audience ". Il ressort des pièces du dossier de première instance que la minute du jugement attaqué du 28 février 2019 comporte les signatures exigées par ces dispositions. Dès lors, le jugement contesté n'est pas entaché d'irrégularité.

Sur le bien-fondé du jugement :

En ce qui concerne la légalité externe de la délibération contestée :

3. Aux termes de l'article L. 2121-10 du code général des collectivités territoriales : " Toute convocation est faite par le maire. Elle indique les questions portées à l'ordre du jour. Elle est mentionnée au registre des délibérations, affichée ou publiée. Elle est adressée par écrit, au domicile des conseillers municipaux ou, s'ils en font la demande, envoyée à une autre adresse ou transmise de manière dématérialisée ". Aux termes des dispositions de l'article L. 2121-13 du même code : " Tout membre du conseil municipal a le droit, dans le cadre de sa fonction, d'être informé des affaires de la commune qui font l'objet d'une délibération ".

4. Il ressort des mentions de la délibération contestée du conseil municipal de Cussac-Fort-Médoc, qui font foi jusqu'à preuve contraire, que la convocation à la séance du 11 octobre 2017 adressée aux conseillers municipaux comportait l'ordre du jour, lequel mentionnait notamment la question de l'approbation des " périmètres de protection modifiés suite à l'enquête publique ". Il ressort également des pièces produites que la convocation était accompagnée d'un envoi concomitant par courriel d'un ensemble de pièces concernant le projet de modification du château de Bernones. Si les requérants contestent l'envoi de ces documents, ils n'assortissent leurs allégations d'aucun élément circonstancié de nature à remettre en cause les mentions de la délibération attaquée. Par suite, c'est à bon droit que le juge de première instance a écarté ce moyen.

En ce qui concerne la légalité interne de la délibération contestée :

5. Aux termes de l'article L. 621-30 du code du patrimoine, dans sa rédaction à la date de la décision attaquée : " I. - Les immeubles ou ensembles d'immeubles qui forment avec un monument historique un ensemble cohérent ou qui sont susceptibles de contribuer à sa conservation ou à sa mise en valeur sont protégés au titre des abords. / La protection au titre des abords a le caractère de servitude d'utilité publique affectant l'utilisation des sols dans un but de protection, de conservation et de mise en valeur du patrimoine culturel. / II. - La protection au titre des abords s'applique à tout immeuble, bâti ou non bâti, situé dans un périmètre délimité par l'autorité administrative dans les conditions fixées à l'article L. 621-31. Ce périmètre peut être commun à plusieurs monuments historiques. / En l'absence de périmètre délimité, la protection au titre des abords s'applique à tout immeuble, bâti ou non bâti, visible du monument historique ou visible en même temps que lui et situé à moins de cinq cents mètres de celui-ci. / La protection au titre des abords s'applique à toute partie non protégée au titre des monuments historiques d'un immeuble partiellement protégé. / La protection au titre des abords n'est pas applicable aux immeubles ou parties d'immeubles protégés au titre des monuments historiques ou situés dans le périmètre d'un site patrimonial remarquable classé en application des articles L. 631-1 et L. 631-2. / Les servitudes d'utilité publique instituées en application de l'article L. 341-1 du code de l'environnement ne sont pas applicables aux immeubles protégés au titre des abords ". Aux termes de l'article L. 621-31 du même code : " Le périmètre délimité des abords prévu au premier alinéa du II de l'article L. 621-30 est créé par décision de l'autorité administrative, sur proposition de l'architecte des Bâtiments de France, après enquête publique, consultation du propriétaire ou de l'affectataire domanial du monument historique et, le cas échéant, de la ou des communes concernées et accord de l'autorité compétente en matière de plan local d'urbanisme, de document en tenant lieu ou de carte communale. / (...) ".

6. Il résulte des dispositions précitées, issues de la loi n° 2016-925 du 7 juillet 2016 relative à la liberté de création, à l'architecture et au patrimoine, que le périmètre de protection des abords du monument historique inscrit doit couvrir les immeubles ou ensembles d'immeubles qui forment avec lui un ensemble cohérent ou qui sont susceptibles de contribuer à sa conservation ou à sa mise en valeur. En l'espèce, il ressort des pièces du dossier, que l'ancien périmètre de 500 mètres couvrant les abords du château de Bernones regroupait à l'ouest de la route des graves, des zones agricoles ou viticoles de peu d'intérêt patrimonial ainsi que des zones déjà urbanisées avant l'inscription du monument en 2012. Les plans et photographies produites au dossier démontrent que ce territoire, désormais exclu du périmètre de protection, ne forment pas avec l'édifice en cause, un ensemble cohérent ou qui serait susceptible de contribuer à sa conservation ou à sa mise en valeur. Au demeurant les parcelles concernées, qui ne sont plus dans le périmètre de protection, ont d'ailleurs été classées en zone UB et 2AU du règlement du plan local d'urbanisme approuvé le 11 juillet 2018. Compte tenu de ces éléments, le conseil municipal n'a pas méconnu les dispositions précitées du code du patrimoine en excluant du champ de protection les parcelles en cause. Si les requérants font valoir que des immeubles situés dans l'ancien périmètre de protection des 500 mètres sont visibles ou covisibles depuis le château de Bernones, il résulte des dispositions précitées que le critère visuel n'est pas le seul élément d'appréciation pour la détermination du périmètre de protection. Enfin, si la notion de covisibilité a été utile à la commune pour délimiter le périmètre de l'AMVAP, lequel coïncide désormais avec le périmètre de protection du château de Bernones dans sa partie ouest, la commune n'a pas commis d'erreur de droit en réduisant le périmètre de protection du monument en cause sans se référer formellement à ce critère de covisibilité.

7. Il résulte de tout ce qui précède, et sans qu'il soit besoin d'examiner la recevabilité de la requête, que M. et Mme B... ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Bordeaux a rejeté leur demande.

8. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de la commune de Cussac-Fort-Médoc, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, la somme que demandent M. et Mme B... au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Dans les circonstances de l'espèce, il n'y a pas lieu de mettre à la charge des requérants, la somme que demande la commune de Cussac-Fort-Médoc sur le fondement des mêmes dispositions.

DECIDE :

Article 1er : La requête de M. et Mme B... est rejetée.

Article 2 : Les conclusions présentées par la commune de Cussac-Fort-Médoc tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. et Mme A... B... et à la commune de Cussac-Fort-Médoc.

Délibéré après l'audience du 30 septembre 2021 à laquelle siégeaient :

Mme Marianne Hardy, présidente,

Mme Fabienne Zuccarello, présidente-assesseure,

Charlotte Isoard, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe, le 17 novembre 2021.

La rapporteure,

Fabienne Zuccarello La présidente,

Marianne Hardy

La greffière,

Sophie Lecarpentier

La République mande et ordonne au préfet de la Gironde en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.

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N° 19BX01723


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Bordeaux
Formation : 1ère chambre
Numéro d'arrêt : 19BX01723
Date de la décision : 17/11/2021
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

41-01-06 Monuments et sites. - Monuments historiques. - Plans d'urbanisme et législation sur les monuments historiques.


Composition du Tribunal
Président : Mme HARDY
Rapporteur ?: Mme Fabienne ZUCCARELLO
Rapporteur public ?: M. ROUSSEL
Avocat(s) : BOISSY AVOCATS

Origine de la décision
Date de l'import : 30/11/2021
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.bordeaux;arret;2021-11-17;19bx01723 ?
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