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19/05/2022 | FRANCE | N°20BX03727

France | France, Cour administrative d'appel de Bordeaux, 1ère chambre, 19 mai 2022, 20BX03727


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Monsieur D... A... a demandé au tribunal administratif de Saint-Barthélemy d'annuler la délibération du 11 janvier 2019 par laquelle le conseil exécutif de la collectivité d'outre-mer de Saint-Barthélemy a refusé de lui délivrer un permis de construire ainsi que la décision du 13 mai 2019 rejetant son recours gracieux.

Par un jugement n° 1900020 du 22 septembre 2020, le tribunal administratif de Saint-Barthélemy a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour administrative d'appel :
r>Par une requête et un mémoire, enregistrés le 17 novembre 2020 et le 8 juillet 2021, M. A......

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Monsieur D... A... a demandé au tribunal administratif de Saint-Barthélemy d'annuler la délibération du 11 janvier 2019 par laquelle le conseil exécutif de la collectivité d'outre-mer de Saint-Barthélemy a refusé de lui délivrer un permis de construire ainsi que la décision du 13 mai 2019 rejetant son recours gracieux.

Par un jugement n° 1900020 du 22 septembre 2020, le tribunal administratif de Saint-Barthélemy a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour administrative d'appel :

Par une requête et un mémoire, enregistrés le 17 novembre 2020 et le 8 juillet 2021, M. A..., représenté par Me Delavallade, demande à la cour, dans le dernier état de ses écritures :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Saint-Barthélemy ;

2°) d'annuler la délibération du 11 janvier 2019 ainsi que la décision du 13 mai 2019 de rejet de son recours gracieux ;

3°) d'enjoindre à la collectivité de Saint-Barthélemy de réexaminer sa demande et de prendre une nouvelle décision dans un délai d'un mois à compter de la notification du présent arrêt ;

4°) de mettre à la charge de la collectivité de Saint-Barthélemy une somme de 4 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- la délibération du 11 janvier 2019 est entachée d'un défaut de motivation ;

- elle est entachée d'erreur de fait dès lors qu'il justifie de sa capacité à produire sa propre énergie et qu'il produit un certificat d'urbanisme mentionnant une desserte en électricité ;

- elle est illégale en raison de l'illégalité du classement en zone N de la parcelle d'assiette du projet par la carte d'urbanisme de Saint-Barthélemy, lequel est entaché d'une erreur manifeste d'appréciation, méconnait le principe d'égalité et est contraire à l'article 2-1 du code de l'urbanisme de Saint-Barthélemy qui autorise les constructions dans les espaces urbanisés.

Par deux mémoires en défense, enregistrés les 5 février 2021 et 3 septembre 2021, la collectivité de Saint-Barthélemy, représentée par Me Destarac, conclut au rejet de la requête et demande qu'une somme de 3 000 euros soit mise à la charge de M. A... au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que les moyens soulevés ne sont pas fondés.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- l'ancien code de l'urbanisme de Saint-Barthélemy ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme B... C... ;

- les conclusions de M. Romain Roussel, rapporteur public ;

- les observations de Me Delavallade, représentant M. A..., et de Me Barreau, représentant la collectivité de Saint-Barthélemy.

Considérant ce qui suit :

1. Par une délibération du 11 janvier 2019, le conseil exécutif de la collectivité de Saint-Barthélemy a refusé de délivrer à M. A... un permis de construire portant sur l'édification d'une résidence principale sur la parcelle cadastrée section AP n° 102 située à Saint-Barthélemy. M. A... a sollicité, auprès du maire, par un courrier du 13 mars 2019, le retrait de cette délibération. M. A... relève appel du jugement du 22 septembre 2020 par lequel le tribunal administratif de Saint-Barthélemy a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cette délibération et de la décision implicite de rejet de son recours gracieux.

2. La délibération en litige vise les dispositions d'urbanisme applicables, notamment le code de l'urbanisme de Saint-Barthélemy ainsi que la délibération du 24 février 2017 portant approbation de la carte d'urbanisme, et relève que le terrain d'assiette projeté se situe en zone naturelle de la carte d'urbanisme et n'est pas desservi en réseau électrique. Après avoir cité les dispositions du règlement applicable à la zone N et l'article 66 de l'ancien code de l'urbanisme de Saint-Barthélemy alors applicable, elle précise que le projet de construction d'une résidence principale n'entre dans aucune des exceptions, prévues à l'article N 2 - IV, à la règle d'inconstructibilité posée par l'article N1 et qu'il n'est pas conforme à l'article 66 en l'absence de desserte en électricité. [0]Ces indications étaient suffisantes pour permettre à M. A... de comprendre et de contester le refus qui lui a été opposé. Par suite, le moyen tiré de l'insuffisante motivation de la délibération litigieuse doit être écarté.

3. D'une part, si M. A... conteste l'absence de desserte de sa parcelle par le réseau électrique, en se prévalant d'un certificat d'urbanisme délivré en 1976 qui indiquait que la parcelle se situait dans une zone résidentielle avec électricité, il ressort de l'avis de la direction des services techniques de la collectivité de Saint-Barthélemy que la parcelle AP 102 n'était pas desservie par le réseau électrique à la date de sa demande de permis de construire. D'autre part, si M. A... soutient qu'il justifie de sa capacité à produire sa propre énergie, il ressort des pièces du dossier que la demande de permis de construire ne comportait aucune précision sur ce point et il ne peut se prévaloir utilement d'une étude postérieure, au demeurant non produite, ni des éléments figurant dans une demande de permis de construire présentée en 2010. Par suite, le moyen tiré de ce que cette décision serait entachée d'erreur de fait s'agissant de l'alimentation en électricité de la parcelle AP 102 doit être écarté.

4. M. A... excipe de l'illégalité de la carte communale de Saint-Barthélemy en tant qu'elle a décidé du classement de la parcelle lui appartenant dans la zone naturelle correspondant, aux termes du règlement dudit document d'urbanisme, " aux espaces qui sont inconstructibles du seul fait de leur caractère naturel, de l'absence d'équipement et de l'obligation de ne pas disperser les constructions sur le territoire de la collectivité " et où sont interdites, en vertu de l'article N 2 - IV, " les constructions nouvelles ".

5. L'article 2 de l'ancien code de l'urbanisme de Saint-Barthélemy, applicable à la date de la décision attaquée, prévoit qu'" en l'absence d'une carte d'urbanisme opposable aux tiers ", les constructions et installations ne sont possibles que dans les espaces urbanisés de la collectivité, sauf pour les exceptions qu'il énumère limitativement. Aux termes de l'article 14 de ce même code : " La carte d'urbanisme comporte un règlement qui fixe les règles générales et les servitudes d'utilisation des sols, qui peuvent notamment comporter l'interdiction de construire, délimiter les zones constructibles et les zones naturelles ou agricoles à protéger et définir les règles concernant l'implantation des constructions. A ce titre, le règlement peut : 1° Préciser l'affectation des sols selon les usages principaux qui peuvent en être fait ou la nature des activités qui peuvent y être exercées (...) 7° identifier et localiser les éléments de paysage et délimiter les quartiers, îlots, immeubles, espaces public, monuments, sites et secteurs à protéger ou à mettre en valeur pour des motifs d'ordre culturel, historique ou écologique et définir, le cas échéant, les prescriptions de nature à assurer leur protection (...)".

6. En application de ces dispositions, il appartient aux auteurs du document d'urbanisme que constitue la carte d'urbanisme de déterminer les partis d'aménagement à retenir pour le territoire concerné par ce document, en tenant compte de la situation existante et des perspectives d'avenir, et de fixer en conséquence le zonage déterminant la constructibilité des terrains. Ils ne sont pas liés, pour déterminer l'affectation future des divers secteurs, par les modalités existantes d'utilisation des sols, dont ils peuvent prévoir la modification dans l'intérêt de l'urbanisme et ils ne sont pas tenus, pour fixer le zonage, de respecter les limites des propriétés. Leur appréciation sur ces différents points ne peut être censurée par le juge administratif qu'au cas où elle serait entachée d'une erreur manifeste ou fondée sur des faits matériellement inexacts.

7. Il résulte des dispositions citées ci-dessus de l'article 2 de l'ancien code de l'urbanisme de Saint-Barthélemy que la règle de la constructibilité limitée aux zones urbanisées qu'elles prévoient ne peut plus être mise en œuvre à partir de l'entrée en vigueur de la carte d'urbanisme. Il résulte par ailleurs des principes rappelés au point 6 que la seule circonstance qu'un terrain a pu, dans le passé, être regardé comme inclus dans les parties urbanisées de la collectivité ne fait pas obstacle à ce que ce terrain puisse être classé pour l'avenir en zone inconstructible par la carte d'urbanisme. Par suite, le moyen tiré de ce que ce classement serait entaché d'erreur de droit en positionnant en zone inconstructible des parcelles qui avaient pu être regardées, avant l'adoption de la carte, comme situées dans les parties urbanisées de la collectivité doit être écarté.

8. Il ressort des pièces du dossier que le rapport de présentation de la carte d'urbanisme de Saint-Barthélemy adopté en 2017 précise que " L'objectif de la collectivité est de tendre à ce que le territoire soit en capacité de se renouveler dans ses limites urbaines (...), en limitant au maximum les extensions périphériques de façon à préserver, pour l'avenir, des espaces naturels existants" et retient, au titre de l'orientation " organiser le territoire urbain de manière durable ", la limitation de l'étalement urbain et, au titre de l'orientation " préserver et mettre en valeur le patrimoine naturel et bâti ", la protection des espaces naturels ou sensibles. Il ressort également des pièces du dossier, et notamment des plans cadastraux et des photographies, que la parcelle en litige, de près de 2 500 m2, située en bord de mer et vierge de toute construction, est bordée par des parcelles à l'état naturel et par une route. Elle n'est pas reliée au réseau public d'électricité et ne dispose pas d'un accès direct à la voirie. Si des constructions se situent à proximité de cette parcelle, et relèvent pour partie de la zone UR correspondant à une zone d'urbanisation de faible densité, elles sont éloignées les unes des autres et entourées d'une forte végétation. Au regard des caractéristiques de la parcelle en cause et compte tenu du parti d'aménagement retenu par les auteurs de la carte d'urbanisme, le classement en zone N de la totalité de la parcelle du requérant n'est pas entaché d'erreur manifeste d'appréciation. Dans ce contexte, les circonstances que la collectivité a réalisé en 2010 des travaux de préfiguration d'un accès futur dans le cadre de l'élargissement de la route et que le tribunal administratif de Saint-Barthélemy a jugé le 26 octobre 2012, avant l'adoption de la carte d'urbanisme, que cette parcelle ne pouvait être regardée comme étant située en dehors des parties urbanisées de Saint-Barthélemy, ne sont pas de nature à remettre en cause cette appréciation.

9. Enfin, compte tenu des principes rappelés au point 6, et dans la mesure où la délimitation retenue ne repose pas, comme en l'espèce, s'agissant de la délimitation entre les zones naturelles et constructibles, sur une appréciation manifestement erronée et n'est pas entachée d'un détournement de pouvoir, elle ne porte pas une atteinte illégale au principe d'égalité des citoyens devant la loi dès lors qu'il est de la nature de toute réglementation d'urbanisme de distinguer des zones où les possibilités de construire sont différentes ainsi que des zones inconstructibles. Ainsi, les circonstance qu'une parcelle désormais classée en zone N comporte des constructions et que des parcelles partiellement classées en zone UR constructible se situent à une cinquantaine de mètres de la parcelle litigieuse ne sont pas de nature à caractériser une discrimination et une rupture du principe de l'égalité devant la loi.

10. Il résulte de ce qui a été dit aux points 6 à 9 que le moyen tiré de l'illégalité de la carte d'urbanisme en tant qu'elle classe la parcelle AP 102 en zone naturelle doit être écarté.

11. Il résulte de tout ce qui précède que M. A... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Saint-Barthélemy a rejeté ses conclusions à fin d'annulation. Par suite sa requête doit être rejetée y compris ses conclusions à fin d'injonction et celles présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Il y a lieu, en revanche, dans les circonstances de l'espèce, en application des mêmes dispositions, de mettre à la charge de M. A..., partie perdante à l'instance, la somme de 1 500 euros à verser à la collectivité de Saint-Barthélemy au titre des frais non compris dans les dépens qu'elle a exposés.

DECIDE :

Article 1er : La requête de M. A... est rejetée.

Article 2 : M. A... versera à la collectivité de Saint-Barthélemy une somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. D... A... et à la collectivité de Saint-Barthélemy.

Délibéré après l'audience du 21 avril 2022 à laquelle siégeaient :

Mme Marianne Hardy, présidente,

Mme Fabienne Zuccarello, présidente-assesseure,

Mme Christelle Brouard-Lucas, première conseillère,

Rendu public par mise à disposition au greffe, le 19 mai 2022.

La rapporteure,

Christelle C... La présidente,

Marianne Hardy La greffière,

Angélique Bonkoungou

La République mande et ordonne au représentant de l'Etat à Saint-Barthélemy en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.

N° 20BX03727 2


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Bordeaux
Formation : 1ère chambre
Numéro d'arrêt : 20BX03727
Date de la décision : 19/05/2022
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : Mme HARDY
Rapporteur ?: Mme Christelle BROUARD-LUCAS
Rapporteur public ?: M. ROUSSEL
Avocat(s) : DELAVALLADE RAIMBAULT

Origine de la décision
Date de l'import : 19/07/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.bordeaux;arret;2022-05-19;20bx03727 ?
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