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17/12/2021 | FRANCE | N°21BX02526

France | France, Cour administrative d'appel de Bordeaux, 4ème chambre, 17 décembre 2021, 21BX02526


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

A... C... B... a demandé au tribunal administratif de Mayotte d'annuler l'arrêté du 5 juin 2020 par lequel le préfet de Mayotte a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligée à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination.

Par une ordonnance n° 2000775 du 12 avril 2021, le président du tribunal administratif de Mayotte a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour administrative d'appel :

Par une requête et des pièces,

enregistrées les 14 juin et le 6 août 2021, A... B..., représentée par Me Ousseni, demande à la c...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

A... C... B... a demandé au tribunal administratif de Mayotte d'annuler l'arrêté du 5 juin 2020 par lequel le préfet de Mayotte a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligée à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination.

Par une ordonnance n° 2000775 du 12 avril 2021, le président du tribunal administratif de Mayotte a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour administrative d'appel :

Par une requête et des pièces, enregistrées les 14 juin et le 6 août 2021, A... B..., représentée par Me Ousseni, demande à la cour :

1°) d'annuler l'ordonnance n° 2000775 du président du tribunal administratif de Mayotte du 12 avril 2021 ;

2°) d'annuler l'arrêté du 5 juin 2020 du préfet de Mayotte ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 3 000 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de le condamner aux entiers dépens.

Elle soutient que :

- eu égard à sa situation personnelle et familiale, la décision lui refusant le séjour porte une atteinte manifestement excessive au droit au respect de sa vie privée et familiale garanti par l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et méconnaît les dispositions du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, dans sa rédaction alors en vigueur ; elle réside en France depuis l'année 2009 et elle n'a jamais quitté le territoire depuis lors ; sa fille majeure, de nationalité française, résidait à ses côtés avant de se rendre en métropole pour y suivre des études supérieures ; ses deux autres enfants, mineurs, sont scolarisés à Mayotte ; elle subvient à l'entretien de ses trois enfants ; elle dispose d'une promesse d'embauche et n'a plus d'attaches personnelles aux Comores ;

- elle est entachée d'une erreur manifeste dans l'appréciation de ses conséquences sur sa situation personnelle.

Par un mémoire en défense, enregistré le 20 octobre 2021, le préfet de Mayotte conclut au rejet de la requête en faisant valoir que la requête est irrecevable pour tardiveté et qu'en tout état de cause, les moyens soulevés par la requérante ne sont pas fondés

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code de justice administrative.

La présidente de la formation de jugement a dispensé la rapporteure publique, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le rapport de M. D... a été entendu au cours de l'audience publique.

Considérant ce qui suit :

1. A... B..., ressortissante comorienne née le 18 février 1980, a déclaré être entrée en France au cours de l'année 2009 et a sollicité la délivrance d'un titre de séjour sur le fondement des dispositions du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, dans sa rédaction alors en vigueur. Par un arrêté du 5 juin 2020, le préfet de Mayotte a rejeté sa demande de titre de séjour et l'a obligée à quitter le territoire français dans un délai de trente jours à destination de son pays d'origine. A... B... relève appel de l'ordonnance du 12 avril 2021 par laquelle le président du tribunal administratif de Mayotte a, sur le fondement du 7° de l'article R. 222-1 du code de justice administrative, rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 5 juin 2020.

2. Aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale (...) 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui. ". Aux termes du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, dans sa rédaction alors en vigueur : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention "vie privée et familiale" est délivrée de plein droit : (...) / 7° A l'étranger ne vivant pas en état de polygamie, qui n'entre pas dans les catégories précédentes ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, dont les liens personnels et familiaux en France, appréciés notamment au regard de leur intensité, de leur ancienneté et de leur stabilité, des conditions d'existence de l'intéressé, de son insertion dans la société française ainsi que de la nature de ses liens avec la famille restée dans le pays d'origine, sont tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus, sans que la condition prévue à l'article L. 313-2 soit exigée. L'insertion de l'étranger dans la société française est évaluée en tenant compte notamment de sa connaissance des valeurs de la République (...) ".

3. A... B... soutient qu'elle réside à Mayotte depuis l'année 2009 et qu'elle participe à l'entretien et à l'éducation de sa fille majeure, de nationalité française, qui résidait à ses côtés avant de se rendre en métropole pour y suivre des études supérieures ainsi que de ses deux autres enfants mineurs, scolarisés à Pamandzi. Elle indique par ailleurs disposer d'une promesse d'embauche et ne plus avoir d'attaches aux Comores. Toutefois, les quelques documents produits, constitués pour l'essentiel d'avis d'imposition établis entre 2016 et 2020 et de factures dont certaines ne comportent pas l'identification du destinataire ou ne sont pas établies à son nom, ne suffisent pas à justifier d'une présence habituelle et continue de la requérante et de ses enfants sur le territoire, notamment pour les années 2009 à 2011 et 2012 à 2016. S'il ressort des pièces du dossier que A... B... contribue effectivement à l'entretien de sa fille majeure, par l'envoi régulier de mandats cash, elle ne fait état d'aucune circonstance de nature à établir que la relation qu'elle entretient avec elle ne pourrait se poursuivre dans des conditions similaires en cas d'exécution de la mesure d'éloignement. De même, s'il est constant que les enfants mineurs A... A... B..., nés en 2004 et en 2006 aux Comores, sont scolarisés sur le territoire en classe de 2nde et 3ème, elle n'établit ni même n'allègue qu'ils seraient dans l'impossibilité de poursuivre leur scolarité dans des conditions satisfaisantes en cas de reconstitution de la cellule familiale dans ce pays. La requérante ne justifie pas davantage de l'absence d'attaches personnelles dans son pays d'origine où elle a résidé, à tout le moins, selon ses affirmations, jusqu'à l'âge de 29 ans ni du développement d'un réseau dense de relations sociales sur le territoire, les trois attestations en ce sens versées au dossier, établies postérieurement à la date la décision en litige, ne suffisant pas à en justifier. Enfin, malgré la production d'une promesse d'embauche, la requérante n'établit ni même n'allègue avoir exercé une activité professionnelle depuis son entrée sur le territoire et disposer de ressources financières stables. Par suite, compte tenu des conditions et de la durée du séjour en France de la requérante, le préfet de Mayotte n'a pas porté à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels la décision lui refusant le séjour a été prise et n'a ainsi pas méconnu les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, ni les dispositions du 7° de l'article L. 313-11 précitées. Pour les mêmes motifs, il n'a pas plus entaché cette décision d'une erreur manifeste dans l'appréciation de ses conséquences sur la situation personnelle de l'intéressée.

4. Il résulte de ce qui précède, sans qu'il soit besoin d'examiner la fin de non-recevoir opposée en défense, que A... B... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par l'ordonnance attaquée, le président du tribunal administratif de Mayotte a rejeté sa demande. Il y a lieu de rejeter, par voie de conséquence, les conclusions tendant à l'application des dispositions des articles L. 761-1 et R. 761-1 du code de justice administrative.

DECIDE :

Article 1er : La requête de A... B... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à A... C... B... et au ministre de l'intérieur.

Copie en sera adressée au préfet de Mayotte.

Délibéré après l'audience du 7 décembre 2021 à laquelle siégeaient :

A... Evelyne Balzamo, présidente,

M. Dominique Ferrari, président-assesseur,

M. Michaël Kauffmann, premier conseiller,

Rendu public par mise à disposition au greffe le 17 décembre 2021.

Le rapporteur,

Michaël D... La présidente,

Evelyne BalzamoLe greffier,

Lionel Boullemant

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.

N° 21BX025264


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Bordeaux
Formation : 4ème chambre
Numéro d'arrêt : 21BX02526
Date de la décision : 17/12/2021
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-01-03 Étrangers. - Séjour des étrangers. - Refus de séjour.


Composition du Tribunal
Président : Mme BALZAMO
Rapporteur ?: M. Michaël KAUFFMANN
Rapporteur public ?: Mme CABANNE
Avocat(s) : OUSSENI

Origine de la décision
Date de l'import : 28/12/2021
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.bordeaux;arret;2021-12-17;21bx02526 ?
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