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16/12/2021 | FRANCE | N°21BX00740

France | France, Cour administrative d'appel de Bordeaux, 7ème chambre (formation à 3), 16 décembre 2021, 21BX00740


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. D... a demandé au tribunal administratif de Toulouse d'annuler l'arrêté du 20 mars 2019 par lequel le préfet de la Haute-Garonne a refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination.

Par un jugement n° 1904414 du 18 décembre 2020, le tribunal administratif de Toulouse a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 23 février 2021,

M. D..., représenté par Me Sadek, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du 18 décembre ...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. D... a demandé au tribunal administratif de Toulouse d'annuler l'arrêté du 20 mars 2019 par lequel le préfet de la Haute-Garonne a refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination.

Par un jugement n° 1904414 du 18 décembre 2020, le tribunal administratif de Toulouse a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 23 février 2021, M. D..., représenté par Me Sadek, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du 18 décembre 2020 du tribunal administratif de Toulouse ;

2°) d'annuler l'arrêté du 20 mars 2019 du préfet de la Haute-Garonne ;

3°) d'enjoindre au préfet de la Haute-Garonne de lui délivrer un titre de séjour d'un an portant la mention " vie privée et familiale ", sous astreinte de 200 euros par jour de retard à compter de la notification de l'arrêt à intervenir ;

4°) de mettre à la charge de l'État le paiement de la somme de 1 500 euros sur le fondement des dispositions des articles 37 alinéa 2 de la loi du 10 juillet 1991 et L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

En ce qui concerne la recevabilité de la demande de première instance :

- sa demande présentée devant tribunal administratif de Toulouse n'est pas tardive dès lors que, étant hospitalisé du 22 février au 30 mars 2019, il n'a pas pu être destinataire de l'arrêté litigieux ; il n'a pu prendre connaissance de cet arrêté que le 24 juin 2019 en se rendant au guichet de la préfecture de la Haute-Garonne.

En ce qui concerne l'arrêté pris dans son ensemble :

- l'arrêté litigieux a été signé par une autorité incompétente ;

- cet arrêté est insuffisamment motivé en méconnaissance des dispositions de l'article L. 211-2 du code des relations entre le public et l'administration.

En ce qui concerne la décision portant refus de titre de séjour :

- cette décision est entachée d'un défaut d'examen de sa situation personnelle ; en effet, le préfet ne pouvait apprécier sa situation en sa qualité de conjoint d'une ressortissante française, dès lors que, par courriel du 14 mars 2019, il avait informé la préfecture de la rupture de la communauté de vie avec son épouse et de la dégradation de son état de santé ; il ne pouvait donc pas faire l'objet d'un refus de titre de séjour sur le fondement des dispositions des 7° et 11° de l'article L. 313-11 et L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; d'ailleurs, sa situation revêt nécessairement des considérations humanitaires exceptionnelles ;

- elle porte une atteinte disproportionnée à son droit au respect de sa vie privée et familiale, en méconnaissance des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- elle est également entachée d'une erreur manifeste d'appréciation.

En ce qui concerne la décision portant obligation de quitter le territoire français :

- cette décision est dépourvue de base légale du fait de l'illégalité de la décision portant refus de titre de séjour ;

- elle est insuffisamment motivée en méconnaissance des dispositions du I de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- sur le fondement des dispositions des 7° et 11° de l'article L. 313-11 et L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, il ne pouvait faire l'objet d'une décision lui faisant obligation de quitter le territoire français.

En ce qui concerne la décision portant fixation du pays de destination :

- cette décision est dépourvue de base légale du fait de l'illégalité de la décision portant obligation de quitter le territoire français ;

- elle est insuffisamment motivée quant à sa situation personnelle.

Par un mémoire en défense, enregistré le 5 novembre 2021, le préfet de la Haute-Garonne conclut au rejet de la requête.

Il soutient que :

- la requête de première instance de M. D... est irrecevable, dès lors que l'arrêté litigieux lui a été régulièrement notifié le 22 mars 2019 avec avis de passage comme en atteste l'avis de réception joint à son mémoire ; ce pli recommandé a été retourné à l'expiration du délai de mise en instance fixé par le règlement postal avec la mention " Pli avisé et non réclamé " le 8 avril 2019 ;

- en tout état de cause, le tribunal a examiné sans aucune erreur avant de les écarter l'ensemble des moyens soulevés considération faite de ce que la décision n'est entachée d'aucune illégalité.

M. D... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision n° 2021/000029 du 25 février 2021 du bureau d'aide juridictionnelle du tribunal judiciaire de Bordeaux.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le code des relations entre le public et l'administration ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé la rapporteure publique, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le rapport de Mme Rey-Gabriac a été entendu au cours de l'audience publique.

Considérant ce qui suit :

1. M. D..., ressortissant marocain, est entré en France le 27 octobre 2011 sous couvert d'un passeport revêtu d'un visa de long séjour portant la mention " vie privée et familiale " valant titre de séjour du 10 octobre 2011 au 10 octobre 2012. Il a ensuite bénéficié d'une carte de séjour temporaire d'un an portant la mention " vie privée et familiale ", renouvelée entre le 11 octobre 2012 et le 10 octobre 2014. Après s'être vu refuser la délivrance d'une carte de résident d'une durée de dix ans qu'il avait sollicitée le 7 octobre 2014, il s'est vu délivrer une nouvelle carte de séjour temporaire d'un an portant la mention " vie privée et familiale ", valable du 7 juillet 2015 au 6 juillet 2016. Le 9 juin 2016, il a sollicité le renouvellement de son titre de séjour en qualité de conjoint d'une ressortissante française sur le fondement des dispositions du 4° de l'article L. 313-11 et du 3° de l'article L. 314-9 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Par arrêté du 20 novembre 2017, le préfet de la Haute-Garonne a refusé de faire droit à sa demande, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination. Par un jugement du 14 juin 2018, le tribunal administratif de Toulouse a annulé cet arrêté et a enjoint au préfet de la Haute-Garonne de réexaminer sa demande dans un délai d'un mois. Par arrêté du 20 mars 2019, le préfet de la Haute-Garonne a de nouveau refusé de faire droit à sa demande, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination. M. D... relève appel du jugement par lequel le tribunal administratif a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté comme étant irrecevable.

Sur la recevabilité de la demande de première instance :

2. Aux termes de l'article R. 776-2 du code de justice administrative : " (...) la notification d'une obligation de quitter le territoire français avec délai de départ volontaire, prise en application des 3°, 5°, 7° ou 8° du I de l'article L. 511-1 (...), fait courir un délai de trente jours pour contester cette obligation ainsi que les décisions relatives au séjour, au délai de départ volontaire, au pays de renvoi et à l'interdiction de retour ou à l'interdiction de circulation notifiées simultanément ". En vertu de l'article L. 512-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " I. ' L'étranger qui fait l'objet d'une obligation de quitter le territoire français (...) et qui dispose du délai de départ volontaire (...) peut, dans le délai de trente jours suivant sa notification, demander au tribunal administratif l'annulation de cette décision, ainsi que l'annulation de la décision relative au séjour, de la décision mentionnant le pays de destination (...) qui l'accompagnent le cas échéant ".

3. Pour rejeter la demande présentée par M. D... en première instance comme étant irrecevable, le tribunal administratif de Toulouse a relevé que sa requête, enregistrée au greffe du tribunal le 31 juillet 2019, était tardive. Cependant, si le pli de notification de la décision portant refus de séjour adressé à M. D... a été retourné à son expéditeur le 10 avril 2019 avec la mention " non réclamé ", il est établi par les pièces du dossier que l'état de santé de M. D..., qui a été hospitalisé du 14 décembre 2018 au 8 février 2019, puis, à nouveau, du 22 février au 30 mars 2019, en raison de la décompensation sévère de ses troubles psychiatriques, puis, une nouvelle fois, aux urgences du CHU de Toulouse le 10 avril 2019 à la suite d'une tentative de suicide, ne lui permettait pas, au vu des comptes-rendus d'hospitalisation et des certificats médicaux produits, de prendre connaissance du courrier recommandé que lui a adressé la préfecture à la date à laquelle il a été présenté. Par suite, dans les circonstances particulières de l'espèce, le délai de recours contentieux à l'encontre de la notification de l'arrêté ne pouvant être regardé comme ayant commencé à courir à compter du 10 avril 2019 au plus tard, M. D... est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Toulouse a rejeté sa demande comme tardive.

4. Il y a lieu pour la cour de se prononcer, par la voie de l'évocation, sur la demande présentée devant le tribunal administratif de Toulouse par M. D....

Sur les conclusions à fin d'annulation :

En ce qui concerne l'arrêté pris dans son ensemble :

5. En premier lieu, par un arrêté n° 31-2019-01-17-002 du 17 janvier 2019, publié le 18 janvier 2019 au recueil des actes administratifs spécial n° 33-2019-025, le préfet de la Haute-Garonne a donné délégation à Mme E... B..., directrice des migrations et de l'intégration, à l'effet de signer, en matière de police des étrangers, les décisions de refus de séjour à quelque titre que ce soit, les décisions prévues aux articles L. 511-1 à L. 511-3-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et les arrêtés portant décision fixant le pays de renvoi. Si M. D... soutient qu'il n'est pas établi que le préfet de la Haute-Garonne était absent ou empêché à la date de l'arrêté contesté, la délégation de signature accordée à Mme B..., qui liste de manière suffisamment précise les actes concernés, n'est pas conditionnée par l'absence ou l'empêchement du préfet. En outre, M. D... n'est pas fondé à soutenir que la délégation précitée n'était plus valable à la date de l'arrêté contesté, dès lors qu'elle n'a été abrogée que le 27 mars 2019 par un arrêté n° 31-2019-03-27-006 produit par le préfet en défense. Par suite, le moyen tiré de l'incompétence du signataire de l'arrêté contesté doit être écarté.

6. En second lieu, l'arrêté contesté comporte les considérations de droit et de fait qui en constituent le fondement. S'il vise les articles " L. 313-11 (4°), L. 313-9 (3°), L. 511-1-I (3° et dernier alinéa), II et III, L. 511-4 (7°), L. 513-1 à L. 513-4, R. 311-11, R. 311-13, R. 313-20, R. 313-35 et R. 313-36 " sans préciser de quel code ils sont issus, les dispositions appliquées au litige et le code dont elles sont issues sont citées dans ses motifs. Il n'en découle donc aucune ambiguïté quant aux dispositions de droit et la nature du code fondant l'arrêté contesté. Par suite, ce dernier est suffisamment motivé au regard des dispositions de l'article L. 211-2 du code des relations entre le public et l'administration.

En ce qui concerne la décision portant refus de titre de séjour :

7. En premier lieu, il ressort des pièces du dossier que le 9 juin 2016, M. D... a sollicité le renouvellement de son titre de séjour en qualité de conjoint d'une ressortissante française sur le fondement des dispositions du 4° de l'article L. 313-11 et du 3° de l'article L. 314-9 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Il est constant que le jugement n° 1800220 du 14 juin 2018 du tribunal administratif de Toulouse a annulé l'arrêté du 20 novembre 2017 par lequel le préfet de la Haute-Garonne avait refusé de faire droit à sa demande, lui avait fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et avait fixé le pays de destination, et a enjoint au préfet de réexaminer la demande de M. D... dans le délai d'un mois. Le préfet de la Haute-Garonne était donc tenu de réexaminer la situation de l'intéressé au regard des seules dispositions du 4° de l'article L. 313-11 et du 3° de l'article L. 314-9 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Contrairement à ce que soutient M. D..., le courriel envoyé le 14 mars 2019 aux services de la préfecture de la Haute-Garonne, dans lequel son conseil se borne à indiquer que l'intéressé avait bénéficié de plusieurs titres de séjour en sa qualité de conjoint d'une ressortissante française, que la communauté de vie était rompue, qu'il était actuellement hospitalisé pour une décompensation dépressive majeure, qu'il souhaitait connaître l'état d'avancement de l'instruction de son dossier et savoir s'il était encore possible de communiquer à la préfecture des certificats médicaux et une promesse d'embauche, ne constitue pas une demande de titre de séjour fondée sur les dispositions des 7° et 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Il ne ressort pas des pièces du dossier que l'intéressé aurait expressément sollicité la délivrance d'un titre de séjour sur le fondement de ces dispositions. Par suite, le moyen tiré de ce que le préfet de la Haute-Garonne n'aurait pas procédé à un examen sérieux et approfondi de sa situation personnelle au regard notamment des dispositions des 7° et 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile doit être écarté.

8. En deuxième lieu, si M. D... soutient qu'il ne pouvait faire l'objet d'une décision portant refus de titre de séjour sur le fondement des dispositions de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, dès lors que sa situation revêtirait des considérations humanitaires exceptionnelles du fait de son état de santé, il n'est ni allégué ni établi, ainsi qu'il a été dit au point précédent, que l'intéressé aurait fait valoir son état de santé à l'occasion de sa demande de renouvellement de son titre de séjour en qualité de conjoint d'une ressortissante française présentée le 9 juin 2016 ou qu'il aurait sollicité la délivrance d'un titre de séjour en raison de son état de santé. Au surplus, le préfet de la Haute-Garonne n'était pas tenu, en l'absence de dispositions expresses en ce sens, d'examiner d'office si l'intéressé pouvait prétendre à une autorisation de séjour sur le fondement des dispositions de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Par suite, le moyen doit être écarté.

9. En dernier lieu, aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui ".

10. Il ressort des pièces du dossier que M. D... est entré en France le 27 octobre 2011 sous couvert d'un passeport revêtu d'un visa de long séjour portant la mention " vie privée et familiale " valant titre de séjour du 10 octobre 2011 au 10 octobre 2012. S'il justifie avoir travaillé chaque année de 2012 à 2017, et avoir déclaré les revenus qu'il a perçus, il ne justifie pas de la pérennité de son insertion professionnelle, dès lors qu'il ressort des pièces du dossier que son parcours professionnel se caractérisait, à la date de l'arrêté litigieux, par une succession d'emplois de courte durée pour des postes de plongeur, aide électricien, agent de service, vendeur préparateur, employé en restauration et pizzaiolo. En outre, si M. D... se prévaut de la présence en France de sa sœur, de nationalité française, qui l'héberge depuis 2018, il ne produit aucune pièce de nature à démontrer la réalité et l'intensité des liens qu'il entretiendrait avec elle, ainsi qu'avec ses neveux. Par ailleurs, l'intéressé ne produit aucun élément de nature à justifier qu'il aurait noué en France des liens privés ou amicaux d'une particulière intensité, quand bien même il se prévaudrait de la durée de sa présence sur le territoire français. S'il s'est marié avec une ressortissante française en 2011 et a obtenu plusieurs titres de séjour en sa qualité de conjoint d'une ressortissante française, il indique lui-même s'être séparé de son épouse. Par ailleurs, s'il fait état de la gravité de son état de santé, ainsi qu'il a été dit précédemment, il n'établit pas avoir sollicité la délivrance d'un titre de séjour en raison de son état de santé. Enfin, l'intéressé est sans enfant et n'est pas dépourvu d'attaches dans son pays d'origine où vivent ses parents, son frère et sa sœur et où il vécu jusqu'à l'âge de 25 ans. Par conséquent, la décision portant refus de titre de séjour n'a pas porté au droit de l'intéressé au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée par rapport aux motifs de ce refus. Par suite, les moyens tirés de ce qu'elle méconnaîtrait les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et de ce qu'elle serait entachée d'une erreur manifeste d'appréciation doivent être écartés.

En ce qui concerne la décision portant obligation de quitter le territoire français :

11. En premier lieu, ainsi qu'il a été dit précédemment, M. D... n'est pas fondé à soutenir que la décision lui faisant obligation de quitter le territoire français serait dépourvue de base légale du fait de l'illégalité de la décision refusant de l'admettre au séjour. Par suite, le moyen doit être écarté.

12. En deuxième lieu, aux termes de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " I. ' L'autorité administrative peut obliger à quitter le territoire français un étranger non ressortissant d'un État membre de l'Union européenne, d'un autre État partie à l'accord sur l'Espace économique européen ou de la Confédération suisse et qui n'est pas membre de la famille d'un tel ressortissant au sens des 4° et 5° de l'article L. 121-1, lorsqu'il se trouve dans l'un des cas suivants : (...) 3° Si la délivrance ou le renouvellement d'un titre de séjour a été refusé à l'étranger ou si le titre de séjour qui lui avait été délivré lui a été retiré (...) La décision énonçant l'obligation de quitter le territoire français est motivée. Elle n'a pas à faire l'objet d'une motivation distincte de celle de la décision relative au séjour dans les cas prévus aux 3° et 5° du présent I, sans préjudice, le cas échéant, de l'indication des motifs pour lesquels il est fait application des II et III (...) ".

13. Il résulte des dispositions précitées de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile que la décision en litige, qui a été prise concomitamment au refus de titre de séjour de l'intéressé, n'avait pas à faire l'objet d'une motivation distincte de cette dernière décision. Dès lors, le moyen tiré de l'insuffisance de motivation de la décision en litige doit être écarté comme inopérant.

14. En dernier lieu, M. D... ne saurait soutenir que, sur le fondement des dispositions des 7° et 11° de l'article L. 313-11 et L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, il ne pouvait faire l'objet d'une décision lui faisant obligation de quitter le territoire français, dès lors qu'une telle décision n'a pas pour objet de refuser à l'intéressé un titre de séjour. Ce moyen, qui est inopérant, doit donc être écarté.

En ce qui concerne la décision portant fixation du pays de destination :

15. En premier lieu, ainsi qu'il a été dit précédemment, M. D... n'est pas fondé à soutenir que la décision portant fixation du pays de destination serait dépourvue de base légale du fait de l'illégalité de la décision lui faisant obligation de quitter le territoire français. Par suite, le moyen doit être écarté.

16. En second lieu, la décision en litige vise les stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et indique que M. D... n'établit pas être exposé à des peines ou traitements contraires à ladite convention en cas de retour dans son pays d'origine, vu notamment l'absence de demande d'admission au bénéfice de l'asile. Dans ces conditions, cette décision est suffisamment motivée et le moyen doit être écarté.

17. Il résulte de tout ce qui précède que M. D... n'est pas fondé à demander l'annulation de l'arrêté du 20 mars 2019. Par voie de conséquence, il y a lieu de rejeter ses conclusions à fin d'injonction et d'astreinte ainsi que celles présentées au titre des dispositions des articles 37 de la loi du 10 juillet 1991 et L. 761-1 du code de justice administrative.

DÉCIDE :

Article 1er : Le jugement du tribunal administratif de Toulouse est annulé.

Article 2 : La demande portée par M. D... devant le tribunal administratif de Toulouse est rejetée.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... D... et au ministre de l'intérieur. Une copie sera transmise pour information au préfet de la Haute-Garonne.

Délibéré après l'audience du 18 novembre 2021 à laquelle siégeaient :

M. Éric Rey-Bèthbéder, président,

Mme Frédérique Munoz-Pauziès, présidente-assesseure,

Mme C... Rey-Gabriac, première conseillère.

Rendu public par mise à dispositions au greffe, le 16 décembre 2021.

La rapporteure,

Florence Rey-Gabriac

Le président

Éric Rey-BèthbéderLa greffière,

Angélique Bonkoungou

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.

N°21BX00740 8


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Bordeaux
Formation : 7ème chambre (formation à 3)
Numéro d'arrêt : 21BX00740
Date de la décision : 16/12/2021
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-03 Étrangers. - Obligation de quitter le territoire français (OQTF) et reconduite à la frontière.


Composition du Tribunal
Président : M. REY-BETHBEDER
Rapporteur ?: Mme Florence REY-GABRIAC
Rapporteur public ?: Mme MADELAIGUE
Avocat(s) : SADEK

Origine de la décision
Date de l'import : 28/12/2021
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.bordeaux;arret;2021-12-16;21bx00740 ?
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