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25/11/2021 | FRANCE | N°21BX02746

France | France, Cour administrative d'appel de Bordeaux, 1ère chambre, 25 novembre 2021, 21BX02746


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme B... A... a demandé au tribunal administratif de Toulouse d'annuler l'arrêté du 13 janvier 2020 par lequel le préfet de la Haute-Garonne a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligée à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de renvoi.

Par un jugement n° 2002916 du 28 mai 2021, le tribunal administratif de Toulouse a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête et des mémoires, enregistrés le 2 juillet 2021

, le 23 juillet 2021, le 1er octobre 2021 et le 12 octobre 2021, Mme A..., représentée par Me Sade...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme B... A... a demandé au tribunal administratif de Toulouse d'annuler l'arrêté du 13 janvier 2020 par lequel le préfet de la Haute-Garonne a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligée à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de renvoi.

Par un jugement n° 2002916 du 28 mai 2021, le tribunal administratif de Toulouse a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête et des mémoires, enregistrés le 2 juillet 2021, le 23 juillet 2021, le 1er octobre 2021 et le 12 octobre 2021, Mme A..., représentée par Me Sadek, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Toulouse du 28 mai 2021 ;

2°) d'annuler l'arrêté du 13 janvier 2020 par lequel le préfet de la Haute-Garonne a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligée à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de renvoi ;

3°) d'enjoindre au préfet de la Haute-Garonne de lui délivrer un titre de séjour d'un an portant la mention vie privée et familiale, et ce sous astreinte de 200 euros par jour de retard à compter de la notification de l'arrêt à intervenir ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- la décision est entachée d'incompétence du signataire de l'arrêté ;

- elles est entachée d'un défaut de motivation et révèle un défaut d'examen approfondi de sa situation personnelle ;

En ce qui concerne le refus de séjour :

- les médecins de l'OFII n'ont pas précisé si le traitement était disponible ou accessible pour la généralité de la population en Algérie, ni indiqué s'il était disponible de manière continue et non pas intermittente sur tout le territoire algérien et non seulement dans les hôpitaux des grandes villes ; ils n'ont pas mentionné le coût de ce traitement ; la faculté de Mme A... de voyager sans risque pour sa santé n'a pas été évoquée ; le rapport du médecin de l'Office français de l'immigration et de l'intégration est irrégulier dès lors que le préfet ne justifie pas de sa désignation régulière ; le rapport de l'Office français de l'immigration et de l'intégration ne lui a pas été communiqué avant la décision attaquée et elle n'a pas été examinée par les médecins de l'Office français de l'immigration et de l'intégration ;

- le préfet de la Haute-Garonne s'est cru en situation de compétence liée au regard de l'avis rendu le 10 décembre 2019 par le collège des médecins de l'OFII ;

- elle méconnait les stipulations de l'article 6 (5°) et (7°) de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 et les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

En ce qui concerne l'obligation de quitter le territoire français :

- elle méconnait les stipulations de l'article 6 (5°) et (7°) de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 et les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- elle est dépourvue de base légale en raison de l'illégalité de la décision portant refus de titre de séjour.

Par des mémoires en défense, enregistrés le 30 septembre 2021 et 8 octobre 2021, le préfet de la Haute-Garonne, conclut au rejet de la requête.

Il soutient qu'aucun des moyens n'est fondé.

Mme A... a été admise au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 22 juillet 2021.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le code de justice administrative.

La présidente de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le rapport de Mme Fabienne Zuccarello, a été entendu au cours de l'audience publique.

Considérant ce qui suit :

1. Mme A..., de nationalité algérienne, est entrée en France le 23 avril 2016 sous couvert d'un passeport revêtu d'un visa de court séjour valable du 12 avril 2016 au 12 juillet 2016. Elle a ensuite bénéficié de certificats de résidence algériens d'un an, renouvelés du 8 juin 2017 au 13 octobre 2019. Le 17 septembre 2019, elle demandé le renouvellement de son titre de séjour au titre de la vie privée et familiale et en qualité d'étranger malade. Par un arrêté du 13 janvier 2020, le préfet de la Haute-Garonne a refusé le renouvellement de son titre de séjour, l'a obligée à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination de cette mesure d'éloignement. Mme A... a saisi le tribunal administratif de Toulouse d'une demande tendant à l'annulation cet arrêté du 13 janvier 2020. Elle relève appel du jugement du 28 mai 2021 rejetant sa demande.

2. En premier lieu, Mme A... se borne à reprendre en appel, sans critique utile et sans apporter d'élément nouveau par rapport à ses productions de première instance, les moyens tirés de l'incompétence de l'auteur de l'acte, du défaut d'examen particulier de sa situation et du défaut de motivation de l'arrêté contesté, moyens auxquels le tribunal a suffisamment et pertinemment répondu. Par suite, il y a lieu d'écarter ces moyens par adoption des motifs retenus par les premiers juges.

3. En deuxième lieu, s'il appartient au préfet, lorsqu'il statue sur la demande de carte de séjour, de s'assurer que l'avis a été rendu par le collège de médecins conformément aux règles procédurales fixées par le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et par l'arrêté du 27 décembre 2016, il ne saurait en revanche porter d'appréciation sur le respect, par le collège des médecins, des orientations générales définies par l'arrêté du 5 janvier 2017, en raison du respect du secret médical qui interdit aux médecins de donner à l'administration, de manière directe ou indirecte, aucune information sur la nature des pathologies dont souffre l'étranger.

4. D'une part, aucun texte législatif ou réglementaire ni aucun principe général de droit n'impose au préfet de communiquer à l'intéressée l'avis du collège des médecins de l'Office français de l'immigration et de l'intégration, préalablement à la décision de refus de séjour. D'autre part, aucune disposition n'impose au collège de médecins, qui rend son avis au regard du rapport médical établi par le médecin rapporteur, de procéder à l'examen du demandeur. La faculté de procéder à un tel examen, alors prévue à l'article R. 313-23 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, est laissée à l'appréciation du collège des médecins. En outre, aucun texte n'impose au préfet de demander à l'Office français de l'immigration et de l'intégration de lui fournir les éléments scientifiques sur lesquels il a émis son avis, ni de lui donner accès à la bibliothèque d'information sur le système de soins des pays d'origine. De plus, il ressort de l'avis du 10 décembre 2019 que le médecin ayant rédigé le rapport médical concernant l'état de santé de Mme A... n'a pas siégé au sein du collège et que celui-ci était régulièrement composé de trois médecins. Enfin, les médecins de l'Office français de l'immigration et de l'intégration n'étaient pas tenus de se prononcer sur la disponibilité des soins dans le pays d'origine de Mme A... dès lors qu'ils ont estimé que le défaut de prise en charge médicale de son état de santé ne devrait pas entraîner des conséquences d'une exceptionnelle gravité. Par suite, et contrairement à ce que soutient la requérante, la procédure n'est pas irrégulière sur ces points.

5. En troisième lieu, il ne ressort pas des termes de la décision attaquée que le préfet se soit mépris sur l'étendue de sa compétence en s'estimant lié par l'avis du collège de médecins de l'Office français de l'immigration et de l'intégration.

6. En quatrième lieu, aux termes de l'article 6 de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 : " Les dispositions du présent article (...) fixent les conditions de délivrance et de renouvellement du certificat de résidence aux ressortissants algériens établis en France ainsi qu'à ceux qui s'y établissent (...) Le certificat de résidence d'un an portant la mention " vie privée et familiale " est délivré de plein droit : (...) 7) au ressortissant algérien, résidant habituellement en France, dont l'état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait entraîner pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité, sous réserve qu'il ne puisse pas effectivement bénéficier d'un traitement approprié dans son pays. ".

7. D'une part, il ressort des pièces du dossier que Mme A..., qui a levé le secret médical, est atteinte d'une paralysie cérébrale infantile diplégique, également appelée maladie de Little. Pour remettre en cause les conclusions de l'avis du collège de médecins de l'Office français de l'immigration et de l'intégration, la requérante se prévaut de certificats médicaux, postérieurs à la décision attaquée, qui indiquent que son état de santé nécessite un suivi régulier par une équipe multidisciplinaire mais qui ne précisent pas que l'absence de prise en charge médicale risquerait d'entraîner des conséquences d'une exceptionnelle gravité pour son état de santé. Par ailleurs, la circonstance que l'intéressée a bénéficié précédemment de titres de séjour en qualité d'étranger malade ne suffit pas à remettre en cause les conclusions de l'avis de l'Office français de l'immigration et de l'intégration. Enfin, Mme A... ne peut utilement contester l'effectivité de l'accès aux soins dans son pays d'origine dès lors que l'absence de soins ne devrait pas entrainer des conséquences d'une exceptionnelle gravité. Dans ces conditions, la décision attaquée n'a pas méconnu les stipulations précitées de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968.

8. En cinquième lieu, le 5° de l'article 6 de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 modifié prévoit que : " Le certificat de résidence d'un an portant la mention " vie privée et familiale " est délivré de plein droit : (...) Au ressortissant algérien, qui n'entre pas dans les catégories précédentes ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, dont les liens personnels et familiaux en France sont tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus ".

9. Mme A... est entrée en France le 23 avril 2016 à l'âge de 21 ans et a été reconnue adulte handicapée par une décision du 12 décembre 2017. Elle fait valoir que son frère est titulaire d'un certificat de résident algérien et l'accompagne dans toutes ses démarches en France, et qu'elle est intégrée à la société française. Toutefois, ces éléments ne sont pas, à eux seuls, suffisants pour caractériser une vie privée et familiale ancienne, stable et intense en France, alors qu'au demeurant il est constant qu'elle bénéficie d'attaches familiales en Algérie où résident ses deux parents. Dès lors, en refusant de lui délivrer un certificat de résidence au titre de la vie privée et familiale, le préfet de la Haute-Garonne n'a pas porté à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs de ce refus. Par suite, les stipulations des articles 6-5° de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 et 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales n'ont pas été méconnues.

10. Il résulte de ce qui précède que Mme A... n'est pas fondée à invoquer, par la voie de l'exception, l'illégalité de la décision refusant de lui délivrer un titre de séjour à l'appui de ses conclusions dirigées contre la décision portant obligation de quitter le territoire français.

11. Pour les mêmes motifs que ceux exposés au point 9 la décision portant obligation de quitter le territoire français n'a pas été prise en méconnaissance de l'article 6 de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 et de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.

12. Il résulte de tout ce qui précède que Mme A... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement contesté, le tribunal administratif de Toulouse a rejeté sa demande d'annulation de l'arrêté du 13 janvier 2020 lui refusant le renouvellement de son titre de séjour, l'obligeant à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et fixant le pays de destination.

13. Dans ces conditions, il y a lieu de rejeter la requête de Mme A..., y compris ses conclusions à fin d'injonction et celles présentées sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

DECIDE :

Article 1er : La requête de Mme A... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme B... A... et au ministre de l'intérieur.

Copie en sera délivrée au préfet de la Haute-Garonne.

Délibéré après l'audience du 28 octobre 2021 à laquelle siégeaient :

Mme Marianne Hardy, présidente,

Mme Fabienne Zuccarello, présidente-assesseure,

Mme Christelle Brouard-Lucas, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 25 novembre 2021.

La rapporteure,

Fabienne Zuccarello La présidente,

Marianne Hardy La greffière,

Sophie Lecarpentier

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.

5

N° 21BX02746


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Bordeaux
Formation : 1ère chambre
Numéro d'arrêt : 21BX02746
Date de la décision : 25/11/2021
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-03 Étrangers. - Obligation de quitter le territoire français (OQTF) et reconduite à la frontière.


Composition du Tribunal
Président : Mme HARDY
Rapporteur ?: Mme Fabienne ZUCCARELLO
Rapporteur public ?: M. ROUSSEL
Avocat(s) : SADEK

Origine de la décision
Date de l'import : 07/12/2021
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.bordeaux;arret;2021-11-25;21bx02746 ?
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