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30/06/2022 | FRANCE | N°20BX03184

France | France, Cour administrative d'appel de Bordeaux, 7ème chambre (formation à 3), 30 juin 2022, 20BX03184


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société d'exercice libéral à responsabilité limitée Hirou, en qualité de mandataire liquidateur de la société à responsabilité limitée Sodico, a demandé au tribunal administratif de Poitiers de prononcer le remboursement d'un crédit de taxe sur la valeur ajoutée d'un montant de 240 000 euros au titre du mois de mai 2017.

Par jugement n° 1800541 du 23 juillet 2020, le tribunal administratif de Poitiers a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête et un

mémoire, enregistrés les 23 septembre 2020 et 26 avril 2021, la société Hirou, représentée par Me F...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société d'exercice libéral à responsabilité limitée Hirou, en qualité de mandataire liquidateur de la société à responsabilité limitée Sodico, a demandé au tribunal administratif de Poitiers de prononcer le remboursement d'un crédit de taxe sur la valeur ajoutée d'un montant de 240 000 euros au titre du mois de mai 2017.

Par jugement n° 1800541 du 23 juillet 2020, le tribunal administratif de Poitiers a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête et un mémoire, enregistrés les 23 septembre 2020 et 26 avril 2021, la société Hirou, représentée par Me Fribourg, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Poitiers du 23 juillet 2020 ;

2°) de prononcer le remboursement d'un crédit de taxe sur la valeur ajoutée d'un montant de 240 000 euros au titre du mois de mai 2017 ;

3°) de mettre à la charge de l'État la somme de 5 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que l'administration fait une analyse erronée du protocole transactionnel conclu le 10 novembre 2016 entre la société Hirou en qualité de mandataire liquidateur de la société Sodico et l'entreprise Pro By Pro, dès lors que la somme de 1 440 000 euros mentionnée TTC dans la transaction est la contrepartie de la livraison de biens meubles.

Par un mémoire en défense, enregistré le 7 avril 2021, le ministre de l'économie, des finances et de la relance conclut au rejet de la requête et fait valoir que les moyens ne sont pas fondés.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme B... D...,

- les conclusions de Mme A... C....

Considérant ce qui suit :

1. La société Sodico, qui exerçait une activité de " commerce de gros (interentreprises) d'appareils électroménagers " a été placée en liquidation judiciaire le 3 septembre 2015, la société Hirou ayant été désignée en qualité de mandataire liquidateur. Cette dernière a demandé, par réclamation du 23 juin 2017, le remboursement d'un crédit de taxe sur la valeur ajoutée au titre du mois de mai 2017, pour un montant total de 251 047 euros. Par décision d'admission partielle du 19 janvier 2018, le service a admis ce remboursement à hauteur de la somme de 11 047 euros, et rejeté le surplus, au motif que l'indemnité versée en mai 2017 par la société Sodico à la société Pro By Pro, dans le cadre d'un protocole d'accord homologué par le tribunal de commerce d'Angoulême le 7 décembre 2017, n'était pas soumise à la taxe sur la valeur ajoutée. La société Hirou, mandataire liquidateur de la société Sodico, relève appel du jugement du 23 juillet 2020 par lequel le tribunal administratif de Poitiers a rejeté sa demande tendant au remboursement d'un crédit de taxe sur la valeur ajoutée d'un montant de 240 000 euros au titre du mois de mai 2017.

2. Aux termes de l'article 256 du code général des impôts : " Sont soumises à la taxe

sur la valeur ajoutée les livraisons de biens et les prestations de services effectuées à titre

onéreux par un assujetti agissant en tant que tel (...) ".

3. La société Sodico, qui exerçait une activité de grossiste et détaillant de produits d'équipements de la maison, a conclu le 24 février 2011 un contrat de vente et d'approvisionnement avec la société Pro By Pro, distributeur grossiste en électroménager et multimédia, aux termes duquel la société Pro By Pro consentait à mettre à disposition de la société Sodico un encours de marchandises d'un montant de deux millions d'euros hors taxes. À la fin du mois de décembre 2013, toutefois, l'encours de la société Sodico dépassait le montant de six millions d'euros. Dans le cadre de la procédure de redressement judiciaire ouverte le 6 mars 2014 à l'encontre de la société Sodico, la société Pro By Pro a déclaré détenir une créance de 8 904 899,68 euros TTC. La société Pro By Pro a demandé la restitution des marchandises figurant dans les stocks de la société Sodico et qui ne lui avaient pas été payées, et, par arrêt du 15 décembre 2015, la cour d'appel de Bordeaux a ordonné le versement à la société Pro by Pro du prix des biens lui appartenant vendus à des sous-acquéreurs et consigné à la Caisse des dépôts et consignations. De son côté, la société Sodico a sollicité auprès du tribunal de commerce de Lille une indemnisation en réparation du préjudice causé par les fautes commises par la société Pro By Pro en lui accordant des facilités de paiement et des délais excessifs, ayant conduit à l'ouverture d'une procédure de redressement judiciaire.

4. Les parties ont toutefois décidé de transiger et ont conclu, le 10 novembre 2016, un protocole transactionnel, homologué par le tribunal de commerce d'Angoulême le 7 décembre 2017. Aux termes de cette transaction, la société Hirou, en qualité de liquidateur judiciaire de la société Sodico, s'engageait à verser à la société Pro By Pro une indemnité transactionnelle de 1 440 000 euros TTC, à se désister de son pourvoi en cassation contre l'arrêt de la cour d'appel de Bordeaux du 15 décembre 2015 et à se désister de son action devant le tribunal de commerce de Lille. Estimant que cette indemnité, ayant pour objet de réparer un préjudice subi par la société Pro By Pro, n'était pas soumise à la taxe sur la valeur ajoutée, le service a rejeté la demande de la société Hirou tendant au remboursement du crédit de taxe sur la valeur ajoutée litigieux.

5. Toutefois, l'article 3 du protocole transactionnel signé le 10 novembre 2016 stipule que la société Pro By Pro " déclare que la réception sur son compte de l'indemnité transactionnelle (...) la remplira de l'intégralité de ses droits au titre de la créance déclarée au passif de la Sodico ". L'indemnité vient donc la rémunérer de sa créance sur la société Sodico afférente aux marchandises livrées à cette dernière mais non payées. Il en résulte que la somme en cause constitue une partie du prix rémunérant les marchandises en cause, et est soumise à la taxe sur la valeur ajoutée, nonobstant la circonstance que la transaction emporte désistement des actions de la société Hirou devant la Cour de cassation et le tribunal de commerce de Lille.

6. Si le ministre soutient à titre subsidiaire que la société Sodico a déjà déduit la taxe sur la valeur ajoutée en cause au moment de la livraison des biens, ce que la société dément, il n'apporte aucun élément au soutien de ses allégations.

7. Il résulte de ce qui précède que la société Hirou est fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Poitiers a rejeté sa demande tendant au remboursement d'un crédit de taxe sur la valeur ajoutée d'un montant de 240 000 euros au titre du mois de mai 2017. Dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu de mettre à la charge de l'État la somme de 1 500 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

DÉCIDE :

Article 1er : Le jugement du tribunal administratif de Poitiers du 23 juillet 2020 est annulé.

Article 2 : La société Hirou, en qualité de mandataire liquidateur de la SARL Sodico, a droit au remboursement d'un crédit de taxe sur la valeur ajoutée d'un montant de 240 000 euros au titre du mois de mai 2017.

Article 3 : L'État versera à la société Hirou la somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à la société d'exercice libéral à responsabilité limitée Hirou et au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique.

Une copie en sera adressée à la direction de contrôle fiscal Sud-Ouest.

Délibéré après l'audience du 2 juin 2022 à laquelle siégeaient :

M. Éric Rey-Bèthbéder, président,

Mme Frédérique Munoz-Pauziès, présidente assesseure,

Mme Florence Rey-Gabriac, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 30 juin 2022.

La rapporteure,

Frédérique D... Le président

Éric Rey-Bèthbéder

La greffière,

Angélique Bonkoungou

La République mande et ordonne au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique en ce qui le concerne et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun, contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.

2

N° 20BX03184


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Bordeaux
Formation : 7ème chambre (formation à 3)
Numéro d'arrêt : 20BX03184
Date de la décision : 30/06/2022
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Composition du Tribunal
Président : M. REY-BETHBEDER
Rapporteur ?: Mme Frédérique MUNOZ-PAUZIES
Rapporteur public ?: Mme MADELAIGUE
Avocat(s) : SELARL P. FRIBOURG - M. FRIBOURG

Origine de la décision
Date de l'import : 12/07/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.bordeaux;arret;2022-06-30;20bx03184 ?
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