La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

19/05/2022 | FRANCE | N°20BX03768

France | France, Cour administrative d'appel de Bordeaux, 1ère chambre, 19 mai 2022, 20BX03768


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A... C... a demandé au tribunal administratif de Bordeaux d'annuler la délibération du 29 janvier 2019 par laquelle le conseil municipal de Beaupuy a approuvé la révision du plan local d'urbanisme, ainsi que la décision du 5 juin 2019 par laquelle le maire a rejeté son recours gracieux.

Par un jugement n° 1903809 du 23 septembre 2020, le tribunal administratif de Bordeaux a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 19 novembre 2020, et un mé

moire enregistré le 17 mars 2022, M. C..., représenté par Me Novion, demande à la cour :

1°...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A... C... a demandé au tribunal administratif de Bordeaux d'annuler la délibération du 29 janvier 2019 par laquelle le conseil municipal de Beaupuy a approuvé la révision du plan local d'urbanisme, ainsi que la décision du 5 juin 2019 par laquelle le maire a rejeté son recours gracieux.

Par un jugement n° 1903809 du 23 septembre 2020, le tribunal administratif de Bordeaux a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 19 novembre 2020, et un mémoire enregistré le 17 mars 2022, M. C..., représenté par Me Novion, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Bordeaux du 23 septembre 2020 ;

2°) d'annuler la délibération du conseil municipal de Beaupuy du 29 janvier 2019, ainsi que la décision du maire de Beaupuy du 5 juin 2019 de rejet de son recours gracieux ;

3°) de mettre à la charge de la commune de Beaupuy la somme de 1 500 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- le changement de zonage de ses terrains s'inscrit dans le parti pris d'aménagement du plan local d'urbanisme, qui se heurte aux objectifs fixés par le schéma de cohérence territoriale du Val de Garonne ; en effet, la superficie totale des zones à urbaniser est inférieure aux objectifs poursuivis et le zonage AU1 prévu par le plan local d'urbanisme est nettement insuffisant au regard de l'enveloppe foncière prévue par le schéma de cohérence territoriale du Val de Garonne ;

- le tribunal administratif n'a pas répondu à son moyen quant au calcul de la zone à urbaniser tel que résultant du règlement graphique du plan local d'urbanisme, qui est le fondement de la contrariété entre le plan local d'urbanisme et le schéma de cohérence territoriale ;

- l'approche retenue par le plan local d'urbanisme nie la réalité de l'urbanisation de la commune de Beaupuy dès lors que son terrain est situé en zone urbaine pavillonnaire ; par ailleurs, le nouveau classement de son terrain ne permet pas de limiter l'étalement urbain ;

- le parti pris d'aménagement contrarie les objectifs du schéma de cohérence territoriale à l'échelle du pôle attractif de Marmande ; en effet, selon ce schéma de cohérence territoriale, la commune de Beaupuy est associée à l'un des deux pôles principaux du Val de Garonne ; les auteurs du plan local d'urbanisme n'ont pas tenu compte de l'organisation pavillonnaire déjà existante dans la commune, qui s'est développée en lien avec le pôle attractif de Marmande ; le choix de densifier l'urbanisation principalement autour du centre historique communal au lieu d'étendre les secteurs urbains périphériques existants est entaché d'une erreur manifeste d'appréciation ;

- le classement de ses parcelles en zone agricole est entaché d'une erreur manifeste d'appréciation dès lors que, situées à moins d'un kilomètre du cœur du village de Beaupuy, elles se localisent à l'intérieur de parcelles déjà urbanisées et qu'elles sont équipées de tout-à-l'égout ; la circonstance qu'une partie de ses terrains fasse l'objet d'une exploitation agricole ne suffit pas à fonder le potentiel agricole, agronomique et biologique de la totalité de ses terrains ; le classement de ses terrains en zone AU1 ne se heurte pas à la logique de lutte contre le mitage.

Par un mémoire en défense enregistré le 17 février 2022, la commune de Beaupuy, représentée par Me Dunyach, conclut au rejet de la requête.

Elle fait valoir que :

- la requête de M. C... est irrecevable dès lors qu'il se borne à reproduire ses moyens de première instance, sans critique du jugement ;

- les moyens de M. C... ne sont pas fondés.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code de l'urbanisme ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme D... B...,

- et les conclusions de M. Romain Roussel, rapporteur public.

Considérant ce qui suit :

1. Par une délibération du 29 janvier 2019, le conseil municipal de Beaupuy (Lot-et-Garonne) a approuvé la révision du plan local d'urbanisme communal. M. C..., propriétaire de parcelles d'environ 9 hectares situées à Beaupuy, relève appel du jugement du 23 septembre 2020 par lequel le tribunal administratif de Bordeaux a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cette délibération et de la décision du 5 juin 2019 par laquelle le maire de Beaupuy a rejeté son recours gracieux.

Sur la régularité du jugement :

2. Il résulte des motifs mêmes du jugement attaqué que le tribunal administratif de Bordeaux, qui n'était pas tenu de répondre à tous les arguments avancés par les parties, a expressément répondu au moyen tiré de l'incompatibilité entre le plan local d'urbanisme de Beaupuy et le schéma de cohérence territoriale du Val de Garonne, alors même qu'il n'a pas évoqué le calcul effectué par M. C... de la surface consacrée à la future urbanisation de la commune. Par suite, le jugement n'est pas entaché d'irrégularité sur ce point.

Sur la légalité de la délibération du 29 janvier 2019 :

3. Il résulte des articles L. 111-1-1 du code de l'urbanisme, dont la teneur a été reprise à l'article L. 142-1 du même code, et des articles L. 121-1 et L. 122-1-4 de ce code, abrogés par l'ordonnance n° 2015-1174, qu'à l'exception des cas limitativement prévus par la loi dans lesquels les schémas de cohérence territoriale peuvent contenir des normes prescriptives, ceux-ci doivent se borner à fixer des orientations et des objectifs. Les plans locaux d'urbanisme sont soumis à une simple obligation de compatibilité avec ces orientations et objectifs. Si ces derniers peuvent être en partie exprimés sous forme quantitative, il appartient aux auteurs des plans locaux d'urbanisme, qui déterminent les partis d'aménagement à retenir en prenant en compte la situation existante et les perspectives d'avenir, d'assurer, ainsi qu'il a été dit, non leur conformité aux énonciations des schémas de cohérence territoriale, mais leur compatibilité avec les orientations générales et les objectifs qu'ils définissent.

4. Pour apprécier la compatibilité d'un plan local d'urbanisme avec un schéma de cohérence territoriale, il appartient au juge administratif de rechercher, dans le cadre d'une analyse globale le conduisant à se placer à l'échelle de l'ensemble du territoire couvert en prenant en compte l'ensemble des prescriptions du document supérieur, si le plan ne contrarie pas les objectifs qu'impose le schéma, compte tenu des orientations adoptées et de leur degré de précision, sans rechercher l'adéquation du plan à chaque disposition ou objectif particulier.

5. Il ressort du document d'orientations et d'objectifs du schéma de cohérence territoriale du Val-de-Garonne, adopté en 2014, qu'il est envisagé d'accueillir environ 5 250 habitants et de produire en conséquence 3 800 nouvelles résidences principales. Toutefois, ce même document, qui affirme que l'un des deux objectifs principaux est de maîtriser la consommation de l'espace, définit à l'intérieur de son territoire une extension maximale de 400 hectares en termes de consommation foncière, avec une consommation, qui doit être comprise dans ce contexte comme désignant un plafond, d'environ 16 à 17 hectares pour la commune de Beaupuy. Dans ces conditions, alors même que la surface de territoire à urbaniser définie par le plan local d'urbanisme de Beaupuy serait inférieure à 10 hectares comme le soutient M. C... en se référant au règlement graphique du plan local d'urbanisme, un tel choix, qui doit s'apprécier en tenant compte de l'ensemble des objectifs du schéma de cohérence territoriale, n'est pas incompatible avec l'objectif d'accueil des nouveaux habitants précédemment décrit. Au demeurant, il ressort des indications contenues dans le rapport de présentation du plan local d'urbanisme de Beaupuy, dont la révision a été approuvée en 2019, que l'ensemble des zones à urbaniser représente 12,48 hectares, auxquels s'ajoutent 3,86 hectares correspondant à l'urbanisation en densification de la zone Ub existante, pour une surface totale de 16,43 hectares dédiés au développement de l'urbanisation. A cet égard, M. C..., s'il conteste ces données, ne fournit pas d'éléments permettant de les remettre en cause, alors qu'il ne justifie pas ses propres calculs quant à la surface ouverte à l'urbanisation. Ainsi, le plan local d'urbanisme de Beaupuy n'est pas incompatible avec le schéma de cohérence territoriale du Val-de-Garonne en ce qui concerne l'enveloppe foncière dédiée aux extensions urbaines.

6. Par ailleurs, le document d'orientations et d'objectifs du schéma de cohérence territoriale indique également, dans ce même objectif de maîtrise de consommation de l'espace, que la priorité doit être donnée au réinvestissement urbain, par opposition avec l'urbanisation en lotissements réalisée dans les décennies précédant la mise en œuvre de ce document, et de limiter les extensions urbaines. Il précise, dans sa prescription P9, que lesdites extensions urbaines doivent s'inscrire dans une dynamique de réhabilitation des centres-villes, bourgs et villages. Ainsi, le choix des auteurs du plan local d'urbanisme de Beaupuy de recentrer les zones dédiées à l'urbanisation autour du centre-bourg est compatible avec les objectifs du schéma de cohérence territoriale du Val-de-Garonne. Si M. C... soutient que cette orientation est contraire à la réalité de l'urbanisation en zones pavillonnaires de cette commune, il ressort du document d'orientations et d'objectifs que c'est précisément ce type d'urbanisation que le schéma de cohérence territoriale a pour objectif de limiter.

7. Enfin, il ressort des pièces du dossier que le schéma de cohérence territoriale du Val-de-Garonne associe la commune de Beaupuy au pôle d'attractivité de Marmande, commune voisine. Le document d'orientations et d'objectifs mentionne que les communes associées aux pôles principaux de Marmande et Tonneins doivent mettre en œuvre " des orientations structurant la ville de façon plus dense, notamment dans les secteurs en interaction directe avec les pôles ". Toutefois, dès lors qu'il n'existe pas de tissu urbain reliant le lieu-dit " Lapaty ", où sont situées les parcelles de M. C..., et la ville de Marmande, il n'y a pas de secteur en interaction directe avec cette ville qui aurait vocation à être densifié, tandis que le document d'orientations et d'objectifs indique également qu'il convient, pour ces communes associées aux pôles principaux, de délimiter les secteurs périphériques et de les rendre moins consommateurs d'espaces. A cet égard, la circonstance qu'une urbanisation entre la zone pavillonnaire de Beaupuy, où s'implantent les parcelles du requérant, et la ville de Marmande permettrait une réduction des gaz à effet de serre n'est pas de nature à caractériser une incompatibilité entre les choix d'urbanisation retenus dans le plan local d'urbanisme et le schéma de cohérence territoriale. Ainsi, le plan local d'urbanisme n'est pas incompatible avec le schéma de cohérence territoriale à l'échelle du pôle attractif de Marmande, contrairement à ce que soutient

M. C....

8. Il résulte de ce qui a été dit aux points 3 à 7 que le moyen tiré de l'incompatibilité du plan local d'urbanisme de Beaupuy avec le schéma de cohérence territoriale du Val-de-Garonne doit être écarté, dans toutes ses branches.

9. Aux termes de l'article R. 123-7 du code de l'urbanisme : " Les zones agricoles sont dites " zones A ". Peuvent être classés en zone agricole les secteurs de la commune, équipés ou non, à protéger en raison du potentiel agronomique, biologique ou économique des terres agricoles (...) ".

10. Il appartient aux auteurs d'un plan local d'urbanisme de déterminer le parti d'aménagement à retenir pour le territoire concerné par le plan, en tenant compte de la situation existante et des perspectives d'avenir, et de fixer en conséquence le zonage et les possibilités de construction. Ils ne sont pas liés, pour déterminer l'affectation future des différents secteurs, par les modalités existantes d'utilisation des sols, dont ils peuvent prévoir la modification dans l'intérêt de l'urbanisme, et leur appréciation sur ces différents points ne peut être censurée par le juge administratif qu'au cas où elle serait entachée d'une erreur manifeste d'appréciation ou fondée sur des faits matériellement inexacts. Par ailleurs, il résulte des dispositions de l'article

R. 123-7 du code de l'urbanisme qu'une zone agricole, dite "zone A", du plan local d'urbanisme a vocation à couvrir, en cohérence avec les orientations générales et les objectifs du projet d'aménagement et de développement durables, un secteur, équipé ou non, à protéger en raison du potentiel agronomique, biologique ou économique des terres agricoles.

11. Il ressort des pièces du dossier que les parcelles dont M. C... est propriétaire, qui représentent selon lui 9 hectares, sont situées au lieu-dit Lapaty et sont classées en zone Ap (zone agricole à protéger) par le plan local d'urbanisme de Beaupuy. Il est constant que deux des neuf hectares appartenant au requérant sont dédiés à la culture, l'intéressé exerçant la profession d'agriculteur, tandis que les sept autres hectares sont vierges de toute construction. D'ailleurs, la carte de synthèse agricole du projet d'aménagement et de développement durables du plan local d'urbanisme communal identifie ces parcelles comme étant à potentiel agricole. Ainsi, contrairement à ce que soutient M. C..., les parcelles en cause ne peuvent être regardées comme étant dépourvues d'un tel potentiel, alors même qu'elles seraient situées à proximité de constructions à usage d'habitation. Il ressort en outre du projet d'aménagement et de développement durables, qui reflète le parti pris d'aménagement adopté par les auteurs du plan local d'urbanisme, que l'objectif de préservation des terres agricoles se traduit par une volonté de stopper le mitage agricole et de " préserver le foncier agricole entre les secteurs ouverts à l'urbanisation, à la fois sur la pente et le plateau ", et d'établir des limites franches, notamment dans le secteur Lapaty, qui se trouve dans la pente entre le centre-bourg et le lac de Beaupuy, entre la zone urbaine et l'espace agricole. Ni la présence de réseaux, qui ont pu favoriser une urbanisation en zone pavillonnaire sous l'empire de l'ancien plan local d'urbanisme autour des parcelles de M. C..., ni la circonstance que des permis de construire aient été délivrés pour des terrains classés en zone Ub situés en face de ces parcelles, ne sont de nature à remettre en cause la pertinence de leur classement en zone agricole. Par suite, le moyen tiré de ce que le classement des parcelles du requérant en zone agricole serait entaché d'une erreur manifeste d'appréciation doit être écarté.

12. Il résulte de tout ce qui précède, et sans qu'il soit besoin d'examiner la fin de non-recevoir opposée par la commune de Beaupuy, que M. C... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Bordeaux a rejeté sa demande.

Sur les frais liés au litige :

13. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de la commune de Beaupuy, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, la somme que M. C... demande au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge du requérant une somme 1 500 euros à verser à la commune de Beaupuy, en application de ces mêmes dispositions.

DECIDE :

Article 1er : La requête de M. C... est rejetée.

Article 2 : M. C... versera à la commune de Beaupuy une somme de 1 500 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... C... et à la commune de Beaupuy.

Délibéré après l'audience du 21 avril 2022 à laquelle siégeaient :

Mme Marianne Hardy, présidente,

Mme Fabienne Zuccarello, présidente-assesseure,

Mme Charlotte Isoard, première conseillère,

Rendu public par mise à disposition au greffe le 19 mai 2022.

La rapporteure,

Charlotte B...La présidente,

Marianne Hardy

La greffière,

Angélique Bonkoungou

La République mande et ordonne au préfet de Lot-et-Garonne en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

N° 20BX03768 2


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Bordeaux
Formation : 1ère chambre
Numéro d'arrêt : 20BX03768
Date de la décision : 19/05/2022
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : Mme HARDY
Rapporteur ?: Mme Charlotte ISOARD
Rapporteur public ?: M. ROUSSEL
Avocat(s) : NOVION

Origine de la décision
Date de l'import : 19/07/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.bordeaux;arret;2022-05-19;20bx03768 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award