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24/03/2022 | FRANCE | N°21BX04586

France | France, Cour administrative d'appel de Bordeaux, 7ème chambre (formation à 3), 24 mars 2022, 21BX04586


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme C... A... B... a demandé au tribunal administratif de Limoges d'annuler l'arrêté du 3 septembre 2021 par lequel le préfet de l'Indre a refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination de la mesure d'éloignement.

Par un jugement n° 2101525 du 25 novembre 2021, le tribunal administratif de Limoges a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée l

e 17 décembre 2021, Mme A... B..., représentée par Me Gomot-Pinard, demande à la cour :

1°) d...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme C... A... B... a demandé au tribunal administratif de Limoges d'annuler l'arrêté du 3 septembre 2021 par lequel le préfet de l'Indre a refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination de la mesure d'éloignement.

Par un jugement n° 2101525 du 25 novembre 2021, le tribunal administratif de Limoges a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 17 décembre 2021, Mme A... B..., représentée par Me Gomot-Pinard, demande à la cour :

1°) de lui accorder le bénéfice de l'aide juridictionnelle provisoire en application de l'article 20 de la loi du 10 juillet 1991 ;

2°) d'annuler ce jugement du 25 novembre 2021 du tribunal administratif de Limoges ;

3°) d'annuler l'arrêté du 3 septembre 2021 par lequel la préfète de l'Indre a refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français et a fixé le pays de la mesure d'éloignement ;

4°) d'enjoindre au préfet de l'Indre de lui délivrer un titre de séjour et, à titre subsidiaire, de procéder au réexamen de sa demande dans un délai de quinze jours à compter de la notification de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 200 euros par jours de retard.

Elle soutient que :

En ce qui concerne la décision de refus de titre de séjour :

- la décision méconnaît le 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la décision méconnaît les dispositions du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- la décision méconnaît les dispositions de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.

Mme A... B... a été admise au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par décision du 10 février 2022.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le code des relations entre le public et l'administration ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- l'arrêté du 27 décembre 2016 relatif aux conditions d'établissement et de transmission des certificats médicaux, rapports médicaux et avis mentionnés aux articles R. 313-22, R. 313-23 et R. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé la rapporteure publique, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le rapport de Mme Nathalie Gay a été entendu au cours de l'audience publique.

Considérant ce qui suit :

1. Mme A... B..., née le 14 février 1989, de nationalité dominicaine, qui déclare être entrée irrégulièrement en France en novembre 2018, a sollicité, le 29 janvier 2020, la délivrance d'un titre de séjour sur le fondement du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Par un arrêté du 3 septembre 2021, le préfet de l'Indre a rejeté sa demande, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel elle pourrait être reconduite. Mme A... B... relève appel du jugement du 25 novembre 2021 par lequel le tribunal administratif de Limoges a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté.

Sur l'admission à l'aide juridictionnelle provisoire :

2. Mme A... B... a été admise au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision n° 2022/000169 du bureau d'aide juridictionnelle du 10 février 2022. Par suite, ses conclusions tendant à obtenir l'aide juridictionnelle à titre provisoire sont devenues sans objet. Il n'y a pas lieu de statuer sur ces conclusions.

Sur les conclusions à fin d'annulation :

En ce qui concerne la décision refusant la délivrance d'un titre de séjour :

3. Aux termes de l'article L. 425-9 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, anciennement codifié au 11° de l'article L. 313-11 du même code : " L'étranger, résidant habituellement en France, dont l'état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait avoir pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité et qui, eu égard à l'offre de soins et aux caractéristiques du système de santé dans le pays dont il est originaire, ne pourrait pas y bénéficier effectivement d'un traitement approprié, se voit délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " d'une durée d'un an. La condition prévue à l'article L. 412-1 n'est pas opposable. / La décision de délivrer cette carte de séjour est prise par l'autorité administrative après avis d'un collège de médecins du service médical de l'Office français de l'immigration et de l'intégration, dans des conditions définies par décret en Conseil d'État (...) ".

4. La partie qui justifie d'un avis du collège de médecins du service médical de l'Office français de l'immigration et de l'intégration qui lui est favorable doit être regardée comme apportant des éléments de fait susceptibles de faire présumer l'existence ou l'absence d'un état de santé de nature à justifier la délivrance ou le refus d'un titre de séjour. Dans ce cas, il appartient à l'autre partie, dans le respect des règles relatives au secret médical, de produire tous éléments permettant d'apprécier l'état de santé de l'étranger et, le cas échéant, si, eu égard à l'offre de soins et aux caractéristiques du système de santé dans le pays dont il est originaire, il pourrait ou non y bénéficier effectivement d'un traitement approprié. La conviction du juge, à qui il revient d'apprécier si l'état de santé d'un étranger justifie la délivrance d'un titre de séjour dans les conditions ci-dessus rappelées, se détermine au vu de ces échanges contradictoires.

5. L'avis du collège des médecins de l'OFII rendu le 23 juillet 2021 indique que l'état de santé de Mme A... B... nécessite une prise en charge médicale dont le défaut peut entraîner des conséquences d'une exceptionnelle gravité et que, eu égard à l'offre de soins et aux caractéristiques du système de santé dans le pays dont elle est originaire, elle peut y bénéficier effectivement d'un traitement approprié. Il ressort des pièces du dossier que si Mme A... B... souffre d'une myasthénie auto-immune, pour laquelle elle est suivie au sein du service de neurologie du centre hospitalier universitaire de Limoges, le certificat médical établi le 11 mai 2021, qui indique que la situation de l'intéressée est stable et qu'elle peut continuer le traitement sous forme de comprimés de Mestinon, ne se prononce pas sur l'indisponibilité de ce traitement en République dominicaine. L'appelante ne peut, en outre, utilement se prévaloir de l'état de santé de sa sœur, qui est atteinte d'une forme extrêmement sévère de cette maladie et qui bénéficie d'un titre de séjour. Les autres pièces versées au dossier ne permettent pas davantage de remettre en cause l'avis du collège des médecins de l'Office français de l'immigration et de l'intégration quant à l'indisponibilité d'un traitement approprié à son état de santé dans son pays d'origine. Ainsi, le préfet de l'Indre n'a pas fait une inexacte application des dispositions de l'article L. 425-9 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile en rejetant la demande de titre de séjour présentée par l'intéressée sur ce fondement.

6. Aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1° Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance ; / 2° Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui ". Aux termes de l'article L. 423-23 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'étranger qui n'entre pas dans les catégories prévues aux articles L. 423-1, L. 423-7, L. 423-14, L. 423-15, L. 423-21 et L. 423-22 ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, et qui dispose de liens personnels et familiaux en France tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus, se voit délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " d'une durée d'un an, sans que soit opposable la condition prévue à l'article L. 412-1. / Les liens mentionnés au premier alinéa sont appréciés notamment au regard de leur intensité, de leur ancienneté et de leur stabilité, des conditions d'existence de l'étranger, de son insertion dans la société française ainsi que de la nature de ses liens avec sa famille restée dans son pays d'origine. / L'insertion de l'étranger dans la société française est évaluée en tenant compte notamment de sa connaissance des valeurs de la République ".

7. Il ressort des pièces du dossier que si Mme A... B... se prévaut de sa qualité de mère d'un enfant français né le 18 avril 2019, elle n'apporte aucune pièce permettant d'établir la contribution effective du père à l'entretien et à l'éducation de l'enfant. La circonstance qu'elle a saisi le juge aux affaires familiales près le tribunal judiciaire de Châteauroux, le 20 septembre 2021, postérieurement à la décision contestée, aux fins de fixer les droits parentaux, n'a pas d'incidence sur la légalité de la décision, qui s'apprécie à la date de son édiction. En outre, il ressort des pièces du dossier que l'appelante déclare être entrée en France en novembre 2018, à l'âge de 29 ans et n'est pas dépourvue d'attaches dans son pays d'origine où résident notamment deux de ses enfants nés en 2009 et 2014. Dans ces conditions, la décision de refus de séjour n'a pas porté à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus et n'a, dès lors, méconnu ni les dispositions de l'article L. 423-23 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ni les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.

8. Le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, devenu l'article L. 435-1 du même code, n'est pas assorti de précisions suffisantes permettant à la cour d'en apprécier le bien-fondé.

9. Il résulte de tout ce qui précède que Mme A... B... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Limoges a rejeté sa demande. Par voie de conséquence, ses conclusions à fin d'injonction et d'astreinte ne peuvent qu'être rejetées.

DÉCIDE :

Article 1er : Il n'y a pas lieu de statuer sur la demande de Mme A... B... tendant à son admission à l'aide juridictionnelle provisoire.

Article 2 : Le surplus de la requête de Mme A... B... est rejeté.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à Mme A... B... et au ministre de l'intérieur.

Une copie sera transmise pour information au préfet de l'Indre.

Délibéré après l'audience du 24 février 2022 à laquelle siégeaient :

M. Éric Rey-Bèthbéder, président,

Mme Frédérique Munoz-Pauziès, présidente-assesseure,

Mme Nathalie Gay, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe, le 24 mars 2022.

La rapporteure,

Nathalie Gay

Le président

Éric Rey-BèthbéderLa greffière,

Angélique Bonkoungou

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.

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Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Bordeaux
Formation : 7ème chambre (formation à 3)
Numéro d'arrêt : 21BX04586
Date de la décision : 24/03/2022
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-03 Étrangers. - Obligation de quitter le territoire français (OQTF) et reconduite à la frontière.


Composition du Tribunal
Président : M. REY-BETHBEDER
Rapporteur ?: Mme Nathalie GAY
Rapporteur public ?: Mme MADELAIGUE
Avocat(s) : GOMOT-PINARD

Origine de la décision
Date de l'import : 05/04/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.bordeaux;arret;2022-03-24;21bx04586 ?
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